Chapitre II Enonciation ou denonciation Dans ce chapitre nous avons pour but d'analyser les proverbes travers une perspective enonciative. Par enonciation, a on entend generalement l'acte de production d'un enonce par un locuteur dans une situation de communication. Selon E. Benveniste 1 , le locuteur (ou enonciateur) adresse un enonce a un allocutaire, dans des circonstances spatio-temporelles particulieres. Ce faisant, il « implante l'autre en face de lui » comme partenaire et refere au monde par son discours. Tout acte d'enonciation se realise dans une situation de communication particuliere, caracterisee par plusieurs elements constitutifs - d'abord, des acteurs de la communication, le locuteur et l'allocutaire, qui se pretent mutuellement des connaissances, deuxiemement, un temps et un lieu specifiques et finalement, des objets presents, qui constituent l'environnement perceptible des protagonistes. 1 BENVENISTE E., 0974). Problemes de linguistique generale II, Gallimard, Paris. p. 82. 58 Selon M. Riegel, pour etudier l'enonciation d'un point de vue linguistique, deux orientations globales sont possibles: 1. l'etude des indices de l'enonciation, 2. l'etude des actes de langage. Selon E. Benveniste, il faut relier les formes linguistiques aux situations d'enonciation. Ainsi, certaines formes de la langue, les deictiques et les modalites en particulier, ne peuvent s'expliquer qu'en remontant aux elements constitutifs de l'acte d'enonciation. Au point de depart de l'etude des actes de langage, il n'y a plus les mots de la langue, mais une theorie generale de !'action. La langue constitue un moyen d'agir parmi d'autres : « dire, c'est faire actes de langage s'interesse ». L'etude des a !'utilisation par le locuteur de sa langue pour accomplir, dans une situation donnee, un certain type d'acte. Selon Riegel2, !'approche enonciative repose sur la notion d'actes de langage. On distingue au moins trois types. d'actes de langage a fondamentaux relies des phrases de type fondamental : asserter (ou constater), questionner et ordonner. Chaque acte est associe par convention a une structure de phrase determinee, au moyen de laquelle il est directement effectue. Ainsi, il existe trois types de phrases fondamentaux : assertif, interrogatif et imperatif3. Pour analyser le statut et la place de la femme, nous allons, tout d'abord, etudier les « manifestations de l'homme dans la langue « indices de l'enonciation )) qui visent »4 • a examiner les Dans cette perspective, nous chercherons des indices ou des traces de l'enonciation dans les 2 3 4 RIEGEL M. et al., Granunaire methodique dujrQil(ais, PUF, Paris, p. 580. Nous en avons parle en premier chapitre. Benveniste cite dans RIEGEL M. et al.. Ibid., p. 577. 59 enonces a partir des deictiques I embrayeurs5 (par exemple, «je )), « tu », « ici )) etc.} et les modalites. Deuxiemement, nous allons etudier des actes de langage. Selon cette orientation, la langue est un moyen d'agir et ainsi «dire, c'est faire ))6. Cette analyse s'interesse a !'utilisation de la langue par les locuteurs afin d'accomplir un certain acte. 2.1. Indices de 1' enonciation 2.1.1. Deictiques I Embrayeurs Les deictiques ou les expressions deictiques sont des unites linguistiques dont le sens implique obligatoirement un renvoi a la situation d'enonciation pour trouver le referent vise. Par exemple : 'Je' fais aujourd'hui la cuisine, ou 'Tll vas au marche maintenant. Pour interpreter ces expressions deictiques, c'est-a-dire pour identifier leur referent, il faut se reporter a la situation d'enonciation immediate. En effet, leur reference varie avec chaque situation particuliere. A titre d'exemple : Attendez !Je vais vous l'indiquer peut etre dit ou ecrit. a des moments et a des endroits divers. Ainsi, le je' ou le 'tu', 'vous' et T' peuvent etre utilises par n'importe quel locuteur pour donner des messages differents. Ainsi, il y a differents elements constitutifs d'une situation d'enonciation, par exemple, personnes, lieu, temps etc. Etudions d'abord le cas des pronoms personnels. La premiere et la deuxieme personne ('je' et 'tu') representent les actants de la communication. Ces deux personnes s'opposent a la « troisieme personne )) (il I elle I on} que E. Benveniste a appelle « non- Jakobson a baptise embrayeurs (shifters}, les unites linguistiques de statut particulier qui permettent de mettre en acte le discours. 6 RIEGEL M. et al., Ibid., p. 577. 5 60 personne »7, puisqu'elle represente la neutralite du locuteur. Cette neutralite porte la morale, mais refute la responsabilite de le dire. Selon Riegel, 'je' designe le locuteur (celui qui parle ou celui qui dit 'je'), 'tu' l'allocutaire (celui a qui le locuteur parle) ; l'un et l'autre sont altemativement utilises par chaque interlocuteur dans un dialogue. En effet, on ne peut interpreter un enonce contenant 'je' et/ou 'tu' qu'en prenant en compte l'acte individuel d'enonciation qui les supporte. En employant 'je' et 'tu', en se les appropriant, chaque enonciateur se pose comme enonciateur et mobilise a son profit le systeme de la langue. Ainsi, 'je' et 'tu' ne sont pas simplement des signes linguistiques d'un type particulier, ils sont avant tout des operateurs de conversion de la langue en discours. II existe egalement 'nous' et 'vous' et on a tendance a considerer ces deux demiers morphemes comme le « pluriel )) de 'je'-'tu'. En fait, 'je' et 'tu' ne sont pas nous et vous ce que cheval est a chevaux ou il est a ils. A ce propos, Maingueneau dit : pluriels que de « « il ne s'agit pas tant de personnes amplifiees )), [.. } II n'y a pas reellement multiplication des 'je' mais extension et illumination ))s. Nous, ce morpheme peut avoir un 'je' et un autre 'je' ou 'tu' ou "il. Alors, ce n'est pas exactement un pluriel de 'je' et de la meme maniere, 'vous' n'est pas un exacte pluriel de 'tu'. ii convient de noter que les embrayeurs lies ala categorie de la personne ne se limitent pas aux deux seuls couples 'je'-'tu' et 'nous' -'vous' ; il existe en effet une dependance evidente entre ces personnes et certains« adjectifs » et « pronoms possessifs » ('ma', 'mes', 'le mien' etc.), qui contiennent en realite un de ces embrayeurs. Benveniste cite dans MAINGUENEAU D., (1981), Approche de l'enonciation en linguistiquefran{:aise, Classiques Hachette, Paris, p. 15. 8 MAINGUENEAU D., (1981). Approche de l'enonciation en linguistiquefran{:aise, 7 Hachette. Paris, p. 14-15. 61 D'apres Benveniste, les personnes ('je' et 'tu') forment a elles deux la «sphere de la locution». Cette locution renvoie a un univers exterieur, celui de la non-personne, par opposition aux. personnes de l'echange linguistique. Cette non-personne ('il' ou 'elle') correspond aux groupes nominaux et a leurs substituts pronominaux. En efiet, 'il', a la difference de 'je'-'tu' est un pro-nom au sens strict, c'est-a-dire. un element anaphorique qui remplace un groupe nominal dont il tire sa reference et qui a ete introduit anterieurement dans le discours tandis que 'je' et 'tu' ne sont pas des substituts pronominaux. Certes, 'je'-'tu' et 'il' ont un point commun : ils ne tirent leur reference que du contexte dans lequel ils sont places mais il ne s'agit pas du meme contexte dans -les deux cas ; pour 'je' et 'tu' il s'agit du contexte situationnel, alors que pour 'il' comme pour tout element anaphorique il s'agit du contexte linguistique9. Voyons d'abord quelques exemples des pronoms personnels ('je' et 'tu') dans le discours proverbial: 2.1.1.1. Pronoms personnels :je et tu 1. \511~1~ ~ ~1 ~. ~ :5[~ ~~-!l~~~~w.rr Amar bhai rabon rqja ami shurponakha Dhora majhe emonjora paris jodi dekha (a) Amar = mon, bhai = frere, rabon = Rabon (le roi du Lanka d'apres la mythologie hindoue), raja= roi, ami= moi, shurponakha = la sreur du roi Rabon, dhora 9 = terre, majhe = au milieu, emon = tel, jora = MAINGUENEAU D .. (1981}, L'enonciation en linguistiquefran{:aise, Hachette, Paris, p. 17-20. 62 couple (au sens du couple de frere et sreur), paris = tu peux, jodi = si, = montres. dekha (b) Mon frere est le roi Rabonlo, moi, Surponakha 11 Situ peux trouver un tel couple sur la terre montre-le-moi. (c) Aucun couple n'est comparable au couple frere et soeur. (d) La soeur est le double de son frere. Elle lui ressemble. Dans ce proverbe, on trouve l'emploi de la premiere et de la deuxieme personne. L'emploi de l'adjectif possessif « amar » (mon) et << ami >> Uel indique l'usage de la premiere personne et les verbes comme << paris >> (peux) et « dekha » (montres) renvoient a l'allocutaire. A travers les expressions comme 'mon frere' et 'moi Shurponakha', on fait parler une femme qui parle de son frere et de son rapport avec lui. Dans ce proverbe, il n'est pas explicite a qui s'adresse ce 'tu'. lei, 'tu' egale 'on'. D'apres Maingueneau, Le tu generique a pour fonction de impersonnels, a valeur generale en « personnaliser )) des enonces rempla~ant le sujet universe! (on en particulier) par un tu. Ainsi est maintenue une relation vivante avec la situation d'enonciation a l'inteieur d'un enonce qui, pourtant, est general; tout se passe comme si l'allocutaire par le « tu generique » etait constitue en partie prenante .du proci~s (beneficiaire, victime ... ).12 Le proverbe nous donne !'impression d'une prise de parole par la femme (une sreur) mais, en fait, n'importe qui (meme un homme) pourrait utiliser ce proverbe pour souligner l'idee que la sreur ressemble a son frere ou autrement la presence du frere justifie la presence d'une sreur. La femme reste toujours une subordonnee. Ainsi, bien que ce proverbe donne !'impression que c'est la femme qui parle, n'importe qui 10 11 Le roi de Lanka qui a enleve Sita, Ia femme de Rama d'apres Ia mythologie hindoue. D'apres Ia mythologie, c'est Ia soeur de Ravan, Surponakha qui l'a provoque pour enlever Sita, car ellc (Surpanakha) etait insultee par laxman, le frere cadet de Ram. 12 MAINGUENEAU D., (1981), L'enonciation en linguistquefranr;aise, Classique Hachette, Paris, p. 16. 