cause de dysphonie, mais leur diagnostic est plus délicat. Sus-
pectées à l’examen stroboscopique et devant l’importance de la
dysphonie, en général disproportionnée par rapport à la lésion,
elles sont le plus souvent confirmées lors de la phonochirurgie.
Il s’agit du kyste épidermoïde, du sulcus (figure 3), de la verge-
ture ou de la micropalmure.
CONDUITE À TENIR
La voix est avant tout un outil qui se découvre, et qu’il faut
apprendre à maîtriser. L’utilisation de la voix nécessite un tra-
vail et un entretien réguliers. Pour cela, il importe de connaître
ses possibilités anatomiques, physiologiques et techniques. La
première étape thérapeutique consiste à redonner confiance en
évaluant les capacités vocales restantes.
Le repos vocal absolu, isolé, de plus de quarante-huit heures, n’a
pas lieu d’être dans une dysphonie chronique, car il génère de
nombreuses frustrations. Tout au plus peut-il être prescrit en cas
de lésions traumatiques ou en postopératoire.
Certains médicaments peuvent être prescrits pour adoucir la
muqueuse pharyngée, mais rien ne vaut une bonne hydratation.
Le traitement médicamenteux n’est justifié que pour traiter une
étiologie de voisinage (reflux gastro-œsophagien), un comporte-
ment nocif pour les cordes vocales, comme une toux violente et
prolongée et une cause allergique ou inflammatoire. Pour cette
dernière, la prescription de corticoïdes est justifiée devant
l’urgence d’une performance, mais elle ne doit pas être faite de
façon systématique à chaque épisode dysphonique. Si les consul-
tations se multiplient pour altération vocale, il est nécessaire de
repenser le diagnostic et de chercher plus loin dans le comporte-
ment vocal.
Dans le cas des dysphonies chroniques, la rééducation ortho-
phonique est une étape obligée de la prise en charge thérapeu-
tique. L’orthophoniste est un professionnel paramédical qui
assure la rééducation des troubles du langage oral et écrit, des
troubles neurologiques du langage, des surdités, des troubles de
la déglutition et des dysphonies. Les orthophonistes ont en géné-
ral un ou deux domaines de compétence et il faut s’en enqué-
rir avant d’adresser un patient en rééducation de la voix. Les
séances de rééducation de la voix se font sur prescription médi-
cale et à raison d’une ou deux par semaine, d’une demi-heure
à trois quarts d’heure chacune. Il faut au moins une vingtaine
de séances. De plus, il est indispensable que le consultant
s’entraîne chez lui entre les séances. Sans cette implication per-
sonnelle, l’efficacité de la prise en charge orthophonique est
incertaine. Par conséquent, l’orthophonie n’a d’intérêt que si le
patient est demandeur. Pour cela, le rôle du médecin prescrip-
teur est très important dans l’explication et la motivation. Le
travail passe par plusieurs phases : faire prendre conscience au
patient de son problème vocal, mettre en place le souffle pho-
natoire et lui faire changer son comportement vocal pour un
plus grand confort en préservant l’efficacité de la communica-
tion. Il est fréquent d’introduire de la relaxation pour faciliter
la détente musculaire et la réflexion sur le corps sonore. Puis
les possibilités vocales seront explorées et adaptées aux besoins
de chaque personne.
L’orthophonie peut être le seul traitement prescrit dans le cas des
dysphonies dysfonctionnelles, mais cette prise en charge peut
aussi encadrer une phonochirurgie.
Les seules lésions pour lesquelles un traitement chirurgical ne
doit pas être envisagé en première intention sont les nodules des
cordes vocales (kissing nodules). Il est raisonnable de prescrire
une quinzaine de séances de rééducation et de réévaluer la gêne
fonctionnelle. Bon nombre de nodules auront alors diminué de
volume et le confort vocal commencera à s’installer. La pour-
suite de la rééducation sera le plus souvent suffisante.
Ailleurs, pour les autres lésions, un traitement chirurgical peut
être envisagé, mais en dehors de l’urgence et encadré par de la
rééducation. La chirurgie des lésions bénignes nécessite un
consentement éclairé du patient, en particulier concernant les
modifications acoustiques de la voix en postopératoire. Par
exemple, la hauteur vocale sera plus élevée après phonochirur-
gie de l’œdème de Reinke. Quelques séances sont pratiquées
avant l’intervention pour sensibiliser le patient à sa voix et elles
sont reprises dès la deuxième semaine postopératoire. Un repos
vocal strict de quatre à six jours semble raisonnable après toute
phonochirurgie pour permettre à la muqueuse des cordes vocales
de cicatriser. Mais le patient doit avoir été informé de l’utilité
de ce repos vocal au risque, sinon, d’avoir une reprise de la
parole difficile, liée à une certaine anxiété vis-à-vis de sa “nou-
velle voix”. La voix chuchotée doit être proscrite car elle résulte
d’un serrage supraglottique pour moduler le souffle expiratoire
sans accoler les cordes vocales. La reprise de la phonation se
fait progressivement en voix conversationnelle, sans effort
vocal, sans facteur de stress, dans le calme et sans abuser du
téléphone. De même, les sports à glotte fermée tels que l’aéro-
bic ou la musculation de type “gonflette”, qui nécessitent une
importante sollicitation du “sphincter laryngé” pour créer une
hyperpression thoracique, seront proscrits. L’arrêt de travail est
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La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no263 - mai 2001
Figure 3.
Sulcus glottidis
prédominant
au tiers moyen
de la corde vocale
droite chez
une femme
de 43 ans,
architecte.
Image vidéo-
laryngo-
stroboscopique
montrant deux
phases différentes
du cycle ondulatoire
de la muqueuse.