INTRODUCTION : [J.P. LUIZARD] -Y eut

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Jean-Pierre LUIZARD (dir.),
Le choc colonial et l'Islam. Les politiques religieuses des puissances coloniales en terres d'Islam.
Ed. La Découverte, Paris 2006. (545 pages)
INTRODUCTION : [J.P. LUIZARD]
-Y eut-il un volet religieux à la colonisation ?
Discours sur colo° du XV°-XVI° marqué par l'apostolat (propagation de la foi); puis au
XVIII° par le mercantilisme ; puis avec Révolution française, apparaît l'idée que l'assimilation doit
être un objectif, mais c'est très vite oublié.
Au XIX°s le colonialisme mercantiliste évolue vers colonialisme impérialiste (sans pour
autant qu'il y ait de plan d'expansion coloniale ou de pol coloniale systématique).
Colonisation des pays musulmans commencée lors de la phase mercantiliste, mais se fait
pour l'essentiel à l'époque impérialiste : en moins d'un siècle c'est la quasi totalité du monde musulman
qui passe sous domination des pays européens. Seuls en réchappent région diffcl d'accès, montagneuses.
Puis Première G mondiale aboutit à démembrement de l'Empire Ottoman.
Ces espaces musulmans sont soumis à différentes formes de dominations politiques :
-colonie : Indonésie, AOF
-mandat : Syrie, Liban, Irak, Palestine
-annexion : Algérie, Asie Centrale et Caucase
-rattachement à la couronne britnq : Indes
-protectorat : Egypte, Tunisie, Maroc
-division en zones d'influence : Iran.
-Une colo° au nom de la civilisation ?
Quand J. FERRY parle de « civiliser » les races inférieures, sous entend valeurs associée à la
« modernité ».
La modernité est à la fois un rapport nouveau avec le temps et la source de la puissance :
le plus moderne domine par sa maîtrise du temps ; s'approprie, confisque le processus de modernisation
des autres en déstructurant les société moins modernes et en contrôlant leur marche vers la modernité.
=> de ce fait la modernité est par essence impérialiste. Ainsi le « paradoxe » qui consiste à voir des
idéaux émancipateurs se transformer en légitimation d'une domination coloniale semble trouver son
origine dans l'essence même de la modernité.
Dilemme pour le colonisé : refuser la modernisation c'est se condamner à disparaître ;
l'accepter c'est perdre sa souveraineté et son autonomie car processus de modernisation est exogène.
=> Dans ce cadre, l'identité -notamment religieuse- devient l'arme privilégiée pour ceux qui n'ont
pas d'autres moyens pour affirmer leur souveraineté. Cette identité religieuse a pu fédérer tous les
enjeux de la lutte contre la domination coloniale (milit, pol, éco, cult) et donne un accès à l'universel.
C'est le décalage sur l'échelle de la modernité qui explique pourquoi la rencontre Islam /
idéaux issus des Lumières a aboutit à une modernité islamique [= islam réformiste : thème du retour à
l'islam des origines, mettre Dieu au cœur de la cité tout en acceptant l'essentiel des systèmes politiques européens et des
catégories pol modernes → nouvel universalisme que les musulmans présentent à leur tour comme la « Civilisation »,
moralement supérieure à celle d'Europe].
-Une colo° qui ne se fait ni au nom du christianisme, ni au nom de la laïcité ?
Les idéaux au noms desquels la colo° se fait diffèrent d'un métropole à l'autre, évoluent au fil
du temps, et ne reflétaient pas toujours l'état de la métropole.
Pourtant, existence d'une culture commune partagées par les colonisateurs : sont tous
porteurs d'un projet missionnaire, cad vocation à répandre un message universel. Projet qui s'est
sécularisé pour devenir discours de la Civilisation, qui donne naissance à une « mission laïque », puis
« humanitaire ».
=> Efficacité missionnaire ds le monde musulman est quasi nulle (t peu de conversions), mais effets
sociaux et culturels importants de ces missions (éduct°...).
Pour les musulmans, les puissances coloniales étaient toutes chrétiennes. Cepdt, colo° des
pays musulmans ne s'est pas faite au nom du christianisme ni au nom de la laïcité : le colonisateur tient
des discours différents selon circonstances et destinataires. Idée que ce qui n'est plus bon pour la Frc au
regard du degrés de civi° atteins, peut tjs l'être pour les sociétés « moins évoluées » [Expl : IIIème Rep
n'exporte pas laïcité ou anticléricalisme, car Église catho reste un appui pol pour la France en pays musulman ]
PARTIE 1 : Utopies des Lumières, expansion économique et coloniale :
l'Europe se projette en terre d'Islam.
Article 1 : La projection chrétienne de l'Europe industrielle sur les provinces arabes de l'Empire
ottoman. [Auteur : Henry LAURENS]
Contexte Europe du XIX°s : toutes les grandes idéologies ont le sentiment de l'avènement
d'un « homme nouveau » ; idée de progrès. → dans ce monde démiurgique, la destruction créatrice
(dans les rapports de production, la transformation, l'appréhension du monde...) semble être la règle.
1/Les Lumières et l'Orient.
Rev°française : fin de l'Ancien Régime et d'un système social où les inégalités des
conditions donnait une place à chacun. Ordre social nouveau : la « démocratie » est alors définie par
l'égalité formelle des conditions, et non par la participation politique.
La pensée des Lumières critique le phénomène colonial surtout cause atrocités commises au
nom de la religion. Ainsi, le nouveau cours colonial doit s'articuler sur une affirmation de respect envers
la religion des peuples dominés ; et sur légitimation par la mission de « modernisation »/ « civi° ».
[Expl : 1798-1801 : expédition d'Egypte de Bonaparte est la première à se mettre sous la bannière de la civilisation,
expedt° qui rejette toute référence chrétienne et se pose comme ami de l''islam. ]
2/Nationalités et renaissance chrétienne :
Référence chrétienne revient au premier plan du discours européen sur l'Empire Ottoman par
le biais du principe des nationalités : dans l'ancien Empire Ottoman, reconnaissance officielle de grp
religieux non musulmans (arméniens grégorien, grecs orthodoxes), pensés comme des nationalités. La
Frc se revendique alors protectrice des catho de l'Empire Ottoman par le biais de la protection
consulaire [= protection accordée aux ressortissants de son Etat, mais dans ce cas se fait sur critère religieux et
individuels, pouvait également être accordée à des musulmans, des chefs de guerres clientélisés par puissance
européenne].
Dès 1780's, philhellénisme européen construit img idéalisée, romantique, des Grecs de
l'Empire Ottoman. En 1821 : orthodoxes de l'Empire se révoltent, provoque l'intervention armée des
gouvernements européens et la naissance d'un petite Etat Grec au nom de la défense du principe des
nationalités (et non pas relg°).
MAIS plus tard, ce principe des nationalités est refusé aux musulmans : séparatisme d'une région de
l'Empire ottoman provoque passage sous domination européenne et non indépendance [Expl : 1881 pr la
Tunisie ; 1882 pr l'Egypte].
3/La projection chrétienne :
Début XIX°s, l'Europe se projette sous une forme chrétienne dans l'Empire Ottoman. Le
contexte de libéralisme, qui s'accommode beaucoup plus d'accommodements avec la relg° que les
Lumières. Ainsi, les Eglises récupèrent la thématique de la civilisation :
=> concept de « civilisation chrétienne » : la spécificité de l'Europe serait son origine chrétienne, la
modernité ne se comprends que comme continuation des principes du christianisme. Les savoirs
scientifique et techniques deviennent instruments de propagation de la foi.
=> contexte de progrès de l'incroyance en Europe : la constitution de catholicités non européennes
devient moyen de perpétuer société chrétienne intégrale, non corrompue par le libéralisme.
Années 1820, ds l'Empire Ottoman : surenchère entre entreprises missionnaires, catho,
protestants, orthodoxes. Chrétiens ont alors croissance démog bien supérieure à celle des musulmans.
→ idée d'un « Orient chrétien » réemerge, et le devenir des chrétiens d'Orient devient le nouvel enjeu
de la q° d'Orient.
→ Chq grande puissance européenne se pose comme chrétienne et mène politique de clientélisation
des non-musulmans.
Expl : Courant millénariste britannique, cherche a rassembler les Juifs et terre Sainte et les convertir, en
attendant la fin des temps. Peu de conversions de Juifs, les missionnaires, s'adressent alors aux autres
grps chrétiens en Orient. En 1847, l'Empire Ottoman reconnaît officiellement les Eglises protestantes,
qui ont statuts analogues aux autres Eglises chrétiennes. Pour Londres, cette présence est également un
outil de contrôle et protection de la route des Indes.
