Ce projet est né en 2007 au Caire, où je séjournais pour finaliser le

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Pi / Bej
Omicron
Xi / Æksi
Nu / Ni
Mu / Mi / Mèj
Lambda / Laoula
Iota
Kappa
Khai
Fai
Kyima / Tschima
Djandja / Djendja
Ti
Hore / Hori
Omega
Psi / Æbsi
Khi / Chi
Phi / Fij
de la religion, a aussi été une écriture du peuple, une écriture de la vie quotidienne que se sont appropriés les égyptiens, bien plus que les hiéroglyphes d’une certaine façon,
ces derniers étant réservés à une élite sociale. L’idée de
ce projet c’est aussi de montrer une autre facette de cette
écriture, de cette culture.
Il semble que notre projet intervienne dans un contexte
scientifique et éditorial particulier, où un grand nombre
de textes coptes cursifs découverts pendant les dernières
décennies en Égypte vont être édités au cours des prochaines années. Il existe de nombreux textes de la vie
quotidienne, qui pour certains sont en train d’être traduits.
Beaucoup de personnes sont surprises qu’après tant
d’années on continue de fouiller en Égypte, et non seulement de fouiller mais surtout de trouver. Ce qui fait
de l’Égypte un lieu remarquable pour la recherche
scientifique c’est son climat : la sécheresse a permis de
conserver de façon exceptionnelle des supports fragiles
de type papyri que l’infiltration de l’eau, l’humidité, ont
rapidement dissous en Europe. Le sol égyptien a conservé
comme un musée ces documents dans les sables,
et l’on retrouve sur l’emplacement de villes construites
à la limite du désert des documents vieux de près
de 15 siècles en relativement bon état de conservation,
lisibles, qui sont des témoins précieux sur la vie de cette
époque. La volonté qui a toujours été celle du peuple
égyptien de transmettre, de laisser une trace, et ce depuis
les hiéroglyphes, trouve un prolongement heureux dans
le climat exceptionnel de ce pays qui a effectivement
permis à certains textes de traverser les siècles, depuis
les textes religieux gravés sur la pierre jusqu’à la
correspondance privée sur papyrus.
Sai / Schai
Theta / Thita
Eta / Ita
Zeta / Zita
Epsilon
Gamma
Beta / Vita
Alpha
Delta
Upsilon / Ypsilon
Quand on parle de copte aujourd’hui on ne songe pas
immédiatement à l’écriture, et si le mot nous évoque
quelque chose ce serait plutôt la religion copte. Le copte
est une langue morte, celle des Chrétiens d’Égypte,
où elle a été utilisé approximativement entre le premier
Tau / Daù
pensaient qu’une telle entreprise était irréalisable,
et considéraient comme incompatibles cursivité
et typographie, spontanéité et stabilisation des formes.
Cet aspect expérimental m’a séduit, et les documents
cursifs remarquables que j’ai eu le loisir d’étudier là-bas
ont achevé de me convaincre de me lancer dans ce projet
à mon retour en France. J’ai tout de suite pensé à Laurent
pour m’aider sur ce projet, il avait réalisé son diplôme
de DSAA Création Typographique en 2006 sur le copte et
écrit un mémoire théorique sur le sujet ; nous projetions
de travailler ensemble quand l’occasion se présenterait
et ce projet était le point de rencontre parfait, l’occasion
de croiser nos deux expériences. Laurent venait justement de toucher une bourse pour poursuivre son projet
de diplôme, pour lequel il avait déjà songé à l’époque
à concevoir une fonte cursive... La collaboration s’est
donc mise en place très vite, presque naturellement, sur
un projet et une écriture qui nous tenait tous deux à coeur.