63 peut prononcer ce proverbe pour refleter le discours male. Derriere ce proverbe reste cache une morale : si le frere est mauvais, sa sreur lui rassemblera. On voit un autre exemple d'emploi de 1e', utilise par une femme: 2. ~aR ~ 'T;J@ f<Jrn ~ <m:-vt ~~ ~ 1Sr1C~B3 \5IBJ ~ ~'vt dekhe shune boro ghore bie dile bape aekhon morijaer ar noncxier tape (a) dekhe- en regardant, shune- en entendant, boro- grand(e), ghore- a la maison, bie- le martage, dile- a donne, bape- le pere, ekhon - maintenant. mori - Ue) meurs, jaer13 - de la belle soeur, ar - et, nonoder14 - de la belle soeur, tape -la temperature. (b) Apres avoir fait beaucoup de recherche, mes parents m'ont fait marier dans une famille tres reputee Mais, maintenant, je meurs de la fievre a cause du mauvais traitement des belles-sreurs (« jaer )) et « noncxier »). (c) Meme dans une famille de haut statut, la relation entre la bellefine et ses belles-soeurs n'est pas forcement bonne. (d) Selon ce proverbe, il existe souvent une rivalite entre la bellefine et ses belles-soeurs meme s'il s'agit d'une famine de grande reputation. On trouve la presence de 'je' dans la conjugaison du verbe 'mowiT (« mori ))}, comme le proverbe precedent. lei, veritablement, 'je' prend la parole et ce 'je' est une femme qui se plaint contre le systeme patriarcal de la societe concernant son martage dans une grande famille. 13 14 Ja est le terme utilise pour la femme du frere aine ou cadet du mari. Nonod est le terme qu'on utilise pour la soeur ainee ou cadette du mari. 64 Dans ce proverbe, la femme parle de sa souffrance causee par ses belles-soeurs. On note qu'ici le 'je' n'est pas generique (homme et femme), c'est une femme qui prend la parole et qui nous raconte son rapport avec ses belles-soeurs. II convient de souligner qu'il ne s'agit pas d'une femme « specifique )), en effet, ce proverbe generalise le rapport entre belle-fille et belle-soeur. On voit un autre exemple d'emploi de 'je', utilise par n'importe queUe personne : .. jodi boli paker kotha tobei othe mathar baetha (a) jodi - si, boli - Ue) parle, paker- de la cuisine, kotha- la parole, tobei- c'est a ce moment, othe- {il) se pousse, mathar- de la tete, baetha -mal. (b) A chaque fois que je lui demande de faire la cuisine, c'est a ce moment la qu'elle a toujours mal a la tete. (c) Une femme donne des excuses quand elle ne veut pas faire de la cuisine. (d) D'apres ce proverbe, quand une femme ne veut pas travailler, elle fait des excuses de toutes sortes. lei, on ne trouve pas l'emploi direct de 'je'. On trouve !'existence de ce 'je' dans la conjugaison du verbe 'parler' (« boli ))). Ce verbe se conjugue a la premiere personne du singulier. Cette presence de 'je' aborde une valeur generique de 'je'. lei, on a !'impression que ce je' qui prend la parole, est une vieille femme qui parle a propos de sa belle-fille. En fait, n'importe quelle 65 personne peut prononcer ce proverbe en parlant d'une femme. Indirectement, le proverbe fait un constat : la place de la femme est dans la cuisine et la societe patriarcale ne peut pas supporter une femme qui evite de faire la cuisine. Parfois les proverbes bengalis utilisent le 1e' pour faire parler un homme. Par exemple : 4. '$JRf '>Jc'ffiJ Nrn ~ ~~~~ maer golay die dori bouke porai dhakai sari = de la mere, golay = au cou, die = en donnant, dori = = a la femme, porai = je fais vetir, dhakai15 = le sari qui (a) Maer corde, bouke vient de Dhaka, shari = sari. (b) Je donne la corde ala mere Etje fais vetir avec un sari 'dhakaf mon epouse (c) Le fils ne respecte pas sa mere et pourtant il offre un sari precieux a son epouse. (d) Le ms n'offre que des soucis a sa mere alors qu'il offre des objets de valeur a son epouse. lei, il s'agit d'un fils qui avoue qu'il commet une faute. A premiere vue, on dirait que l'homme en question, regrette son action. En fait, ici 1e' renvoie a tousles hommes. Derriere ce proverbe reste une morale, un 15 Represente une bonne qualite de sari qui coute tres cher. 66 conseil : un homme n'a pas le droit de negliger sa mere agee au depens de son epouse. 11 est interessant de noter que ce proverbe reflete indirectement que c'est l'homme qui decide le bonheur de son epouse en negligeant sa mere. En effet, c'est lui qui est responsable du conflit entre les deux femmes. 11 est fort interessant de noter qu'en franc;ais nous n'avons pas trouve de proverbes ou on emploie le 'je' pour faire parler les femmes. Dans notre corpus, nous n'en avons note qu'un seul cas. Nous l'avons etudie dans le cbapitre precedent dans la partie consacree a !'interrogation (proverbe numero 7). Voyons d'autres proverbes utilisant la deuxieme personne: 5. Ne donne pas tafille a un oiseleur ou a un pecheur ~ Ce proverbe s'adresse evidemment au parent d'une fille. lei, on le conseille de ne pas marier sa fille a un marl qui est oiseleur ou pecbeur. lei, il s'agit des professions tres dures et difficiles a exercer. En effet, on donne une serie de conseils a une personne qui peut etre n'importe quel bomme. Ces conseils sont a propos du mariage de sa fille. lei on degage de differents criteres pour choisir un marl. Dans ce contexte, on a parle de deux types de metiers (oiseleur et pecheur) qui exigent qu'on voyage tout le temps. 11 est interessant de voir que ce proverbe reflete l'idee qu'on «donne une fille >>a l'homme comme si c'est un objet de consommation. Encore une fois, les adjectifs possessifs de deuxieme personne du singulier 'ta' et 'ton' sont indiques afin de creer une impression d'enonciation. « Ta »de ce proverbe ala meme valeur que le « tu >>. Mais, 67 en fait, il n'y a pas de veritable enonciation. Selon Maingueneau l'adjectif possessif comme 'ton', 'ta' ou 'tes' ont aussi une «valeur generale » 16. Voyons un proverbe bengali avec les deictiques (tu, ta etc.) : 6. :x.1H<l1C~\3 ~. ~~<31@\3 ~ ~ mm ~~ ¥ fbf0rn ~ shonibareo hat, robibareo hat, I I shohoje radha kolonkini buk chitie hd! (a) shonibareo = aussi le samedi, hat = le marche hebdomadaire, = aussi le dimanche, hat = le marche hebdomadaire, shohoje = facilement, radha = Radha, le nom de l'amante du Dieu Krishna, robibareo kolonkini = une personne qui possede une mauvaise reputation, buk = la poitrine, chitie = avec la fierte, hat= (tu) marches. (b) Le marche hebdomadaire est le samedi et aussi le dimanche, toi, Radha, la mauvaise femme, tu marches avec fierte en projettant ta poitrine! (c) Une femme de mauvaise reputation, peut circuler avec fierte dans une place frequentee ! (d) lei, dans un ton plein de sarcasme on se moque d'une femme d'une mauvaise reputation qui marche avec fierte dans les endroits publics. Encore une fois, ici, 'tu' n'est pas utilise pour une femme specifique. lei « tu » signifie « toutes » les femmes. C'est pour dire que si une femme a une mauvaise reputation, c'est pour toujours. Elle ne peut passe debarrasser de cette mauvaise reputation mais peut-etre elle peut 16 MAINGUENEAU D., (1981). Op. Cit., p. 17. 68 la cacher en etant dans la foule oil personne ne va la remarquer. Derriere ce proverbe se cache une menace: si une femme acquiert une mauvaise reputation en commettant l'adultere etc. elle ne sera jamais pardonnee par la societe traditionnelle. Voyons maintenant des proverbes bengalis et fran~ais qui utilisent la troisieme personne pour parler du comportement d'une femme meprisee par la societe patriarcale : 2.1.1.2. Non-personne: 1. ~~ffic~ ~<®I, nI elle I on <PbS4ffirn om S41CSi<P ~ ~~~ ~~~ ffif~ ~ m1J khotmotie hii.te nari kotmotie chay , • ' # f masek khanek bhitor tar s'lthir s'ldur jay (a) Khopnotie - le son prod~it par le pied en marchant, hate - marche (marcher), nari - femme, kopnofie - une maniere de regarder en colere, chay- voit (voir), masek khanek- un mois, bhitor- entre, tard'elle, s'tthir- du raie, smdur-la poudre rouge, jay- s'en va. (b) La femme qui marche en faisant du son par les pieds avec fierte et qui regarde avec colere, dans quelques mois son 'sindur'I 7 ne restera pas sur sa raie. (c) La femme arrogante qui marche avec fierte et qui a un regard meprisant, perdra bientot son bonheur. (d) La femme qui fait preuve des qualites masculines n'aura pas de bonheur. 17 Une poudre rouge, Ie symbole du bonheur des femmes mariees en Inde. 69 Dans ce proverbe, on note que dans la premiere partie, il existe deux verbes « hate» ('marcher') et deux verbes sont « « « chay ,, ('regarder') et le sujet de ces nrui ,, ou la femme. Ces deux mots onomatopeiques khotmotie » (le son qu'on produit en marchant avec les chaussures) et << kotmotie » ajoutent un jugement concernant le comportement de la femme. Ces deux mots a travers le sujet a la troisieme personne aborde une description d'une femme 'masculine'. Le dernier vers nous devoile la non acceptabilite de ce genre de comportement 'masculin' en montrant la consequence negative. lei, 'elle' a la valeur d'une anaphore, 'elle' remplace la femme, en fait, 'elle' represente toutes les femmes. A ce propos Simone de Beauvoir dit : [... ] Une femme qui sollicite trop clairement le desir mille a mauvais genre ; mais celle qui semble le repudier n'est pas plus recommandable: on pense qu'elle veut se masculiniser, c'est une lesbienne ; on se singulariser : c'est une excentrique ; en refusant son role d'objet, elle defie la societe c'est une anarchiste.