P.
BARBARIN (Paris - Francia)
IMAGES EUCLIDIENNES DES PLANS NON EUCLIDIENS
1.
- Exposé.
En élargissant la notion primordiale de l'angle de deux lignes géodésiques
sur une région normale,
c'est-à-dire
totalement dépourvue de points singuliers
ou exceptionnels, il est permis de donner, comme Ton sait, un sens plus étendu
aux définitions 4, 8, 9, 11 et 12 des Éléments
d'Euclide
(i).
Si nous appelons, par convention, égaux deux angles géodésiques dont la
mesure par rapport à 2n ou par rapport à -, ce qui est plus simple, est la
même, il est naturel
d'admettre
comme postulat fondamental que Tun de ces
angles peut se substituer à l'autre, alors même qu'ils n'appartiennent pas à la
même surface, c'est-à-dire être transporté d'une surface sur une autre sans
que sa mesure change, la région où il est transporté demeurant aussi normale.
C'est cette idée simple que, sans faire appel à la troisième dimension, nous
voulons utiliser uniquement pour passer des plans non Euclidiens au plan Eucli-
dien, ou inversement, en construisant sur ce dernier, par des tracés élémentaires
qui ne sont que des inversions, les correspondantes de figures géodésiques appar-
tenant aux deux premiers.
Je rappelle pour cela que, par le moyen de quadrilatères géodésiques trirec-
tangles, nous savons, étant donné un segment s de géodésique, construire sur
le plan de Riemann l'angle
, . .
et sur celui de Lobatchefsky-Bolyai l'angle
or
=
U(s).
Nous savons aussi effectuer les constructions inverses, et déterminer, con-
naissant l'angle o ou l'angle
of
l'une des géodésiques
s=e(a)
ou
s=C(</) (2).
(*)
EUCLIDE,
Édition Peyrard, 1816, avec texte grec, français et latin.
(2)
Études de géométrie analytique non Euclidienne. (Académie Royale de Bruxelles,
Mémoires, Tome LX, 1900, § 2).
Constructions générales. (Académie de Lisbonne, Jornal, 1917).
La géométrie non Euclidienne. (Scientia, Gauthier Villars, 1928, § 24).
62 COMUNICAZIONI
Soit E le plan euclidien. Appelons
sKz
la courbure constante d'une surface R
répondant à
e=l,
ou d'une surface L répondant à
£=—1.
Nous traçons sur E l'angle rectiligne droit xoy, puis sur R et L les angles
géodésiques droits XOY et
X'0'Y'\
à un
point -M
de R nous faisons corres-
pondre un point
m
de E, et de même à un point
M'
de L nous faisons cor-
respondre un point
m!
de E. M et
m
sont appelés images l'un de l'autre, ainsi
que
M'
et m'. Pour unifier les notations, je désignerai les fonctions habituelles
relatives à un segment géodésique s par les notations
C(s),
8(s), T(s) avec
C2(s)
+
eS2(s)
= l,
et qui sont circulaires ou hyperboliques selon que
e=l
ou
s=—
1.
Le postulat de la conservation des angles énoncé plus haut, et qui a servi
de base aux travaux célèbres de DARBOUX, KLEIN, CAYLEY et de beaucoup
d'autres géomètres, s'exprime par les équations générales
œ=xom=XOM,
COtg
V= ^-=r =
,
&
dm
SQ
dco
r
'
où
Q=OM
et r=om. On en déduit
r-d.rf,
d étant une constante arbitraire. Il reste à traduire ce résultat par une construction.
2.
- Construction des Images.
) Couple M, m. - Traçons sur E le cercle absolu de centre o et de
rayon d. Le paramètre de R étant désigné par
XJ,
la région normale de cette
surface est limitée par le cercle de centre
O
et ayant pour rayon -
U;
elle est
représentée sur E par l'intérieur de l'absolu. Si nous faisons en particulier
eo=0,
M
est sur OX et
m
sur ox. Il faut tracer l'angle
yoa
égal à
ju=$(OM),
et
joindre le point a de l'absolu au point
yL
opposé de y par une droite qui
coupe
o#
en m; on a en effet
om=oyi
tg
oyia=dtg ^ =
dT—.