Sigma / Sima
Au cours de ces quelques mois de travail sur des formes
coptes classiques, j’ai également eu l’occasion de consulter
et d’étudier de nombreux documents cursifs, généralement sur papyri, et j’ai commencé à m’intéresser à cette
forme plus vivante, plus personnelle, plus méconnue
aussi, loin des lourdes onciales si caractéristiques de
cette écriture. C’est en discutant, au hasard de rencontres
avec les chercheurs coptisants, que j’ai réalisé qu’aucune
fonte copte cursive n’existait. Et non seulement certains
chercheurs étaient intéressés par la perspective d’en voir
réaliser une pour publier leurs textes, mais j’ai aussi
compris que cette absence provenait sans doute en grande
partie du fait que beaucoup de chercheurs ou d’éditeurs
Conception
d’une fonte
copte
à usage
scientifique et
éditorial.
siècle avant J.-C. et le IXe siècle ; elle apparaît en fait sous
sa forme définitive aux environs du IIIe siècle. Elle sert
encore aujourd’hui dans le cadre des cérémonies religieuses de l’église copte, c’est un peu l’équivalent de
notre latin, mais son usage s’est déplacé du champ
de la religion vers celui de la recherche, où l’étude
du copte prend une place de plus en plus importante
depuis quelques siècles.
L’écriture copte est une rencontre entre deux
écritures et deux cultures, égyptienne et grecque. Elle
emprunte 24 signes à l’écriture grecque, les 7 autres
signes de base proviennent du démotique, qui est l’écriture
auparavant en usage en Égypte, et permettent de retranscrire des sons propres à la langue égyptienne.
Le démotique dérive du hiératique, qui dérive luimême du système hiéroglyphique : les signes dérivés
de l’écriture démotique présents dans le copte sont la dernière trace de ces trois écritures successives. Mais au-delà
du changement des signes, la véritable révolution vient
du changement structurel, l’Égypte découvre grâce au
grec le principe du système alphabétique, dont l’ingéniosité et la simplicité au regard des systèmes préexistants
enthousiasment les scribes de l’époque.
Si la langue copte est si étroitement associé à la religion c’est pour deux raisons, la première, historique, c’est
qu’elle a été conçu pour permettre de diffuser des écrits
religieux en vue de christianiser l’Égypte ; la seconde,
presque « éditoriale » et littéraire, est la conséquence
de la première : les textes coptes dont nous disposons
et qui sont publiés traitent essentiellement de questions
religieuses. Tout l’enjeu de notre projet est de montrer
que le copte, si elle est une écriture sacrée au service
Rho / Ro
Ce projet est né en 2007
au Caire, où je séjournais
pour finaliser le dessin
d’une nouvelle fonte copte
pour les éditions de l’Institut
français d’archéologie
orientale (Ifao), basée
sur l’ancienne fonte copte
au plomb de l’Imprimerie
nationale et de l’Ifao.
une
scripte
copte
Laurent Bourcellier et Jonathan Perez
Ces 7 derniers signes sont propres
au copte alors que les 24 premiers
sont communs au copte et au grec.
13
Une scripte copte
Laurent Bourcellier et Jonathan Perez
14
Mu extrait d’un papyrus du VIIe siècle
Une alternative à l’onciale
Les fontes coptes sont relativement nombreuses pour
une langue morte, preuve du succès de ce domaine
de la recherche même si elles sont dans l’ensemble très
peu satisfaisantes esthétiquement et techniquement,
car peu de maisons d’éditions et de chercheurs font appel
à des typographes. Elles sont toutes plus ou moins toutes
basées sur la forme onciale des textes religieux : la nouvelle fonte copte de l’Ifao que j’ai réalisée l’année passée,
dont l’imprimerie est une référence mondiale importante
en terme d’édition scientifique, et le copte dessiné par
Laurent pour son diplôme, n’échappent pas à cette règle.
Un des constats de départ de ce projet, qui nous vient de
chercheurs, est de dire qu’il est peut-être paradoxal de ne
retenir qu’une « image » onciale de l’écriture copte, intimement liée à la religion et au contexte de reproduction
de textes religieux, et de devoir utiliser cette forme pour
la reproduction de documents de la vie de tous les jours.
Nous avions envie de proposer une alternative au choix
typographique de l’onciale, pour laisser le chercheur
et l’éditeur libres de choisir la forme qui leur conviendrait
d’avantage selon l’ouvrage publié, d’affiner s’ils le souhaitaient le rapport entre la situation sociale du texte
et sa représentation typographique.
Exemple d’onciale classique
et de cursive copte.
Ce mot signifie « comme
tu me l’as écrit ».