Expl : GUIZOT fait de la France la protectrice attitrée des catholiques orientaux. Se traduit dans région
du Liban par un soutien aux Maronites (catho) contre les Druzes (branche de l'Islam, soutenus par la
GB).
1848 : conflit mineur entre orthodoxes et catholiques dégénère et se transforme en remise en
cause radicale du statut de l'ensemble des lieux Saints. Dégénère quand Russie exige reconnaissance
officielle de son droit de protection sur l'ensemble des orthodoxes... ce qui revient à la fin des Balkans
ottomans => début de la Guerre de Crimée (1854).
1856 : le « Hatt Humayun » [= texte diplo du sultan] confirme les privilèges et immunités
accordées aux Eglises ; confirme absence de discrimination dans les emplois publics ; répartition
confessionnelle des populations dans les nouveaux conseils provinciaux et municipaux de l'Empire.
→ s'agit d'anticiper volonté européenne afin d'éviter tutelle.
→ de fait, les protectorats russes et français continuent de s'exercer
1860, intervention militaire française au Liban et en Syrie, faite au nom de l'Europe, pour
protéger les pop° chrétiennes. Est à l'origine de la création de la province autonome du Mont Liban :
dirigée par un gouverneur -sujet ottoman chrétien- et surveillé par consuls européens. Mise en place
conseil consultatif sur base proportionnelle pour chaque communauté religieuse.
4/L'Empire réformé
Après 1860, rétablissement autorité de l'Empire ottoman, avec entre autre la fin de la
protection consulaire européenne pour les musulmans. → Renforce ainsi l'identification entre
l'Europe et les communautés non-musulmanes, stt chrétiennes.
Essor des missions catho françaises à partir du Second Empire : France est le 1er pays
exportateur de missionnaires dans la seconde moitié du XIX°s.
→ vers 1880, le Français devient la 1ere langue étrangère pratiquée dans l'Empire Ottoman : diplomates
all et britnq doivent s'exprimer en Français pour se faire comprendre.
→ l'enseignement féminin est un quasi monopole des missions catho françaises
=> progrès de la francophonie débouchent sur une politique d'influence « morale » via le
catholicisme (sorte de pol culturelle avant l'heure), avec subventions annuelles votées par le Parlement.
Idée que la projection d'une France catho serait la plus adéquate car la société orientale serait de nature
religieuse, la laïcité y serait perçue comme synonyme d'immoralité.
Quelques nuances cependant :
-création d'une Mission Laïque, s'inspirant du modèle catho pour le domaine scolaire. Mais semi échec.
-prise de conscience qu'une projection uniquement chrétienne de la France risque de devenir une gêne
dans un Empire français largement peuplé de musulmans. → 1911 : création de la Commission
interministérielle des affaires musulmanes.
Conclusion :
Décalage paradoxal : c'est au moment où rev° industrielle devient une réalité sociale et que
Europe est en voie de laïcisation, qu'elle adopte une projection chrétienne dans l'Empire Ottoman. Cette
projection n'est pas le reflet de l'état de la métropole sur la question religieuse. Deux raisons à cela :
1-période de recomposition du christianisme européen. Pas seulement défensif, les missions
chrétiennes se donnent aussi pour objectif de restaurer la cité chrétienne homogène qui a cessé
d'être en Europe. Empruntent une partie du discours de son adversaire laïque sur la « civilisation ».
2-modernisation de la société ottoman accélère l'émancipation des non-musulmans. Les
puissances Européennes ont alors la volonté de clientéliser ces communautés.
→ émancipation des non-musulmans de l'Empire Ottoman a été plus rapide et plus complète que
celle des non-chrétiens en Europe, et a débouché sur la constitution de communautés
confessionnelles en tant qu'entité juridique et qu'acteur politique : évolution contraire a celle
connue en Europe !!
+ Projection chrétienne est définie comme la marque du réalisme politique, dans une perspective
d'influence politique pour les puissances européennes concurrentes.
Article 2 : Le discours colonial des Saint-simoniens : une utopie post-révolutionnaire française
appliquée en terre d'islam (Egypte, Algérie). [par Philippe REGNIER]
=> limite hors programme, concerne surtout les années 1820-1840.
Discours saint-simonien sur la colo° du Proche-Orient offre un accès privilégié à un moment
décisif de l'invention du colonialisme français du XIX°s : le choix entre l'association et la domination.
Contexte France 1830, explosion anticléricalisme populaire et début de laïcisation. Le
mouvement Saint-simonien se trouve en porte-à-faux par rapport à ces évolutions :
-issue du philosophe subversif le comte de St-Simon (1760-1825), adversaire de l'aristo et du clergé et
adepte de la philosophie positiviste (proche de A. Comte).
-idée de nécessité d'une doctrine générale, d'un dogme et culte supérieur au catholicisme en
universalité effective.
=> tentative de dépassement du catholicisme, non par la réforme (Luther) mais par l'intégration
d'éléments allogènes pour former une sorte de doctrine syncrétique.
Mouvement rapidement interdit en métropole => s'exporte : vague de migrations,
beaucoup de St Simoniens partent dans but industriel. Ainsi, Muhammad Ali (Egypte) entretient
quelques St Simoniens à sa cour, certains occupent même des postes clé dans l'administration de l'Etat.
Ces réfugiés politiques font ainsi rentrer leur foi dans la sphère privée et adoptent vis a vis de l'Islam
une posture atypique : lisent le Coran, se convertissent (Expl : Ismaÿl URBAIN), apprennent l'arabe
(Expl : B. P. ENFANTIN) → désir de syncrétisme. Islam les fascine car montre puissance populaire de
la religion et leur semble porter des valeurs dénigrées aux Occidentaux en réconciliant sphère sociale et
privée.
>> la foi saint-simonienne constitue une synthèse en avant de leurs autres et antérieures convictions, une
solution pour les accommoder avec la religion officielle et avec désir de modernité.
Exemple de parcours :
Barthélémy Prosper ENFANTIN (1796-1864) :
Issu famille bourgeoise parisienne, fait Polytechnique où il rencontre futurs saint-simoniens. Début de
carrière dans compagnies de chemin de fer, dans le journalisme.
Ouvre branche religieuse à la communauté saint-simonienne en 1828 → condamnation en 1832 à 1 an
de prison.
En 1834 il part en Egypte dans l'espoir de trouver la « femme-Messie » → y exporte son projet de canal
de Suez avec ses amis polytechniciens, mais n'obtient pas soutien du sultan. Début des travaux de
prospection, topographique.
Après bref retour en France, il part pour l'Algérie en 1840 dans un poste officiel de chercheur, grâce a
ses appuis haut-placés. Il s'agit de mettre fin à sa proscription de fait, en le sécularisant et en lui donnant
une dignité de scientifique. Il conçoit l'idée d'un « Institut » qui serait sorte d'académie des sciences
musulmanes, entre Le Caire et Alger, et qui intégrerait des musulmans. Projet rapidement relégué, en
partie parce que s'inscrit contre violence ordinaire des colonies. Enfantin veut au contraire promouvoir
l'association, ou plutôt « l'exploitation des indigènes par eux-mêmes » [Enfantin]. Prends pour modèle
les Romains: place accordée aux valeurs religieuses des peuples soumis.
Ismaÿl URBAIN (1812 Cayenne -1884 Alger) :
Métis : fils illégitime d'un négociant Français et d'une Guyanaise de couleur. Son père
l’emmène enfant faire ses études en métropole, à Marseille.
Découvre saint-simonisme à Paris vers 1831, les suit en Egypte en 1833 à la recherche de la
femme Messie. Se convertit à l'islam (1836), apprend l'arabe, et -en Algérie- épouse une jeune
musulmane (1843). Devient interprète aux armées en Algérie et y découvre violence de la conquête.
Devient alors arabophile militant, se veut porte-parole des arabes en métropole. Son expérience de
l'islam l'amène à participer au Conseil Consultatif du gouverneur général d'Algérie. Conseiller personl
de Napo III, favorable à une politique arabophile et à la création d'un « royaume arabe ».
A la chute du Second Empire, se fait chasser d'Algérie par colons qui n'apprécient guère ses idées. Meurt
en métropole mais est enterré à Alger, seul musulman au cimetière chrétien.
