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Il la cherche sans cesse des yeux. «Agathe!». Elle, c’est
Agathe Natanson son épouse. Menue, souriante. Dans leur
salon boulonnais, qui s’ouvre sur un joli jardin très tran-
quille, le couple parle duneme voix de leurs plantations
de fines herbes et de radis, de leur toure en cours et… de
leurs poules, qu’ils viennent dacquérir au Salon de
lAgriculture. Mais pcision utile, donnée avec un grand rire:
«Rassurez les voisins! Ce sont des poulettes qui ne font pas de
bruit; pas de cot cot cot…» Tout a été dit sur Monsieur Marielle,
en particulier à loccasion de la sortie de son livre* mi-rieux,
mi-truculent, à limage de son auteur. Ses attaches terriennes
à sa Bourgogne natale, son amour de la bonne chère et son
inoxydable amit avec ses compagnons de bamboche du
temps de l’insouciance, celui du Conservatoire: Belmondo,
Rich, Rochefort et les autres. Avec lesquels il a fait les quatre
cents coups, avant et après- que cette promotion exception-
nelle nimprègne définitivement le cinéma français. Quand on
l’interroge sur ses fiers, ses cent films, il balaie la question
mais montre dun geste son incroyable collection de disques
de jazz (vinyles, s’il vous plaît!), moignant d’une passion
totale, ce dans les caves du Saint-Germain de la grande
époque, virus qu’il a transmis à son épouse.
Tous deux se sont renconts il y a une quinzaine d’années
par lami Jean-Paul (Belmondo) avec qui Agathe jouait Tailleur
pour dames. Toute jeune, elle qui fut une pensionnaire de la
Comédie Française pendant près de 5 ans, a interprété Molière
et Beaumarchais. Elle avoue un penchant immodéré pour
Marivaux.
Lui, on lui connt une prédilection pour Flaubert. Pince sans
rire, Marielle est un modeste qui se définit comme un artisan
au service des textes. Ils ont ainsi en commun l’amour du
verbe, de la belle langue, et se sont sentis servis en tournant
ensemble dans la rie des «Maupassant» pour la lévi-
sion. Indifférent à la lébrité, il assène: «Le seul lieu de la
représentation, cest la scène; je me fous de mon image, labandon-
nant volontiers aux miroirs, seulement quand il est venu le temps
de se raser, et encore: je me suis assez vu pour men dispenser. »
C’est son penchant pour le vélo qu’il pratique dans le Bois, et
son envie de tranquilli qui lont amené, il y a de nombreuses
anes jà, vers Boulogne-Billancourt; vers ce jardin peuplé
d’écureuils dans les arbres, quil appelle son «petit coin de
province à Paris.». Elle, l’authentique germanopratine, a
consenti à venir cultiver avec lui son jardin, entre deux tour-
nées ou tournages. Et là, justement, ils sont en toure, avec
une pièce jouée plus de 500 fois dé : Les mots et la chosede
Jean-Claude Carrière. Un dialogue sur scène, un jeu des
mots, qu’ils évoquent avec gourmandise, comme un prolon-
gement de leur symbiose à la ville. Hier Angoulême, demain
Metz. Si on leur parle de performance, ils rient. Car pour ces
deux compères-là, partir en toure théâtrale ressemble bien
à partir en goguette. Elle raconte: «Nous aimons beaucoup ça.
Nous visitons ainsi des villes où nous n’irions jamais. Nous arri-
vons suffisamment tôt pour pouvoir nous balader: il y a toujours
un mue, des jolies rues, et les gens sont gentils. Et puis cest
important, je déniche un bel hôtel et un bon restaurant! Pas de
téléphone, on est tous les deuxdes petites vacances ».
Des escapades qui alternent avec laventure collective, souvent
fusionnelle, qu’est un tournage. Dont il dit: « On vit ensemble,
on mange ensemble, pendant des semaines. Autant être avec des
gens de bonne compagnie! » Comme ceux qu’il va rejoindre en
avril, José Garcia et Gad Elmaleh, pour le prochain film
dOlivier Dahan (La Môme). Son titre: Les seigneurs. Aups de
sa gente dame, lui, il en est un.
Christiane Degrain
*Le grand n’importe quoi (Calmann-Lévy)
Boulogne-Billancourt : le salon d’un
appartement dans une rue tranquille
du quartier des Princes. Lui est grand.
Il occupe l’espace, avec cette envergure
tranquille qui en a fait une silhouette
si familière de l’écran, depuis près
de cinquante ans. Elle, son alter ego,
comédienne comme lui, avec lui.
© Baptiste Piégay
Le seul lieu
de la repsen-
tation, cest la
scène ; je me
fous de mon
image.
portrait
JEAN-PIERRE MARIELLE ET AGATHE NATANSON
Elle et lui
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