même - AGAP

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AGAP – CNARELA
Association pour aider à l’étude et à l’enseignement du grec et du latin dans
la région d’Aix-Marseille et en Provence
BULLETIN DE JANVIER 2011
Université de Provence – Aix-Marseille I
Département des Sciences de l’Antiquité
Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme
5 rue du Château de l’Horloge – 13094 Aix-en-Provence CEDEX 2
http://agap.mmsh.univ-aix.fr
ÉDITORIAL
Chers collègues, chers agapéens, chers amis,
Ce bulletin 2010-2011 arrivera bien tard dans vos boîtes car il a subi de près les vicissitudes
de la nouvelle présidente qui a déménagé (certains diront que ce n’est pas seulement
géographique !) et de l’ensemble des professeurs de Lettres classiques qui ont encore eu,
cette année, à lutter sans relâche pour leur discipline et même, quelquefois, pour leur poste.
Nombreux sont ceux qui, parmi nous, doivent gérer les nombreux changements et
bouleversements provoqués par les différentes réformes qui pleuvent sur notre profession,
aussi bien dans le primaire que le secondaire et l’université. Tout est remis en cause : les
formations, les diplômes, les concours, les disciplines mêmes, nos conditions d’exercice enfin
qui se trouvent de plus en plus « précarisées », pour utiliser un néologisme à la mode qui
nous vient, comme de nombreuses choses ces derniers temps, du monde économique.
Et c’est là que le bât blesse : tous les aspects de notre métier sont maintenant soumis à une
logique comptable, à une loi du « marché » qui ne tient compte ni des contingences
humaines, ni de la morale sociale élaborée, dans notre démocratie, à partir de la réflexion de
nos plus anciens philosophes.
Nous commençons à découvrir les ravages provoqués par la réforme du collège et
l’obligation d’appliquer les réglementations du S3C ou Socle Commun des Connaissances et
des Compétences, la mise en place généralisée du Livret de Compétences (ah ! les petites
croix dans les petites cases ! quelle avancée technique et intellectuelle !), l’intrusion de sigles
barbares dans les cycles scolaires : ASSR, B2i, CESC, HDA* qui perturbent les journées et
privent souvent les élèves des cours qui leur seraient, parfois, bien plus profitables. Ces
différents « outils » n’auraient pas grande importance (nous avons tous connu des outils
semblables qui, eu cours de notre carrière, ont disparu, souvent sans laisser de souvenir
impérissable ...) s’ils n’étaient pas la manifestation sans cesse réaffirmée d’une volonté de
priver les professeurs et leurs élèves de la liberté d’agir et de penser qui leur est due. Car
qu’est-ce que l’ « évaluation par compétence » (j’entends d’ici certains plaisantins dauber sur
le terme ...) et le Livret de compétences, sinon des moyens de maintenir les futurs électeurs et
consommateurs dans un état de béatitude aveuglée, qui est celui du « ravi » de la crèche ?
Pour le lycée, le recul nous manque pour percevoir toutes les conséquences de l’application
de la réforme, mais nous sommes nombreux à souffrir, avec nos élèves, d’emplois du temps
ineptes, du morcellement et de l’éparpillement des cours. Nos disciplines, comme à
l’accoutumée, sont parmi les premières à souffrir des coupes budgétaires, des suppressions
de postes et du refus de considérer le savoir comme le noyau vivant de l’enseignement.
Ainsi, dans certains établissements, les enseignements d’exploration grignotent sur les
heures d’option et ne viennent pas les renforcer dans les cas où l’enseignement d’exploration
intitulé « Langues et culture de l’antiquité » est couplé avec l’option de latin ou de grec ; c’est
au professeur, encore une fois, de jongler avec les programmes et l’hétérogénéité des élèves
rassemblés dans une même classe avec des vœux et des objectifs différents. Encore ce cas
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n’est-il pas le plus alarmants : de nombreux élèves sont regroupés dans des classes à double
niveau (seconde et première, ou, pire, première et terminale) ou n’ont pas un horaire complet
pour le cours de latin ou de grec.