Inversement,
m
étant donné sur ox, la droite
myi
rencontre l'absolu en a et
l'angle
yoa=ju.
On en déduit
OM=®
(ju).
) Couple M', m'. - Traçons l'angle
xoa!
égal à
/JL,==IÎ(0'M'),
la tangente
à l'absolu en a' rencontrant ox prolongé en t, on décrit le cercle de rayon ta!
qui rencontre ox en m', car
/
j. j.
i
d(l
sinu') ,,
fut
p'\
,
mO'M'
omf=ot—ta!=—
—-"=d
tg
7
£
=^«r—-—,
cos
^ ö
\4 2
/
2
'
puisque cos
//=th
OfM'.
P.
BARBARIN: Images euclidiennes des plans non euclidiens 63
Inversement, étant donné
m'
sur ox, on décrit le cercle qui passe par
m',
a son centre t sur ox et est orthogonal à l'absolu en
a';
l'angle
xoa'=ju',
et
on en déduit
0'1P
=
C(//).
Quand
jLt
+
jLLf=-,
a et
a'
se
confondent
sur l'absolu
;
donc
m
et
m!
se con-
fondent, et les points
M
et
M'
ont la même image m sur E.
3.-
Résolution des équations
tg#=th^,
ïgx=ktl\y.
Ce qui précède donne le moyen immédiat de résoudre la première équation,.
car un système de solutions est
x=\®(n),
y=Je(f-/*),
ju
étant un angle arbitraire. Plus généralement, nous saurons résoudre par une
construction graphique analogue l'équation
ïgx=k
th^,
k
étant quelconque. Il suffira pour cela de prendre sur
om
la ligne
omi=Xoni
et de tracer l'angle
/j1
= <D(OJfi)
qui lui correspond; on aura alors
tgÇ-itgJ,
*-|eo*i),
2/=Mj-4
4.
-
Image
d'une géodésique de R ou de L.
Soit A ou A' son point de rencontre avec OX ou
O'X'
auquel elle est
perpendiculaire; nous construirons d'abord l'image euclidienne a ou
a'
de chacun
de ces points. L'équation polaire de la géodésique considérée ayant la forme
KTQCOSCO=1,
celle de son image devient
r2 + 2eKdr cos
coed2
=
0,
cette image est donc un cercle. Pour e=l, il passe par les deux points y et
y±
de l'absolu; par conséquent c'est le cercle des trois poinis y, a et
yL
limité à
l'axe. C'est aussi l'inverse du segment
yoyL
de cet axe par rapport à a, avec
i
—2-1
.
.
sd2
la puissance ay2
egale
aussi a
.
C ~2
Les images de deux géodésiques orthogonales le sont aussi, et alors le
centre de l'une, ainsi que le symétrique du centre de l'autre par rapport à o
sont conjugués vis à vis de l'absolu.
L'image d'une géodésique de L perpendiculaire à O'X' au point A' passe
par a', est orthogonale à l'absolu et se confond précisément avec le cercle de
centre t qui a servi à trouver ce point. Si l'on trace la demi corde
a'V
de
64 COMUNICAZIONI
l'absolu perpendiculaire à ox, ce cercle est encore l'inverse de la droite
yoyL
par rapport à a', mais en prenant pour puissance —a'b'2 égale aussi à
2
Deux géodésiques parallèles ont leurs images tangentes au même point de
l'absolu
;
pour deux géodésiques perpendiculaires les centres t, t' sont conjugués.
5.
- Image de la géodésique de deux points et de leur distance.
Soient
Mi
et
M2
deux points de R, ou
M±'
et
M2
de L. L'image de leur
géodésique est le cercle passant par
m4
et
m2
qui coupe l'absolu aux deux
extrémités d'un diamètre dans le premier cas, et dans le second, le cercle ortho-
gonal à l'absolu qui passe par
mi
et
m2.