Croquis d’analyse de ce signe
Ligature par approches
courantes
(Mu-Alpha)
Dessin sur calque
Vectorisation du signe
Papyri et ostraca
Laurent dans le cadre de son diplôme, et moi-même
dans le cadre de mon travail pour l’Ifao, avions opté pour
deux solutions typographiques très distinctes, basées sur
l’onciale. Mon but en réalisant un revival du caractère
de l’Imprimerie nationale et de l’Ifao était d’aboutir à la
forme la plus représentative possible de l’écriture onciale
caractéristique du copte. Il s’agissait également de compléter la fonte au plomb qui existait par de nombreux nouveaux signes, mais toujours en gardant à l’esprit l’idée
de parvenir à une forme onciale classique par excellence.
La démarche de Laurent pour son diplôme, s’il s’est lui
aussi basé sur l’analyse de ces formes historiques classiques,
propose une approche esthétique plus « actuelle »
de la typographie copte.
Après avoir travaillé sur une option historique classique et une approche résolument plus contemporaine,
nous avons envisagé ce projet comme la troisième voie
possible dans le travail sur une écriture ancienne, une
voie où ce sont l’écriture cursive et l’humain qui sont
au centre du travail typographique.
La première phase du projet a été l’observation de l’écriture : sans maîtriser l’aspect purement linguistique nous
étions cependant tous deux familier de l’écriture copte
pour avoir déjà travaillé dessus et l’avoir étudiée. L’écriture cursive est néanmoins très différente de l’écriture
copte classique, plus stable, et la phase préparatoire
d’analyse a été particulièrement longue et importante.
Nous avons eu la chance d’avoir de nombreux documents
à notre disposition, de pouvoir observer des modèles cursifs très variés pour pouvoir cerner l’existant. J’ai eu
l’occasion de visiter le musée copte du Caire, où sont
exposés de nombreux papyri et ostraca (éclats de poterie
sur lesquels les égyptiens écrivaient parfois), et les chercheurs coptisants avec qui nous étions en contact ont
pu nous fournir des indications et une documentation
précieuse tout au long du projet.
Nous avons conclu cette phase d’observation, durant
laquelle nous nous étions déjà un peu familiarisés avec
le ductus des signes, par une courte phase de calligraphie
de l’écriture copte cursive, en essayant de retrouver
des outils et des supports proches de ceux utilisés dans
la plupart des documents, calame et papyrus.
D’une façon générale la place accordée au tracé manuscrit
a été importante tout au long du projet, depuis la calligraphie jusqu’aux corrections des premiers signes vectorisés.
Passée la phase d’analyse, la question de la mise
au point d’une méthode de travail s’est posée, non seulement parce que nous n’avions jamais travaillé sur
une cursive étrangère, mais également parce que nous
n’avions jamais réalisé de projets de création de caractères
à deux. Nous étions d’accord sur la méthode de travail
globale, que l’on peut résumer ainsi en simplifiant:
une première phase de croquis d’analyse de quelques jours,
une deuxième phase de sélection des signes qui nous
semblaient les plus intéressants (lisibilité, esthétique,
représentativité) dans les documents de travail, une troisième phase de dessin sur calques de ces signes agrandis,
de l’ordre de deux semaines environ, et enfin une
quatrième phase de vectorisation, de retouche et d’harmonisation des signes, qui a durée plusieurs semaines.
15
Laurent Bourcellier et Jonathan Perez
L’écriture copte comprend un très grand nombre
de lettres accentuées dérivées des 31 lettres de
base. La version actuelle de la fonte comprend
près de 700 glyphes, mais le projet reste bien sûr
ouvert et sera sans doute amené à évoluer encore,
à être enrichi en lien avec la communauté scientifique. Il ne s’agit pas uniquement de signes
coptes, elle contient également une part importante de signes spécifiques à l’édition scientifiques : crochets, parenthèses, mais surtout
chaque signe copte doit exister en version
« pointée », il s’agit d’une convention d’édition qui
signale que l’on a déduit le signe, d’après
son contexte par exemple, parce qu’il était
manquant. L’utilisation de signes pointés
est d’un emploi très courant dans la publication de documents de type papyrus, souvent légèrement abîmés ou incomplets. La fonte se
destine aux chercheurs et étudiants, mais aussi
et surtout aux éditeurs scientifiques, elle est
en conséquence très complète et a été
conçue pour fonctionner de façon
optimale sur du matériel
professionnel.
