Théories Linguistiques et Syntaxe du Français LG017, 2e semestre 2002-2003
Nora Boneh, norab@mail.com Université Paris 7
http://lg017.free.fr
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Les constructions à copule
1. Bibliographie
Cardinaletti, A. & Guasti, M.T. 1998. Small Clauses, Syntax and Semantics 28.Academic Press.
Déchaine, R.M. 1993. Predicates accros categories. Thèse de Doctorat.
Higgins, F.R. 1973. The Pseudo-cleft construction in English.Thèse de Doctorat. MIT.
Moro, A. 1997. The raising of predicates.Cambridge University Press.
Rouveret, A. 1998. Être et Avoir : syntaxe, sémantique, typologie.Presses Universitaires de
Vincennes.
Ruwet, N. 1982. Grammaire des insultes et autres études.Seuil. Paris. Chapitre 4, 6.
2. Les phrases à copule
sujet = ce dont on parle
prédicat = ce que l’on en dit
(1) a. Jean est médecin D’’ être N’’
b. Jean est content D’’ être A’’
c. Jean est dans le jardin D’’ être P’’
(2) a. Jean est mon meilleur ami D’’ être D’’
b. Mon meilleur ami est Jean D’’ être D’’
c. Paris est la capitale de la France D’’ être D’’
d. La capitale de la France est Paris D’’ être D’’
(3) a. Cette femme est Marilyn Monroe D’’ être D’’
b. Marilyn Monroe est cette femme D’’ être D’’
(4) a. Le meilleur ami de Jean est le pire ennemi de Paul D’’ être D’’
b. Le pire ennemi de Paul est le meilleur ami de Jean D’’ être D’’
c. Marilyn Monroe est Norma Jean D’’ être D’’
d. Norma Jean est Marilyn Monroe D’’ être D’’
La différence entre les phrases en (1) et les phrases en (2-4) est que dans
celles en (1) on ne peut pas inverser l’ordre des constituants :
(1’) a’. *Médecin est Jean
b’. *Content est Jean
c’. *Dans le jardin est Jean
Pour Higgins (1973) les phrases en (1-4) se divisent de la manière suivante :
Phrases prédicationnelles : (1), (2a), (2c)
Phrases spécificationnelles : (2b), (2d)
Phrases identificationnelles : (3)
Phrases d’identité : (4)
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Est-ce que dans les phrases en (2-4) il n’y a pas de hiérarchie entre les
deux D’’ ? Est-ce qu’elles ont une structure plate (comme en (5a)) ?
(5) a. I’’ ou b. I’’
egi ei
D’’ D’’ D’’ I
ei
D’’
Pour les phrases en (2), on ne peut pas admettre une structure telle qu’en (5a),
vu les asymétries suivantes entre (2a/2c) et (2b/2d) :
A. Les clivées
(6) a. C’est Jean qui est mon meilleur ami
b. *C’est mon meilleur ami qu’est Jean
(7) a. C’est Paris qui est la capitale de la France
b. *C’est la capitale de la France qu’est Paris
B. Les interrogatifs
(8) a. Quel est ton meilleur ami ?
b. *Quel est Jean ?
(9) a. Quelle est la capitale de la france ?
b. *Quelle est Paris ?
C. ne … que
(10) a. Jean n’est que mon meilleur ami
b. *Mon meilleur ami n’est que Jean
(11) a. L’homme n’est que la plus noble conquête du chat
b. *La plus noble conquêt du chat n’est que l’homme
D. Remplacement de l’attribut par le pronom ‘le’
(12) a. Jean est très séduisant
b. Jean l’est, très séduisant
(13) a. Jean l’est, mon meilleur ami
b. *Mon meilleur ami l’est, Jean.
Ces tests montrent qu’il ne s’agit pas d’une structure plate, mais qu’il y a une
hiérarchie entre les deux D’’. Il ne sont pas interchangeable comme le suggèrent
les exemples en (2).
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Mais pour les phrases en (4), cette asymétrie n’est pas attestée :
A. Les clivées
(14) a. C’est le meilleur ami de Jean qui est le pire ennemi de Paul
b. C’est le pire ennemi de Paul qui est le meilleur ami de Jean
B. Les interrogatifs
(15) a. Quel est le meilleur ami de Jean ? - Le pire ennemi de Paul
b. Quel est le pire ennemi de Paul ? - Le meilleur ami de Jean
C. ne … que
(16) a. Le meilleur ami de Jean n’est que le pire ennemi de Paul
b. Le pire ennemi de Paul n’est que le meilleur ami de Jean
D. Remplacement de l’attribut par le pronom ‘le’
(17) a. *Le meilleur ami de Jean l’est, le pire ennemi de Paul
b. *Le pire ennemi de Paul l’est, le meilleur ami de Jean
3. Le verbe être
Mis à part la participation du verbe être dans des constructions prédicatives (1)-
(2) et des constructions d’identité (4), être peut désigner aussi lexistence :
(18) a. Dieu est
b. Je pense donc je suis
Il est employé aussi en tant que verbe auxiliaire :
(19) a. Jean est parti inaccusatifs
b. La pomme est mangée passifs
c. Jean s’est lavé pronominaux
Est-ce qu’il y a un point commun à tous ces emplois différents du verbe
être (identité, existence, prédication, auxiliaire) ?