=> Concepts de « civi° » et de « progrès » d'URBAIN différent de celui du colonialiste : le
colonisateur est bien celui qui montre la voie du progrès, mais il demande une prise en compte du
point de vue de l'Autre musulman africain. Demande une séparation entre le spirituel et le
temporel, condition de réalisation de l'égalité civile et politique : proposition laïque avant la lettre. En
1865, il propose aussi d'ériger une mosquée à Paris symétriquement à évêché à Alger, et reconnaître et
financer le culte musulman via un consistoire (en 1865).
>> Double caractéristique du saint-simonisme :
-laïcisation du religieux
-sacralisation du laïque
Article 3 : Les sources d'inspiration de la Constitution tunisienne de 1861.
[par Hafidha CHEKIR]
Constitution tunisienne du 26 avril 1861 a eu une courte vie : suspendue en 1864. Mais
importante car la première du monde arabo-musulman [1876 en Turquie ; 1879-82 en Egypte ; 1906
en Iran...).
Contexte marqué par : pénétration européenne avec conquête de l'Algérie (1830) et
affaiblissement dynastie ottomane ; apparition doctrine hostile à modernité occidentale et qui propose
renouveau relgx [les wahhabites = restauration d'un islam purifié et réactivation du patrimoine légué par les
Anciens] ; courant réformiste libéral qui prône transformation structures trad du pouvoir et limitation du
despotisme.
=> constitution tunisienne fortement imprégnée des expériences constitutionnelles françaises et de la
théorie du constitutionnalisme [= garantir la lib et la sécurité individuelle par la subordination du gouvt
constitutionnel à une Constitution écrite, qui doit limiter l'absolutisme, le despotisme ].
1/Proclamation du Pacte fondamental de 1857 : consécration des droits et libertés des
habitants du royaume.
Pacte de 1857 est sorte d'équivalent à la déclaration des droits de l'Homme qui a précédé Constitution
en Frc. Apparaît pour le première fois idée que souverain soumis au droit.
a-Sources de ce pacte : contexte de mouvement réformiste, avec abolition esclavage en 1846.
Tunisie est alors une province de l'Empire Ottoman qui est en pleine période de réformes
(les « Tanzimat » de la période 1839-76) et dont l'esprit influence Tunis : en 1839 puis 56, le sultan
affirme l'égalité entre musulmans et non musulmans et donne privilèges aux communautés non
musulmanes.
Influence occidentale directe par le biais des consuls français. (leur objectif : maintenir un
état faible en Tunisie tout en poussant pousser à plus d'autonomie vis a vis de l'Empire ottoman) et
consuls britannique (objectif : faciliter pénétration de capitaux anglais).
Également, influence de l'entourage du Bey composé d’oulémas et de mamelouks [=jeunes
esclaves achetés à Constantinople et élevés à la cour du Bey, souvent destinés à de hautes fonctions].
b-L'apport du Pacte fondamental.
Volonté de l'inscrire dans la référence religieuse :
-Préambule confirme attachement à la religion musulmane et les réformes respectent la chari'a qui « a
été instituée par Dieu pour défendre l'homme contre les injustices ».
-Serment qui conclu le Pacte donne bénédiction du Coran.
Pacte consacre principes de :
-liberté : de conscience et de culte ; de commerce et de l'industrie (pr répondre aux solicitations francobrit) avec absence d'intervention des autorités dans l'économie.
-égalité : équité face à l'impôt ; égalité devant la loi et service militaire pour tous. (→ répond a une
demande des consuls étrangers)
-propriété : droit de propriété reconnu pour les étrangers
-juridique : principe des tribunaux mixtes (assesseurs israélite si un sujet israélite est impliqué).
c-La référence au Pacte dans la Constitution de 1861 :
La Constitution intègre dans ses dispositions l'essentiel des principes reconnus dans le Pacte, afin de
consacrer le droit de tous les habitants, nationaux et étrangers. Permet de satisfaire les puissances
occidentales en garantissant à leurs sujets les conditions idéales pour s'installer en Tunisie et préparer
l'avènement d'un protectorat.
2/Promulgation de la Constitution de 1861 : établissement de la monarchie constitutionnelle
Met en place une monarchie constitutionnelle : pouvoirs du bey régit par la Constitution,
partagés avec d'autres organes et soumis à des restrictions. Prend la forme d'une Charte octroyée
(comme celle de 1814 en Frc) : geste unilatéral, pas de consultation préalable de la pop° ou de ses
représentants.
=> Place les rapports du souverain avec son peuple sur une base contractuelle et juridique... alors
que situation de fait l'assoit sur la tradition et les principes religieux.
a-Pouvoir exécutif :
-Chef de l'état : succession héréditaire par ordre d'âge, de la famille husseinite, au pouvoir depuis 1705.
Il prête serment qui mentionne Dieu et s'engage rien faire contraire au Pacte.
Déchéance du Bey possible si respecte pas son serment et viole lois.
-Premier ministre : prérogative explicitées seulement en matière judiciaire. A un droit de regard sur
tous les ministres et sur budget de chaque ministère : c'est le véritable chef du gouvernement.
-Les ministres : affaires importantes doivent être soumises au chef de l'Etat et auConseil suprême.
b-Pouvoir législatif :
Conseil suprême : pas représentants élus mais 1/3 membres nommés par ministres et fonctionnaires,
2/3 notables.
→ A l'initiative des lois et vote les lois. Loi doit ensuite être adoptée par Chef de l’État en Conseil des
ministres. Le Conseil suprême peut s'opposer, c'est lui qui enregistre. A également des compétences
juridictionnelles.
c-Pouvoir juridique :
Avant 1861 : coexistence justice religieuse, séculière et capitulaire. Avec Constitution, les tribunaux
sont réorganisés selon spécialisation : de police, civil, militaire de commerce...etc.
Principe d'inamovibilité des magistrats garantie indépendance de la magistrature
Tous tribnx (sauf conseil de guerre) ont la possibilité de faire appel.
Principe d'égalité devant la loi.
Conclusion : Constitution tunisienne de 1861 est incontestablement d'inspiration occidentale,
dans sa forme comme dans son contenu.
Mais y a t'il respect de tous les principes du constitutionnalisme ?
-séparation organique des 3 sphères de pouvoir, mais pas de séparation du point de vue fonctionnel
(l'autorité centrale reste de Conseil suprême)
-contrairement aux régimes occidentaux, le chef de l’État est responsable devant le Conseil suprême.
-mamelouks accaparent vite les places au Conseil suprême
Seconde question en suspens : à aucun moment il est précisé s'il s'agit d'un État religieux ou
un État laïque. Semblerait que les rédacteurs aient cherché à trouver forme de conciliation entre
principes de constitutionnalisme et principes religieux.
Quelles suites ?
Constitution fut confrontée aux soulèvements populaires à Tunis contre privilèges
accordés aux juifs par le Bey, et hostilité de certains oulémas. Campagne de protestation aggravée par
situation eco et socl du pays. Ces réformes privilégiaient les notables, tunisiens ou étrangers, et
concernent au final très peu les couches populaires.
=> Pacte fondamental et Constitution « ne prenaient pas en considération les aspirations populaires et
se contentaient... de lever les obstacles juridico-religieux qui freinaient la pénétration européenne...
tout en sauvegardant l'absolutisme du pouvoir ».[Charter, 1975]
Suspension de la Constitution en 1864, installation du protectorat en 1881 : mise œuvre
peu durable de la Constitution mais qui accéléra les changements dans les représentations, permis une
appropriation de cette idée constitutionnelle par la population.
=> 1920 : création du Parti libéral constitutionnaliste tunisien. Le rétablissement de la Constitution
devient une revendication populaire mise en avant par les nationalistes. Réclament Parlement élu
au suffrage universel, dans le cadre d'une monarchie husseinite tunisienne souveraine.
=> 1921 : deux juristes français sont chargés de voir compatibilité du rétablissement de la Constitution
de 1861 avec le régime de protectorat. Signe que pouvoir colonial prend très au sérieux ces
revendications.
Exemple d'appropriation/détournement par les indigènes de valeurs et d'outils à l'origine mis en place
par les européens pour dominer.
Article 4 : La politique coloniale de Jules Ferry en Algérie et en Tunisie.
[par : J-P LUIZARD]
=> Limite hors programme car surtout regard de la métropole.
J. FERRY = à la fois le chantre de la colo° et de la mission civilisatrice de la France... et le
père de l'école laïque
→ personnage qui montre la cohérence de ces deux aspects dans le contexte et les idéaux de l'époque.
