DOSSIER DE PRESSE Projet de loi de bioéthique Un triple enjeu humanitaire, sanitaire et social Examen en 1ère lecture par le Sénat 7 avril 2011 www.adv.org Contact presse : Ségolène du Closel 06 14 20 42 38 Sommaire Synthèse des demandes aux sénateurs page 3 Analyse du projet de loi et propositions de l’Alliance page 5 L’assistance médicale à la procréation page 6 La recherche sur l’embryon et les embryons surnuméraires page 13 Le dépistage anténatal du handicap page 17 Annexe : la gestation pour autrui, une tentation à proscrire page 20 2 Synthèse des demandes aux sénateurs Engagée dans l’accompagnement des souffrances humaines profondes que sont l’infertilité, le handicap, la maladie, l’Alliance pour les Droits de la Vie est favorable à tout ce qui contribue à soigner, guérir et soulager. Une seule condition doit être posée : le respect de la vie et de la dignité de tout être humain, critère essentiel des choix éthiques de notre société. Afin d’aboutir à un texte de loi rééquilibré, davantage respectueux de l’éthique de la recherche, des droits de l’enfant et des êtres humains contre toute forme d’instrumentalisation et de discrimination, l’Alliance encourage solennellement les sénateurs à rectifier la loi bioéthique. I - L’Alliance pour les Droits de la Vie demande une vigilance particulière des sénateurs sur 3 points : 1. Assistance médicale à la procréation : garantir les droits de l’enfant - En supprimant l’exigence de deux ans de vie commune pour les couples non mariés revendiquant les techniques artificielles de procréation, le texte avance sans le dire vers un « droit à l’enfant ». La procréation artificielle serait incitée dans un cadre parental peu stable, contraire à l’intérêt de l’enfant. - En incitant davantage au don anonyme de gamètes, y compris pour des donneurs qui n’ont pas encore procréé, le texte méconnait le droit des enfants à connaître leur origine biologique. Pour l’Alliance, ces deux évolutions méritent d’être remises en cause, au nom du respect de l’intérêt des enfants. 2. Recherche médicale : respecter l’embryon - En remplaçant le critère de « progrès thérapeutique» par celui de «progrès médical » et en supprimant tout délai pour ces exceptions, le texte étend sans véritable limite les dérogations à l’interdit de la recherche sur l’embryon. L’embryon serait plus que jamais livré aux chercheurs comme un simple matériau de laboratoire, alors que ces recherches n’ont aujourd’hui abouti à aucun progrès thérapeutique. - Les dispositions du projet de loi visent à développer, dans un cadre solidaire, le recueil de sang de cordon et placentaire qui est, par ailleurs, l’alternative éthique à la pratique controversée du double DPI (ou « bébé-médicament »). Hostile à toute recherche ou expérimentation qui détruit l’embryon humain, l’Alliance demande que soient remise en cause l’extension des dérogations à l’interdit de la recherche sur l’embryon et la pratique du double DPI qui conduit à instrumentaliser l’enfant à naître et a un coût important en embryons humains. 3 3. Diagnostic prénatal : protéger les plus vulnérables - En prévoyant la systématisation du dépistage prénatal du handicap à toutes les femmes sans apporter de propositions thérapeutiques avant la naissance, les grossesses sont rendues anxiogènes, et c’est l’avortement encore plus systématique du fœtus porteur de handicap qui se profile insidieusement. La nouvelle pression légale pesant sur les médecins ferait basculer la France vers un eugénisme « compassionnel » organisé par l’Etat. L’Alliance est favorable à la liberté de prescription du médecin, en matière de Diagnostic prénatal et à la juste information des familles qui ne réduise à son handicap un être humain sur lequel on décèle une anomalie, et qui envisage aussi les aides qui pourront soutenir sa famille dans son épreuve. II- Si le projet de loi n’a pas cédé à la surenchère sur 3 points importants, l’Alliance appelle les sénateurs à confirmer ces interdits garants de la dignité humaine. 1. La gestation pour autrui (ou mères porteuses). Contraire au droit de l’enfant de ne pas subir une « maternité éclatée » et au principe de non marchandisation du corps de la femme, elle doit demeurer interdite. 2. La procréation artificielle pour les personnes homosexuelles. Contraire à l’intérêt de l’enfant qui ne doit pas être délibérément conçu en étant privé d’un père ou d’une mère, elle doit demeurer interdite. D’autant que, par principe, l’Assistance médicale à la procréation est réservée aux couples ayant des problèmes d’infertilité médicalement constatés. 3. L’autorisation explicite de la recherche sur l’embryon. Symbolique, le maintien de l’interdiction manifeste que la recherche sur l’embryon humain est une transgression, car l’embryon humain n’est ni une chose, ni un animal. Même si les dérogations élargies tendent à ruiner la portée de l’interdit, son maintien reste un acquis symbolique à préserver. 4 Analyse du projet de loi et propositions de l’Alliance 5 L’assistance médicale à la procréation (AMP) 1. Contexte général Les techniques artificielles de procréation se sont développées dès les années 1970 en premier lieu, avec l’insémination artificielle. La première fécondation in vitro (FIV) a été réalisée en Grande Bretagne en 1978 par le biologiste Robert Edwards, qui a reçu en octobre 2010 le prix Nobel de médecine, et par le gynécologue Patrick Steptoe en 1978. Elle a donné naissance à Louise Brown. En France, ce sont le biologiste Jacques Testart et le gynécologue René Frydman qui réalisèrent la première fécondation in vitro en 1982 donnant naissance à Amandine. La première loi bioéthique de 1994 a donné un cadre à ces techniques. 2. Législation actuelle L'assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à la demande d'un couple, afin de : - remédier à l'infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué ; - éviter la transmission à l'enfant d'une maladie d'une particulière gravité. Le couple doit être formé d’un homme et d’une femme, marié ou en mesure d'apporter la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans pour les concubins. Les deux membres du couple doivent être vivants et consentants, en âge de procréer. L’AMP est remboursée aujourd’hui jusqu’à 43 ans pour les femmes. La France a fait le choix dès 1994 d’autoriser la production d’embryons en nombre supérieur à ceux qui seraient réellement transférés et de congeler les embryons surnuméraires pendant un délai de cinq ans. La loi de 1994 a également autorisé l’insémination ou la fécondation in vitro avec donneur (de sperme ou d’ovocyte) en retenant le principe d’anonymat du donneur et la gratuité du don. 10 enfants peuvent naître d’un même donneur. La France interdit le double don (sperme et ovocyte). 3. Quelques chiffres En 20081, 20 136 enfants sont nés en France par assistance médicale à la procréation (AMP), 70% par FIV et 30% par insémination. - 14 115 enfants issus de la fécondation in vitro (FIV) et 6 021 enfants conçus à la suite d'une insémination artificielle. Parmi eux, - 1 200 enfants ont été conçus avec donneur de gamète (dont 87% par don de sperme). - 16 enfants sont nés de dons d’embryons à d’autres couples. L’ICSI, technique qui consiste à injecter un seul spermatozoïde dans le cytoplasme de l'ovocyte (directement à l'intérieur de l'ovule), en cas de stérilités masculines, représente 54% des FIV en France. - 200 000 enfants sont nés par FIV depuis 20 ans2 en France et 50 000 environ avec donneurs. 