Diagnostic différentiel des diathèses hémorragiques

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LE DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DES DIATHESES
HEMORRAGIQUES
Les saignements spontanés se rencontrent assez fréquemment chez le chien, alors qu’ils sont
plutôt rares chez le chat. Leur diagnostic différentiel doit tout d’abord distinguer les causes
locales (ex: hémorragie lors d’une tumeur d’origine vasculaire, saignement en présence de
mastocytome (libération d’héparine),...) des troubles de l ’hémostase.
Les troubles de l’hémostase peuvent être classés en:
I. Troubles de l’hémostase primaire: ce sont:
les pathologies affectant les plaquettes:- soit troubles quantitatifs: thrombocytopénie
- soit troubles qualitatifs: thrombocytopathie
les vasculopathies (rares).
II. Troubles de l’hémostase secondaire: ce sont les pathologies affectant les protéines de la
coagulation.
III. Troubles mixtes: la coagulation intravasculaire disséminée (CIVD).
L’examen clinique permet déjà d’orienter le diagnostic. En effet, le type de saignement
suggère souvent la cause sous-jacente:
Les pétéchies sont associées à des thrombocytopénies et à des anomalies vasculaires. Lors de
thrombocytopénie, on les retrouve principalement au niveau des gencives, des muqueuses
respiratoire, gastrointestinale, et urinaire, donnant des symptômes d’épistaxis, méléna et/ou
hématurie.
Les ecchymoses sont de petits spots hémorragiques au niveau de la peau ou des muqueuses.
Elles sont souvent considérées comme résultant de la confluence de pétéchies et donc souvent
secondaires à une thrombocytopénie ou une vasculopathie. Cependant, on peut également en
retrouver lors de déficience en facteurs de coagulation.
Les saignements au sein des tissus (hématomes, hémarthroses), sont surtout associés à une
déficience en facteurs de coagulation.
De même, les défauts d’hémostase Iaire (thrombocytopénie, thrombocytopathie,
vasculopathie) donnent souvent lieu à des saignements prolongés lors de prise de sang, alors
qu’au contraire, lors d’une déficience en facteur de coagulation, le saignement est en général
différé (endéans 24 h lors d’un trauma), ce retard étant dû au fait que le clou plaquettaire
normalement formé n’est pas stabilisé par la fibrine.
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I. LES TROUBLES DE L’HEMOSTASE PRIMAIRE:
Deux types de pathologies peuvent être en cause: les thrombocytopénies et les
thrombocytopathies. Les vasculopathies, très rares, ne seront pas reprises ici.
LES THROMBOCYTOPENIES:
La thrombocytopénie est la coagulopathie acquise la plus fréquente.
On parle de thrombocytopénie en-dessous de 150.000 plaquettes par mm3. En-dessous de
25.000 par mm3, on assiste à des saignements spontanés. Toutefois, lors de chirurgie, le
risque d’hémorragie existe dès 50-75.000 plaquettes par mm3.
Il existe cependant des exceptions: certains chiens ne saignent pas alors qu’ils n’ont plus que
10.000 plaquettes par mm3, alors que d’autres saignent dès 50.000 plaquettes par mm3. En
effet, outre le nombre de plaquettes, d’autres facteurs interviennent comme leur taille, leur
activité, la stabilité du support endothélial capillaire... Il existe également des différences
d’une espèce à l’autre: le chat, notamment, développerait des hémorragies par
thrombocytopénie plus difficilement que les autres espèces (en général, pas de saignements
au-dessus de 10.000 plaquettes par mm3 !).
SIGNES CLINIQUES:
Lors de thrombocytopénie, ce sont principalement des saignements capillaires qui ont lieu, se
manifestant par des pétéchies, des écchymoses, de l’épistaxis, de l’hématurie, du méléna, ...
L’agrégation plaquettaire étant très rapide lors du prélèvement, particulièrement chez le chat,
une estimation du nombre de plaquettes doit toujours être réalisée lors de la lecture du frottis
au microscope (numération automatique souvent sous-estimée); à cette occasion, une
appréciation de la morphologie plaquettaire pourra également être faite.
La thrombocytopénie peut être due à:
1. une destruction plaquettaire
2. une consommation ou une distribution anormale des plaquettes
3. une diminution de la production médullaire
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1/ Thrombocytopénie secondaire à une destruction plaquettaire:
C’est la cause la plus fréquente chez le chien, elle est rare chez le chat.
On distingue la destruction immune (IMT= immune mediated thrombocytopenia) de la
destruction non immune.
La thrombocytopénie à médiation immune:
Elle se rencontre surtout chez les femelles d’âge moyen.
Elle est la conséquence soit d’une augmentation de la phagocytose plaquettaire au niveau des
organes du système réticuloendothélial, c’est-à-dire la rate, le foie et la moëlle osseuse, soit
d’une diminution de la production des plaquettes suite à une destruction des mégakaryocytes
dans la moëlle osseuse.