Il n'a pas eue de discours spécifique sur l'Islam mais, ayant eu à gérer Algérie et Tunisie, il a intégré
vision de l'islam à celle plus large de ses conceptions coloniales et de la religion.
1/J. FERRY, un homme de son temps.
1870 : désastre de Sedan, France affaiblie, effacement diplomatique avec la pol de
« recueillement », qui se termine avec l'arrivée des républicains au pouvoir et l'expédition de
Tunisie (1880-81). Fondateur du Second Empire français avec la reprise de l'expansion coloniale sous
son égide [1881 : protectorat Tunisie, 1883 : protectorat Annam ; 1883-85 : conquête du Tonkin ; 1879-1885 :
conquête du Congo ; Madagascar].
1892 : le parti colonial devient un groupe parlementaire, il s'étend à toutes les tendances
politiques mais la grande majorité est constituée de républicains modérés. FERRY s'appuie également
sur la franc-maçonnerie (lui même frc-maçon à partir de 1875).
Contestation de la politique coloniale par certains de ses contemporains:
-CLEMENCEAU (chef des radicaux)
-les droites, surtout monarchistes (argument : la colo° coûte trop cher).
a-Les sources d'inspiration de sa pol coloniale.
FERRY lecteur assidu de journaux, dont britanniques : y puise inspiration pour définir son discours sur
la colonisation.
→ reprend l'expression de « mission civilisatrice » à Charles LAVOLEE, dans son article de 1863 paru
dans la « Revue des Deux Mondes ».
→ marqué par la pensée de LEROY-BEAULIEU, auteur de « La colo° chez les peuples modernes »
(1874)
→ sensible au protestantisme libéral : reprend idée que la colo° est le triomphe de la liberté par
l'éducation des peuples.
b-Comment a t-il exposé sa politique coloniale ?
FERRY sachant colonisation peu populaire attend d'avoir été chassé du pouvoir pour justifier
ouvertement sa politique coloniale.
→ ainsi, l'opération de Tunisie a été menée en cachant des objectifs, présentée comme une simple
opération de police afin d'obtenir les crédits à la Chambre.
→ discours à la chambre, en tant que simple député, le 28 juillet 1885 : décline les trois raisons de la
politique coloniale :
1-patriotique : garder place de premier plan dans le monde dans un contexte de rivalité avec la GB
(« rayonner sans agir … en regardant comme un piège... toute expansion vers l'Afrique ou vers
l'Orient... c'est abdiquer ») + puissance coloniale comme composante du prestige et fierté national dans
contexte perte Alsace-Moselle. Argument patriotique le plus important dans son esprit.
2-économiques : colo° ouvre des marchés et stimule les échanges, règle le problème des débouchés, dans
contexte montée du protectionnisme en Europe (« la politique coloniale est la fille de la politique
industrielle »). Arguments mercantilistes classiques en fait.
3-organisationnelles : étendre la civi° industrielle à la surface du globe ; argument de la « mission
civilisatrice » (« les races supérieures ont … le devoir de civiliser les races inférieures »). Républicains
divisés sur cette question : certains croient en l'amélioration des « races inférieures » par l'éducation
pour en faire des égaux, d'autres seulement dans perspective de rapprochement du modèle occidental.
Rares sont ceux qui comme Clemenceau dénoncent l'idée même de hiérarchie des races et hypocrisie de
l'argument qui cache violence. Vision civilisatrice ne passionne de toute façon pas ses contemporains.
2/L'Algérie, du rattachement à la condamnation de la politique d'assimilation.
Conquête commencée fin règne Charles X, poursuivie sous Louis-Philippe (reddition d'Abd
el Kader en 1847) : a surtout été l'œuvre de la monarchie et avait été critiquée par les républicains pour
son coût et ses méthodes.
Entre 1848 et 70, succession de politiques contradictoires, finalement souci de favoriser les
colons l'emporte sur politique arabophile :
-1865 : senatus-consulte établit pour la première fois en droit la différence juridique entre
Européens et indigènes, qui continuent à être régis par loi religieuses, sauf si demandent à devenir
citoyen (demande naturalisation concerne max 200 musulmans et 152 juifs jusqu'en 1870 : t peu).
-1870's : avec la République, poursuite pol d'assimilation à la France, avec exportation
systm administratif.
→ Création 3 départements (1870)
→ système municipalités destinés à préserver la domination des colons : commune de plein droit /
mixtes / indigène
→ rattachement des services administratifs aux ministères de la métropole
→ afflux de nouveaux colons.
Idée de ferry : conquête des musulmans par l'école laïque... mais peu sont scolarisés.
-1870 : décret Crémieux accorde la citoyenneté aux Juifs des 3 départements.
-1873 : abolition propriété collective des Douars [=groupes de familles], autorise l'Etat à
prélever une partie des terres pour les revendre aux colons.
-1881 : Code de l'indigénat soumet tous les musulmans, citoyens ou non, à un régime et à
des tribunaux spéciaux. Définit des infractions imputables aux indigènes seuls et des peines spéciales
aux indigènes (amendes collectives, internement...)
-1881 : diminue le pouvoir du Gouverneur Général (sorte de vice-roi, avec pvr civil et
militaires) qui devient une sorte de préfet.
-1889 : étrangers européens obtiennent la citoyenneté française et leur naturalisation
=> seuls les musulmans sont donc à l'écart de la citoyenneté : l'islam devient la religion du colonisé.
-Tournant 1892 : FERRY fait un voyage en Algérie à la tête d'une commission sénatoriale
« Commission des 18 », instituée suite à une demande du rapporteur du budget de l'Algérie.
Pendant 53 jours, parcours territoire, interroge colons et indigènes, observe rouages de l'adm°. Son
rapport est publié en 1892 sous le nom « Le gouvernement de l'Algérie ». Il se démarque de la politique
d'assimilation des républicains et constate échec de cette politique en Algérie : « nous avons péché par
esprit de système ». FERRY prône désormais une politique indigénophile.
→ fustige stupidité d'appliquer le code forestier métropolitain en Algérie qui ne tient pas compte des
usages locaux ( pâturage, nomadisme).
→ est favorable à réforme des communes de plein exercice, système qui exploite musulmans sans leur
donner aucune représentation.
→ de manière générale, favorable à une place plus importante des musulmans dans conseils municipaux
et généraux
→ n'est pas pour la suppression du Code de l'indigénat
→ rejette possibilité de self-government pour l'Algérie : « le peuple arabe apprécierait peu les droits
politiques … (il) ne nous demande pas de l'associer à nos libertés politiques » selon lui. Arabes
préféreraient choix d'autorité que choix issu du suffrage.
Article 5 : La revanche des congrégations ? Politique anticléricale et présence catholique française
en Palestine au début du XX°s.
Auteur : Dominique TRIMBUR
Pbmtq : pol française change t-elle au cours des années considérées et affecte elle la vie des
établissements catholiques du Moyen-Orient ?
I-La législation anticléricale n'a pas d'effet, voire un effet positif sur la présence française en Palestine :
1880's : laïcité en Frc provoque migration des établissements relgx à l'étranger, en
particulier en Terre Sainte.
1905 : loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat
Mais dans les faits, la République limite tout ce qui peut porter atteinte à sa puissance
internationale et reste pour cela très étroitement associée au catholicisme hors de France, en fait un
outils de sa pol / influence internationale (plus ou moins idée de Soft Power). Défense du catholicisme
d'autant plus que les intérêts français sont menacés en Terre Sainte (concurrence : voyage Guillaume II
en Orient en 1898 ; Italie qui demande protectorat sur les catho).
→ France agit pour la défense des populations chrétiennes, encourage indirectement écoles françaises
catho en Terre Sainte.
→ passe souvent par l' intermédiaire de ses représentants sur place, pour éviter embarras de la
métropole, censée être laïque.
Expl : novembre 1901, accords de Mythilène qui renforcent le statut des établissements
congrégationnistes français dans l'Empire Ottoman : reconnaît les écoles fondées par congrégations
françaises, exonère de taxe ces établissement par exemple.
→ Après 1ere G mondiale, politique anticléricale reléguée au second plan en métropole : relance du
protectorat catholique et relance de la présence française en Palestine par le biais des établissements
religieux.
Expl : 1920, l' "École pratique d'études biblique" (fondée à Jérusalem en 1890 par des Dominicains) est
reconnue par l’État et devient "École biblique et archéologique française".
II-Un impact réel négatif à l'étranger de la législation anticléricale métropolitaine :
-Affecte l'image de la France : rivaux (Allemagne, Italie) s'emparent de l'argument que la
France anticléricale est indigne du protectorat sur les catho de la région.