[ ... ps La citation ci-dessus montre clairement qu'une femme ayant des qualites << masculines » est meprisee par la societe. Examinons maintenant un autre proverbe franc;ais utilisant <<on», la non-personne : 8. On voit une fille amoureuse on clot laporte vainement - D'apres ce proverbe, il est inutile de fermer la porte si la fille est amoureuse. 18 BEAUVOIR S. de, (1949}, Deuxieme sexe, vol. II, Gallimard, Paris, p. 209. 70 lei, le proverbe commence par 'on' c'est a dire la troisieme personne. lei ce proverbe est compose de deux parties, et chacune est introduite par 'on', la troisieme personne. Ce pronom 'on' etant vague sujet » << un ne revele pas le locuteur, mais exprime quand meme son inquietude. Alors ce proverbe attire notre attention vers l'objet de la premiere partie qui est la .fille. De plus, la premiere partie decrit une fille amoureuse. C'est la deuxieme partie qui ajoute une valeur negative a la premiere. L'adverbe vainement dans ce contexte renforce l'idee de l'inutilite du locuteur. Ce proverbe evoque l'idee qu'il est difficile de retenir une fille a la maison une fois qu'elle tombe amoureuse. lei, 'on' veut dire n'importe queUe personne. Voyons un autre proverbe en non-personne: 9. On ne peut pas plus compter sur le soleil d'hiver que sur l'amour d'une belle .fille ~ Ce proverbe parle de I'amour vascillant de la fille. Ce proverbe commence par 'on', la troisieme personne comme le proverbe precedent. lei ce proverbe est compose de deux parties, et ces deux parties se lie par 'que', un pronom relatif mais ces deux parrties ont un seul sujet 'on', la non-personne. Ce pronom on etant sujet » 19 << un vague ne revele pas le locuteur, mais exprime son opinion concernant une belle fille. Si on considere 1' objet de ces deux parties, on trouve que 'l'amour d'une belle fille' est comparee avec 'le soleil d'hiver', les deux elements sont non comptables. De plus, c'est la premiere partie qui ajoute une valeur negative ala deuxieme. Ce proverbe evoque l'idee qu'il est difficile de compter sur une fille et sur sa decision. lei, 'on' se refere a n'importe queUe personne, en fait a toute la communaute 'male'. 19 RIEGEL M., Op. Cit., p. 197. 71 Voyons un autre proverbe en non-personne avec un theme different: 10. On voit bien que c'est lafille de la maison sa chemise depasse son cotillon -+ Ce proverbe commente sur l'habit d'une fille et selon ce proverbe le comportement d'une fille I ses vetements revelent son appartenance. Encore une fois, ce proverbe commence par 'on', .la troisieme personne qui est aussi une non-personne. Ce pronom on ne revele pas l'identite du locuteur, mais exprime son opinion concernant l'habit d'une fille. De plus, c'est la deuxieme partie du proverbe ou on decrit l'habit, plus precisement la longeur de la chemise d'une fille. Ce proverbe evoque un certain code vestimentaire pour une fille « ideale » et la categorise selon ses vetements. De ce qui precede, nous avons degage que les pronoms personnels comme 'je' et 'tU sont rarement employes au sein du discours proverbial. Lorsqu'ils sont employes, ils ne representent pas de veritables partenaires de l'enonciation. Ils ont une valeur« generique ».La troisieme personne ('on' en fran¥Us et en bengali« tar»), est frequemment utilisee au sein des proverbes parce qu'en l'utilisant le locuteur ne veut pas prendre la responsabilite de sa parole. Curieusement, nous avons trouve plus d'emplois de je' («ami» ou des verbes conjugues en premiere personnel dans les proverbes bengalis que dans les proverbes franc;ais. Ce je' est souvent une femme ou une fille (proverbes numeros 1, 2, 3) qui revele son mecontentement vis-a-vis sa position (proverbes numeros 1, 2, 3). Notamment, no us avons trouve, dans le cadre des proverbes bengalis, des cas ou le 'je' peut egalement etre employe par une femme agee ou une jeune femme (proverbe numero 2, 3). 72 11 est interessant de noter que nous n'avons pas trouve de proverbes fran<;ais oil le << je » represente la parole d'une femme ou d'une fille. De meme, les pronoms « nous » et « vous 11 ne sont guere visibles dans le discours proverbial. Par contre, l'emploi de «on» est frequent danS leS proverbeS fran<;aiS. Le « tU II est UtiliSe SOUVent pOUr s'adreSSer aux parents d'une fille. La plupart des conseils accordes aux parents portent sur le mariage de leur fille et le choix d'un bon mart pour elle. En bengali, le 'tu' (des verbes conjugues en deuxieme personnel est utilise ouvertement pour une femme qui n'a pas de bonne reputation dans une societe patriarcale. On n'a trouve guere l'usage de 'nous' ou 'vous' en fran<;ais et « wnra » ou « tomra » en bengali, dans le discours proverbial. Apres avoir etudie le.cas des pronoms personnels 1e', et 'tu' et celui de la non personne 'on' I 'tar', parlons de !'utilisation des temps dans les proverbes. 2.1.1.3. Temps D'apres Riegel, « Le terme temps est tres ambigu en fran<;ais, car il peut designer le concept de temps ou la forme grammaticale qui l'exprime; certaines langues distinguent ces deux sens a l'aide de deux termes distincts, respectivement time et tense {anglais), Zeit et Temps (allemand). [... ]. 11 est en tout cas indispensable de distinguer les deux « temps » possibles, car le temps denote et le temps grammatical ne coincident pas necessairement. Une meme epoque peut etre indiquee par des temps verbaux differents et, inversement, un meme temps verbal peut situer le proces dans des epoques differentes. Ainsi, l'imparfait de l'indicatif peut situer le proces dans n'importe laquelle des trois epoques: • n partait lorsque le professeur aniva (passe) ; 73 • Si tu etais ici, quel bonheur ! (actuel) ; • n serait heureux s'il reussissait d son examen (futur). Les appellations des temps du verbe ne correspondent pas forcement aux temps de la realite denotee. Un futur peut egalement servir a evoquer la situation presente ou meme passee. 11 est difficile de parler de « present » pour les modes impersonnels comme l'infinitif, qui ne distinguent pas par eux-memes les epoques et qui peuvent evoquer un proces aussi bien a venir (J'espere rentrer demain) que passe (Elle croyait tout savoilj »20. Selon Maingueneau « en tant que forme non-marquee de l'indicatif, le << present )) est susceptible d'entrer dans des enonces exprimant le futur. Dans ce cas c'est un circonstant qui indique la valeur temporelle: Demain Paul va d Nice. Hier je vais chez lui, sa mere ne veut pas que je rentre ... 11 ne faut pas penser qu'ici le present se met a exprimer le futur ou le passe ; en fait, ce sont les adverbes qui portent !'information temporelle de l'enonce. La langue parlee recourt beaucoup ace procede, extremement commode. 11 suffit de degager par le contexte s'il s'agit de passe ou de futur pour avoir la possibilite d'utiliser constamment le <<present)), forme la plus economique et la plus indetermiee de l'indicatif )) 2 1. 2o RIEGEL M., Op. CiL, P. 289. 21 MAINGUENEAU D .• (1991), L'enonciation en linguisti.quefranr,;aise, Hachette, Paris. p. 65. 74 A titre d'exemple, « Le chat est vertebre 11, en tant qu'enonce- occurrence, suppose un acte d'enonciation, un evenement discursif sunrenu en un temps et un lieu determines. Pourtant, le fait que le chat soit un vertebre constitue une verite independante de son enonciation : emis pas n'importe quel enonciateur dans n'importe queUe situation cet enonce demeure valide. lei il ne saurait y avoir d'embrayeurs, et le ((present II du verbe ne peut etre oppose a un passe ou a un futur; il s'agit la d'une forme temporelle «zero», a-temporelle ou « generique ». Prenons quelques exemples des proverbes utilisant le present de l'indicatif et voyons sa valeur : 2.1.1.3.1. Present 11. Fille honnete et morigenee est assez riche et bien dotee ---+ D'apres ce proverbe une fille honnete et bien elevee est bien recompensee. lei, le 'present' a une valeur atemporelle. 11 reussit a decrire le comportement d'une fille avec des qualites specifiques. Le seul avantage qu'une fille re~oit pour etre honnete est de pouvoir se marier avec une dot ou d'avoir un mart riche ! Indirectement, on conseille a une fille d'etre. honnete et fidele, si elle veut obtenir un bon mart. Voyons un autre proverbe au sujet du comportement d'une fille: 12. Quand une .fille et puis un gar{:on se rencontrent. c'est une mauvaise affaire ---+ Ce proverbe annonce une mauvaise fin qui resulte d'une rencontre d'une fille avec un gar~on. 75 lei, le verbe au present de l'indicatif (« se rencontrent ») implique qu'il y aura toujours une aventure amoureuse entre une fille et un gar~on s'ils se rencontrent. Le verbe 'etre' au present de l'indicatif dans la deuxieme partie du proverbe introduit une morale et une menace pour une fille et un gar~on) gar~on. Indirectement, on conseille a la fille (et aussi au de ne pas s'engager aux aventures amoureuses avant le martage. De meme, nous avons un autre proverbe qui annonce une fin tragique si la fille ne se comporte pas comme une « fille 11. 