avec un Hispanique qui connaît parfaitement la langue espagnole et la culture qui
lui est associée. « Apprenez le français car, en français, vous n'aurez pas la
concurrence des Hispaniques ! ». Tel est le message distillé par les sections locales
des Alliances françaises aux Etats-Unis. Toutefois, cet argument est insuffisant.
Pourquoi, en effet, apprendre le français pour communiquer avec des pays
francophones tels que la France ou la Belgique quand l'ambition première des
citoyens de ces pays est de « pratiquer » leur anglais avec tous les étrangers quels
qu'ils soient ? Si les Belges francophones, les Français, les Suisses romands et les
Québécois affichaient la volonté d'utiliser leur langue en commerce international, on
verrait en quelques années, dans les pays non francophones, les besoins en
français langue étrangère aisément décupler. Les Alliances françaises doivent
prendre conscience que leur principal problème n'est pas au niveau local mais qu'il
se situe à Paris, à Bruxelles, à Montréal et à Genève.
Les problèmes de « confiance linguistique » dans les pays francophones dits « du
nord » (Belgique, France, Suisse, Québec) doivent être résolus mais, en attendant,
il me paraît urgent que l'Alliance française n'essaye plus de vendre le français
comme appartenant à la France mais à la Francophonie, ce groupement d'une
cinquantaine de pays qui représente environ 500 millions d'habitants. D'autre part, il
me paraît essentiel que l'attitude vis-à-vis de la principale langue étrangère
concurrente, c'est à dire l'anglais, devienne résolument offensive. En effet, dans
les pays qui ne sont ni francophones ni anglophones, beaucoup d'Alliances n'ont
aucun argument solide pour convaincre leurs élèves de choisir le français plutôt
que l'anglais. Dans de tels cas où ce dilemme existe, le conseiller de l'Alliance doit
pouvoir clairement trancher et amener son élève potentiel à étudier le français en lui
procurant un assortiment de raisons qui le détourneront de ses intentions, pas
encore affirmées, d'étudier l'anglais aux dépens du français. Il ne faut pas oublier
que, confrontés à un tel problème, les anglophones ne se gênent absolument pas
pour attaquer la langue française, par des moyens plus ou moins pervers. Je ne
prendrai pas la peine de le démontrer ici et je réfère ceux qui en chercheraient des
preuves à lire mon livre pour s'en convaincre.
Voici donc mon argumentaire:
- Sur 3000 idiomes parlés dans le monde, 78 ont une littérature et le français fait
partie de ces grandes langues dont la diffusion est intercontinentale et dont la
littérature a une réputation internationale. Les autres grandes langues sont l'anglais,
l'arabe, le chinois, l'espagnol, le portugais et le russe.
- Toutefois, contrairement au russe qui est confiné sur le continent euro-asiatique, le
français a essaimé sur 5 continents. Le chinois, la plus parlée de toutes les grandes
langues, est davantage diffusé, surtout par la diaspora chinoise, mais il n'a pas
encore largement essaimé au delà du peuple asiatique han.
- Avec le chinois, le sanscrit, l'arabe, le latin et le grec ancien, le français est l'une
des six langues (il n'y en a que six !) à avoir débordé massivement sur d'autres
idiomes. En effet, même si l'espagnol est actuellement nettement plus parlé que le
français, l'espagnol n'a jamais fourni une partie substantielle de son vocabulaire à
une autre langue comme cela a été le cas avec le chinois qui a fourni directement
au coréen ou au japonais plus de 30% de leurs vocabulaires respectifs. De la même
manière, l'arabe a contribué dans des proportions similaires ou plus grandes au
vocabulaire du perse et de nombreuses langues africaines. Quant au français, il a
fourni plus de 50% du vocabulaire anglais actuel.
- Le français est parlé par les élites de nombreux pays. La reine d'Angleterre,
l'empereur du Japon et sa famille le parlent couramment. Je viens d'apprendre que
le français est encore utilisé quelquefois dans le système juridique anglais. 5O pays
font partie de l'organisation de la Francophonie et si tous les citoyens, dans ces
pays là, ne parlent pas tous français, au minimum, les gens passablement éduqués
savent communiquer en français.
- De par son origine ou de l'influence qu'il a eu sur le développement d'autres
langues, le français est probablement, parmi les langues européennes, l'une des
langues étrangères qui sont les plus faciles à étudier lorsqu'on a l'espagnol ou
l'anglais comme langue maternelle. L'Alliance française qui compte le plus de
membres est celle d'Argentine et ce n'est pas un hasard. Pour un anglophone, le
français est nettement plus facile que l'allemand ou que le russe. Toutefois,
l'espagnol sera peut-être plus facile car plus phonétique mais son utilité demeure
limitée en dehors du bloc latino-américain.
- La plupart du temps, l'étude du français, qui est facultative dans des pays tels que
ceux d'Amérique latine ou au Japon, est entreprise par des gens qui sont,
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