-France étudie possibilité de remplacer réseaux relgx en Orient par un réseau laïque : 1902,
création Mission laïque française, mais faiblesse de son implantation.
-Loi de 1901 sur les associations crée une situation de non-droit qui gêne la bonne
marche des établissements religieux en Orient, leur bloque des demandes de subventions de la part de
l'Etat français. Pousse établissements à chercher la rentabilité financière.
-Très rapidement après 1901, désorganisation des établissements et baisse du
recrutement des congrégations présentes en Palestine, dû a l'interdiction en métropole du noviciat.
Remplacement des congrégationnistes Français par des religieux étrangers.
=>A la veille de la 1ere G mondiales, diplomates et administrateurs français au Proche
Orient tirent sonnette d'alarme, demandent révision de la législation qui atteint aux intérêts nationaux
dans la région : demandent qu'on autorise le recrutement des religieux par exemple. Personnalités
religieuses et politiques s’emparent de la question en métropole (comme Maurice BARRES).
Effet de l'engagement de religieux dans la guerre : dans les années 1920, réchauffement
des relations entre la France officielle et les congrégations encourage rentrée des congrégation et des
religieux en métropole. Dès lors exil perd son sens de refuge et les établissements religion en Terre
Sainte changent de fonction.
Expl : Assomptionnistes rouvrent séminaires en France, ce qui supprime la nécessité d'un tel
établissement en terre sainte → "Notre-Dame de France" n'accueille plus de novices et devient un
simple centre d'accueil pour les pélerins et touristes de passage.
Ccl° : L'anticléricalisme n'est pas un article d’exportation (comme dirait GAMBETTA),
mais il reste que poltq anticléricale intérieure a des effets sur l'extérieur. A long terme, il participe à
la dégradation de la position française après un age d'or fin XIX°-début XX°s. Congrégations en
Palestine sortent donc fragilisées et peu à même de résister aux attaques que sont mandat britannique et
déchirement.
Article 6 :
Quand la laïcité des franc-maçons du Grand Orient de France vient aux Jeunes Turcs.
Auteur : Thierry ZARCONE.
=> hors programme, pas de situation coloniale.
1937 : Mustafa KEMAL ajoute la laïcité à la Constitution de 1924 de la Jeune
République Turque (1923).
→ aboutissement d'une histoire centenaire, avec mesures de sécularisation qui commencèrent avec la
période des Tanzimat (1839-1861), et reprend en 1908 avec les Jeunes Turcs puis après 1823 par les
Kémalistes.
C'est cette tendance du mouvement jeune Turc en exil à fin XIX°s qui établit des liens
étroits avec la franc-maconnerie française et italienne, et intègre leur anticléricalisme et leurs idées
sur la laïcité et la modernité.
Ironie de l'histoire : en 1935 le grand-Orient de Turquie est mis en sommeil, les loges
françaises et italienne sont supprimées... après que le régime de Kémal ait "absorbé" ses valeurs de
laïcité et modernité.
Article 7 : Peuple juif/populations autochtones : les fondements de la domination britannique en
Palestine.
Auteur : Nadine PICAUDOU.
Pbmtq : Echec de la politique brit en Palestine car difficultés à concilier les deux volets de
son engagement lors du mandat dans l'entre-deux guerres :
-soutenir et favoriser la construction d'un Foyer national juif (déclaration BALFOUR de 1917)
-doter le pays de libres institutions de gvt, dans le cadre d'une unité politique de la Palestine et dans
le respect des exigences de justice à l'égard de toutes les populations.
I-Les présupposés de l'action politique britannique en Palestine.
A- Présupposés à l'égard des Juifs :
Soutien brit au sionisme dicté par mélange d'engagement moral et d'intérêts stratégiques
dans un contexte de clientélisation des nationalismes orientaux avec démembrement Empire
Ottoman.
Soutien britnq au sionisme en 1915-1917 qui cherche surtout la victoire de l'Entente :
-sionisme est alors un instrument de l'Allemagne (nbx juifs germanophones...) : réveil fantasme
britannique d'un complot judéo-turco-allemand.
-cherche à mobiliser la communauté juive russe contre sa minorité de juifs bolchéviks et pacifistes qui
sont pour une sortie de la guerre.
-volonté de mobiliser la communauté juive américaine pour entrée en guerre des Etats-Unis contre
l'Empire Ottoman.
=> présupposé à tout ça : fantasme d'un judaïsme mondial puissant et qui serait un élément
déterminant des relations internationales + confusion judaïsme et sionisme.
Soutien au projet sioniste devient après guerre l'instrument de la mainmise brit sur la
Palestine.
-> Sionisme offre légitimité, caution morale à la GB pour sa présence en Palestine (mandat en 1922).
-> Raisons stratégiques de cet intérêt : point de jonction important entre Egypte et Mésopotamie et
maillon de la route vers l'Inde (glacis protecteur autour de Suez) + contre attaquer influence française en
Terre Sainte.
Dans classe pol de GB pas perception sur le long terme de la position à avoir à l'égard du
sionisme, mais avec le temps consensus sur le fait que l'Etat se trouve engagé par une promesse
qu'il doit honorer quel qu’en soit le prix, car retrait signifierait perte de crédibilité et donc
affaiblissement de sa politique impériale.
B-Présupposés à l'égard des Arabes de Palestine :
Vision coloniale classique où l'Arabe est la figure par excellence du "native", donc mise en
œuvre d'une éthique coloniale associant domination et protection.
Expl : Lord CURZON en 1923 lors de la Conf impériale : "être juste et ferme avec les Arabes".
De plus, population locale opposée au "pur arabe" des steppes et désert de l'intérieur
dans le discours britnq : les autochtones palestiniens ont l'image mêlée du Levantin dégénéré et celle
du paysan asservi (opposé au libre bédouin qu'on assimile à la Transjordanie).
→ Ce regard "ethnographique" produit une vision politique des Arabes locaux comme population
qu'il faut traiter avec équité mais à laquelle on ne reconnaît pas la dignité de peuple... donc Palestine
exclue d'emblée de la question nationale arabe (seulement pour la Syrie).
De cette vision découle action britnq fondée sur gestion paternaliste de la pop° arabe de
Palestine, fondée sur préservation du statu-quo social et religieux. Pouvoir réel reste aux mains des
administrateurs britnq, et notables urbains tradi deviennent leurs interlocuteurs légitimes.
II-Contraintes de l'action politique britannique en Palestine.
- Prendre en compte l'hostilité fondamentale des Arabes au projet de Foyer national juif :
surtout suite à émeutes antijuives (1921 à Jaffa ; 1929 autour question du Mur des Lamentations).
→ Britnq font exercice de réinterprétation permanente de la déclaration Balfour : abandon de l'idée
de majorité politique juive dans le pays dans discours officiels ; rapport SHAW de 1930 pointe problème
des paysans arabes sans terre et du chômage arabe.
→ 1930 : « Livre Blanc » de Lord PASSFIELD propose concessions sur l'immigration juive et la vente
des terres aux Juifs.
Lobbying sioniste t fort à Londres et mise en cause internationale du mandat britanique dans la région.
1931 : GB revient sur ces concessions faites aux Arabes.
=> Pb fondmental : présence britnq fonde sa légitimité sur patronage du sionisme (échelle
internationale), mais seul le consentement de la soct arabe peut en garantir la stabilité (échelle
locale).
Évolution : contestation Arabe prend ampleur régionale voire internationale.
-1928 ; création d'un comité de défense des le lieux saints de l'Islam
-1931 : réunion à Jérusalem d'un congrès islamique : 1ere mobilisation anti-impérialiste a tonalité
religieuse islamique.
-1935 : Palestine n'est plus au Colonial Office mais au Foreign Office + India Office + Etat-Major.
Signe que enjeux impériaux ont pris le pas sur les enjeux internes.
-1937 : conférence de Bluden réunit les Etats Arabes : rejet du projet PEEL de partage de la Palestine et
menacent la GB de se ranger auprès des puissances européennes qui lui sont opposées si ne renonce pas.
Nécessité s'assurer neutralité Etats Arabes dans conflit mondial qui s'annonce.
-1939 : nouveau Livre Blanc, s'oriente vers un gel du Foyer National Juif.
III-Une politique de communautarisation qui exacerbe le clivage judéo-arabe.