1 Chiffres les plus récents fournis par l’Agence de biomédecine www.agence-biomedecine.fr - Rapport d’activité de l’Agence de biomédecine 2009 publié en août 2010 2 Ined - Population et Société n°451 6 4. Principales questions éthiques posées 4-1 La conception d’embryons surnuméraires et leur congélation Pour la seule année 20073, 278 505 embryons ont été conçus pour donner naissance aux 14 487 enfants nés par FIV, soit 19 embryons pour une naissance. 149 1914 embryons sont conservés congelés dont 34% sans projet parental. Les parents sont placés devant des choix difficiles sur le devenir de leurs embryons. « Ce stock d’embryons [a] rapidement suscité une interrogation profonde sur leur statut ontologique et juridique » souligne Jean-René Binet5, maitre de conférence à la faculté de Droit de Besançon. Suspension du temps « La congélation des embryons peut poser des problèmes aux couples dans la mesure où elle a d’une certaine manière pour effet de suspendre le temps, entre la conception et la venue au monde éventuelle mais aussi de les placer devant un choix difficile. »6 Inversion de l’ordre des générations « Ce procédé arrête le temps, peut inverser l’ordre des générations, oblige les gens à une gymnastique bizarre, comprendre que deux « jumeaux » par exemple naissent avec cinq ans d’écart… C’est pourquoi il faudrait selon [la psychiatre Genevève Delaisi de Parceval] limiter le plus possible la congélation d‘embryons surnuméraires. »7 Les médias rapportaient le 13 octobre 20108 une histoire parue dans le Daily mail : une femme de 42 ans vivant aux Etats-Unis a donné naissance à un enfant en mai 2010, issu d’un embryon congelé depuis 20 ans, donné à l’adoption par un autre couple : « Biologiquement, ce bébé est le frère de l'enfant de ce couple (…), même s'ils sont nés à 20 ans d'écart» indiquait l’article. Des parents en souffrance sur le sort de leurs embryons «De plus en plus de parents n'arrivent pas à se prononcer. C'est difficile, il s'agit du sort des frères et sœurs potentiels de leur enfant. La responsabilité d'une telle décision est trop lourde, ils préfèrent la laisser aux Cecos. »9 Pierre Boyer, biologiste au service de médecine et de biologie de la reproduction de l’hôpital Saint-Joseph de Marseille, auditionné le 10 juin 2009, par la mission d’information parlementaire de révision des lois de bioéthique, a évoqué une étude réalisée par le Dr. Adjiman, dont il ressort que « la moitié des femmes objets de l’étude éprouve un sentiment d’abandon d’enfant lorsque les embryons congelés ne sont pas implantés. » 3 Bilan des activités de procréation et génétique humaines en France 2007 Rapport d’activité de l’Agence de biomédecine 2009 www.agence-biomedecine.fr 5 Rapport d’information de la mission parlementaire sur la révision des lois de bioéthique - 20 janvier 2010 p.80 - Audition du 13 mai 2009. 6 Rapport d’information de la mission parlementaire sur la révision des lois de bioéthique - 20 janvier 2010 p 80-81 7 Rapport d’information de la mission parlementaire sur la révision des lois de bioéthique - 20 janvier 2010 p 81- Audition de G. Delaisi de Parceval – psychiatre 8 Voir www.Slate.fr 9 Dr Jean-Marie Kunstmann interrogé par le Figaro - 12 mai 2009 4 7 Des pays ont fait le choix de ne pas congeler des embryons En Allemagne notamment les embryons conçus le sont en vue d’une réimplantation sans congélation. « J’observe que d’autres pays où, comme en Allemagne, on n’autorise pas la production d’embryons surnuméraires et où on utilise cette technique, les choses ne se passent pas si mal. » 10 4-2 Le manque de données épidémiologiques sur l’infertilité et le recours à l’AMP Il semblerait que l’infertilité se soit développée ces dernières années. D’après l’agence de biomédecine11 1 couple sur 7 consulte et 1 sur 10 poursuit des traitements pour remédier à son infertilité. Si l’AMP donne de l’espoir à des couples, le parcours est néanmoins contraignant. Il convient de s’interroger sur les causes de l’explosion de l’infertilité dans notre pays. D’après une étude12 conduite en 2008 par les épidémiologistes et démographes Henri Léridon et Rémy Slama pour l’Inserm, en un demi-siècle, la densité des spermatozoïdes aurait diminué de moitié chez les Occidentaux. Les scientifiques attribuent la croissance de l’infertilité à des facteurs environnementaux (pesticides et pollution) ou aux modes de vie (tabagisme, sédentarité, etc.). Cause aggravante, l’augmentation de l’âge maternel au premier enfant qui franchira bientôt, en France, la barre des trente ans13 ; leurs hypothèses vont jusqu’à envisager qu’un couple sur cinq serait à terme concerné par la stérilité, contre un sur dix actuellement. Le Syndicat des gynécologues obstétriciens (Syngof) s’alarme du retard de l’âge de la maternité qui contribue au recours à l’AMP alors qu’il aurait pu être évité par des naissances plus précoces. Un ensemble d’études (projet « Fecond ») est en cours, conduit par des unités mixtes Inserm-Ined, notamment une approche socio-épidémiologique de l’infertilité. Dans la présentation du projet, il est indiqué qu’« une définition médicale de l’infécondité mène probablement à sous-estimer largement l’ampleur du phénomène social d’infécondité dans la population française. En effet, dès 1991, Henri Leridon [Ined] suggérait une «impatience» des femmes qui vivraient des délais de recherche de grossesse inférieurs à un an comme un problème d’infécondité. Cette «impatience» pourrait être particulièrement nette en France où l’on observe à la fois une forte médicalisation de la vie reproductive et une forte norme parentale liée au niveau « élevé» de la fécondité française. »14 10 Rapport d’information de la - mission parlementaire d’information sur la révision des lois de bioéthique - 20 janvier 2010 p 83 - citant Jean-René Binet, maître de conférence à la faculté de droit de Besançon - Audition du 13 mai 2009. 11 Dossier de presse L’assistance médicale à la procréation en 2010 - mars 2010 12 Etude parue dans Human Reproduction - avril 2008 13 Cette barrière a été franchie en 2009 avec un âge moyen de 30 ans pour la première maternité. 14 Note détaillée du projet sur www.ined.fr 8 4-3 Des techniques contraignantes physiquement et psychologiquement Des couples témoignent de la lourdeur de ces techniques physiques et morales qui laissent près de la moitié de ceux qui y ont recours sans enfant et retarde bien souvent les démarches d’adoption. Les Cahiers de l’Ined n°161 De la pilule au bébé éprouvette parlent de ce « parcours du combattant » : « L’importante extension des méthodes médicales d’assistance à la procréation ne doit cependant pas faire oublier les difficultés de ce parcours médical, souvent qualifié de « parcours du combattant». Ainsi, la journaliste Brigitte-Fanny Cohen témoigne de sa propre expérience dans son livre, Un bébé mais pas à tout prix. Les dessous de la médecine de la reproduction : « Et je crois qu’il [son mari] n’en peut plus d’aller se masturber dans un placard à balai. Il ne dit rien mais il va craquer. Et moi, je ne supporte plus l’idée de faire un bébé avec du sperme. Car depuis longtemps je n’ai plus le sentiment de faire un bébé avec mon mari. L’homme, dans la FIV, est réduit à l’état de sperme. Il donne ses spermatozoïdes. Un point, c’est tout. […] À tel point que j’ai parfois l’impression étrange et désagréable de fabriquer un bébé avec le médecin plutôt qu’avec mon compagnon. La femme, le sperme du mari et le gynécologue : voilà la nouvelle sainte trinité. » (Cohen, 2001, p. 97) 4-4 Des conséquences mal connues sur les enfants conçus par AMP Malgré leur succès, ces techniques d'assistance médicale à la procréation soulèvent de nouvelles questions, notamment, des conséquences pour la santé et le développement des enfants ainsi conçus. Plus globalement, des interrogations se font jour sur les conséquences pour la santé de l'enfant des conditions ayant entouré sa conception et sa gestation. Des programmes de recherche ont été mis en place depuis 2008 à l’Inserm sur ce sujet : actuellement, le programme de recherche15 de l'équipe "Epidémiologie de la reproduction et du développement de l'enfant" a deux axes principaux : l'épidémiologie de la reproduction humaine et l'épidémiologie pédiatrique. Tout en ayant leurs développements propres, ces deux axes sont aussi fortement liés. D'une part, les traitements de l'infertilité, et de façon plus générale les événements périnataux peuvent avoir des conséquences sur la santé ultérieure des enfants. D'autre part, certaines pathologies des enfants peuvent avoir des conséquences sur leur fertilité ultérieure. 