Vendredi saint 2013 La lecture du livre d’Isaïe suscite la question suivante : Comment Jésus s’est-il chargé du péché des multitudes ? Et la lecture de l’épître aux hébreux suscite cette autre question : pourquoi l’obéissance par les souffrances de la passion est-elle chemin de perfection pour le Christ ? La Passion selon St Jean apporte quelques éléments de réponse à ces deux questions. Au fil de ce récit nous assistons à la conjonction progressive des Juifs et des Romains contre Jésus. Jésus catalyse le péché du monde contre lui tant et si bien que la diversité des cultures et des religions s’en trouve relativisée. Montrer ainsi que le péché est le point d’unité du monde et de l’humanité c’est aussi le prendre en charge et l’assumer. Ce faisant Jésus révèle la nature du péché. Celui-ci, par-delà toutes les formes qu’il prend, est la mise en œuvre d’un désir de mort qui s’en prend à la source de la vie. Rappelez-vous que le début du chapitre 1 de l’évangile selon St Jean annonce que tout ce qui est prend source dans le Verbe de Dieu qui s’est incarné en Jésus. Ainsi Jésus mobilise les Juifs et les Romains contre lui parce qu’il est la vie. La mise à mort de Jésus est donc un défi lancé à la vie que Jésus relève en témoignant d’une fidélité indéfectible à son Père. En effet, la mise à mort de Jésus vise non pas tant à tuer Jésus qu’à mettre en échec cette fidélité. Ainsi Jésus prend en charge le péché du monde en acceptant le défi que lui lance la ligue des pécheurs. Certes, Jésus souffre des mauvais traitements qui lui sont infligés. Mais il souffre surtout du silence de son Père alors qu’il lui témoigne d’une fidélité indéfectible et parce qu’il lui témoigne de cette fidélité. Ce silence du Père ne doit pas nous étonner ni même nous scandaliser car le Père n’a pas d’autre parole à donner que son fils et la fidélité indéfectible dont il témoigne. Le fils atteint la perfection parce que mourant sur la croix, il n’est plus que désir du Père malgré l’acharnement de ses adversaires. Il incarne totalement ces mots du psaume 30 : « Moi, je suis sûr de toi, Seigneur, je dis : « Tu es mon Dieu. » La mort de Jésus sur la croix n’est donc pas un échec contrairement aux apparences. Beaucoup de détails en témoignent. Il est crucifié au sommet d’un lieu appelé crâne. Ainsi de sa mort un corps est en train d’émerger. Il laisse une tunique à la disposition des pécheurs. Il met en route une postérité en donnant à son disciple une mère et à celle-ci un fils. Il remet l’Esprit à qui en sera preneur. Il ne ressort pas brisé de l’épreuve puisque ses jambes restent indemnes contrairement aux deux autres condamnés. Son corps ouvert par un coup de lance se révèle source. Joseph d’Arimathie et Nicodème, les disciples cachés, sortent de la clandestinité. Jésus est déposé dans un tombeau neuf situé dans un jardin. Tous ces détails annoncent l’ouverture du tombeau au matin de Pâques. Je conclurai en me faisant encore l’écho de l’épître aux Hébreux. Puisque Jésus a partagé nos faiblesses sans jamais cesser de désirer son Père, comme lui, au jardin des Oliviers, entretenons et orientons notre désir par la prière et prenons garde de ne pas nous servir de ces faiblesses comme autant d’alibi à notre péché, à notre désir de mort. Amen.