A/Côté Juif : des initiatives de communautarisation entérinées par la GB
Dès avant les émeutes de Jaffa (1921), l'adm° britanq a cautionné les dynamiques politiques
internes au yichouv [=communauté juive en Palestine] et entérine naissance d'organes pol de gestion de la
communauté :
-1920 : autorise la Knesset, d'où émanera conseil national permanent (1949)
-la Histadrout, un syndicat
-la Haganah, une milice d'auto-défense
-système bancaire propre, écoles, services de santé...etc.
En 1927, adm° brit donne statut à la communauté juive, prévoit conseils rabbiniques et
organes communautaires locaux, et reconnait l'ensemble des structures pol dont s'est
progressivement doté le yichouv.
B/Coté Arabe : un processus de communautarisation largement sur l'initiative des Britnq.
Janvier 1922 : Conseil musulman suprême, organisme religieux élu pr 4 ans et financé
par le Haut Commissariat britnq, se voit confier :
-le contrôle des wakf [=org° qui gère la charité : école, hôpitaux...]
-la tutelle des tribunaux religieux et la nomination du personnel judiciaire.
Hâjj AMIN AL-HUSEYNI (1897-1974), candidat des Britanq, est élu mufty [=autorité
religieuse qui a charge interpréter lois, donner des avis juridiques ].
=> Britanq procèdent ainsi à une communautarisation des musulmans dans une région où seuls les non
musulmans (chrétiens + juifs) étaient organisés sur base communautaire.
=> Ce Conseil religieux qui gère les affaires de la communauté est pour les notables palestiniens une
alternative à une collaboration politique directe avec les Britnq, collab° refusée jusque là pour ne
pas cautionner déclaration Balfour.
=> Signe l'échec à mettre en place des institutions politiques représentatives de la population dans son
ensemble.
H. Al Huseyni : a soutenu les émeutes du Nabi Mouassa (pélerinage sur tombe Moïse) en 1920, puis
amnistié en échange son soutien aux Britnq.
Il soutient le projet sioniste afin de voir crée un État Palestinien : c'est un nationaliste !
IV-L'échec des politiques de "libre gouvernement" (self government) :
1923 : boycott arabe du vote pour un premier projet de conseil législatif élu.
Les Britnq adoptent dès lors stratégie gradualiste : représentation pol locale conçue comme
étape vers participation niveau national : organis° d'éléction municipales en 27 et 34 dans cet esprit.
Echec de ces tentatives successives car:
-sionistes demandent une parité poltq, le temps que la pop° juive devienne majoritaire.
-refus/réticences Arabes à entrer dans le jeu institutionnel du mandat, afin de ne pas entériner projet
de Foyer national juif : accepter représentation, même égalitaire revient à admettre que pays n'est pas
arabe.
-Britnq semblent se refuser à reconnaître des institutions représentatives de la majorité arabe. Tentent de
compenser cette absence d'institutions représentatives (qui est l'une des obligation de son mandat)
par l'intégration des élites locales, juives et arabes, à l'adm° du mandat. Mais aucun juif ou arabe
n'accède aux plus hauts postes de l'administration mandataire. Britnq gardent une emprise directe sur
la haute adm° en Palestine, pour cause d'"exceptionnalité" des "passions raciales et religieuses".
=> c'est plus une politique de patronage classique qu'une politique d'association des élites arabes au
pouvoir.
Expl : fonctionnaires arabes semblent avoir intégré ce rôle : 1936, pétition à l'itiniative de Musa ALALAMÎ (avocat gouvt britnq), où signataires se reconnaissent mission d'assurer lien entre gouvernement
et population arabe.
Conclusion : Des obligations incompatibles ?
-1937 : rapport commission d'enquête PEEL : dénonce caractère fondamentalement
irréconciliable des deux obligations du mandat britannique (1 : Foyer national juif + 2 : libres
institutions).
→ Difficultés constante des Britnq à hiérarchiser les deux obligations.
Explication : le décalage des politiques menées à l'égard des deux communautés, Britnq
ayant des présupposés et des contraintes différentes envers chacune.
Ainsi l' "exigence de justice à l'égard de toute les populations" que demande la deuxième
obligation du mandat est comprise différemment selon le groupe concerné :
→ à l'égard des Juifs : appuyer processus construction nationale.
→ à l'égard des Arabes : protection, garantir leur droits.
De plus, ce décalage est aggravé par la prise en compte des dimensions internationales
du problème de la Palestine et l'absence de consensus dans la classe politique Britnq.
PARTIE II : L'échec de l'universalisme républicain français en Algérie.
Article 8 : Les enjeux de la naturalisation des Juifs d'Algérie : du dhimmi au citoyen.
Auteur : Joëlle ALLOUCHE-BENNAYOUN.
-juillet 1830 : Juifs rencontrés par armées française "fuient apeurés".
-juillet 1962 : plus de 90% des français d'Algérie de confession juive quittent définitivement l'Algérie
pour la France.
=> entre ces deux dates, Juifs d'Algérie ont progressivement refoulé leur identité berbéro-arabe
pour adopter identité française, symbole d'homme libre qui coexiste avec leur identité religieuse
cantonnée à la sphère privée.
=> Transformation au début subie, devient de plus en plus souhaitée et revendiquée par les juifs
indigènes, qui deviennent rapidement des acteurs conscients de leur propre acculturation.
I-Les aspect historiques.
Juifs présents en Afrique du Nord depuis VIII°s avant JC. S'y installent plus massivement
après soient chassés d'Egypte et après destruction du Temple en 70.
Juifs convertissent des tribus berbères à l'époque romaine. Absorbent ensuite aux XIII puis XVem siècle
une partie des Juifs expulsés de France et d'Espagne.
Avec conquête du Maghreb par Arabes et islam au VII°s, ces Juifs vivent sous le statut
de dhimmi [="protégés" : des sujets de seconde zone, qui sont tolérés par le pouvoir musulman à condition que
tout marque leur infériorité ; sont soumis à leur juridiction propre pour affaires internes à la communauté... dans
cas affaire Juif/musulman, relève du cadis et Juif systématiquement condamné ]. Périodes de tolérance alternent
avec périodes de persécution.
Lors débarquement français en 1830, les Juifs sont entre 15 et 16000, les musulmans 2
millions. Sont surtout implantés dans 4 villes : Alger, Oran, Constantine, Tlemcen. Sont organisés en
"nations", des communautés indépendantes, avec un chef responsable devant les autorités (il lève
l'impôt). Quelques riches familles de négociants, proches du pouvoir turc local, mais dans l'ensemble
une population juive très pauvre, méprisée et humiliée quotidiennement.
=> Ont impôts spécifique, interdiction posséder une terre, porter des armes, monter à cheval,
avoir des vêtements verts ou rouge, devaient dépendre les pendus, protéger les jardins des puissants lors
des invasions de sauterelles...etc.
II-L'évolution de la judaïcité algérienne.
Ascendant de la France sur grande masse des Juifs d'Algérie car :
1/la colonisation pour Juifs d'Algérie c'est :
– affaiblissement des normes islamiques traditionnelles
– égalité avec les musulmans => donc amélioration de leur situation.
2/Beaucoup Juifs accueillent favorablement présence française sous l'influence de Juifs installés en
France (Marseille surtout) après pogrom d'Alger 1805 avec qui familles ont gardés liens.
3/"rencontre sentimentale" (R. AYOUN) : mysticisme leur fait interpréter la venue des Français à la
lumière sentence d'un grand rabbin expulsé ' siècle avant et qui a dit "le verbe de Dieu arrive de France".
Colo° comme providence divine qui les libérerait du joug musulman.
En France, y a eue émancipation des Juifs sur le principe de négation d'une "Nation"
juive... le communautarisme en Algérie pose donc un pb idéologique. Juifs de France s'emparent de
cette question, et reprennent à l'égard de leur coreligionnaires d'Algérie le discours dont avaient été
l'objet des années auparavant : seraient dans un état d'arriération et la colo° apporterait civilisation
synonyme de "régénération".
Très vite, population juives d'Algérie sont administrativement de moins en moins soumises à
leurs notables traditionnels.
Expl : Réforme des tribunaux rabbiniques : au début de la conquête, le pouvoir confirme le rôle des
tribunaux juifs, puis dès 1832 possibilité de faire appel devant autorités françaises, et dès 1842 Juifs
sont exclusivement justiciables devant tribunaux français sauf pour cas religieux et état civil.