25% de la grande prématurité est liée à l’AMP et des études commencent à montrer que la prévalence de handicap est supérieure chez les enfants nés de ces modes de procréation par rapport à des conceptions naturelles. Le psychiatre Stéphane Clerget, dans son livre Quel âge aurait-il ? Le tabou des grossesses interrompues fait état de risques de ces modes de conception sur la psychologie de l’enfant : « L’enfant né de PMA a une histoire prénatale qui est un véritable parcours du combattant, et il nait sur un champ de bataille embryonnaire (…) Cela survient quand le futur enfant à naître n’a pas conscience de soi, et l’on ignore aujourd’hui le véritable impact de ces aventures embryonnaires sur sa destinée. Cependant, les parents ont en tête la biographie conceptionnelle de leur enfant. Et ils lui transmettent, souvent à leur insu (…) ». 15 Inserm Unité 822 http://www.u822.idf.inserm.fr/page.asp?page=3529 9 4-5 Le don de gamète prive délibérément du lien biologique Les gamètes : des cellules spécifiques et uniques Ovule ou spermatozoïde, les cellules sexuelles ont la particularité de pouvoir fusionner lors de la fécondation, pour former un zygote, embryon de quelques cellules. Les cellules du corps humain possèdent 23 paires de chromosomes, soit 46 chromosomes. Les gamètes, eux, n'en possèdent que 23, c'est-à-dire un seul membre de chaque paire de chromosomes. Ils sont porteurs des caractéristiques génétiques de leurs auteurs transmises à l’embryon de manière unique. Le don de gamète a une portée physique mais aussi symbolique car sont transmises des données biologiques du donneur. La parenté et la filiation comportent, à côté des dimensions affective et sociale, une dimension biologique portée par les caractéristiques de ces cellules. C’est ce qui différencie ce don destiné à donner la vie, d’un don d’organe ou d’éléments du corps humains tel le sang visant à réparer un organe du corps d’une personne existante ou à soigner une maladie. Des troubles identitaires pour les enfants nés de dons Depuis quelques années, des enfants nés par insémination ou FIV avec donneur maintenant majeurs, regroupés pour certains dans l’association PMA (Procréation Médicalement Anonyme) font part de leur revendication d’avoir accès à leurs origines. Un des porte-parole de ce courant est Arthur Kermalvezen, auteur du livre Né de spermatozoïde inconnu. La charte de cette association constate que « En votant la loi de bioéthique de 1994 qui impose l'anonymat des donneurs, la France a fait à nouveau alliance avec le secret et le mensonge : cette loi supprime définitivement pour l'enfant toute chance d'avoir un accès à ses origines. Aujourd’hui, c’est le désir égoïste des adultes qu’on sacralise. Notre société prône le "droit à l’enfant" tout en ne se souciant pas de son bien-être. Légaliser l'anonymat des donneurs ajoute à la rupture de filiation, le poids d'un secret. Qui peut prétendre qu’il est préférable pour un enfant à naître qu’il ne connaisse jamais ses origines ? Qui peut refuser à un être humain de savoir d’où il vient ? La filiation est multiple : sociale, affective, charnelle et biologique. Force est de constater que seuls ceux qui connaissent leurs origines biologiques nient cette réalité. Le choix de savoir ou celui d'ignorer ses origines n’appartient qu’au principal intéressé : l’enfant. ». Les promoteurs du maintien de l’anonymat invoque le primat du lien affectif et social sur le lien biologique et redoute une baisse du nombre de donneurs. Paradoxalement, ces troubles identitaires sont à l’origine de l’évolution du droit en matière d’accouchement anonyme et d’adoption. Une mission parlementaire conduite par la députée UMP Brigitte Barèges a rendu un rapport en janvier 2011 préconisant la suppression de l’accouchement anonyme et la possibilité pour des enfants majeurs d’avoir accès aux données identifiantes de leur mère biologique. Pourtant les problématiques se posent différemment : dans un cas l’absence de parenté biologique et l’anonymat sont décidés délibérément, dans l’autre il s’agit de trouver la solution la moins mauvaise possible pour pallier une détresse ou un accident de vie pour des femmes qui ne peuvent garder l’enfant qu’elles attendent. Les femmes sont aujourd’hui incitées à laisser le plus de données non identifiantes possible concernant le père ou elle-même et à lever l’anonymat à tout moment. 10 Des risques psychologiques et sanitaires pour le donneur Le don de gamètes a été autorisé, dès 1994, dans des conditions strictes : les donneurs doivent être âgés de moins de 45 ans (moins de 36 ans pour les femmes), vivre en couple et avoir au moins un enfant. Le donneur doit obtenir le consentement de son conjoint. Ont été écartés les donneurs qui n’avaient pas procréé pour permettre les conditions de l'expression d'un consentement libre et éclairé. Les donneurs qui n’ont pas été confrontés à la parentalité peuvent ne pas réaliser la portée de ce don. Les conséquences psychologiques peuvent aller de la préoccupation jusqu'au fantasme nourri à propos des enfants issus du don, notamment lorsque le donneur n'aura pas eu d'autres enfants. S’agissant particulièrement des femmes, Jacqueline Mendelbaum16 pense que « On ne peut négliger les risques, même faibles, que la ponction d’ovocytes et les traitement afférents font peser sur la fécondité de la donneuse. Il y a aussi le risque encouru par ces femmes si d’aventure elles n’avaient pas d’enfant par la suite ». La ponction ovocytaire et les traitements associés présentent en effet des risques médicaux17 pour les femmes. Ces risques peuvent être liés à la stimulation ovarienne syndrome d’hyperstimulation, accidents thromboemboliques…-, à l’anesthésie, à la ponction elle-même - hémorragie, infections- ou encore à des complications par blessure d’un organe intrapéritonéal. Dispositions contenues dans le projet de loi adopté en 1ère lecture par l’Assemblée nationale. - L’accès à l’AMP est autorisé aux couples non mariés sans attendre deux ans de vie commune. - Le don de gamète par des hommes et des femmes n’ayant pas encore procréé est autorisé. - Le transfert d’embryon après le décès du père, si celui-ci a donné son consentement préalable, est possible sous certaines conditions. - L’anonymat du don de gamète est maintenu contrairement à la proposition initiale du projet de loi. - La gestation pour autrui (ou système des mères porteuses) demeure interdite. - L’élargissement d’un droit à l’AMP pour des personnes célibataires ou homosexuelles n’ayant pas de problème médical d’infertilité est écarté. 