Leur construction est donc facile;
appelons les
(
mim2
). La distance
MiM2
sera connue par
MiM2
=
O
(0), G étant
l'angle des cercles orthogonaux à
(
rriim2
)
menés par
mL
et
m2
de façon à couper
aussi l'absolu suivant un diamètre.
La distance
Mi'M2
sera connue par
~ML'M\2
= G (6')
;
l'angle 0' se construit
en menant par
m2
le cercle orthogonal à
(m/m/)
et à l'absolu, coupant ce
dernier en
a2,
puis le cercle qui passe par
m^
et est aussi orthogonal à l'absolu
en
a2
;
6'
est l'angle de ce dernier avec
(
mi'm2).
Or, si l'on appelle I et J les points où la géodésique
MLM2
rencontre le
cercle imaginaire de l'infini, on sait que
(d)
Mjd2
= -±=
L(MiM2IJ),
2r
s
la parenthèse étant un rapport anharmonique.
TyToîG
(MiM2IJ)
= (0,
MiM2IJ) =
(o,
mim2ij),
i et j étant les images de
/
et J. Donc si sur le plan E on pose par définition
mim2
=
~==zL(o,
mim2ij),
2
F
e
on a
MiM2=niim2.
Le triangle de trois géodésiques de R ou de L a donc pour image celui
de trois cercles du plan E où la somme des angles est égale à celle du premier,
et comme elle, supérieure ou inférieure à deux droits.
6. - Image d'une droite de E sur R ou sur L.
Supposons la perpendiculaire à ox à la distance oa=p.
Son équation polaire se transforme en
T-
=
dcos co
(l)
LAGUERRE,
1853;
CAYLEY,
1859.
P.
BARBARIN: Images euclidiennes des plans non euclidiens 65
et représente un hypercycle. Pour le construire, il n'y a qu'à déterminer les
points A de R ou A' de L qui ont a pour image; puis tracer la médiatrice
de OA ou O'A'. L'image demandée est la branche ne passant par
O
ou par
O'
dans
T
hypercycle qui a cette médiatrice pour base.
Il en résulte que sur R ou sur L trois branches
d'hypercycle
de cette sorte
forment un triangle où la somme des angles est toujours égale à deux droits.
7.
- Image d'une géodésique de L sur R ou inversement.
En posant
XOM=X'0'M'
=
to,
OM=Q,
0'M'=Q',
on doit avoir
dq
dç'
dm sino
dcoshg'
'
d'où
tgf-itgf,
X étant un nombre arbitraire. Soit A' le point de rencontre de la géodésique
de L considérée avec O'X', et A son image sur R.
N0US aVOnS +
OA
,^0'A'
tg
—=*th
,
et nous avons vu au § 3 le moyen de déterminer OA.
L'image de la géodésique est également un hypercycle dont il faut trouver
la base et
l'équidistance.
Construisons d'abord l'angle
a=IÎ(0'A');
la base est
la géodésique de R située du côté de A à la distance p de
O
donnée par
1 +
X2
ou plus simplement, si l'on pose
X=tgcp,
1
tgp-
sin
2q>
tg a
'
mais,
l
pouvant être supposé rationnel,
sin2<p
l'est aussi, et j'ai indiqué
(*)
les constructions géodésiques à faire pour obtenir p.
L'équidistance d est alors égale à
OA—
p.
De même, l'image sur L d'une géodésique de R est un hypercycle passant
par A' et dont la base se construit par la même méthode que plus haut.
8. - Images d'un cercle de l'une des surfaces E, R, L sur les deux autres.
En généralisant les explications qui précédent, on voit aisément que cette
image est toujours un cercle. Donc, pour le construire, il n'y a qu'à tracer le
(*)
Constructions générales (Jornal de Lisbonne, 1917). La Géométrie non Eucli-
dienne, Chapitre VI.
Atti del Congresso. 5
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