Ne pensez pas que l’université soit épargnée par cet ouragan de réformes : la récente
application de la réforme des concours a des répercussions catastrophiques sur le
recrutement des étudiants en master et sur la formation des futurs professeurs du secondaire
et du supérieur. Ainsi, la fusion en une seule épreuve des écrits de latin et de grec au CAPES
ne va pas œuvrer en faveur de la qualité disciplinaire de nos jeunes collègues qui se
trouvent, d’ores et déjà, dans une situation épouvantable avec les réforme, ou plutôt, la
suppression des IUFM : certains d’entre eux sont jetés en pâture aux pires classes de nos
établissements, sans préparation et sans véritable soutien puisque, dans le même temps,
notre administration n’a pas jugé utile de préparer un véritable statut des tuteurs et
professeurs conseillers pédagogiques digne de ce nom et du travail que cela représente.
Autant qu’il est possible, nous vous tiendrons au courant de tous les développements et
informations liés à ces problèmes sans oublier, cependant, les nombreux aspects positifs et
agréables, parfois, de notre métier : c’est pour cela que je vous demande à tous de nous faire
part de vos expériences, de vos réussites et de celles de vos élèves dans tous les domaines qui
intéressent notre discipline ; n’hésitez pas à nous envoyer, par courriel ou courrier, vos
productions, personnelles ou collectives, vos projets, vos coups de gueule, aussi, sur tel ou tel
événement local ou pus général.
En attendant de vous lire, de vous entendre ou de vous rencontrer au cours des assemblées
générales, des journées de l’Antiquité, de la remise des prix du rallye, du stage ou d’autres
manifestations que nous allons tenter d’organiser avec votre aide et votre participation, je
vous souhaite la meilleur des années 2011 possible !
Anne-Marie CHAZAL
* Traduction pour ceux qui n’auraient pas encore eu l’occasion de pratiquer le langage « siglesque » (nous
pouvons, nous aussi, inventer des néologismes horribles !) :
ASSR : Attestation Scolaire de Sécurité Routière
B2i : Brevet Informatique et Internet
CESC : Comité d’Éducation à la Santé et à la Citoyennenté (excusez du peu !)
HDA : Histoire Des Arts
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HOMMAGES
L’année 2010 fut riche en événements les plus divers : des amis, des savants humanistes et
dévoués à la cause de l’enseignement des langues et cultures anciennes, nous ont quittés,
nous laissant continuer une route qui, sans eux, sera sans doute moins fleurie et moins claire.
Nous leur rendons hommage dans ces lignes : elles sont l’expression de l’indéfectible
admiration que nous leur portons qui est un gage de leur immortalité spirituelle.
HOMMAGE À BERNARD VALETTE
Bernard VALETTE nous a quittés le 13 janvier 2010 au terme d’un combat courageux et qui
nous semblait pouvoir durer toujours. Pour nous souvenir de lui et de sa faconde, de sa
pensée toujours positive et si vivifiante, nous publions un conte que son épouse, Claire
VALETTE, a confié à Pascale PEYRONNET :
EN HOMMAGE À BERNARD VALETTE
MEMBRE FONDATEUR DE THALASSA
ET MEMBRE ACTIF DU BUREAU DE LA CNARELA.
C’est avec une immense douleur que nous avons appris, le 13 janvier 2010, la
disparition de notre ami Bernard Valette.
Qui ne connaît pas Bernard ? Qui n’a jamais entendu Bernard ?
Nous lui devons nos plus grands fous rires lors des AG et nos plus beaux souvenirs
de voyage avec nos élèves et les guides de THALASSA.
Sa bonne humeur, ses coups de gueule et ses idées novatrices (notamment la mise à
jour du site web de la CNARELA) nous ont permis de braver les embûches semées
par les réformes sans pitié.
Après avoir pleuré à chaudes larmes comme les jumeaux sous la louve nourricière de
l’affiche de la CNARELA, nous saluons l’obstination et le talent que Bernard a mis au
service du latin et du grec.
Poursuivons de plus belle le combat pour la défense et la mise en valeur des Langues
Anciennes !
N’ayant pas pu assister à la remise des prix du rallye 2009, il nous avait adressé une
lettre qu’il aurait aimé lire aux lauréats.
Nous tenions à vous faire partager cette lettre truculente qui nous rappelle l’humour
et l’engagement sans faille de Bernard.
Pascale Peyronnet, secrétaire de l’AGAP.