5. La position de l’Alliance sur l’AMP Favorable aux véritables thérapies contre la stérilité ou l’infertilité, l’Alliance pour les Droits de la Vie est très réservée sur la réalité actuelle de ce que l’on nomme Assistance médicale à la procréation (AMP) : elle conteste particulièrement les pratiques qui comportent la destruction d’embryons, ou quand elles privent par avance l’enfant ainsi conçu de son père ou de sa mère biologiques. Auditionnée le 11 mars 2009 par la mission d’information sur la révision des lois de bioéthique Risques de la stimulation ovarienne et du prélèvement ovocytaire Gynécologie Obstétrique et fertilité – novembre 2009. P. Merviel a, R. Cabry b, V. Boulard b, E. Lourdel a, M.-F. Oliéric a, C. Claeys a, P. Demailly b, A. Devaux b, H. Copin b 16 17 11 6. Propositions de l’Alliance concernant l’AMP Arrêter la congélation d’embryons humains. Le stock de 149 191 embryons congelés vivants attise les convoitises des chercheurs et place leurs parents devant d’impossibles choix. Pour l’Alliance, il est injuste de congeler un être humain en stoppant ainsi artificiellement son développement. Le moratoire demandé est un préalable aux débats légitimes sur le devenir des embryons actuellement congelés. Renforcer la recherche médicale contre l’infertilité. On sait que l’infertilité augmente, au point qu’un couple sur sept consulte aujourd’hui pour cette raison. Or, les techniques d’AMP, très couteuses, sont essentiellement palliatives. Leurs performances limitées laissent un couple sur deux sans enfant. Il est temps de lancer des études poussées sur les causes de l’infertilité et leur prévention : stérilités féminines tubaires et stérilités masculines d’origine environnementale notamment. Mesurer objectivement l’impact sanitaire des techniques d’AMP. La prévalence de naissances d’enfants porteurs de handicap ou de maladie du fait de l’AMP doit être publiée et connue : grossesses multiples, grande prématurité ; anomalies génétiques liées à la FIV et à l’ICSI ; report de l’infertilité paternelle sur les enfants conçus par ICSI, etc. Il est urgent de publier des bilans scientifiques complets dans ces domaines trop peu connus. 12 La recherche sur l’embryon et les embryons surnuméraires 1. Contexte général Les stocks d’embryons congelés ont été progressivement constitués à la suite de cycles de FIV depuis 1994. Les embryons surnuméraires ont attisé la convoitise des chercheurs. 2. Législation actuelle En 2004, la loi a autorisé à ce que les embryons congelés surnuméraires soient donnés à la recherche avec l’assentiment des parents : jusque-là, les parents avaient la possibilité de les transférer dans l’utérus maternel, de demander leur destruction ou de les donner à un autre couple. Une dérogation en contradiction avec le principe d’interdiction de recherche sur les embryons a été introduite dans la loi pour une période de 5 ans, « pour des recherches à visée thérapeutique et sans recherche alternative possible d’efficacité comparable ». Les décrets ayant tardé à être publiés (2006), la fin du moratoire se situe en février 2011. 3. Quelques chiffres Rappel : 149 19118 embryons sont conservés congelés dont 34% sans projet parental. Une cinquantaine de programmes de recherche sont répertoriés sur le site de l’Agence de Biomédecine. Aucune indication thérapeutique n’existe à ce jour. L’argument essentiel avancé par les chercheurs auprès du législateur pour obtenir des dérogations à l’interdiction de recherches sur l’embryon humain consiste à vouloir disposer de cellules souches en nombre illimité pour les utiliser dans le cadre de thérapies cellulaires visant à recomposer des tissus présentant des dysfonctionnements (pour maladie ou vieillesse). Deux obstacles importants persistent, soulignés par le rapport de la mission d’information parlementaire de révision de la loi de bioéthique. – Le risque lié à la persistance de cellules souches embryonnaires humaines pluripotentes résiduelles dans le greffon ou à l’émergence d’un comportement aberrant des précurseurs greffés. Ce dernier écueil est commun aux cellules IPS et aux cellules pluripotentes adultes ; – Le risque immunologique de rejet de la part du receveur, puisqu’on est dans une situation classique de greffe allogénique (cellules provenant d’un donneur). 90 pathologies hématologiques sont actuellement traitées à partir de cellules de sang de cordon19. 4. Les recherches alternatives 4-1 Les cellules souches adultes et les cellules issues de sang de cordon et placentaire Le Rapport de la mission d’information parlementaire de révision des lois de bioéthique fait état des thérapies existantes avec notamment les cellules de sang de cordon : 18 19 Rapport d’activité de l’Agence de biomédecine 2009 www.agence-biomedecine.fr Colloque Le sang de cordon dans la révision des lois de bioéthique – 26 octobre 2010 - Sénat 13 « Certaines cellules souches adultes ont prouvé depuis plus de trente ans leur potentiel thérapeutique. Ainsi, les thérapies recourant aux cellules souches hématopoïétiques issues de la moelle osseuse ou du sang périphérique bénéficient à plus de 3 000 malades par an traités pour des hémopathies malignes, pour des tumeurs solides ou pour contrer les effets sur la moelle osseuse de chimiothérapies. Depuis les essais cliniques du docteur Éliane Gluckman, en 1989, on sait utiliser les cellules du sang placentaire (…) Le prélèvement de ces cellules ne présente pas de difficultés techniques. Elles offrent l’avantage de ne pas poser les problèmes de compatibilité qu’ont les greffes de cellules de la moelle osseuse (…) D’autres indications de thérapies à partir de cellules souches issues du sang placentaire sont envisageables selon le docteur Gluckman : « Dans le sang et surtout dans le placenta, on trouve des cellules souches qui, conservées, pourraient ultérieurement être différenciées en hépatocytes, neurones, cellules pancréatiques… Il s’agit là seulement d’une indication thérapeutique en puissance, et on en est encore au stade des recherches. (…) Le laboratoire de recherche du centre de transfusion sanguine des armées de Percy travaille sur les cellules souches mésenchymateuses afin d’améliorer la production en culture d’épiderme pour les grands brûlés. » ». 4-2 La reprogrammation des cellules souches humaines adultes La découverte des techniques de reprogrammation des cellules somatiques (cellules IPS – découvertes en 2007) a réorienté la recherche et éloigné les perspectives de clonage. Cette voie est reconnue comme prometteuse par la communauté scientifique. Ce sont les équipes du Dr Yamanaka au Japon et du Dr Thompson aux Etats Unis qui ont ouvert cette voie. 5. Principales questions éthiques posées 5-1 La destruction des embryons L’utilisation des embryons pour la recherche conduit à leur destruction. 5-2 Des conflits d’intérêts La « course aux annonces » cache des conflits d’intérêts majeurs au sein de la communauté scientifique. Cette précipitation ne respecte pas les malades qui vivent souvent des situations dramatiques, en faisant naître chez eux de faux espoirs à court terme. Par son annonce d’octobre 2010, la firme de biotechnologie Geron Corporation semblait faire espérer une thérapie prometteuse aux personnes paralysées à la suite d’une lésion de la moelle épinière, traduite par certains comme le premier patient traité avec des cellules souches embryonnaires humaines. Or il ne s’agit en réalité que d’un essai clinique pour évaluer la tolérance du patient à des cellules dérivées de cellules souches embryonnaires. Le même type de publicité a été fait dans la foulée au mois de novembre 2010 par la société Advanced Cell Technologie pour un essai clinique concernant une pathologie oculaire. 