Elle peut être primaire: c’est la thrombocytopénie autoimmune. Elle est décrite comme une
entité pathologique distincte chez l’homme, le chien, le chat et le cheval. Son diagnostic est
fait après exclusion des autres causes de thrombocytopénie immune.
Elle peut être secondaire: associée à d’autres désordres immunitaires (anémie hémolytique
autoimmune, arthrite rhumatoïde, lupus érythémateux disséminé), à des infections comme
l’ehrlichiose, à certaines néoplasies (myélome multiple, lymphome, leucémie myélogène,...),
...
On peut également noter une destruction immunologique des plaquettes suite à
l’administration de certains médicaments (quinine, par exemple). La thrombocytopénie est
souvent rapide et se manifeste par un purpura généralisé. L’arrêt du médicament
s’accompagne d’une augmentation de la numération plaquettaire dans les 7 à 10 jours.
Signes cliniques:
Pétéchies au niveau des muqueuses buccale, gingivale, nasale et vaginale.
Pétéchies et écchymoses cutanées particulièrement en région abdominale, à la face interne des
cuisses et des membres antérieurs, ainsi que dans le conduit auditif externe.
Epistaxis, méléna, hématurie, hémorragie de la sclérotique, hyphéma.
D’autres symptômes non spécifiques peuvent être présents: fièvre, soif augmentée, anorexie,
léthargie,...
Labo:
La numération plaquettaire est en général inférieure à 50.000 plaquettes par mm3.
Anémie régénérative (polychromasie, réticulocytose)
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Leucocytose neutrophilique avec left shift et monocytose (réponse médullaire); parfois
leucopénie.
Elle s’accompagne souvent d’une protéinurie (secondaire à un dépôt d’immuncomplexes au
niveau du glomérule).
Il n’existe actuellement aucun test de routine permettant de mettre en évidence des Ac-
antiplaquettaires.
La thrombocytopénie non immune:
* De nombreux médicaments peuvent provoquer une thrombocytopénie dans les quelques
jours suivant l’administration. Elle est due à une suppression médullaire directe, ainsi qu’à
une destruction immune et non immune. En général, l’arrêt du médicament en cause est
rapidement accompagnée par le retour à la normale de la numération plaquettaire.
* Vaccination (virus vivant atténué): signes cliniques 48 h après la vaccination (peuvent durer
pendant 7 à 21 jours).
* Lors de vasculopathie (CIVD, hémangiosarcome)
* Lors d’urémie, lors de cirrhose.
* Certains agents infectieux agissent directement au niveau des plaquettes (ex: ehrlichiose).
La thrombocytopénie est une manifestation précoce de la plupart des infections septicémiques.
2/ Thrombocytopénie secondaire à une consommation ou distribution
anormale:
Troubles de consommation:
Les plaquettes peuvent être consommées de façon excessive:
- Lors de CIVD, lors de formation d’un thrombus suite à une lésion vasculaire, lors
d’agrégation plaquettaire secondaire à une infection virale ou à une vaccination
- Lors d’hémorragie sévère (ex: intoxication Warfarin). Il semble cependant que les
hémorragies ne s’accompagnent que très rarement de thrombocytopénie. En effet, lors
d’hémorragie, il y a une libération massive de plaquettes à partir des réserves médullaire et
splénique maintenant un taux de plaquettes en général supérieur à 150.000 par mm3.
Troubles de distribution:
- Dans les pathologies spléniques: splénomégalie, torsion, néoplasie.
- Lors d’hépatomégalie, hépatopathie, hypertension portale
- Lors de vasodilatation dans les chocs endotoxiniques
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3/ Thrombocytopénie secondaire à une diminution de la production
médullaire:
C’est la cause la plus fréquente chez le chat (étiologie virale), elle est rare chez le chien.
Hypo/aplasie médullaire, myélofibrose:
- Médicamenteuse: les oestrogènes à fortes doses s’accompagnent d’un purpura hémorragique.
L’examen hématologique révèle une thrombocytopénie, une leucocytose importante
rapidement suivie d’une leucopénie, et une anémie progressive. D’autres médicaments ont été
décrits: dapsone, phénylbutazone, chimiothérapie...
- Infectieuse: Ehrlichia canis, FeLV
- Médiation immune
- Toxines chimiques
- Thrombocytopénie cyclique
- Irradiation
- Idiopathique
Pathologies myéloprolifératives ou lymphoprolifératives.
La tendance au saignement chez les animaux thrombocytopéniques semble être conditionnée
par le niveau d’intégrité vasculaire. En effet, lorsque le nombre de plaquettes diminue,
l’intégrité vasculaire diminue proportionnellement favorisant le saignement. Ainsi, le
confinement d’un animal thrombocytopénique, en limitant tout stress au niveau des vaisseaux,
va limiter les risques d’hémorragie et permettre à l’hématocrite d’augmenter.
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