13. Fille qui siffle coq qui pond portent malheur a une maison -+ Dans ce proverbe le present (portent malheur) prevoit l'avenir d'une fille qui siffle, en se comportant comme des proverbe, les premiers verbes comme « gar~ons. Dans ce siffler, pondre 11 au present ont la valeur de repetition, et le demier verbe 'porter malheur' ala valeur d'une prevision. Ce proverbe comme le proverbe precedent, semble corrtger le comportement de la fille. Encore une fois, on predit mauvais sort pour une fille qui se comporte comme un homme («fille qui siffle 11). Examinons ce que disent les proverbes bengalis au present : 14. ~ ~IC~ fu cre- ~~~·~crepanta bhate ghee nosto • baper barijhee nosto • 76 (a) panta bhate non raffine, nosto = dans = gate, le riz du jour precedent, ghee = le beurre baper bart = dans la maison du pere, jhee = la fille, nosto = gate. (b) Le beurre (non raffine) est gache sur le riz du jour precedent, de la meme maniere la fille (mariee) est gachee chez ses parents. (c) Comme le beurre est peu desire sur le riz pourri, de la meme fa<;on, une fille mariee qui reste chez ses parents n'est pas respectee. (d) Ce proverbe indique indirectement qu'une femme mariee est respectee seulement chez son marl. Encore une fois, ce proverbe au present a une valeur atemporelle et annonce une morale. La premiere ligne au present nous apporte une comparaison en tirant un exemple de · la vie quotidienne. Mais la deuxieme annonce son sort. Le seul verbe utilise pour toutes les deux lignes (« nosto »)est au present, qui a une valeur atremporelle. Ce proverbe conseille a la fille de ne pas rester chez ses parents apres son manage. Ainsi, le proverbe impose des regles de conduite pour une femme mariee. Voyons un autre proverbe bengali qui parle de la femme rnariee et de ses atouts: 15. ~r<P <J\f;QJ~ C'S'ffin '>1i ~~~~~m ~~~'9ft eke bouer gora ga tay hoechhe chheler ma lom ~ '.e lom,J: te porchhe pa 77 (a) eke claire, ga chheler = avant = teint I = du fils, ma tout I d'abord, bouer la peau, tay = la = en = de la belle- fille, gora = plus, hoechhe = est devenu(e), mere, lomphe lomphe = en sautant, porchhe = revient, pa = le pied. (b) La femme a deja un teint clair, puis, elle devient la mere d'un fils et elle marche en sautant. (c) Une belle femme au teint clair qui est aussi la mere d'un fils, devient tres orgueilleuse de ses atouts. (d) D'apres ce proverbe, une femme qui est belle et en meme temps mere d'un fils devient tres orgueilleuse. Ce proverbe indique !'importance d'un fils et de la beaute pour une femme dans la societe bengali. Le proverbe raconte au present la vie d'une femme: des son martage jusqu'a la naissance de son enfant. Cette narration de sa vie se deroule a travers divers verbes. On commence par le verbe 'etre' ce verbe est sous-entendu en bengali et on ne !'utilise pas dans ce cas, mais le sens dit que ce vebe existe ici. Ce verbe decrit !'aspect physique de la femme. Ensuite, on passe par le verbe 'devenir' (hoechhe) en bengali pour evoquer la deuxieme etape de sa vie, qui est la naissance de son fils. Finalement, le verbe 'marcher' (porchhe pa) en bengali raconte egalement de maniere implicite sa fierte et son comportement orgueilleux. Ainsi, toute l'essence de sa vie est expliquee a l'aide du present de l'indicatif qui a la valeur d'un recit atemporel. Ce proverbe met en lumiere egalement !'importance du teint clair et du fils dans la vie d'une femme bengali. A partir de nos proverbes cites ci-dessus nous avons degage que le «present» ne signifie pas le present d'enonciation. En fait, le present ala valeur atemporelle. Il est employe pour raconter un conseil (proverbe numero 11, 14) ou une menace (proverbe numero 12, 13, 14). Quelque 78 soit la valeur du present, le statut de la femme est marginalise. En effet, les proverbes franc;ais et bengalis recourent beaucoup ace« present» qui reste souvent implicite dans le cas des proverbes bengalis. Le present permet de construire un univers de definitions, de proprietes, de relations tout a fait etranger ala temporalite. 2.1.1.3.2. ~tur Comme le present, un autre temps souvent utilise dans les fran~ais proverbes et bengalis : c'est le « futur ». Contrairement au present qui peut aussi fournir l'image du futur et du passe, le futur ne peut fournir que l'image du futur. Dans le cadre des proverbes, nous ne trouvons pas les indicateurs temporels comme 'demain', 'tout de suite' etc., pour specifier la distance entre le fait a venir et le present du locuteur. Pourtant, se « sa localisation temporelle permet au futur simple de charger de valeurs modales associees a l'avenir. >> 22 D'apres Maingueneau23, • La combinaison je + futur est tres souvent interpretable comme un acte de promesse. Le locuteur n'informe pas seulement de son intention, il se met dans !'obligation morale de l'effectuer. Par exemple quand un homme politique dit: « Je construirai un hopital », c'est tout d'abord prendre un engagement et non informer un acte futur d'un individu. • Un futur associe a « tu » est ordinairement compris comme un ordre, parfois comme une prediction. En effet, le tu + futur est pertinent si c'est le fait meme de l'enoncer qui oblige autrui a l'accomplir (c'est-a-dire si l'enonciateur a le pouvoir d'ordonner) ou si l'enonciateur possede un savoir qui lui permet de connaitre a l'avance le comportement de 22 RIEGEL M. et al., Op. Cit., p. 312. 231\WNGUENEAU D., Op. Cit.. p. 77. 79 l'interlocuteur. Dans les deux cas, une modalite de necessite est implicite. Par exemple : Paul sera decapite. Cette phrase. peut etre un ordre d'un juge ou une prediction. • L'association d'une non-personne et d'un futur re<;oit en general trois types d'interpretation modale : necessite, probabilite, possibilite. Le fait d'une prediction ou d'un ordre sera un ordre dans la bouche d'un juge et une prediction dans celle de quelque personne competente a qui on aura demande son opinion. Par exemple : R gagnera bien a lafm du mois. Prenons quelques exemples des proverbes fran<;rus et bengalis pour analyser la valeur du futur : 16. Lajeune fille qui vit retiree sera une tres bonne mariee - D'apres ce proverbe, une fille sera une femme « ideale » apres son mariage, si elle mene une vie modeste et simple, sans beaucoup d'ami(e)s. Ce proverbe annonce l'avenir de la fille. Le temps au futur indique son destin. La partie qui precede le verbe 'etre' au futur decrit la caracteristique et le comportement de la fille et renseigne sur sa qualite et sa nature. Ensuite, le verbe au futur predit son avenir. Ainsi, ce proverbe, raconte a la fois la vie de la jeune fille de fa<;on implicite, et fait une bonne prediction concernant son destin. Indirectement, le verbe au future indique un certain comportement exige d'une jeune fille : elle doit etre modeste sans d'ami(e)s. De la meme maniere, on voit un autre exemple ou I'on utilise le futur pour predire, le sort d'une femme. 1 7. Jeune fille jenestriere ne sera pas bonne menagere 80 Ce proverbe mentionne litteralement qu'une jeune fille qui reste --+ pres de la fenetre ne sera pas une bonne menagere. Implicitement, ce proverbe predit qu'une jeune femme faineante qui ne travaille pas et regarde tout le temps dehors de la maison par la fenetre ne sera pas une bonne menagere. L'emploi du futur avec la negation annonce l'avenir de la fille. Indirectement, on y voit une f morale : une jeune fille ne doit pas rester sans travail. De la meme favon dans l'exemple suivant, le verbe au futur annonce le destin incertain d'une jeune fille. 18. Fille et pretre ne savent pas oiL ils iront --+ Ce proverbe demontre que la jeune fille n'a aucun sens de direction. Ellene sait ou aller. Ce proverbe compare la fille au pretre. Un pretre est une personne qui passe la plupart de son temps au temple. De la meme maniere, une fille reste a la maison la plupart de son temps selon les normes de la societe patriarcale. Alors, on presuppose que ces deux personnes ne connaissent pas le monde exterieur. Ainsi, iront ». « ils ne savent pas ou ils ils sont toujours indecis et confus. Etudions quelques proverbes bengalis pour etudier d'autres nuances de futur : gouri lo jhi tor kopale buro bor, ami korbo ki? 81 (a) Gowi = le nom d'une deesse qui a le teint claire, lo = comme, jhi = la fille, tor= a toi, kopale = la fortune, buro = vieux, bor = le marl, ami= je, korbo = ferai, ki =quai I qu'est-ce que. (b) Oh belle fille- ton destin est d'avoir un mari age, qu'est-ce que je pourrai faire? (c) Meme une belle fille aura un mari age. (d) Ce proverbe parle du destin etrange d'une belle fille concernant son mariage a un homme a.ge. Dans cet exemple, on remarque que le verbe utilise au futur ne renvoie ni a un evenement futur, ni a l'attente d'un resultat futur. En effet, le verbe au futur a la forme interrogative a une valeur rhetorique. Cette partie montre que personne ne peut changer le destin etrange d'une femme. lei, un autre proverbe parle du mariage de la fille au futur: onno dekhe debe ghee, patro dekhe debejhi (a) onno = le riz, dekhe = en regardant, debe = tu donneras, ghee = beurre non raffine, patro = le marie, dekhe = en regardant, debe = tu donn eras, jhi = la fille. (b) Tu donneras du beurre (non raffine) selon la quantite du riz, et tu donneras ta fille en considerant les qualites de son fiance. (c) Comme il faut mesurer du beurre selon la quantite du riz de la meme maniere il faut verifier l'identite du gendre avant de lui donner la fille en mariage. (d) Ce proverbe conseille les parents de faire attention quand ils marient leur fille. Pourtant, il ne leur propose pas de chercher l'opinion de la fille. 