14 5-3 L’embryon humain comme cobaye « gratuit » Un des intérêts mis en avant est de pouvoir tester de nouveaux médicaments (criblage pharmaceutique) ou réaliser des recherches sans passer par les tests sur les animaux qui, eux, coûtent chers et nécessitent une formation et des installations spécifiques. Par exemple, des embryons écartés lors de DPI porteurs de gènes de maladies héréditaires sont actuellement objet de recherche. Dispositions contenues dans le projet de loi adopté en 1ère lecture par l’Assemblée nationale - L’élargissement de la dérogation à l’interdiction de recherche sur l’embryon sans limite de temps et dans un cadre plus large de recherche à visée « médicale », qui remplace la notion de « progrès thérapeutique majeur ». - La révision des critères d’évaluation des procédés d’assistance médicale à la procréation, notamment la congélation ultra rapide des ovocytes qui nécessite de prouver leur « reproductabilité » ce qui pourrait induire la création d’embryons pour la recherche. - L’encadrement pour le recueil des cellules souches issues de sang de cordon ombilical. Le choix retenu par la France est celui du recueil par des banques publiques allogéniques c'est-à-dire pour une utilisation indifférenciée par les patients qui en ont besoin, sachant que le patient doit avoir une compatibilité avec le donneur. 6. La position de l’Alliance concernant la recherche et l’embryon humain L’Alliance pour les Droits de la Vie est favorable à une recherche scientifique qui concilie les progrès thérapeutiques avec le respect de l’intégrité et de la dignité humaine. L’Alliance conteste toute recherche sur l’embryon, qui le détruit et n’est aucunement destinée à son bénéfice. Avaliser l’idée d’êtres humains exploités pour le reste de l’humanité est contraire aux Droits de l’Homme et à la démocratie. 7. Les propositions de l’Alliance concernant la recherche et l’embryon humain Financer en priorité la recherche qui concilie les progrès scientifiques ou thérapeutiques avec le respect de l’intégrité et de la dignité humaine. Tout euro versé à une recherche qui ne respecte pas l’intégrité de l’embryon est contraire aux Droits de l’Homme et constitue un détournement de l’argent public ou privé nécessaire à la recherche éthique. C’est cette dernière qui doit impérativement être soutenue. Etablir un registre public des thérapies déjà efficientes utilisant les cellules souches non embryonnaires et créer une instance indépendante qui vérifie l’absence de conflits d’intérêts pour toute communication autour de la bioéthique et du progrès médical. La fascination de certains chercheurs pour l’embryon a trop 15 longtemps nuit au rayonnement des résultats de la recherche éthique, y compris dans les milieux scientifiques. C’est pourquoi un effort de recensement et de communication est désormais nécessaire pour dynamiser ces recherches. Réétudier la législation encadrant la recherche, qui limite actuellement la recherche sur l’animal au détriment de l’embryon humain. Du fait de la pression des associations de protection de l’animal, la recherche sur les modèles animaux est sévèrement contrainte, en terme de formation et d’infrastructure, alors que la recherche sur l’embryon humain ne nécessite aucun diplôme préalable. Le rééquilibrage demandé passe par l’interdiction explicite des tests de médicaments sur les embryons. 16 Le dépistage anténatal du handicap 1. Contexte général Le dépistage anténatal s’est développé dans les années 1970 avec la mise au point de l’échographie médicale puis progressivement des tests biologiques. Il s’est considérablement accru ces dernières années. 2. Législation actuelle L’avortement pour cause de handicap a été autorisé dès la loi de 1975 sur l’avortement jusqu’au dernier jour de la grossesse. La loi de bioéthique de 1994 encadre les pratiques de diagnostic prénatal (DPN), de diagnostic préimplantatoire (DPI) et de décision d’interruption « médicale » de grossesse (IMG). La définition contenue par la loi : « Le diagnostic prénatal a pour but de détecter in utero chez l'embryon ou le fœtus une affection d'une particulière gravité » laisse un large champ d’application. Le législateur a souhaité ne pas établir de liste de maladies pour ne pas les stigmatiser. Le DPI a été autorisé pour éviter la transmission de maladies génétiques héréditaires : il consiste à créer des embryons par FIV, d’en prélever une cellule pour vérifier s’ils sont porteurs du gène défectueux dû à la maladie héréditaire (ex : myopathie, mucoviscidose …) pour ne réimplanter que les embryons indemnes de la maladie. C’est une technique lourde qui nécessite la création de 28 embryons20 pour une naissance. 7621 enfants sont nés en 2008 mais le recours au DPI tend à se développer. En 2007, on a découvert que cette technique avait été utilisée en France à Strasbourg dans des cas de maladies prédictives sans assurance que la maladie ne se développe, ni à quel âge il pourrait se développer (cancers familiaux héréditaires). Les médias et l’opinion s’en sont émus sans que des mesures ne soient réellement prises pour stopper cette pratique. La loi de 2004 a introduit une transgression supplémentaire en autorisant le « bébé médicament » ou double DPI. Cette technique consiste à effectuer un diagnostic en vue de transférer in utero un embryon, à la fois indemne d’une maladie génétique grave et dont les caractéristiques immunologiques, en termes de compatibilité du système HLA 22 permettent d’envisager le prélèvement à sa naissance des cellules souches hématopoïétiques issues du sang de cordon ombilical pour traiter un aîné gravement malade. En France, le premier bébé issu de cette technique est né en janvier 2011. Le développement des banques de sang de cordon allogéniques conduit à reconsidérer l’intérêt du double DPI, particulièrement transgressif dans la mesure où il instrumentalise l’enfant à naître et nécessite un tri embryonnaire. 3. Quelques chiffres - 80% des grossesses sont contrôlées par les tests biologiques de dépistage de la trisomie 21, qui donne lieu à 80 000 amniocentèses chaque année, technique qui peut provoquer des 20 Calculé à partir des chiffres indiqué dans les Rapport annuel de l’Agence de biomédecine 2008 Rapport annuel de l’ Agence de biomédecine 2009 www.agence-biomedecine.fr 22 HLA : human leucocyt antigen. Vise à identifier les antigènes d’histocompatibilité portés par les cellules des tissus responsables de la réaction de rejets des greffes. 21 17 - fausses couches dans 1% des cas ; 96% des fœtus diagnostiqués porteurs de trisomie 21 donnent lieu à une interruption médicale de grossesse. La quasi totalité des grossesses est contrôlée par échographie. 60% des IMG se font à la suite de diagnostics de malformation ou de handicap posés par échographie. Près de 7000 IMG23 sont pratiquées chaque année. 