
de mens rea. Selon le libellé actuel du paragraphe, un praticien qui satisfait à l’élément
d’actus reus (le fait de fournir l’aide médicale à mourir sans « la connaissance, les soins et
l’habileté raisonnables »), mais ne le fait pas avec un quelconque élément de mens rea
(comme l’intention, la connaissance, l’insouciance déréglée ou téméraire) ne sera pas visé
par l’une ou l’autre des exemptions. Il s’agit d’un seuil de culpabilité beaucoup plus faible
que celui que le paragraphe 219(1) établit pour la négligence criminelle, qui exige l’élément
de mens rea suivant, soit une « insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de
la sécurité d’autrui ». Il convient de souligner que nulle part ailleurs dans le Code criminel un
manquement à une norme de soins (c.-à-d. agir sans « la connaissance, les soins et
l’habileté raisonnables ») ne donne lieu à une infraction criminelle.
En outre, cette disposition rend l’exemption conditionnelle à l’observation d’exigences
inconnues et mal définies : les lois et normes provinciales n’ont pas encore été promulguées
et le terme « règle » n’a pas de signification juridique. Toutes les exigences provinciales
sont aussi incorporées par renvoi sans égard à leur importance, alors que certaines
exigences pourraient être simplement de nature administrative. Le fait d’associer une
conséquence criminelle à un manquement à la norme pourrait dissuader des autorités
réglementaires d’adopter des normes, voire de prendre des mesures destinées à améliorer
les soins et la sécurité du patient dans ce domaine.
Il serait tout à fait injustifié d’importer des notions civiles ou réglementaires à titre de
fondement d’une conduite criminelle. L’exigence d’agir avec la connaissance, les soins et
l’habileté raisonnables est une norme civile et réglementaire qui s’accompagne déjà de
conséquences civiles et réglementaires. Pour les raisons susmentionnées, le
paragraphe 241.2(7) devrait être entièrement supprimé.
b) L’exigence qu’un praticien soit convaincu que la demande d’aide médicale à mourir
est signée et datée devant deux témoins indépendants [alinéa 241.2(3)c)] : La définition
de « témoin indépendant » est fournie au paragraphe 241.2(5), mais en pratique, un
médecin ou une infirmière praticienne n’est pas à même de déterminer si ces conditions
sont remplies. Il conviendrait de supprimer le mot « indépendant » de ce paragraphe et de
faire supporter aux témoins la responsabilité de toute fausse déclaration concernant leur
indépendance. Il est important de souligner qu’aux termes des alinéas 241.2(3)a) et
241.2(1)d), le médecin ou l’infirmière praticienne est déjà tenu d’établir que la demande est
« volontaire » et « sans pressions extérieures ».
c) L’exigence qu’il n’existe pas de « relation d’affaires » entre les praticiens qui
prodiguent l’aide médicale à mourir et les praticiens qui donnent l’avis prévu à
l’alinéa 241(3)e) [alinéa 241.2(6)a)] : L’interdiction de toute forme de « relation d’affaires »,
sans fournir de définition, sera une source d’incertitude. Par exemple, l’existence
d’aiguillages réguliers serait-elle considérée comme une « relation d’affaires »? Une relation
de collaboration entre une infirmière praticienne et un médecin serait-elle considérée
comme une « relation d’affaires »?
Si l’intention de l’alinéa 241.2(6)a) est d’éviter la participation de praticiens lorsqu’ils
travaillent dans une société en nom collectif ou à d’autres titres dans la même clinique, cette
intention devrait être explicitement stipulée. À notre avis, une définition plus large d’une
relation d’affaires créerait aussi des obstacles à l’accès, en particulier dans les régions
rurales où les praticiens doivent régulièrement collaborer.