82 Cet exemple emploie egalement deux fois le verbe 'donner' au futur. lei, le futur n'apporte pas une valeur de possibilite ou probabilite, au contraire, le locuteur conseille a l'interlocuteur concernant le parti a choisir de sa nne, utilisant le futur. 11 est amusant de noter que la fille, qui vase marier, n'a aucun choix concernant le partenaire de sa vie et ce sont ses parents qui vont choisir et verifier le statut de son fiance. Etudions up. autre proverbe bengali parlant de la parure de la femme: 21.~~~.~~ ~ <fCC1 ~ ~9J"t ? kalo kapor rukkho mat1i.a lokkhi bolen thakbo kotha (a) kalo = noir, kapor = les vetements, rukkho = sans huile I sec, = la tete, lokkhi = le nom de la deesse de richesse, thakbo =je resterai, kotha = ou. ~matha bolen = dites, (b) Les vetements sales, la tete sans huile Lokkhi Oa deesse de la richesse) dit: ou resterai-je? (c) La salete des vetements et le corps mal propre de la femme eloignent la richesse de la maison. (d) Selon ce proverbe, une femme doit s'occuper de son allure pour le bien-etre de sa maison. Si les vetements d'une femme sont sales et la tete n'a pas d'huile, la deesse de la richesse (Lakshmi) ne rendra pas visite a la maison. Au Bengale on croit qu'une maison sera frequentee par la deesse · de la prosperite, ou la maitresse de la maison est respectee et bien soignee. lei, on demande ala femme d'etre belle et on lui demande indirectement de passer son temps a se soigner. Encore une fois, on la limite dans les quatre murs et ainsi on la domine. lei, le mot 'interrogatif ou + le futur + 'je'. a la valeur de negation. Si c'etait « je resterai ici » - cela aurait la valeur de promesse, mais comme on utilise ici la structure interrogative, 83 la valeur du proverbe change. Il signifie que la deesse ne reste pas dans une maison ou la femme restera sale, sans parure, sans respect. A propos de la parure, Simone de Beauvoir a dit : [... ] Soigner sa beaute, s'habiller c'est une sorte de travail qui lui permet de s'approprier sa personne comme elle s'approprie son foyer par le travail menager.[ ... )24 Ainsi, s'occuper de la beaute devient une tache imoprtante pour une femme y compris le travail menager. Dans cette partie, nous avons degage que l'emploi du futur avec le pronom personnel « je » est rare (un seul cas en proverbe bengali) (proverbe numero 21) ici, le 'futur' annonce une negation (« je ne resterai pas») emise par la deesse (« lokkhi »). Derriere cette negation, se degage une morale : une femme doit s'occuper de sa parure, sinon, il n'y aura pas de bonheur dans la maison. Il est interessant de noter que meme si la femme est comparee a la deesse, sa place est definie dans les quatre murs de la maison. Il existe egalement plusieurs cas des emplois du 'futur' avec « tu » dans les proverbes bengalis, pourtant, nous n'avons pas trouve de tels exemples en proverbes fran¢s. En bengali, nous avons remarque qu'on utilise en bengali « 'tor + futur » et en fran~ais « tu + futur » dans les proverbes pour donner des conseils aux parents d'une fille. La formule la plus employee est: le futur avec la troisieme personne ('on'). La plupart des proverbes en bengali et en fran~s relevant de ce type, annoncent le sort inevitable d'une femme (proverbes numeros 16, 17, 18). Apres avoir analyse la valeur des pronoms personnels et les temps (present et futur), etudions les modalites d'enonce: 24 BEAUVOIR S. de, {1949), Deuxieme sexe, vol. Vol. II. Gallimard, Paris, p. 205. 84 2.1.2. Modalite d'enonce La modalite d'enonce est, le segment de la chaine parlee et ecrite produit par un locuteur, qui traduit l'attihide du sujet parlant par rapport a ce qu'il enonce. La notion de modalite est empruntee a la logique modale, qui distingue la necessite et la possibilite et ajoute a la logique des propositions les operateurs correspondants2 5. Dans l'approche enonciative, on distingue les modalites d'enonciation et les modalites d'enonce. Les modalites d'enonciation renvoient au sujet de l'enonciation en marquant l'attitude enonciative de celui-ci dans sa relation a son allocutaire. Elles se traduisent par differents types de phrases enonciatifs : declaratif, injonctif et interrogatif qui expriment respectivement une affirmation, un ordre ou un questionnement, a l'intention de l'allocutaire. Un meme contenu peut etre pourvu de differentes modalites26. Les modalites d'enonce renvoient au sujet de l'enonciation en marquant son attitude vis-a-vis du contenu de l'enonce. Elles expriment la maniere dont l'enonciateur apprecie le contenu de l'enonce. evaluations logiques classiques, limitees a la vente, a la « Aux possibilite, a la necessite et a leurs contraires, s'ajoutent d'autres sortes d'appreciations : la proposition enohcee peut etre certaine, etablie, obligatoire, pennise ou d'un point de vue affectif, utile, heureuse, agreable, souhaitable, ... »27 • La modalite d'enonce qui est basee sur la logique et qui apporte une notion de certitude s'appelle aussi la modalite (( epistemique 2s 26 ». RIEGEL M., Op. Cit. p. 579. Ibid .. p. 580. 27 Cornme nous avons deja aborde les enonces assertifs, interrogatifs. imperatis et negatifs dans le chapitre precedent. nous allons focaliser notre attention sur les modalites d'enonce. 85 Marii:1a Yaguello a commente a ce sujet en disant que : La modalite epistemique permet a l'enonciateur de traduire sa plus ou moins grande certitude quant au caractere de fait de ce qu'il enonce.28 La modalite d'enonce qui apporte des appreciations en termes de bon ou de mauvais s'appelle la modalite « axiologique " d'apres Riegel. L'enonce epistemique est la phrase par laquelle l'enonciateur exprime une echelle de verite et une possibilite, une probabilite ou un manque de certitude. Voyons quelques exemples des modalites a travers !'usage des: adjectifs, et adverbes etc. : 2.1.2.1. Adjectifs 22. Oreille petite, fd.le jolie - Selon ce proverbe, une certaine caracteristique particuliere rend une fille belle. Ce proverbe est un exemple de l'enonce axiologique et il s'exprime avec deux groupe nominaux. Cet enonce foumit egalement une valeur informative a l'aide du terme 'oreille petite' dont 'petite' est un adjectif qui estime la fille sur une echelle contie l'adjectif 'grande'. La demiere partie du proverbe 'fille jolie' nous foumit encore un adjectif qui apprecie esthetiquement la fille mais c'est assez imprecis comme la defmition d'etr~ ]oli' n'est pas tres explicite. On pourrait egalement en deduire qu'une fille « parfaite » ne doit pas preter attention aux bruits: elle ne doit pas croire facilement 28 a de fausses nouvelles. YAGUELLO M., (1988), Legrand livre de la languefra.rtfaise. Seuil. Paris. p. 174. 86 Un autre proverbe fran~s qui parle de la beaute : 23. CEil bleu et sourcil blondfont la beUejeunefi.lle ~ D'apres ce proverbe, deux caracteres physiques particuliers rendent une fille belle : il faut qu'elle ait des yeux bleus et des cheveux blonds. Comme les exemples precedents, ce proverbe traduit une admiration pour la beaute de la femme. lei, des precisions sont apportees au sujet de sa beaute avec les adjectifs descriptifs comrne 'reil bleu' et 'sourcil blond'. L'expression « font appreciation esthetique, dormant la belle jeune fille a la » ajoute une phrase une subjectivite. Dans ce cas, les adjectifs de couleur comme 'bleu' et 'blond', decrivant en principe une realite objective, ajoutent des specificites a la beaute de la femme. Lexicalement, le sens de 'la belle jeune fille' est tres flou, par contre les adjectifs 'bleu' et 'blond' precisent la nature de la beaute occidentale a travers la modalite epistemique. Etudions un proverbe bengali concemant la precision de la beaute: 24. <n<P ~ e<llitJ '1($ ~ ~e<ffirn~~ . nak nei betir nother sfwkh felna betir koto thomok • •• (a) nak -le nez, nei - ne ... pas, betir - de la fill e. nother - du bijou du nez, shokh- le desir, felna- pas de valeur, betir- de la fille, koto- . combien, thomok .,. . faire la fiere . . (b) La fille a un nez plat, elle desire un bljou du nez 87 Quelle fierte de la fille sans valeur ! (c) La beaute naturelle est plus importante que l'ornement .. Sans la beaute innee, le bijou ou son desir n'a pas de sens. (d) Un bijou ne peut pas embellir une fille laide. lei, on trouve un ton sarcastique de ce proverbe concernant la beaute d'une fille. Le ton indique que meme pour porter un bijou au nez, la fille doit avoir un beau nez. lei, au lieu de dire qu'un bijou ne va pas sur un nez plat, on se moque du son desir de la fille de porter un bijou sur le nez. lei, cette enonciation male denonce non seulement la fille qui est laide mais aussi le desir d'avoir des bijoux. Etudions les proverbes bengalis a travers les modalites provenant de l'usage des adjectifs : eostreer shotek sree (a) eostreer = d'une femme mariee, shotek = plus de cent, sree = la beaute. (b) A une femme mariee, une centaine de beautes. (c) Le mariage devient le symbole de la beaute pour une femme. (d) D'apres ce proverbe, le mariage rend une femme tres belle et competente. Ce