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Mémoire d’Histoire Militaire
Brénod et la Seconde Guerre mondiale
Rédigé par l’aspirant Carrez
Promotion Général Brocard
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Droit de réserve
Ce document a été réalisé dans un but de transmission de mémoire. Il est le fruit de la
collecte de témoignages de personnes originaires du village encore en vie et ayant vécu la
Seconde Guerre mondiale à Brénod. Ce récit ne fait que traduire leurs paroles. J’ai, dans la
mesure du possible, recherché la cohérence dans les témoignages et essayé de les rapprocher,
quand cela était possible, avec des faits officiellement établis. J’ai volontairement omis
certains faits n’ayant pu vérifier leur véracité.
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Introduction
Le Seconde Guerre mondiale a été la guerre la plus meurtrière de l’histoire de
l’humanité. Ce conflit a laissé des traces profondes dans les mémoires car au-delà de la guerre
« conventionnelle », elle fut une période noire pour le genre humain. En effet, de nombreux
actes de barbarie ont été perpétrés contre les populations civiles. La folie nazie s’est déchaînée
et son idéologie l’a poussé à appliquer, comme tout le monde le sait, la solution finale ; la
logique d’extermination des juifs et de toutes les « races » qui n’étaient pas dignes de vivre
dans le Reich. Pour cela les camps d’extermination ont été créés et la machine infernale s’est
mise en route. Cependant, l’ampleur de cette tragédie et le nombre de victimes ont fait oublier
les autres camps : les camps de concentration, destinés à la détention des opposants politiques,
des résistants ou tout simplement d’innocents pris en otage. C’est de cette dernière catégorie
que nous allons traiter.
En effet, le village de Brénod de l’Ain dont est originaire ma famille maternelle a subi
des rafles de civils innocents en représailles de la présence de maquis dans la région. Trois
membres de ma famille ont été déportés et un seul est revenu marqué à tout jamais par cette
détention oh combien traumatisante. Mon grand père et d’autres membres du village
racontent, toujours, 65 ans après, l’histoire tragique de la rafle du 6 février 1944. 34 personnes
furent déportées, 15 ne revinrent jamais. Le village ne comptait alors que 500 habitants et
ceux qui partirent faisaient partie de la tranche active des 18-40 ans. Certes, devant le nombre
de morts dans certaines régions de la France, cela semble peu mais pour une commune rurale,
le choc psychologique fut énorme et il est encore perceptible 65 ans après dans les mémoires.
Ce récit raconte l’histoire de ces évènements du point de vue de mon grand père qui
l’a vécu alors qu’il n’était âgé que de 16 ans. Ce récit est très spontané et rempli d’anecdotes
sur la situation ce qui rend plus vivant ces témoignages et montre le choc engendré.
Localisation du village
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Le contexte de la guerre
Pour comprendre pourquoi l’impact sur la population est si important, il nous faut
expliquer comment la Seconde Guerre mondiale est perçue avant la rafle du 6 février 1944.
Comme on le sait, la Seconde Guerre mondiale débute en septembre 1939. L’ordre de
mobilisation entraîne des bergnolands1 sous les drapeaux. Ainsi, le village de 500 habitants
perd déjà de sa population active.
En 1940, au mois de juin, c’est la débâcle pour les troupes françaises et c’est aussi les
premières incertitudes pour les familles des soldats. En effet quand la France signe l’armistice
les proches de soldat n’ont alors aucune nouvelle. Le village de Brénod se retrouve alors en
zone libre et les premiers soldats démobilisés rentrent dans leurs foyers. Peu de temps après,
les premières lettres des prisonniers de guerre parviennent et les familles sont ainsi fixées.
Quinze hommes resteront prisonniers en Allemagne durant le conflit, ils sont dans des zones
rurales semblables à Brénod, ils sont bien traités, peuvent recevoir et envoyer du courrier.