3.1 Proposition
Le verbe être est le verbe intransitif par excellence.
Il sélectionne un seul constituant :
(20) être [X’ ]
Ce constituant peut être un D’’ comme dans les constructions existentielles en
(18), ou une Proposition Réduite (Small Clause).
(21) a. être [D’’ Dieu ]
b. être [PR Jean médecin/content/dans le jardin/mon meilleur ami]
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Les Propositions Réduites se trouvent dans les contextes suivants :
(22) a. Jean considère [Marie [A’’ intelligente]]
b. On pensait [Marie [P’contre la peine de mort]]
c. On supposait [Marie [N’’ professeur de lettres]]
Les phrases copulatives sont donc dérivées comme des phrases contenant un
verbe à montée :
(23) Marieisemble [ ticoupable]
(24) Marieiest [ticoupable]
3.1.1 Les verbes à montée
Le verbe sembler (verbe à montée) n’assigne pas de rôle thématique externe :
(25) a. Il semble que Jean travaille
b. Jeanisemble [titravailler]
En (25a), le D’Jean reçoit le rôle thématique Agent du verbe travailler,il reçoit le
cas Nominatif dans le spécificateur de I’’ de la partie enchâssée. Un il explétif
occupe la position spécificateur de I’’ principal.
En (25b), le D’Jean reçoit le rôle thématique Agent du verbe travailler, à défaut
d’assignateur de cas dans la partie enchâssée, le D’’ Jean se déplace dans la
position de spécificateur de I’’ de la partie principale. Le D’’ Jean n’a pas été
sélectionné directement par le verbe sembler.
L’agrammaticalité de (26b) est due à l’assignation d’un rôle non-approprié :
(26) a. Julie déplore la fin des vacances
b. *Ma brosse à dents déplore la fin des vacances
Cette agrammaticalité est préservée malgré la présence de sembler (27b), ce qui
confirme le statut neutre de sembler vu le fait qu’il n’assigne pas de rôle
thématique externe.
(27) a. Julie semble déplorer la fin des vacances
b. *Ma brosse à dents semble déplorer la fin des vacances
vs
c. Ma brosse à dents semble convenir pour nettoyer ces vieux objets
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3.2 Quelle position d’origine pour le verbe être : V° ou I° ?
oLe verbe être n’assigne pas de cas (ni accusatif, ni partitif).
oIl n’assigne pas de rôles thématiques – il sélectionne seulement un
constituant à sa droite.
oIl a toutes les propriétés morphologiques d’un verbe : flexion, forme à
l’infinitif, au subjonctif/conditionnel/impératif, formes de participe présent et
passé.
oMis à part des phrases comme (18) – être n’a pas de sens lexical. Les
phrases comme en (18) sont aussi assez rares à trouver.
oMais, selon le test distributionnel suivant, être peut bien se trouver en V°
(28a) :
(28) a. [V’’ Souvent être heureux] est une condition pour écrire des poèmes
b. Être souvent heureux est une condition pour écrire des poèmes
3.3 La fonction du verbe être
En français le temps morphologique sélectionne toujours la catégorie V’’
(Déchaine 1993). I° ne sélectionne pas directement A’’/N’’/P’’.
(29) a. Jean est heureux
b. *Jean heureux
Une langue à l’opposé du français de ce point de vue est le créole haïtien.
Au présent, on ne trouve pas de copule :
(30) a. Bouki kontan
Bouki content
'Bouki est content st médecin'
b. Bouki nan jaden an
Bouki dans jardin le
‘Bouki est dans le jardin’
c. Bouki doktè
Bouki médecin
‘Bouki est médecin’
Avec les prédicats verbaux, les valeurs temporelles sont calculées selon le type
du verbe :
(31) a. Pyè renmen chat mwen verbe d’état (statif) = présent
Pyè aime chat mon
‘Pyè aime mon chat’
b. Pyè vann bèf yo verbe d’événement = pas
Pyè vend bétail le
‘Pyè a vendu le bétail’
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