proverbe bengali porte une appreciation esthetique sur la femme mariee. II apprecie l'etat de la femme mariee, le seul etat appreciable pour une femme. Ce proverbe se compose de deux adjectifs et un nom. Le premier mot 'eostree' evalue la femme sur une echelle graduee contre le mot 'veuve' et 'sree' est un nom subjectif. Le seul mot 88 utilise ici 'shotek' est un nom avec un suffixe 'ek' en bengali. Ainsi, avec ces trois elements, ce proverbe n'exprime ni une probabilite ni une possibilite. Ce proverbe indique ce qui est souhaitable et ainsi on trouve la modalite axiologique dans ce proverbe. Voyons un autre proverbe bengali: 26. ~ C5t'l ~ ~. ~ CDm ~ "Sllrn ~~-miD~~~ machh chene gobhir jot pakhi chene 9-al mayejane puter mayajiejoto kal = connait, gobhir = profond, jol = l'eau, pakhi = l'oiseau, chene = connait, 9-al = la branche d'un arbre, maye = la mere, jane = connait, puter = du fils, maya = amour profond, jie = elle vive, joto kal = jusqu'a ce que. (a) machh = le poisson, chene (b) Le poisson reconnait l'eau profonde, l'oiseau reconnait sa branche La mere garde l'amour du.fils tout au long de sa vie (c) Comme un poisson reconnait toujours la profondeur de l'eau et un oiseau reconnait la branche sur laquelle il vit, de la meme maniere, la mere garde l'amour de son fils pendant toute sa vie. (d) Selon ce proverbe, l'amour de la mere pour ses enfants (surtout son fils) est sans parallele. La premiere partie de ce proverbe montre differentes relations entre les etres vivants et leur demeure. Le premier vers presente deux comparaisons, ou le seul verbe 'reconnaitre' est utilise deux fois. Le verbe etablit alors une relation affective entre les etres vivants et leur demeure. En ce qui conceme le deuxieme vers, il etablit une comparaison avec le premier vers. lei, le tenne 'maya' (I'amour) et I'expression comme << jie joto 89 kal » (tout au long de la vie), depassent la valeur d'affinite, et exprime une attitude favorable du locuteur a travers la modalite (« jiejoto kal »}. lei, on souligne le role matemel de la femme. La meme idee se manifeste aussi dans les proverbes franc;ais : 27. A l'enjant ilfaut la chaleur de la mere ---+ D'apres ce proverbe, !'enfant, c'est surtout la responsabilite de la mere. Ce proverbe exprime a la fois le sentiment et !'evaluation du locuteur. Tout d'abord, !'expression 'la chaleur de la mere' exprime semantiquement un sentiment du locuteur et ce sentiment montre ce qui est bon ou mauvais. De ce point de vue, ce proverbe est un enonce axiologique. Ensuite, le verbe 'falloir' expose une obligation, qui interdit tout ecart de la mere par rapport a I'education de son enfant. En dehors de cette obligation, il revele egalement un jugement de valeur assez fort. Ainsi il etablit une responsabilite de la mere vis a vis son enfant. Comment est le rapport entre la mere et la fille dans le proverbe bengali: mae jhie kondol kondol noy, shokaler badol badol noy (a) mae = avec la mere, jhie = avec la fille, kondol = la querelle, noy = n'est pas I ne ... pas, shokaler = du matin, badol = nuage, badol = la pluie, noy = n'est pas I ne ... pas. (b) La querelle entre la mere et la fille n'est pas une vraie querelle, le nuage du matin ne donnera pas de pluie. 90 (c) Comme le nuage du matin, la querelle entre la mere et la fille n'est pas serieuse. (d) D'apres ce proverbe, de petits arguments entre la mere et sa fille ne meritent pas d'etre consideres serieusement. Cet exemple donne une nuance appreciative en bengali puisque le locuteur est cense avoir raconte un fait etabli. En revanche, par sa forme et par la presentation de deux faits paralleles, il etablit, termes qui sont objectifs, une valeur informative quant a l'aide des a la situation. lei, le mot 'kondol' (querelle) porte une connotation negative. Mais en lisant le proverbe entier on se rend compte qu'il ne s'agit pas d'une vraie querelle entrela fille et sa mere. Meme Simone de Beauvoir a parle de petites querelles dramatiques entre la mere et sa fille. D'apres elle, la fille est « alter ego » de sa mere : [ ... ] La petite fille est plus totalement livree a sa mere; les pretentions de celle-ci en sont accrues, leurs rapports revetent un caractere bea'ucoup plus dramatique. Dans une fille, la mere ne salue pas un membre de la caste elue : elle y cherche son double. [•.• )29 . Examinons maintenant le cas des adverbes qui refletent aussi la subjectivite du discours male : 2.1.2.2. Adverbes 29. m ~'9f ~~~ <:till ~~~ <P@ ~~~~~~~~~ rna bap bhat dey dingunti kore 29 BEAUVOIR S. de. Op. Cit., vol. II. p. 189. 91 shamir tullo bhat ar keu dite nare (a) Ma- mere, bap - pere, bhat- du riz, dey - donnent, dingunti - en comptant le jour, shamir- du mari, tullo - comme, bhat - du riz, ar keu- quelqu'un d'autre, dite- donne, nare- ne peut pas. (b) Les parents donnent du riz en comptant le jours, personne ne peut me donner du riz comme le mari. (c) La mere et le pere donnent du riz a leur fille pendant un temps limite alors que son marl lui donne du riz toute sa vie. (d) La fille reste quelques jours chez ses parents mais le reste de sa vie, apres son marlage, elle depend de son marl. lei, si l'on pose la question 'comment' ou 'de queUe maniere' on donne du riz, on trouvera la reponse avec (( dingunti kore)) quijoue le role d'une modalite: modalite epistemique. L'expression « dingunti kore » joue le role de l'adverbe du verbe 'donner'. Etant donne que l'adverbe modifie le sens du verbe, on remarque qu'exclusivement le premier vers de ce proverbe contient un adverbe qui decrlt precisement la fa<;on de donner du rlz. 'Donner' est le meme verbe pour detailler tous les deux vers. Ce proverbe elabore indirectement !'importance du mari. L'absence de l'adverbe en cas de deuxieme vers nous explique l'indispensabilite du marl dans la vie d'une fille. Ce proverbe renforce l'idee de la contribution du marl dans la vie de la fille. Cet adverbe bengali introduit d'une part, une comparaison entre les parents et le marl et d'autre part, il ajoute dans ce proverbe une certaine subjectivite. lei, on approuve une idee classique tres nette et claire que la fille est toujours sous la domination ou la direction de quelqu'un ; en enfance, elle est protegee par ses parents et une fois qu'elle est adulte elle est dirlgee par son marl. Elle n'a jamais une vie independante. 92 Analysons un autre proverbe qui comprend des modalites : 30. On tiendrait plutot un panier de rats qu'uneftlle de 20 ans Selon ce proverbe, meme des rats sont plus souhaitables qu'une --+ jeune fille. Ce proverbe etablit une comparaison au mode conditionnel. 11 partage avec le futur quelques caracteristiques: la supposition, et !'hypothese. lei, on parle d'une action possible << plutot ». a travers un adverbe Bien que la phrase ne soit pas introduite par 'si', on remarque une structure equivalente grace au terme 'que' qui evoque une comparaison entre 'une fille' et 'un panier de rats'. Cette comparaison avec 'que' presente une incertitude inherente a l'avenir concernant la femme. Done, !'incertitude inherente a ce mode conditionnel presente un fait dont la verite n'est pas garantie, mais exprime aussi une possibilite. A travers la modalite, le proverbe devoile les prejuges contre la fille. Voyons d'autres proverbes du meme genre: 31. Point de ftlle qui ne desire etre ferrune, point de femme qui ne desire etre mere --+ Toute fille a un but ultime : elle veut se marier et toute femme a un destin ultime : elle vetit devenir la mere. Dans ce proverbe, l'adverbe point est employe deux fois au commencement de deux propositions. Dans toutes les deux propositions cet adverbe s'emploie sans negation ne. Concernant le role de 'point' a l'interieure d'une phrase verbale Riegel dit: Dans I'usage actuel, point joue, [... ], le role d'une variante ayant une coloration archaique ou litteraire 3o 30 Ibid., p. 417. 93 Considerant cette constatation, on peut dire peut-etre que ce proverbe particulier jouit d'une touche litteraire. Selon les gramrnairiens, l'emploi de ·poinf se trouve surtout dans une circonstance conversationnelle. A propos de ce proverbe, on peut dire que cet adverbe porte sur le terrne .fi.lle dans la premiere proposition et sur le terrne femme dans la demiere proposition. Ainsi, il apporte un impact particulier sur ces deux terrnes concemant la femme. Voyons un autre exemple d'un proverbe fran<;ais avec une modalite: 32. Jetme femme, bois vert et pain tendre font bientot maison a vendre ---+ D'apres ce proverbe, une jeune femme equivaut a un bois vert, mal efficace, ou au pain tendre, qui coiite cher. Ainsi, elle est moins efficace mais tres chere. Elle ptut causer la mine de sa maison. Dans ce proverbe, l'adverbe ·bientot' fonctionne comme un complement circonstanciel a l'interieur de la phrase. A travers cet adverbe on trouve ici une menace : on risque de tout perdre dans peu de temps en vendant la maison. Si l'on pose la question temporelle (quand ?