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C'était il y a très longtemps, très longtemps ...un temps où le savoir et la culture avaient
pour origine deux cités, Athènes et Rome ... Rome avait déjà étendu sa domination et fondé en
particulier une ville dans un pays appelé la Gaule. Cette ville s'appelait Lutétia, Lutèce ; elle
était située sur un fleuve, la Seine, et était déjà célèbre par les encombrements de sa circulation.
C'est là que s'étaient posés deux pigeons, Latinus, le mâle, et Ellenika, la femelle. Elle était
athénienne, lui romain. Le destin les avait fait se rencontrer alors qu'ils participaient aux Jeux
Olympiques des Volatiles, jeux au cours desquels les oiseaux présentent un spectacle : ainsi les
cygnes dansent sur un lac, les pies calculent 3,14, quant aux pigeons, ils cherchent La Fontaine
afin de pouvoir vivre d'amour et d'eau fraîche. Bref, la ville de Lutèce, où ils avaient trouvé
refuge, était, malgré ces encombrements, tellement belle, que certains la nommaient déjà Paris,
du nom d'un personnage mythologique grec qui passait pour très beau lui-même et à qui, il y a
bien longtemps, on avait demandé de se prononcer sur la beauté de quelques déesses célèbres. A
dire vrai, ceux qui trouvaient Lutèce digne de s'appeler Paris avaient un très bon jugement...
Et puis un jour, nos deux tourtereaux reçurent une lettre anonyme les dénonçant comme
coupables d'étudier des langues bizarres, le grec et le latin, et qui étaient censées être «
mortes ». A coup sûr cette dénonciation venait d'un méchant « corbeau » qui ne comprenait rien à
la valeur de l'Antiquité classique. Latinus et Ellenika se dirent « partons d'ici car ces oiseaux
sont de mauvaise augure ». Ils savaient en effet que dans un lieu appelé «Ministerium
Educationis » (que l'on pourrait traduire par « Le lieu où certains responsables font un blocage
sur la valeur de l'étude du grec et du latin) », certaines personnes cherchaient à détruire
systématiquement toutes les initiatives visant à promouvoir l'enseignement de ces deux langues,
partant du principe qu'elles étaient mortes, et bien mortes ; bref, ces personnes étaient de vrais «
vautours », toujours prêtes à fondre sur leurs proies éducatives et à prendre en grippe tous ceux
qui souhaitaient que l'étude des Langues Anciennes perdure . Latinus et Ellenika en conclurent : «
Partons de cette ville car, le moins qu'on puisse dire, c'est que certains responsables éducatifs ne
sont pas des aigles ! »
Ils prirent donc leur envol....
Après de longues heures, ils passèrent au-dessus d'une montagne très bizarre : elle ne ressemblait
pas aux autres, elle n'avait pas véritable sommet, elle était creusée en son centre et le sommet
était en fait représenté par une sorte de couronne. Ils descendirent pour voir de plus près cette
bizarrerie de la nature et se posèrent enfin sur cette montagne qui les intriguait tant. Un homme
gardait un troupeau ; ils lui demandèrent comment s'appelait cette montagne si étrange ; il leur
répondit : « Le Puy de Dôme » Latinus et Ellenika s'esclaffèrent : « Ils sont fous, les gens d'ici !
Une montagne qui porte le nom d'un Puy et d'un Dôme ; ils ne savent pas ce qu'ils veulent. Mais
des gens qui nomment ainsi une montagne ne peuvent être totalement mauvais ». Ils
découvrirent alors qu'à quelque distance de cette montagne, se trouvait une ville, perchée sur une
butte ; ils s'y rendirent et questionnèrent le premier habitant qu'ils rencontrèrent. « Quel est ton
nom, bel habitant ? Je me nomme Vercingétorix, répondit l'autre ». « Où sommes-nous ?
demandèrent les deux pigeons ». « À Gergovie, la capitale de cette contrée, et notre roi s'appelle
Arvernus. Il est très ouvert à toutes les cultures » « Alors, dit Latinus, s'il n'est pas sectaire,
peut-être est-il possible ici d'étudier le grec et le latin ? » « Bien sûr, répondit Vercingétorix ; nous
avons dans notre ville un groupe très dynamique, l’ARELACLERA qui a pour devise en grec «
Diavazo, etsi petao », ce qui veut dire en langage de notre région « Je lis, donc je vole ». Vous
voyez que cette devise vous convient parfaitement ! » Avant de quitter leur interlocuteur, ils
remarquèrent que celui-ci tenait dans sa main un ouvrage bizarre, la Guerre des Gaules. Ils lui
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demandèrent quel était le thème de cet ouvrage. Vercingétorix changea alors de couleur et s'écria
: « C'est l'histoire d'un mec, César, qui raconte qu'un jour il viendra dans notre pays pour mater
une révolte .... Mais ce jour-là, je serai présent et rira bien qui rira le dernier ». Ellenika et
Latinus, en parcourant cette ville de Gergovie, croisèrent une mouette, ce qui les intrigua, puis
une cigogne : « Que fais-tu là, bel oiseau ? » « Je viens des froides contrées retrouver la chaleur
d'un accueil sympathique ».