Nous ne voulions pas d’un projet où l’un jouerait le
rôle de directeur artistique et l’autre d’exécutant, ni d’une
répartition stricte des signes qui nous paraissait absurde,
mais là encore la question du travail à deux s’est résolue
presque naturellement. Conscients que nous aurions
tendance à aller vers deux directions différentes nous
avons commencé par vectoriser chacun de notre côté
une dizaine de signes, pour voir ce vers quoi chacun
tendait, en allant volontairement vers « l’excès », Laurent
vers une version très stabilisée, proche d’une italique
typographique, et moi-même vers une cursive très peu
stabilisée, proche d’un fac-similé.
Nous avons confronté nos deux directions au bout
d’une semaine environ, et cela a été la première étape
importante du dessin de la fonte. Confronter ces
extrêmes nous a permis de cerner tout de suite ce vers
quoi il fallait tendre, et la façon de s’approcher d’un juste
milieu par des allers-retours entre ce que nous avions
trouvé du côté de la stabilisation des formes et ce que
nous avions trouvé du côté de la cursivité. Nous avons
ensuite travaillé ensemble sur un même ordinateur
le dessin de 3 ou 4 signes-clés de l’écriture, qui nous ont
permis de fixer un début de parti-pris esthétique, une
sorte de ligne graphique, et nous nous sommes répartis
les signes de base restant à réaliser dans l’esprit de ceuxci. Nous nous sommes ensuite échangé les signes, chacun
retravaillant ceux de l’autre, et nous nous retrouvions
régulièrement pour finaliser ensemble tel ou tel signe,
critiquer au sens large du terme nos dessins, préciser
ensemble une structure sur les attaques ou les sorties
des tracés, etc.
Travailler à deux nous a permis à la fois de croiser nos
regards sur cette écriture mais aussi d’avoir un regard
extérieur sur notre propre production, de voir des choses
que nous n’aurions pas vu en travaillant seul. Nous avons
rapidement accepté ce principe de dessin commun, et les
concessions que cela impliquait parfois, pour tout ce que
cela nous apportait. En conservant toutefois, pour l’anecdote, ce qu’on pourrait appeler un « droit de veto unique »
chacun pour un signe, qui consistait à peu près à dire
« celui-ci je m’en charge, tu ne comprends rien à cette
lettre et je vois exactement comment il faut la faire ».
Nous avons été finalement presque surpris que ce travail
de dessin commun se déroule avec autant de facilité.
17
Laurent Bourcellier et Jonathan Perez
Ligature par approches courantes
(Alpha-Iota)
Ductus
Silhouette et ligne médiane. Ce mot signifie « comme tu me l’as écrit ».
Ligature
(Hore-Omicron-Upsilon)
Ligature par approche de paires
(Lambda-Lambda)
Pression
Ligature dite « as de pique »
(Epsilon-Rho)
Un juste équilibre
Nous avons distingué deux grands enjeux, ou disons problématiques typographiques dans ce projet, sur lesquels
nous allons un peu nous attarder. Le premier, et le plus
évident, était de parvenir à un équilibre entre cursivité
et stabilisation, entre fidélité et distanciation par rapport
au modèle. Nous nous sommes principalement basé sur
un papyrus copte du VIIe siècle dans ce projet (que nous
ne pouvons pas reproduire pour des questions complexes
de droit d’images), exceptionnel à de nombreux égards.
Remarquable tout d’abord par son esthétique, par son bon
état de conservation et la quantité de signes qu’il contient
et que nous avons donc pu observer comme provenant
d’une même main. Intéressant aussi parce qu’il résout
d’une certaine façon cette problématique du « trop
cursif » ou « trop stable » en proposant un modèle d’écriture cursive très lisible, où les lettres sont suffisamment
formées pour proposer un modèle possible pour une
typographie. Nous sommes à ce moment là un siècle
où le copte a été suffisamment assimilé, où le peuple s’est
véritablement approprié l’écriture et où nous ne sommes
plus dans une logique de copie du modèle grec, et pas
encore dans le « maniérisme » des derniers siècles.