}, l'adverbe « bientot » repond et complete la phrase. De ce qui precede, il resulte que l'adverbe « bientot » constitue un effet special concemant une jeune femme qui est la cause de la mine de la maison. Ainsi, il joue le role d'une modalite et exprime le point de vue du locuteur «male». De ce qui precede, nous degageons que les adjectifs, les structures impersonnelles attributives et les adverbes jouent le role des modalites 94 d'enonces. Les modalites mettent en lumiere le point de vue sexiste de la voix male. On trouve la misogynie a l'interieur du discours proverbial qui reflete la structure d'une culture ou d'une societe. Puisque les proverbes sont censes etre la sagesse ancienne d'une culture quelconque, on les utilise pour montrer et enseigner la tradition de la societe ala generation suivante et ainsi on inculque ces idees misogynes chez des jeunes afin de renforcer l'image subjuguee de la femme. Examinons maintenant la representation de la femme a travers une etude des actes de langage dans les proverbes. 2.2. Actes de langage On considere habituellement que la langue est utilisee pour transmettre une information. Or, on ne saurait reduire l'usage du langage a la production d'assertions, dont le sens se limiterait a la representation d'un etat de choses. La philosophie anglaise3 1 a montre que la langue est d'abord un moyen d'agir sur autrui. Cette conception met en valeur la force intrinseque de tout acte d'enonciation : tout locuteur, quand il enonce une phrase dans une situation de communication donnee, accomplit un acte de langage, qui instaure un certain type de relation avec l'allocutaire. Comme tout acte, un acte de langage vise a modifier un etat de choses existant. Un acte de langage comporte plusieurs particularites. Un acte de langage repose toujours sur une convention sociale implicite qui associe dans une communaute donnee, telle expression linguistique a la realisation de tel acte de langage particulier. Comme les actes de langage ne peuvent se realiser que par le langage, celui-ci en determine les regles. 31 AUSTIN J .L. cite dans PJEGEL M. Ibid., p. 583. 95 Ainsi, la grammaire du imperative fran~is a un acte d'injonction, questionnement. Parfois, le verbe promesse, « feliciter » associe directement une phrase une phrase interrogative « promettre » sert a un acte de a realiser un acte de un acte de felicitations, etc. Des termes comme 'idiot', 'cretin', 'imbecile' servent a realiser, dans certaines conditions, un acte d'injure. Un acte de langage definit aussi des droits et des devoirs. En l'accomplissant, le locuteur donne un certain role a l'allocutaire, conformement au scenario conventionnel qui regit l'acte de langage. Ainsi, quand il donne un ordre, le locuteur pose son droit d'imposer un· certain comportement a son partenaire, qui est mis en demeure de se plier a l'injonction. D'apres Austin, un acte de langage se decompose en trois sortes d'actes32 : Un acte locutionnaire: c'est << le dire», l'acte de production d'un enonce, qui a trois composantes etroitement liees : un acte de production des sons, un acte de combinaison des mots en phrases et un acte de reference. Le resultat de l'acte locutionnaire est une phrase, pourvue d'une signification. De ce point de vue, n'importe quel proverbe est locutionnaire au moment de sa prononciation. 32 AUSTIN J. L.. (1970). (Huitieme conference, Paris), cite dans RIEGEL M. Ibid., 585. 96 Un acte illocutionnaire: c'est l'acte de langage proprement dit, ce que le locuteur fait en parlant, conformement a une convention reconnue : poser une question, donner un ordre, faire une promesse. Un acte perlocutionnaire : c'est l'effet produit par l'acte illocutionnaire sur l'allocutaire. II n'est pas prevu par la convention, mais permet d'evaluer la reussite ou l'echec de l'acte illocutionnaire suivant les reactions de l'allocutaire. Celles-ci peuvent etre nombreuses et variees. Riegel fait aussi une classification des actes de langage. Dans notre etude, nous nous appuyons sur sa classification. D'apres lui, 33 il existe deux types d'actes de langage : l. actes directs et 2. actes indirects. Les actes de langage directs correspondent a trois types de phrases : declaratif, interrogatif et imperatif. Ainsi, la phrase declarative correspond normalement a un acte d'assertion, la phrase interrogative a un acte de questionnement et la phrase imperative a un acte d'injonction. Comme les trois types de structures (declarative, interrogative et imperative) ont deja ete discutes dans le chapitre precedent, nous allons aborder quelques exemples des actes indirects. 2.2.1. Actes de langage indirects D'apres Riegel si les actes de langages directs utilisent la forme linguistique associee par convention a un acte de langage specifique, les actes de langage indirects sont accomplis au moyen d'un enonce contenant une forme associee conventionnellement a un autre acte que celui qu'ils visent a accomplir. L'affirmation litterale reste vraie et se trouve completee par l'acte indirect qui en est contextuellement le 33 RIEGEL M., Ibid., p. 587. 97 prolongement quasi naturel. Par exemple : ll se fait tard, pour dire « je ne veux pas sortir '' Voyons quelques exemples des actes indirects : narir bol chokher jol (a) narir = de la femme, bol = du pouvoir, chokher = des yeux, jol = des larmes. (b) Le pouvoir de la femme reside dans s,es larmes. (c) Quand une femme se sent impuissante elle se sert de ses larmes comme une arme. (d) Selon ce proverbe, une femme a une seule fac;on de se defendre et c'est a travers ses larmes. C'est un autre exemple d'un enonce assertif qui indirectement !'incompetence ?e la femme a se exprime defendre Au lieu de dire qu'elle n'a pas de pouvoir, on dit que les larmes sont son pouvoir. Ace propos Simone de Beauvoir a constate : {... ] Dans une lutte oil son insuffisance intellectuelle la condamne a etre vaincue a tous coups, la jeune femme n'a d'autres recours que le silence, ou les larmes, ou la violence {... )34 De ce qui precede, la femme a deux options extremes : elle doit recouvrir aux larmes ou a la violence au cas ou elle ne saurait comment se defendre. soti nari gongajol, osot nari boddho jol 34 BEAUVOIR S. de, Op. Cit., vol. II, p. 95. 98 (a) Soti3s =femme fidele, nari =femme, gongajoP6 = l'eau du fleuve Ganges, jol = l'eau, osot = infidele, nari = femme, boddhojol = l'eau stagnante. (b) La femme fidele pure comme l'eau de Gange, la femme infidele comme l'eau stagnante. (c) La vie d'une femme fidele est exemplaire pour la societe, en revanche, personne n'aime une femme infidele. (d) Ce proverbe a travers des phrases nominales juxtaposees, parle de deux categories de femmes. lei, on valorise la femme fidele et critique une femme non fidele de rester fidele a son marl. On demande indirectement a la femme a son marl et a son mariage. lei, au lieu de dire qu'une femme fidele est toujours appreciee, on la compare avec l'eau du fleuve Gange qui est consideree comme l'eau pure. On utilise traditionnellement l'eau de Gange pour la veneration des Dieux et pour des travaux sacres. Ainsi, une femme fidele est consideree comme une sainte. En revanche, une femme infidele est comparee avec l'eau stagnante. Alors, ici a l'aide d'une comparaison implicite, on insulte une femme infidele. Etudions des proverbes fran~s : 35. Ajille de 15 ans, ilfaut un homme de 30 -t Selon ce proverbe, une jeune fille doit a voir un partenaire age et mur pour la contr6ler. 35 36 "Soti" est un personage de la mythologie hindoue. Elle s'est tuee pour son mart. C'est un fleuve de l'Inde et cosidere comme un fleuve saint. 99 Apparemment, ce proverbe parle du mariage d'une jeune fille avec un homme age. Mais, si on reflechit bien, on trouve que on prononce ce proverbe pour dire implicitement qu'il est difficile de controler une jeune fill e. Voyons un autre proverbe franc;ais qui utilise la forme interrogative pour constater quelques chose de tres different : 36. La bonne mere ne dit pas, veux-tu ? ---+ D'apres ce proverbe, une bonne mere n'a pas besoin de demander si son enfant veut quelque chose, elle le lui donne tout simplement. C'est un proverbe en interrogation. lei, il s'agit d'une question dont on n'attend pas la reponse. Indirectement, on veut demontrer qu'une bonne mere ne demande aucune question avant de donner quelque chose a ses enfants. En franc;ais nous avons trouve plusieurs exemples des actes indirects sous forme d'une structure inpersonnelle. 2.2.1.1. Structures impersonnelles On appelle les verbes impersonnels, les verbes qui ne s'emploient qu'a la troisieme personne du singulier. Comme de nombreux verbes personnels en franc;ais peuvent aussi connaitre ce type de construction, on reunis parfois d'« unipersonnels >>, les uns et les autres sous !'appellation pour les distinguer des modes depourvus de marques personnelles egalement dits impersonnels. Qu'ils soient impersonnels ou construits impersonnellement, ces verbes sont toujours 100 precedes de la caracteristiques forme pronominale suivantes : sujet invariable, il qui aucune presente les admission de substitution, pronominale ou nominale, verification d'un verbe immediat et accord du verbe en personne et en nombre pour determiner le genre de l'attribut. n impersonnel n'a aucune des proprietes imperatives des sujets ordinaires et en particulier du pronom personnel il(s}, elle(s} dans ses emplois anaphoriques et deictiques. 