Ils parvinrent enfin à une grande maison dans laquelle se trouvaient des adolescents et des
adultes ; une plaque était fixée à l'entrée : ARELACLERA « Nous y voilà » s'extasièrent les deux
pigeons ; enfermé dans une cage dont la forme évoquait un temple, un perroquet répétait sans
cesse : « Langues Anciennes, langues pas mortes ». Dans la demeure, les adultes expliquaient aux
enfants que lorsque l'on donne quelque chose, c'est un « datif», que lorsqu'on critique quelqu'un,
c'est un « accusatif», que lorsqu'on pratique une opération chirurgicale, c'est un « ablatif» et que
lorsque l'opération est importante, c'est un « ablatif absolu ». Cela leur sembla étrange, mais à
coup sûr, ces élèves et leurs professeurs parlaient les mêmes langues qu'eux, même si subsistaient
quelques différences d'interprétation ! Ils remarquèrent aussi un petit défaut de langue chez les
élèves ; ceux-ci ne disaient pas « à mi-chemin », mais « à MICHELIN ». Nos deux pigeons
trouvèrent ces élèves particulièrement gonflés. Ils demandèrent aux enseignants comment ils
procédaient pour motiver les élèves ; ceux-ci leur répondirent : « Les Langues que certains
nomment mortes, nous les nommons « anciennes » ; elles sont pour nous la jeunesse de la pensée
... et puis nous organisons des voyages vers les pays et les lieux qui représentent une des sources
de la culture classique ; nous partons dans de grands chars pouvant contenir une quarantaine de
personnes ; sur les chars se trouve inscrit une sorte de slogan : « Connaître d'où l'on vient, c'est
savoir où l'on va ». C'est une formule un peu bizarre d'un druide du Sud de la France, Bernardus
Valettus, qui s'occupe de nous organiser certains de nos voyages à travers une association,
Thalassa, ce qui veut dire, en grec, la mer, enfin, la mer que connaissaient les Grecs et à chaque
voyage, il nous demande de ramener une mouette, ce qui explique que vous rencontriez dans
notre bonne cité de Gergovie de tels oiseaux ;ils nous rappellent ainsi tous les jours ces contrées,
proches de la mer, auprès desquelles nous allons nous resourcer .... Mais avec lui on peut
s'attendre à tout ! Ce slogan, il l'aurait utilisé pour la première fois lors d'un banquet de la
CNARELA, une sorte de confédération de tous les partisans des Langues Anciennes. Mais ici
nous avons aussi un autre slogan, lié aux caractéristiques de notre région ; dans les environs de
Gergovie se trouve une source dont l'eau possède des vertus magiques : celui qui en boit en
lisant des textes antiques a le sentiment de voler de savoir en savoir et d'être ainsi victorieux
de l'ignorance ; cette source, nous l'avons donc appelée Volvic parce que son étymologie vient de
« voler » et de « victoire »... Donc les langues anciennes, cela coule de source »...
Latinus et Ellenika furent favorablement étonnés de la capacité imaginative des habitants de
la région. Ils vécurent à Gergovie des jours heureux, et puis une nuit, la ville fut saisie de
panique ; les habitants courraient en tous sens ; ils furent réveillés par une personne qu'ils
avaient rencontrée à l'ARELACLERA, Michaelus Chastanus, qui élevait des oies dans son «
insula » et qui leur cria : « Partez sans attendre ,mes oies viennent de m'avertir qu' une armée
de barbares s'approche de Gergovie ; ils veulent détruire notre ville ; sur leurs bannières sont
inscrits les mots « Rentabilité immédiate , mort aux Langues Anciennes, Sections à supprimer,
Dotation Globale Horaire ». Ils veulent brûler tous les livres ayant trait au grec et au latin ».