Encore une fois, le projet est aussi le résultat d’allersretours entre de nombreux modèles, pour aller chercher
des formes plus représentatives, comprendre des structures, mais nous avons essayé de retrouver l’esprit
de ce document, le rythme de la main de la personne
qui a écrit ce texte. Pour éviter de tomber dans une stabilisation excessive comme dans une cursivité « brouillon »
nous nous sommes efforcé de rester fidèle à ce document,
de nous y référer le plus souvent possible pour que notre
travail en découle et faire en sorte que nous retrouvions
dans le résultat quelque chose de ces quelques lettres
cursives écrites il y a 14 siècles.
Il ne s’agissait pas de tomber dans une logique
de fac-similé, qui du reste, si on l’applique au dessin
typographique où un signe possède une forme unique,
ne rend absolument pas compte du rythme du document.
Dans un papyrus les lettres, les tracés, les mots s’équilibrent
pour aboutir à une impression d’ensemble finalement
régulière, mais avec une vibration propre à l’écriture
cursive : c’est ce que nous avons essayé de rendre dans
ce projet en mettant au point des formes qui, répétées,
aboutiraient à donner face au texte typographié une
sensation proche de ce que l’on a face au manuscrit, tout
en étant suffisamment représentatives pour permettre
de typographier n’importe quel texte cursif.
La main du Copte
Ligne médiane et silhouette
Le second enjeu spécifique à ce projet était de rendre
compte de la cursivité sans avoir recours à la ligature
systématique : dans l’écriture latine, cursivité et ligatures
sont presque synonymes, et plus on est cursif, plus on est
ligaturé. L’écriture copte à une logique très différente, et
l’écriture cursive a ceci de commun avec la forme onciale
que chaque lettre est indépendante, doit pouvoir « vivre »
d’elle-même. Il y a parfois des ligatures sur de petits groupes
de lettres, mais nous ne pouvions nous baser sur un système de ligature pour suggérer la cursivité, et le choix de
réaliser une typographie penchée ne suffisait pas
à rendre ce que nous cherchions.
Nous avons donc pris le parti de considérer que
les lettres comportaient un plein et un délié, mais que ce
plein et ce délié n’étaient pas produit par l’outil, le calame
des écritures cursives étant probablement taillé en pointe
et non en biseau, mais que ce contraste provenait uniquement de la pression de l’outil. La vibration qui en résulte
est plus subtile, et uniquement basée sur notre analyse
du geste, du ductus de chaque signe. Et cela donne également à ce travail une autre dimension qui est presque
celle d’un outil, d’un exercice d’analyse d’une écriture
cursive copte, d’une « main ». Il nous a fallu réviser toutes
les connaissances que nous avions des différents ductus
par rapport aux tracés latins car dans la cursive copte
la construction des signes est parfois très particulière,
et c’était aussi un des intérêts de ce projet que de découvrir
une autre façon d’aborder des ductus qui nous semblent
a priori évidents.
Nous avons enfin fait le choix de ne pas utiliser le principe
d’une ligne de base classique pour nos signes, pas plus
que d’une ligne suspendue, mais de structurer notre
écriture autour d’une ligne médiane, ce qui nous a permis
de dynamiser l’écriture et d’être dans une logique plus
proche des cursives sur papyrus, avec un travail de mise
en valeur de la silhouette des mots pour conserver
la vibration des lignes calligraphiées. Travailler le placement des caractères en accord avec une ligne médiane
n’a pas été chose aisée. Quel que soit le glyphe, l’œil doit
percevoir que le tracé et la position découlent du glyphe
precèdent et annoncent le suivant, on doit sentir que
ce placement résulte d’une logique de tracé manuscrit.
Qui plus est, le placement ne doit pas non plus desservir
la silhouette, ce qui nuirait a la fluidité et au rythme
d’ensemble. Comme pour une fonte latine, la silhouette
des mots participe aussi a la distinction des glyphes entre
eux et a une meilleure lisibilité.