Deux ne reviendront jamais. Cependant on voit la cruauté de l’Histoire dans une famille, une
mère (grande-tante de mon grand père) qui a déjà perdu son mari durant la Première Guerre
mondiale voit ses deux fils prisonniers de guerre et doit alors assumer seule sa ferme.
Passé le choc de la défaite et de l’instauration du régime de Vichy, le village ne subit
pas les stigmates de la guerre. Il va accueillir en 1941 les chantiers de jeunesse qui remplacent
sous le régime de Vichy l’année de conscription et sont appelés aussi l’armée de l’armistice.
Le camp de Brénod comptera près de 200 jeunes. Le camp dépend du centre de Jujurieux à
une vingtaine de kilomètres. Les jeunes sont « blanchis » et portent tous la même tenue. Ils
marchent au pas et montent les couleurs. A Brénod, ils font du bucheronnage et débitent du
bois pour faire du charbon de bois qui sera utilisé
dans les gazogènes.
En 1942, le débarquement des Alliés en
Afrique du Nord va déclencher l’occupation
complète de la France. Ainsi Brénod voit passer
des convois de blindés allemands dans ses rues.
C’est le premier contact avec les troupes du
Reich.
L’occupation complète de la France va provoquer la chute du régime de Vichy. Ainsi,
l’Allemagne prend le contrôle et va alors instaurer le STO2. Les jeunes Français de 20 ans
sont envoyés en Allemagne pour travailler dans des usines. Entrainant la fin des chantiers de
jeunesse.
Cependant l’instauration du STO va provoquer un refus des jeunes Français d’aller en
Allemagne. La seule solution pour eux est alors de prendre la fuite et de se cacher pour éviter
les arrestations par les gendarmes. A Brénod il existait déjà de petits foyers de résistants. Ces
hommes se cachaient et faisaient des « coups de mains » dans les chantiers de jeunesse pour
se ravitailler. Le STO va générer un afflux massif de jeunes volontaires. La Résistance est
alors composée de nombreux jeunes et d’anciens officiers de l’ancienne armée française. De
plus elle compte dans ses rangs des « locaux » et une grande majorité de personnes du
département. En effet, le plateau d’Hauteville-Brénod va accueillir des foyers de résistants car
la région est montagneuse et il existe de nombreuses fermes isolées pour se cacher. A Brénod
1 Habitants de Brenod
2 Service du Travail Obligatoire
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et dans les environs, ils s’installent secrètement dans les fermes du Pré Guy, de Pré de Joux,
du Molard et de Retord.
La Résistance est mal équipée et manque cruellement de ravitaillement. Au départ, elle
prend pour cibles les camps de jeunesse puis après leur dissolution s’attaquent aux
commerces. Les maquis manquent de tout : armement, nourriture, carburant mais vont
toutefois s’organiser comme une armée ; ce n’est pas pour rien qu’ils s’appelleront l’armée
secrète. Des brigades et des groupes s’instaurent. Cependant il y a déjà des rivalités entre les
FTP : Francs Tireurs Partisans et l’armée secrète. Les maquis, une fois organisés, vont alors
commencer à recevoir le soutien des Alliés grâce aux parachutages et devenir de plus en plus
confiants. Ainsi, le 11 novembre 1943, ils défileront même en ordre dans la ville d’Oyonnax
où ils déposeront une gerbe à la mémoire des victimes de la Première Guerre mondiale.
Toutefois comme on l’a dit, la Résistance comporte des personnes de tous horizons et
inévitablement il y a des espions en son sein qui seront responsables de la mort de
nombreuses personnes comme nous allons le voir.
Le secteur de Brénod va devenir le lieu de rassemblement de nombreux maquis et va
aussi accueillir le PC départemental dans la ferme du Molard. Les habitants se doutent de
quelque chose mais leur seul contact avec la guerre sont les passages d’avions alliés qui
partent bombarder de nuit l’Italie et le bruit de ces avions restera longtemps dans les
mémoires.
Carte représentant les maquis dans le département de l’Ain
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