4. Principales questions éthiques posées 4-1 Un taux de dépistage anténatal les plus élevés au monde La France, compte tenu de son système social et de sa politique de dépistage très développée, détient le record mondial de dépistage anténatal24. Dans les faits, la surenchère de dépistage de la trisomie 21 en fait aujourd’hui un handicap emblématique au point que des propositions de le dépister lors de diagnostic préimplantatoire (DPI) ont été avancées mais finalement non retenues dans la rédaction de l’avant projet de loi de 2010. Des voix commencent à se faire entendre pour dénoncer une nouvelle forme d’eugénisme : le professeur Sicard ancien président du CCNE, ou encore le professeur Mattéi, auteur des lois de bioéthique de 1994 et de 2004 s’en sont alarmés lors des Etats généraux de la bioéthique en 2009. Ils sont aujourd’hui rejoints par un nombre grandissant de professionnels de la grossesse qui ressentent un malaise croissant dans l’exercice de leurs métiers. Des personnes handicapées se sentent discriminées et marginalisées en constatant que des embryons porteurs du même handicap sont éliminés, souvent systématiquement. 4-2 Les risques de judiciarisation de la naissance Un cercle vicieux s’est progressivement installé : des praticiens se trouvent mis en difficulté par des « erreurs de dépistage » qui leur sont reprochées pour lesquels les parents demandent réparation. En 2000, la jurisprudence Perruche obtenue par les parents d’un jeune homme dont le handicap n’avait pas été diagnostiqué avant la naissance, conduisait à instituer un « préjudice d’être né » et à obtenir réparation. La mobilisation de parents d’enfants handicapés a permis de faire voter en 2002 la disposition anti-Perruche qui a donné un coup d’arrêt à ces revendications proclamant que « nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance ». Les parents, s’ils peuvent demander réparation du préjudice moral, ne peuvent pas faire peser sur les praticiens le coût du handicap qui relève de la solidarité nationale. Les médecins, pour éviter des possibles procès, sont conduits à proposer et pratiquer le DPN de manière systématique. En 2010, des parents ont déposé un recours au conseil constitutionnel pour faire vérifier la constitutionnalité de la loi anti Perruche qui a été finalement réaffirmée. 4-3 DPN et IMG : un lien souvent fatal Aujourd’hui les grossesses deviennent anxiogènes du fait de la multiplicité des propositions de dépistage. Les femmes commencent à en témoigner ainsi que de leur souffrance après une interruption médicale de grossesses (IMG). 23 6876 attestations délivrées en vue de l’IMG en 2008 - Rapport annuel de l’Agence de biomédecine 2009 www.agence-biomedecine.fr Dans une question à la ministre de la Santé Roselyne Bachelot, publiée au Journal officiel du 2 octobre 2007, la députée UMP Bérengère Poletti affirmait que la France détient un "triste record mondial" concernant la pratique de l'amniocentèse avec 1 femme enceinte sur 10 subissant ce diagnostic. Elle précisait que "le prélèvement du liquide amniotique à travers l'abdomen provoque 2 fausses couches d'enfants normaux pour une trisomie dépistée". 24 18 Lors d’une présentation en avril 2008, au collège de gynécologie du Centre Val de Loire, Dominique Decamp-Mini, juriste spécialisée en droit de la santé soulignait que le Diagnostic prénatal est fortement lié à la notion d’IMG, et que cela a valu à la médecine prénatale le qualificatif de «médecine thanatophore» c’est-à-dire d’une médecine qui n’a pas d’autre solution à apporter que celle de la mort du fœtus atteint de cette affection d’une particulière gravité. Dispositions contenues dans le projet de loi adopté en 1ère lecture par l’Assemblée nationale - Renforcement des mesures de proposition des examens prénataux par les médecins. - La prescription des examens anténataux est élargie aux sages-femmes. - L’inquiétude manifestée par un grand nombre de praticiens et d’observateurs à propos d’une forme d’eugénisme moderne n’a pas été prise en compte. - La confirmation de l’autorisation du bébé médicament. 5. La position de l’Alliance sur le diagnostic prénatal et préimplantatoire Nous demandons une prise de conscience des conséquences de la montée inédite de la sélection et de l’exclusion anténatale des êtres humains porteurs d’anomalies. L’Alliance plaide pour une politique ambitieuse d’accompagnement au moment de l’annonce du handicap et d’accueil des personnes handicapées, impliquant le plus possible ces dernières. 6. Proposition de l’Alliance concernant le diagnostic prénatal et préimplantatoire Envisager autrement le dépistage anténatal des anomalies. La France détient le record mondial du dépistage anténatal du handicap, mais aussi celui de l’IMG. De nombreux experts s’alertent du taux de 96% d’avortements en cas de détection d’une trisomie 21. L’Alliance propose que soit conduite une autre politique d’annonce du handicap, d’accueil des nouveau-nés handicapés et de communication sur la place que peuvent prendre les personnes handicapées dans la société. 19 ANNEXE La Gestation pour autrui : pourquoi s’opposer à la légalisation ? Contexte général La gestation pour autrui, ou recours à une mère porteuse, est un procédé dans lequel une femme porte un enfant « pour le compte d’autrui », et s’engage à remettre l’enfant au couple demandeur à l’issue de la grossesse. Cette pratique correspond à trois types de situations différentes : 1. Fécondation in vitro avec les ovocytes de la femme demandeuse et le sperme du conjoint du couple demandeur, puis implantation de l’embryon chez la mère porteuse. (L’enfant aura ainsi deux « mères » : sa mère gestatrice + sa mère biologique et éducatrice). 2. Insémination artificielle de la mère porteuse avec le sperme du conjoint de la femme demandeuse stérile. (L’enfant aura également deux « mères » : la mère biologique et gestatrice + la mère éducatrice). 3. Fécondation in vitro avec les ovocytes d’une donneuse d’ovocyte fécondé avec le sperme du conjoint, puis implantation de l’embryon chez la mère porteuse. (L’enfant aura ainsi trois « mères » : la mère biologique + la mère gestatrice + la mère éducatrice). La gestation pour autrui est principalement envisagée pour des cas de stérilité féminine liée à des dysfonctionnements de l’utérus : Le syndrome MRKH est une pathologie qui se définit par une absence congénitale d'utérus, avec des trompes et des ovaires qui peuvent fonctionner. D’autres pathologies de l’utérus, comme par exemple le syndrome d’Asherman, consistent en des cicatrices utérines (synéchies) développées à l’issue d’un curetage en suite de couches, après la naissance d’un enfant (suspicion de rétention placentaire, hystérectomie, exposition au distilbène). Cette pratique est aussi revendiquée par des hommes homosexuels pour avoir un enfant en utilisant les services d’une mère porteuse. Depuis quelques années, ces questions ont été importées en France par des adultes ayant eu recours à des mères porteuses à l’étranger, et principalement le couple Mennesson. Ils posent la question du statut des enfants (état civil, filiation). Les interrogations posées par ce procédé de procréation sont nombreuses. A titre d’exemple, le journal canadien National Post du 6 octobre 2010 rapportait le cas d’un couple canadien ayant eu recours à une mère porteuse. Après la découverte que l’enfant était porteur d’une trisomie 21, le couple a demandé l’avortement, ce que la mère porteuse a refusé. L’article souligne que cette situation a suscité des questions épineuses au sujet du contrat qu’ils avaient passé. 