3 7. Mieux vaut m.arier safille que d'avoir du chagrin par la suite - Selon ce proverbe, si les parents d'une fille veulent eviter des problemes dans leur vie. il faut qu'ils marient leur fille aussi tot que possible. lei, la fille est traitee comme un fardeau. Dans ce proverbe, au lieu de dire que la fille est un fardeau, on a ecrit « mieux vaut » marier sa fille. Le manque du sujet reel le rend un enonce impersonnel. Pourtant. ce proverbe donne un conseil aux. parents de fille de marier leur fille jeune. sinon ils auront des consequences tragiques plus tard. « 11 vaut mieux »est aussi une modalite qui exprime un jugement de valeur autrement dit, la subjectivite du locuteur mille. Voyons un autre proverbe de ce type: 38. n vaut mieux entendre un breuj parler qu'une fi.lle siffler - D'apres ce proverbe, on ne supporte pas une fille qui siffle et qui est mal elevee. 101 lei, au lieu de dire directement qu'on ne supporte pas une fille qui se comporte comme un gar~on, on utilise le verbe 'valoir' qui porte la meme valeur que 'falloir' : on oblige tout le monde d'accepter « un breuf parler » (chose impossible !) mais de ne pas tolerer une fille qui siffle (comme un gar~on ou homme). Ainsi, l'enonciation male peut meme accepter une action impossible mais non le sifflement d'une fille ! indirectement, on denonce les qualites << masculines 11 chez la femme. Voyons deux autres exemple~ avec I'expression<< il y a 11: 39. A lajemme comme ala barque, il y a toujours des reparations a faire Ou, --+ 40. Bateau etjemme, il y a toujours a refaire D'apres ces proverbes, une femme est comparable a un objet comme une barque ou un bateau, qui doit etre conduit tout le temps. Ces deux proverbes contiennent deux parties et dans les deux cas, les dernieres parties contiennent !'expression impersonnelle « il y a». lei, cette expression introduit une opinion negative au sujet de la femme. II nous parait important de mentionner ici que dans les deux cas, La femme est un consituant anime qui est compare avec un autre element inanime la barque. Par consequent, on peut facilement constater que ces proverbes nous apportent une comparaison misogyne en comparant la femme avec un objet. Puisqu'on ne sait pas quand on doit la reparer, on la degrade en comparant avec un objet trivial dans un ton ironique. Dans ce contexte, on a !'impression que le discours male oblige les parents ou le mari de « refaire la femme 11 d'apres les normes de la societe patriarcale. 102 De ce qui precede, nous degageons que les proverbes fram;ais s'emploient les tournures impersonnelles comme « il faut, il vaut mieux, etc. ,, pour renforcer l'idee de l'ordre et du conseil. La plupart des proverbes ayant des tournures impersonnelles attributives soulignent la subjectivite de la vision male. Celle-ci impose certaines regles de conduite sur la femme. Nous avons analyse jusqu'ici, dans cette partie, quarante proverbes au total parmi lesquels vingt-deux sont en fran~ais et dix-huit sont en bengali. Nous avons discute les indices de l'enonciation et les actes de langages. Nous avons divise les indices de l'enonciation en deux parties - les deictiques et les modalites. Nous avons examine les pronoms personnels et les divers temps utilises dans les proverbes. Notre analyse nous a revele que les proverbes utilisent frequemment un discours subjectif de la voix male. De plus, il existe peu d'actes de langage directs des locuteurs. On peut e:xpliquer ce point de vue des locuteurs comme une vue du monde partagee par les locuteurs d'une culture particuliere, en utilisant la langue comme un outil d'expression. R. M. Krauss exprime la meme idee : [...]a language reflects a world view shared by its speakers37 Ainsi, une langue represente la mentalite des gens d'une societe donnee, en d'autres mots, [... ] language [... ] represents the mass mind.3S 37 KRAUSS R.M. & C. Y. Chiu, Language and Social Behaviour. dans •Language and Social Behaviour•. Columbia University and the University of Hong Kong. 1993, p. 19. " [... ) une langue refl(~te la vue d'un monde partagee parses locuteurs,. 38 Ibid., p. 20. • [... ) une langue{ ... ] represente la mentalite des masses • 103 A l'aide de differents moyens lexicaux et syntaxiques, les modalites d'enonces annoncent uncertain degre de verite dans les proverbes ainsi que le jugement de valeur en mentionnant bon ou mauvais, vrai ou faux concernant la femme. A la lumiere des formes de phrases et de leur emploi, on peut facilement conclure que meme avec !'utilisation des elements grammaticaux, comme adjectifs et adverbes, les proverbes ne cessent pas de faire des commentaires de nature misogyne. Dans la plupart des cas, on observe que les proverbes donnent un jugement de valeur. Presque partout, on essaie de souligner le cote negatif de la femme. Nous avons degage que les pronoms personnels 'je' et 'tu' sont rarement employes au sein du discours proverbial. Meme s'ils sont employes, ils ont une valeur « generique ». La troisieme personne 'il' ou 'elle' ou 'on' est frequemment utilise au sein des proverbes fran~s. En utilisant Ia troisieme personne, le locuteur se debarrasse de lc;t responsabilite de sa parole. Curieusement, notis avons trouve plus d'emplois de 1e' au sein des proverbes bengalis. Ce 1e' est souvent une femme ou une fille ou une femme agee (proverbes numeros 1, 2, 3, 4) qui revele son mecontentement vis-a-vis sa position dans la societe. En bengali, ce 1e' revele le rapport d'une fille ou d'une femme avec son frere, avec sa belle-mere et aussi avec ses belles-soeurs, mais de tels cas ne sont pas visibles en fran~s. 11 est interessant de noter que nous n'avons pas trouve de proverbes fran~ais ou le 'je' represente la parole d'une feinme ou d'une fille. De meme, les pronoms 'nous' et 'vous' ne sont guere visibles dans le discours proverbial. Le 'tu' est utilise souvent pour s'adresser aux parents d'une fille. La plupart des conseils sont accordes aux parents 104 concernant le mariage de leur fille et le choix d'un bon mari pour elle. Par defmition, les pronoms ne designent que des referents humains. Nous inclut le locuteur et d'autres personnes (allocutaire(s) ou tierce(s) personne(s)) ; Vous designe le ou les allocutaires et peut inclure une tierce personne. Mais, on ne les trouve pas dans le cadre des proverbes. 11 faut noter que le seul proverbe fran~s ou on a trouve une trace de la premiere personne ne nous montre qu'une conversation courte entre la fille et sa mere concernant le but et les consequences du manage en general. Nous avons aussi degage que le «present» ne signifie pas le present d'enonciation. En fait, le present ala valeur atemporelle. 11 est employe pour raconter un conseil (proverbe numero 11, 14) ou une menace (proverbe numero 12, 13, 14). Quelque soit la valeur du present, le statut de la femme est marginalise. En efiet, les proverbes franc;ais et a ce « present » qui reste bengalis recourent beaucoup souvent implicite dans le cas des proverbes bengalis. Le present permet de construire un univers de definitions, de proprietes, de relations tout a fait etranger a la temporalite. Nous avons egalement degage que l'emploi du futur avec le pronom personnelje' est rare (un seul cas en proverbe bengali) (proverbe numero 21). De plus, le 'futur' n'annonce pas ici l'avenir mais associe avec !'interrogation, il annonce le refus (« ou resterai-je ? pas>>) emis par la deesse « » egale « je ne resterai lokkhi >>. Derriere cette negation, se degage toujours une morale concernant la parure ou le bonheur de la femme. Bien que la femme soit comparee a la deesse, sa place est defmie dans les quatre murs de la maison. 105 I1 existe plusieurs cas des emplois du 'futur' avec 'tu' dans les proverbes bengalis, pourtant, nous n'avons pas trouve de tels exemples en proverbes fran<;ais. En bengali, nous avons remarque qu'on utilise 'tu' + futur >>dans les proverbes pour donner toujours des conseils aux « parents d'une fille. La formule la plus employee est l'usage du futur avec la troisieme personne ('il' ou 'elle'). A travers ces formules, nous avons trouve Ia valeur d'une prediction: Ia plupart des proverbes en bengali et en fran<;ais relevant de ce type, annoncent le sort inevitable d'une femme (proverbes numeros 16, 17, 18, 20). Dans Ia partie sur Ia modalite, nous avons trouve des similarites ainsi que des differences entre les proverbes fran<;ais et bengalis. Nous avons trouve des proverbes employant des adjectifs pour parler de la beaute physique de la femme. En fran<;ais on utilise les termes comme « l'oeil bleu », « sourcil blond», « oreille petite» alors qu'en bengali, on parle des cheveux, du teint claire, des bracelets de conque ... Les adverbes refletent egalement Ia subjectivite male. Les modalites mettent en lumiere le point de vue sexiste du discours proverbial. La majorite des proverbes sont des actes de langage indirects. II est a remarquer que le discours proverbial n'accuse personne directement. La fa<;on de dire est a Ia fois subtile et satirique. Le proverbe « depersonnalise la situation et reduit d'autant les dangers d'affrontement et de defi a l'autorite »39 • Ainsi, cette depersonnalisation des proverbes libere l'enonciateur de toutes les responsabilites. C'est la raison pour laquelle la plupart des proverbes se presentent ala troisieme personne et emploient des tournures impersonnelles. Meme si on trouve des LABOY W., (1978). • Le sens commun •. dans Le parter ordinaire, Les Editions de minuit. Paris, p. 288. 39 106 proverbes en premiere ou en deuxieme personne impliquant la femme, celles-ci sont depourvues de tout pouvoir. Ce ne sont pas de veritables partenaires de l'enonciation. En fait, a travers toutes sortes d'elements linguistiques d'enonciation, le discours proverbial denonce la femme et la marginalise. 107