ÉDITORIAL
6 | La Lettre du Cardiologue • N° 490 - décembre 2015
”
calibrée pour les populations européennes, dont l’épidémiologie est différente. Il serait
probablement beaucoup plus pertinent en Europe de calculer un risque cardiovasculaire
à l’aide des échelles Score, mais elles ne mesurent pas les mêmes événements que le score
de Framingham. Il sera important pour le praticien de savoir comment identifier les bons
candidats en termes de risque, en utilisant les calculateurs de risque adaptés à la France et
à l’Europe.
Un élément qui n’a pas encore été présenté concerne la qualité de vie des patients
dans les 2 bras de l’étude. Il sera important de l’évaluer précisément. On peut s’attendre
à ce que le groupe recevant un traitement plus intensif ait, du fait des effets indésirables,
une moins bonne qualité de vie, mais cela reste à établir, car il faut prendre en compte
les événements cardiovasculaires et non cardiovasculaires évités par le traitement. Il est
possible qu’on se retrouve dans une situation (qui n’est pas exceptionnelle en médecine)
où un traitement plus intensif est associé à une amélioration de la survie, mais à une
dégradation de la qualité de vie. Il est donc important de discuter dans le détail avec le
patient des bénéfices, des risques et des effets indésirables du traitement de l’hypertension
artérielle : c’est une condition indispensable pour une bonne adhésion à un traitement
chronique comme celui de l’hypertension artérielle. L’avis du patient, dont les préférences
peuvent différer de celles du praticien, doit être pris en compte.
Enfin, pour mettre en perspective les résultats de SPRINT, il est utile de comparer le
nombre de patients à traiter pour éviter 1 événement cardiovasculaire(63), le nombre de
patients à traiter pour éviter 1 décès toutes causes(83), et le nombre de patients à traiter
pour induire 1 insuffisance rénale aiguë(55). Ces chiffres nous rappellent que les bénéfices
éventuels du traitement ont un prix, qui n’est pas uniquement celui des traitements
antihypertenseurs (dont la plupart ont désormais des génériques et sont relativement peu
coûteux), mais qui est aussi celui des effets indésirables. Si SPRINT et la méta- analyse
des essais randomisés antérieurs déplacent le curseur du traitement de l’hypertension
artérielle vers un traitement plus intensif, il ne peut s’agir d’une règle univoque et
simpliste. L’application pratique de ces résultats doit être adaptée à chaque malade en
fonction de ses préférences, de sa tolérance et de sa présentation clinique, quisont
propres à chaque individu.
L’auteur déclare avoir des
liens d’intérêts avec Sanofi et
Servier (bourses de recherche) ;
Amarin, AstraZeneca, Bayer,
Boehringer-Ingelheim, Bristol-
Myers-Squibb, CSL-Behring,
Daiichi-Sankyo, GlaxoSmithKline,
Janssen, Lilly, Novartis, Pfizer,
Regeneron, Roche, Sanofi,
Servier, The Medicines Company
(honoraires) ; Aterovax
(co-inventeur).
Références bibliographiques
1. Xie X, Atkins E, Lv J et al. Effects of intensive blood pressure lowering on cardiovascular and renal outcomes: updated syste-
matic review and meta-analysis. Lancet 2015 Nov 7 [Epub ahead of print].
2. SPRINT Research Group, Wright JT Jr, Williamson JD, Whelton PK et al. A randomized trial of intensive versus standard
blood-pressure control. N Engl J Med 2015;373(22):2103-16.
3. Perkovic V, Rodgers A. Redefining blood-pressure targets — SPRINT starts the marathon. N Engl J Med 2015;373(22):2175-8.
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