Expl :1845 = création d'un Consistoire Algérien supprime ce qui reste des institutions de la judaïcité
traditionnelle . Ses membres sont Juifs originaires d'Alsace/Lorraine, ils sont nommés par le Ministère
de la Guerre et prêtent serment fidélité au roi de France. Sont chargé org° culte + ont une mission
"civilisatrice" auprès des Juifs d'Algérie.
III. Abandon du statut personnel, acquisition de la nationalité française : un processus par étapes.
Argument en métropole pour acquisition de la citoyenneté française pour les Juifs d'Algérie :
-Juifs ont accueilli la France comme libératrice, forment donc soutien à la présence française en Algérie
-sont prêts à perdre leur statut personnel (alors que refus musulmans sur ce point) et seraient plus aptes à
"assimiler" les principes de la "civilisation".
-action des Juifs de France (émancipés sous la Rev°), dont Cremieux est issu.
Instruction en Français dans des écoles israélites sous contrôle du Consistoire donne accès à
école, langue française et accélère "modernisation" des Juifs d'Algérie.
Mais des résistances : pop° préfèrent souvent leur rabbin locaux aux rabbins formés en
métropole ; peu de sympathie envers Juifs de France qui se donnent pour mission de les "civiliser".
-1865 = senatus-consulte de Napo III donne possibilité aux Juifs et Musulmans
d'Algérie de devenir citoyen, à condition de renoncer à son statut personnel. Peu de succès : seul 144
juifs acquièrent citoyenneté frcse entre 1865 et 70. (causes : procédure longue, encore bcp
d'analphabétisation, et surtout car ce statut demande une démarche personnelle qui passe pour une forme
d'apostasie).
- 24 octobre 1870 décret Crémieux = fin du régime militaire et naturalisation collective
des Juifs d'Algérie.
=> plus de 34000 Juifs deviennent citoyens Français (représentent + de 13% de la pop° non
musulmane du pays, mais jusqu'à 20 % de l’électorat dans grandes villes, donc de quoi faire changer la
majorité et renforcer le camp républicain).
=> certains refusent (surtout familles de l'arrière-pays) par peur d'une déjudaïsation liée à la perte de
leur statut personnel, et partent en Tunisie ou au Maroc voisin. A l'inverse, quelques juifs Maroc et
Tunisie s'installent alors en Algérie.
But du décret Crémieux et des naturalisations massives qui suivent (loi de 1889 sur la
naturalisation des Européens : Italiens, Maltais, Espagnols) : "faire" des Français pour renforcer
présence française en Algérie : besoin de soldats sur place, besoin de républicains (supposément)
convaincus.
=> Les Juifs se retrouvent de fait dans le camp des colonisateurs.
Conclusion : En devenant citoyens Français, Juifs d'Algérie se retrouvent dans une
communauté de destin avec pieds-noirs [=colons de France et d'Europe du sud], qui pour la plupart les
haïssent.
Au moment du décret Crémieux, les Juifs forment un groupe de 35000 pers, sur une base
ethnique et religieuse, mais socialement hétérogène. Ce groupe qui reste socialement marqué par très
forte proportion de pauvres et d'indigents, au moins jusqu'à la fin du XIXeme sicèle, mais le décret a
permis leur développement social, économique, politique.
Colons affectent de considérer décret comme "injuste" pour les musulmans, mais aucun ne
propose de l'étendre à la population musulmane. Antisémitisme constant, souvent violent, des colons
culmine sous Vichy.
Évolution religieuse et culturelle des Juifs d'Algérie plus lente qu'en métropole.
=> Acculturation sélective, qui doit beaucoup à leur scolarisation, massive dès 1882 :
-abandon progressif des anciens quartiers juifs, du costume tradi, de la langue judéo-arabe.
-choix de prénoms français, mais maintien de leurs noms de famille
-organisation familiale , réseaux de sociabilité, quotidien et pratiques religieuses restent profondément
marquées par le judaïsme de leurs ancêtres.
-proclament leur patriotisme, sont soldats lors de la 1ereGM au même titre que les autres citoyens ; en
1939-45 (abrogation décret Crémieux en oct 1940) peuvent s'engager dans résistance à Londres, ou
comme volontaires dans la Première Armée qui participe à libération de la France en 44.
Francisation accélérée qu'ils ont subie d'abord (France républicaine a besoin de leur vote);
est ensuite revendiquée fièrement. Singularité de leur vote : appui aux partis de gauche et aux tentatives
visant à égaliser le statut des musulmans.
Pendant guerre d'Algérie une minorité rejoint le FLN et une minorité rejoint l'AOS,
l'immense majorité choisissant émigrer en France métropolitaine.
Article 9 : Islam et citoyenneté en Algérie sous la IIIeme République : logiques
d'émancipations et contradictions coloniales (l'exemple des lois de 1901 et 1905).
Auteur : Anna BOZZO.
Pbmtq : quel impact a eue la laïcité républicaine en Algérie ? Cette pol a t'elle été
intériorisée par les colonisés ?
Chrono du glissement d' « indigène » à « musulman »:
-au moment conquête : distinction entre les « citoyens » Français et les « nationaux », qui sont sujets de
la france avec un statut personnel propre.
-senatus consulte de 1865 : possibilité d'accéder à la citoyenneté pleine et entière par le biais de la
naturalisation individuelle, à condition de renoncer à son statut personnel pour Juifs comme pour
musulmans.
-décret Crémieux de 1870 : établit une distinction entre les nationaux autochtones en naturalisant
automatiquement tous les « israélites indigènes ».
Nécessité de prendre en compte le facteur religieux dans le système de luttes politiques vers
l'indépendance car :
-L'islam réformiste est le seul a avoir, à partir de l'entre-deux guerres, su fédérer les différentes options
et sensibilités qui existaient dans un mouvement national très composite.
-L'organisation de la résistance culturelle intervient dans un contexte sécularisé. Ainsi, l'association des
ulémas réformistes, qui se voulait « apolitique », a fournit au mouvement national un fondement culturel
qui se voulait différent de celui proposé par la IIIeme Rep : une identité enracinée dans l'islam.
Deux éléments qui expliquent que la relation coloniale se soit construite en Algérie à
travers une surdétérmination du religieux, dans les deux camps :
→ Démarche propre à l'islam : percevoir la dimension religieuse des événements politiques.
→ Vocabulaire et catégories de pensée du colonisateur : on oppose "Français" et "musulmans" comme si
étaient antonymes dans le même registre. Ainsi, si les colons ne sont pas tous chrétiens pratiquants, sont
tous d'accord pour faire de la religion chrétienne un marqueur identitaire du colonisateur : cotiser et
financer église dans chaque ville et village de colonisation ne pose pas de pb par exemple.
Une perception de la religion du plus grand nombre d'Algériens, l'Islam, comme une menace
permanente pour le colon a mené à une politique de « confessionnalisation » toujours plus poussée (Cf
article précédent). Cette confessionnalisation a eut pour conséquence une double évolution de l'Islam :
-sécularisation de l'islam : abandon de la prétention à caractère exclusif de leur message ; repli de
l'Islam dans la sphère privée et sur la spiritualité vécue individuellement.
-affirmation dans l'espace public d'un islam identitaire et communautaire, devenu une idéologie
politique moderne et globalisante, apte à engager une résistance pol et culturelle contre le colonisateur.
=> politique à l'égard de l'islam (qui aboutit avec loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1907) a
eue effet inverse de celui escompté.
Dans un premier temps, fonctionnarisation des cultes et clientélisation des confréries
musulmanes pour mieux les contrôler. A pour effet de diviser les musulmans, mais aussi parfois de créer
de nouvelles structures de contestations à l'ordre colonial.
Expl : Confiscation des biens « habous » [= l'équivalent des « wakfs » au Moyen-Orient. Biens inaliénables,
érigés en fondation religieuse et dévolus à des buts pieux comme l'entretien des mosquées, l'assistance aux pauvres et
aux pèlerins...etc] au lendemain de la conquête a de lourdes conséquences :
→ rend nécessaire l'instauration d’établissements d'enseignement supérieur, les « medersas »,
opérationnels en 1850. Donnent un enseignement gratuit des sciences islamiques, mais aussi de
Français , d'histoire, géographie. Devaient servir à recruter le personnel pour le culte et la justice
musulmane, des fonctionnaires, mais aussi former des esprits « dociles ».
→ Fonctionnarisation du culte musulman avec le décret de 1851 : réorganise le culte musulman et
la caste des "desservants de mosquée" devient une sorte de clergé payé par l'Etat, avec un certain
prestige, mais est associé aux colonisateurs. Musulmans, surtout des campagnes, se tournent alors plutôt
vers les ulémas, qui voient une afflux de nvx adeptes.