20 Dès lors, la gestation pour autrui peut-elle être considérée comme un procédé permettant de répondre aux souffrances de couples infertiles ? Ou bien constitue-t-elle une nouvelle forme d’aliénation et de marchandisation du corps humain ? Législation actuelle La première loi bioéthique française (n° 94-653 du 29 juillet 1994) définit plusieurs principes fondateurs garantissant le respect dû au corps humain. Inviolable, le corps ne peut faire l’objet d’un droit patrimonial, conformément à l’article 16-1 du code civil. Les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain ou à ses éléments sont nulles. En 1994, le Conseil Constitutionnel rappelle que les principes du code civil « au nombre desquels figurent la primauté de la personne humaine, le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie, l’inviolabilité, l’intégrité et l’absence de caractère patrimonial du corps humain ainsi que l’intégrité de l’espèce humaine (…) tendent à assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine ».25 Par ailleurs, comme le rappelle le Rapport d’information de la mission parlementaire, « la situation des enfants nés d’une GPA, s’agissant de leur filiation comme de l’exercice de l’autorité parentale, est donc régie par la loi comme s’il n’y avait pas eu de convention de maternité de substitution. L’ordre public français ne peut être contourné par le recours à une mère porteuse étrangère, quand bien même cette pratique serait autorisée dans les pays concernés ».26 Dans le cas de procréation ou de gestation pour le compte d’autrui, des sanctions pénales sont encourues par la gestatrice, le couple commanditaire et les intermédiaires. Dans sa lettre de mission du 11 février 2008 pour la révision des lois de bioéthique, le Premier ministre demande au Conseil d’État de procéder à l’examen de la question suivante : « La contrariété à l’ordre public des conventions de mères porteuses et la nullité de tous les actes qui en découlent pourraient-elles, dans certaines hypothèses exceptionnelles, faire l’objet de tempéraments ? » Le Conseil d’État ainsi que les citoyens membres des panels des États généraux de la bioéthique se prononcent pour le maintien de la prohibition de la maternité pour autrui. Ils adoptent la position prise le 20 novembre 2008par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, et par l’Académie de médecine le 10 mars 2009. Le 6 avril 2011, la Cour de Cassation doit rendre un jugement sur l’annulation d’un arrêt de la Cour d'Appel de Paris de mars 2010 au sujet de l’affaire Mennesson. Ce dernier confirmait la filiation des fillettes nées aux Etats-Unis par GPA vis-à-vis de leurs parents français, mais refusait d'inscrire leurs actes de naissance à l'état civil français. 25 26 Décision n° 94-343 du 27 juillet 1994 concernant la loi relative au respect du corps humain Rapport d’information de la mission parlementaire sur la révision des lois de bioéthique, 20 janvier 2010 21 Arguments avancés en faveur de la légalisation de la GPA Certains évoquent tout d’abord l’absence de réponse médicale aux infertilités d’origine utérine. En effet, il n’y a pas, aujourd’hui, de réponse thérapeutique à certaines formes de stérilité et donc pas d’alternative possible à la GPA. L’infertilité est en outre une situation ressentie comme une injustice par les couples concernés. Enfin, certains arguent du primat du biologique sur l’éducatif, préférant ainsi le recours à la GPA plutôt qu’à l’adoption. Par ailleurs, pour contourner l’interdiction de la maternité pour autrui en France, certains couples se rendent dans des pays étrangers où celle-ci est autorisée. Ainsi, selon Laure Camborieux, psychologue clinicienne, « l’interdiction actuelle est délétère. Les dérives existent déjà en France : en tapant « mère porteuse en France » sur Google, vous voyez apparaître les agences des pays de l’Est et les endroits où trouver des annonces. (…) Pour qu’une interdiction soit respectée, il faut qu’elle soit juste, justifiée et efficace. Aujourd'hui, l’interdiction de la GPA ne remplit pas ces critères ».27 Les couples ayant eu recours à une GPA à l’étranger se prévalent donc de l’argument du « fait accompli ». Enfin, la légalisation de la GPA permettrait de prévenir certaines dérives et de permettre l’expression d’un acte de générosité. Ainsi, Mme Micoud, coprésidente de l’association des parents gays et lesbiens, a souhaité que « la GPA soit autorisée pour toute personne seule ou tout couple porteur d’un projet parental, qu’elle soit organisée et strictement encadrée pour éviter toute dérive marchande, garantir la dignité de tous les protagonistes et permettre un consentement libre et éclairé de la femme qui accepte de porter un enfant pour autrui, et que les personnes qui mettent en œuvre une maternité pour autrui puissent bénéficier de conseils juridiques et d’un suivi médical et psychologique approprié ». Ainsi encadrée, la pratique de la GPA serait plus sûre et permettrait d’éviter la situation d’inégalité et de discrimination sociale entre couples aisés et couples moins favorisés. Les risques encourus par la gestatrice et par l’enfant à naître La femme est exposée aux risques et contraintes inhérents à toute grossesse (poussée hypertensive, hémorragie, grossesse extra-utérine, douleurs et suites de l’accouchement…). Les répercussions psychologiques d’une GPA sur la mère porteuse ne sont en outre pas négligeables. Selon les termes d’une mère porteuse, la mère a l’impression d’avoir été utilisée comme « un sac » et les dépressions post partum sont nombreuses. En outre, il ne faut pas sous-estimer l’importance des relations entre la mère gestatrice et l’enfant. Le docteur Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre, souligne le risque pour l’enfant de « la rupture imposée. Il ne s’agit pas d’un abandon, mais d’une rupture programmée, délibérée 27 Les citations contenues dans cette note sont issues des auditions réalisées par la Mission parlementaire sur la révision des lois de bioéthique. Elles sont extraites du Rapport d’information de la Mission parlementaire du 20 janvier 2010, p.119 et suivantes. 22 de ce que l’enfant a vécu pendant la grossesse. Une telle rupture a toujours des conséquences psychiques. » Faute de retrouver « la continuité sensorielle avec la peau, les odeurs, la nourriture, la voix, la rythmicité de la mère, (…) le bébé s’agrippera à d’autres objets, mais il s’agira d’une organisation défensive secondaire, après la faillite de l’environnement primaire à valeur organisatrice ». Le parallèle établi parfois entre GPA et adoption semble ici erroné, puisque « l’adoption est instituée dans l’intérêt de l’enfant pour pallier un accident de la vie, tandis que le GPA impose, d’une certaine manière, cet accident de la vie à un enfant ». Une grossesse vécue sans attachement affectif ne peut être concevable d’un point de vue psychologique et anthropologique. Les relations entre la gestatrice et l’enfant soulèvent également des interrogations sur le long terme. Ainsi, le professeur Jean-François Mattéi se demande : « Quel rapport l’enfant établirat-il avec la gestatrice non anonyme ? Voudra-t-il la rencontrer, par curiosité ou par désir de savoir ? » Une étude canadienne fait état de déclarations spontanées sur le blog de jeunes ayant été conçus par GPA. Elle révèle une grande souffrance, et ce qui est présenté comme un don est perçu comme un abandon. Par ailleurs, selon le professeur René Frydman, la GPA ne revient-elle pas, « sous couvert d’intentions louables, à faire courir des risques, physiques et psychologiques, non négligeables à certaines femmes mais aussi à leur famille, car elles ont souvent un conjoint et des enfants » ? En effet, les répercussions sur l’entourage de la mère porteuse sont également à prendre en compte. Le docteur Pierre Lévy-Soussan fait part de ses inquiétudes concernant les «problèmes psychiques de la mère porteuse, de son mari et de leurs enfants, qui devront intégrer le