La version « caption »
Pour une meilleure lisibilité de la fonte dans des corps
inférieur à 8 points (très fréquents, par la présence
de notes, dans les éditions scientifiques) une version
optimisée pour les corps de légende est en cours
de réalisation. Sa graisse est légerement supérieure.
19
Laurent Bourcellier et Jonathan Perez
Recto
Verso
5
5
20
10
10
25
15
15
30
20
D’un point de vue technique, la fonte est compatible Mac
et PC et, autant que possible, basée sur Unicode : les grilles
Unicode ne contenant pas la plupart des caractères nécessaires à l’édition scientifique, cela représente une proportion très réduite des signes. Elle est également compatible
avec la fonte copte des éditions de l’Ifao. Un clavier virtuel
pour permettre la saisie de textes coptes via notre clavier
Azerty est déjà réalisé pour Mac, avec un placement
logique des lettres en fonction des touches et des raccourcis
de type ^ + e = ê pour saisir facilement l’ensemble des
signes accentués. Nous allons travailler à la réalisation
d’une version PC de ce clavier dès que possible.
Le projet étant une initiative personnelle, sans commanditaire, la distribution et la vente se fera à nos deux
noms, via notre site internet, où nous proposerons également des spécimens de caractères de la fonte. Nous
espérons que cet outil, relativement expérimental dans
le domaine de l’édition scientifique, servira à éditer de
nombreux textes cursifs et saura convaincre éditeurs et
chercheurs, et les sensibiliser d’avantage encore à la problématique typographique de reproduction de textes
anciens, en ouvrant peut-être de nouvelles perspectives
esthétiques peu ou pas encore explorées pour le copte
et d’autres écritures anciennes. ı
Laurent Bourcellier et Jonathan Perez
Merci pour leurs conseils à :
Émilie Decombes, Geneviève Favrelle
et Jean-Louis Fort.
car j’en ai besoin : c’est que j’ai reçu
un acompte aujourd’hui pour le Sticheron.
+ Lorsque mon humilité a reçu la sainte
Quant à l’encre noire, je te la rembourse-
+ Voilà que le prêtre Phaustos a écrit au sujet
lettre de ta piété, j’ai été empli d’une
rai en espèces. Si le Seigneur m’en donne
du livre. Si tu as fait ses finitions, remets-le, s’il te
grande joie. Dieu sait que j’ai été très
le moyen, j’irai au nord le matin et je les
plaît, à son homme qu’il a envoyé pour cette affaire.
chagriné de ne pas t’avoir rencontré hier.
mettrai en ordre chez toi. Surtout,
Ce qui lui incombe au plus juste (prix), écris (le) moi
C’est qu’en vérité le soleil était tout à fait
prie pour moi, mon cher frère pieux !
sur un petit tesson et c’est moi qui te le rembourserai
couché avant que j’arrive chez Épiphane.
(À) maître Moïse, Marc, ton humble frère
directement, en attendant que Pahôm aille au nord.
Comme je me suis senti enthousiaste
Je lui (= à Phaustos) dois encore deux trimesion;
auprès de lui, je n’ai pas trouvé le moyen
mon frère Jacob, l’homme (de) Piom va s’engager
d’aller à Tsès. Fais-moi la grande faveur
pour l’un et un autre frère va s’engager pour
de plier pour moi les autres papyrus
un autre. Je me suis dit (en moi-même) : si je te donne
qui sont chez toi pour demain matin tôt
encore son prix, je suis quitte avec lui. À mon frère
(le) prêtre et à mon frère Psaté, l’humble Marc.
www.typographies.fr
Copte Scripte, tous droits réservés.
Les deux textes ci-contre sont extraits de l’article
« Marc le prêtre de Saint-Marc » de Chantal Heurtel,
paru dans Actes du huitième congrès international
d’études coptes, Paris, 28 juin – 3 juillet 2004.
Édités par N. Bosson et A. Boud’hors. Leuven-Paris-Dudley,
MA : Uitgeverij Peeters en Departement Oosterse Studies,
2007.2 volumes. OLA 163. Article pp. 727-750, volume 2.
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