Application de la loi de 1901 sur les associations se fait sans problème en Algérie, où de
très nombreuses associations se créent : une floraison qui montre que l'insécurité ambiante pousse les
gens à se regrouper à l'intérieur de chaque communauté religieuse, selon des affinités
géographiques, d'activité ou de loisirs. Associations d'abord crées par des Européens, parfois ouvertes
(en théories au moins) aux « indigènes » (partis de gauche, syndicats...), puis par musulmans.
A l'inverse, loi de 1905 (laïcité avec la séparation de l'Eglise et de l'Etat) soulève des
polémiques et n'est appliquée en Algérie qu'en 1907. En effet, application de la loi remettrait en cause
le système de fonctionnarisation du culte musulman, privé de moyens avec la confiscation des biens
habous. Pour éviter indépendance du culte musulman et demandes de restitution des biens habous, on
décide de créer 3 associations cultuelles musulmanes au niveau des « préfectures et sous l'égide
des préfets : associations autorisées à collecter les dons, mais qui continuent malgré tout à
recevoir un budget pour le culte musulman.
=> des associations cultuelles musulmanes fictives qui devaient permettre au gvnt de continuer à
contrôler le culte tout en appliquant la loi à la lettre. Associations dirigées par un clergé officiel choisit
par le gvnt colonial.
Ce n'est qu'après le 1ere GM que musulmans s'emparent de la structure associative pour en
faire un outil de contestation, avec la multiplication des associations cultuelles musulmanes
conccurentes des associations d'Etat.
Expl : Mais 1931 : création de l'asso° des ulémas musulmans d'Algérie. Apporte un statut légal à une
mouvance informelle du réformisme algérien, avec son président BEN BADIS. Asso° qui se veut
apolitique. Création d'un réseau d'écoles privées libres ; revendication systématique de la séparation
du culte musulman et de l'Etat avec la restitution des biens habous.
Dans les années 1920-30, revendiquer l'application de la loi de 1905 devient une forme de
contestation du pouvoir colonial.
Expl : 1924, l'émir KHALED, petit fils d'Abdelkader, envoie une pétition au président HERRIOT pour
demander une véritable séparation du culte musulman et de l'Etat.
Conclusion : La loi de 1901 a été paradoxalement le « cheval de Troie » d'une conscience
citoyenne musulmane, pas prévue par les acteurs du décret d'application de la loi de 1905. Essor d'une
société civile au sens moderne du terme, constituée autour de la contestation des pouvoirs en place, a été
une première dans un pays arabe.
La non application de la loi de 1905 aux musulmans conduit l'Islam algérien à revendiquer la
séparation du culte et de l'Etat, et donc d'une certaine façon à prendre en compte une vision sécularisée
de la politique et du rapport à l'Etat.
Article 10 : La République et la Mosquée : genèse et institution(s) de l'Islam en France.
Auteur : Jalila SBAÏ.
=> hors programme.
Article 11 : Les apories d'une projection républicaine en situation coloniale : la dépolitisation de
la séparation du culte musulma, et de l'Etat en Algérie.
Auteur : R. ACHI.
=> problématique de l'exportation de la laïcité dont on a déjà un exemple avec la Palestine.
PARTIE 3. Maroc et Afrique subsaharienne : des politiques musulmanes pour la
France ?
Article 12 : Quelques propos sur la politique musulmane de Lyautey au Maroc (1912-1925)
Auteur : Daniel RIVET. [voir aussi fiche sur "Le Maroc à l'épreuve de la colo°" de RIVET]
D. RIVET décrit Lyautey comme un "grand lord colonial de la Iieme République (...) un
homme de théâtre jouant avec toute une panoplie de rôles : le grand seigneur épris d'ordre social et
nostalgique de l'Ancien Régime, l'officier non conformiste et, presque, l'intellectuel en uniforme (...)
mais aussi le colonisateur inquiet, conscient de rentrer dans le commencement de la fin des empires".".
G. DE TARDES en 1956 le décrit comme un "Swan à épaulettes".
Méthode Lyautey en matière de protectorat est avant tout une expérience de domination, à
adapter d'un peuple à l'autre et suivant le moment. Pour lui, protectorat n'est pas un aboutissement mais
un commencement, dont l'objectif est de parvenir à l'autonomie et à l'indépendance.
=> Idée que l'Etat le plus avancé doit transfuser la modernité à l'Etat dominé, afin de le "réveiller"
et le réintroduire dans l'histoire mondiale. Ceci passe par un transfert de savoir-faire technique et
intellectuel, surtout à destination des élites afin de pas trop déstabiliser.
=> LYAUTEY est en décalage par rapport à ses contemporains dans sa vision des Marocains : non pas
un peuple inférieur, mais une société marquée par un islam intellectuel et en quête de transcendance
absolue.
1912 : Première expérience de LYAUTEY lorsqu'il est nommé en catastrophe résident
général lors de la création du protectorat du Maroc (traité avec Moulay Hafid le 30 mars), qui
provoque indignation de l'opinion publique marocaine :
→ révoltes de troupes chérifiennes (avril)
→ tribus du Moyen-Atlas descendent sur Fès (fin mai)
→ insurrection du Sud profond déclenchée par le sheikh [="ancien" ; position honorifique pouvant parfois
désigner chef de tribu] Ahmed Al-HIBA, et qui fait figure de mahdî [="celui qui montre le chemin", sorte de
messie/sauveur]. C'est une révolte qui cherche à mettre à bas la dynastie alaouite qui a "vendu" le Maroc à
l'étranger, et un mouvement qui a aussi une forte dimension sociale.
Face à ces révoltes, contemporains de LYAUTEY réagissent comme si c'était des
mouvement de contre-rév°, développent rhétorique d'un "fanatisme musulman" que la France république
combattrait via le protectorat.
A l'inverse, LYAUTEY perçoit dans ces révoltes non seulement la dimension religieuse, mais aussi la
peur sociale et la passion patriotique.
→ à son arrivée comme gouverneur, réunit l'élite marchande citadine qui tient ficelles du pouvoir et
tient discours sur la restauration de l'ordre passé, le maintien des hiérarchies pré-coloniales.
1°)L'islam comme conservatoire d'un cadre de civilisation matérielle.
LYAUTEY imprégné d'orientalisme : déplore l'enlaidissement, l'avilissement de l'oriental
au contact de l'européen après son expérience en Algérie. Dès lors, cherche à rendre la figure du
colonisateur la moins visible, et maintenir l'ordre existant ... au risque de figer villes et sociétés
dans un passé reconstruit ("retraditionalise" ?):
→ Pour l'urbanisme:
-bâtir villes à distance des vieilles cités pour éviter que le couple médina/ville nouvelle accolée ne se
transforme en cille indigène/ville européenne
-cimetières soigneusement préservés, comme écrins de verdure.
-sauvegarder le bâti monumental de la ville ancienne par un système de zones de protection.
→ Pour l'organisation socio-économique : les corps de métiers sont préservés voire restaurés
dans l'artisanat (vision orientaliste ici encore, qui fait de l'Orient un passé occidental : ici la référence est
la corporation du Moyen-Age)
2°) Conserver aux hommes leur intégrité, aux femmes leur intimité.
Pour Lyautey, un musulman européanisé (expl : Jeune Turc) n'est plus un musulman, sans
être un européen non plus : peur du déracinement, du métissage des indigènes, peur que la perte
"d'authenticité" n'introduise désordre dans la cité coloniale.
→ création costume particulier pour les spahis, les tirailleurs, les goumiers [=soldat de l'infanterie légère
dans l'armée d'Afrique].
→ on impose le port du burnou [=long manteau de laine blanche] et de la chechia [=couvre-chef masculin]
dans les collèges musulmans.
Pour cette même raison de refus de tout ce qui serait culturellement hybride, les femmes
sont assignées à l'espace préservé, quasi sacralisé, de la maison. Élément biographique explicatif :
LYAUTEY a grandi dans un univers exclusivement féminin, et son homophilie ("sensualité
homosexuelle" en tout cas).
→ pas de femmes dans les réceptions officielles à la résidence du gouverneur quand s'y trouvent des
musulmans
→ on vaccine les européennes à domicile pour leur éviter toute promiscuité ; tandis que les femmes du
peuple sont vaccinées dans des lieux publics, fermés pour la circonstance (placettes, ruelles,
dispensaires).
=> mise en place d'une politique qui renforce le cloisonnement entre sphère masculine
et sphère féminine.
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