fait de voir leur mère enceinte et qu’elle donne un enfant à un autre, avec toutes les angoisses que cela suppose ». Les risques pour le couple éducateur et pour l’enfant une fois né La GPA n’est pas exempte de risques pour le couple qui souhaite y recourir. Le couple doit être préparé à accueillir un enfant atteint d’une maladie ou d’une malformation grave. En outre, la psychanalyste Sophie Marinopoulos exprime ses « doutes concernant la fabrication d’un matériel psychique à partir d’un élément biologique provenant d’une tierce personne ». Enfin, le couple peut avoir à faire face à une ingérence de la mère porteuse dans sa vie privée, voire à un chantage financier. Il faut également évoquer les dangers d’une parenté fragmentée. Dans le cadre d’une AMP avec tiers donneur, l’enfant peut avoir jusqu’à cinq parents ou géniteurs (le donneur de sperme, la donneuse d’ovocytes, la gestatrice, le père et la mère éducateurs). Cette fragmentation de la parenté a été dénoncée par Jean-Pierre Foucault, président de la Commission de santé publique et de bioéthique du Grand Orient de France. Il fait valoir que «trop d’acteurs interviennent dans l’acte de procréer (…). La mère porteuse pourra revendiquer un lien de filiation avec l’enfant. Qui peut alors prétendre être le père et la mère de l’enfant ? » 23 Enfin, l’enfant devra s’accommoder d’avoir été l’objet d’un contrat, puisque la GPA s’inscrit le plus souvent dans le cadre d’un marché. Le principe d’indisponibilité du corps humain est toujours d’actualité Par l’arrêt n° 90-20105 du 31 mai 1991, la Cour de Cassation condamne la convention par laquelle une femme s’engage, « fut-ce à titre gratuit », à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance, en ce qu’elle constitue un détournement de l’institution de l’adoption et qu’ « elle contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes ». Le Rapport d’information de la mission parlementaire rappelle que « le corps n’est pas seulement le support matériel de la personne ; il ne peut dès lors être qualifié de chose car il ne peut pas être envisagé en soi, isolément de l’être humain qui l’habite. Le corps n’est pas de l’ordre de l’avoir mais de l’être ». En outre, la philosophe Sylviane Agascinsky note que « demander à une femme d’enfanter à la place d’une autre signifie qu’elle doit vivre neuf mois, et vingt-quatre heures sur vingtquatre, en faisant abstraction de sa propre existence corporelle et morale. Elle doit transformer son corps en instrument biologique du désir d’autrui, bref elle doit vivre au service d’autrui, en coupant son existence de toute signification pour elle-même ». A titre d’exemple, aux États-Unis, les contrats passés avec les parents intentionnels ou éducateurs prévoient, dans ses moindres détails, la vie de la mère porteuse : son alimentation, ses activités, son hygiène et, bien sûr, lorsqu’ il y a insémination, sa vie sexuelle. Ce contrôle de la vie intime est pire que celui exercé jadis sur les nourrices, puisque c’est l’existence organique d’une femme qui est substituée à celle d’une autre femme. Or, personne ne dispose de plusieurs corps et de plusieurs vies. Et nul n’est libre d’installer une cloison étanche entre son corps organique et sa vie psychique. Les risques de marchandisation du corps humain sont bien réels Certaines personnalités, parmi lesquelles les membres du groupe de travail sénatorial sur la maternité pour autrui, considèrent que la GPA pourrait être légalisée en tant que moyen au service de la lutte contre l’infertilité, au même titre que les autres techniques d’AMP. A l’inverse de cette argumentation, Roselyne Bachelot pense qu’une légalisation de la GPA «fait courir aux plus fragiles le risque d’une instrumentalisation aliénante de leur corps et de leur psyché » et fait « reconnaître le primat du génétique tout en admettant que la mère puisse être celle qui élève et non celle qui porte et accouche ». En effet, la grossesse engage l’ensemble du corps et le psychisme de la femme. Sylviane Agacinski fait valoir que « la grossesse constitue une série de transformations très profondes et très longues. Elle bouleverse l’ensemble de l’existence d’une femme sur le plan physiologique, mais aussi sur le plan psychologique et moral. Considérer qu’une femme pourrait faire abstraction du processus d’enfantement qu’elle vit, c’est lui demander un clivage entre ce qui se passe dans son corps et le sens qu’elle donne à sa vie, comme si les aspects biologiques et biographiques pouvaient être scindés. Bref, c’est réduire son corps à une machine ou à un animal. (…) Instrumentaliser ainsi les organes d’une femme, ce qui 24 revient à la traiter comme une chose et à faire d’elle un outil vivant, est contraire au principe d’inviolabilité du corps ». La grossesse engage davantage que le seul utérus, ce que démontrent les clauses prévues dans les contrats américains des mères porteuses. Comme le note Catherine Labrusse-Riou, professeur de droit à Paris I, « les contrats américains d’inspiration libérale sont fascinants par la servitude totale qu’ils organisent. La servitude volontaire est la pire qui soit ». Il en résulte une différence de nature et non de degré entre les dons d’éléments du corps humain et la GPA, dès lors que celle-ci suppose la mise à disposition de l’ensemble du corps de la femme et de sa personne. De plus, comme le note le Rapport d’information de la mission parlementaire, « la GPA ne peut être comparée à une activité professionnelle, notamment parce qu’il n’y a plus dans ce cas de distinction entre le temps de travail et celui de la vie personnelle ». Il faut également évoquer le risque d’exploitation des femmes les plus vulnérables. Le développement du « body shopping » et du « baby business » attire en effet les femmes en situation précaire. On peut dès lors craindre une forme d’esclavage moderne. La position de l’Alliance pour les Droits de la Vie : maintenir l’interdiction de la GPA Dangereuse pour la gestatrice, néfaste pour le couple éducateur et l’enfant, la GPA représente une instrumentalisation et une marchandisation du corps humain, qu’une autorisation encadrée ne suffit pas à contenir. Il faut maintenir la prohibition de la gestation pour autrui. - - - - - L’Alliance considère que la programmation d’un enfant qui sera séparé – par contrat – de celle qui l’aura porté et enfanté ne respecte pas le droit de l’enfant. Une maternité éclatée entre deux voire trois femmes (génitrice, gestatrice et éducatrice) est une injustice pour lui. C’est également une injustice pour les femmes porteuses dont le travail s’apparente à de l’esclavage, incompatible avec leur dignité (cf. le contrat détaillé qu’elles doivent signer et auquel elles doivent se soumettre). La maternité pour autrui est par ailleurs inégalitaire. Elle susciterait une fracture entre deux groupes de personnes : les couples ayant les moyens de financer une mère porteuse, et les femmes démunies qui loueraient leur utérus ou vendraient leurs ovocytes. Ceux qui imposent le débat en France en ayant eu recours à cette technique à l’étranger devraient être poursuivis par la justice, sans qu’on nie pour autant l’intérêt des enfants concernés à avoir un état civil clair, ne cachant rien de leur histoire chahutée. Pas plus que pour la peine de mort ou d’autres faits contraires aux Droits de l’Homme, la France n’a pas à se caler sur des législations transgressives et sur le « moins disant » éthique. Alliance pour les Droits de la Vie - 12 rue Rougemont 75009 Paris 01 45 23 08 29 www.adv.org 25