Ellenika et Latinus suivirent tous les habitants et se retrouvèrent au sommet du Puy de
Dôme. Là, les membres de l’Arelaclera tinrent un discours à la foule rassemblée : « Si on doit un
jour nous priver de toute notre culture classique, nous devons apprendre par cœur tous les livres
que nous avons emportés ; ainsi nul ne pourra plus jamais nous priver d'une partie de nos
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racines ». La foule applaudit et commença à réciter tous les textes qu'ils avaient pu soustraire à
la folie des barbares... La voix de cette foule se diffusa alentours, jusqu' à Gergovie. Un
miracle se produisit alors : les barbares, pris de panique, s'enfuirent. Le lendemain matin,
tout était redevenu calme ; le peuple de Gergovie, dans la lueur de l'aube, vit alors une étoile audessus du Puy de Dôme qui leur disait : « je suis la vérité de la Culture, je suis la permanence de
notre civilisation; je suis la protection des Langues Anciennes ; rien ne pourra me faire
disparaître ; certains essaieront, mais ils n'y parviendront pas .... Un jour, tous les amoureux des
Langues Anciennes se retrouveront dans une nouvelle ville que vous allez bâtir dans la plaine,
près de Gergovie, et dans cette ville brilleront et vivront à jamais l'espérance »
Latinus et Ellenika eurent alors l'assurance que cette région, dans les années futures, serait
« élue » des dieux de l'Antiquité. Ils suivirent l'étoile et s'envolèrent loin, loin, loin....
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HOMMAGE AU PROFESSEUR ALAIN MOREAU
Nous tenons à rappeler ici le souvenir du professeur Alain MOREAU qui a rejoint en 2010
les rives des mythes qu’il a étudiés et interrogés toute sa vie.
Professeur de grec ancien à l’Université Paul-Valéry de Montpellier, de 1973 à 2000, il était,
en effet, un spécialiste de la mythologie et de la tragédie grecques. Longtemps directeur du
SEMA, le Séminaire d’Études sur les Mentalités Antiques et du GITA, Groupe
interdisciplinaire du théâtre antique, il a organisé dans le cadre du SEMA trois colloques
internationaux qui se sont tenus à Montpellier, et dont les Actes ont été publiés par le Service
des Publications de l’Université Paul Valéry.
Nous tenons aussi à rappeler qu’Alain MOREAU fut le rédacteur en chef de Λὐχνος, la
revue de Connaissance Hellénique dans les années 1990.
Pour lui rendre hommage et lui donner toute la place que mérite son œuvre, nous vous
indiquons ici une bibliographie de ses principales productions dont certains titres éveilleront
sans doute la nostalgie de quelques-uns et quelques-unes :
La fabrique des mythes. Paris : Les Belles Lettres, 2006
Eschyle : la violence et le chaos. Paris : Les Belles Lettres, 1985
Mythes grecs I : Origines . Montpellier : Service des Publications de l’Université Paul Valéry Montpellier III, 1999
Mythes grecs II : L’initiation . Montpellier : Service des Publications de l’Université Paul
Valéry - Montpellier III, 2004
Le Mythe de Jason et Médée. Le Va-nu-pied et la Sorcière. Paris : Les Belles Lettres, collection
« Vérité des mythes », 1994
La magie. Études rassemblées par Alain Moreau et Jean-Claude Turpin. Actes du colloque
international de Montpellier, 25-27 mars 1999 organisé par le Séminaire d’Étude des
Mentalités Antiques (SEMA) et le Centre d’Études et de Recherches sur les Civilisations
Antiques de la Méditerranée (CERCAM), Montpellier : Publications de l’Université Paul
Valéry, 2000, 4 tomes.
Tome 1. Du monde babylonien au monde hellénistique
Tome 2. La magie dans l’antiquité grecque tardive. Les mythes.
Tome 3. Du monde latin au monde contemporain.
Tome 4. Bibliographie.
Les astres. Études rassemblées par Béatrice Bakhouche, Alain Moreau et Jean-Claude Turpin.
Actes du Colloque international de Montpellier (23-25 mars 1995), Publications de la
Recherche, Université Paul Valéry - Montpellier III, 1996.
Tome I : Les astres et les mythes. La description du ciel.
Tome II : Les correspondances entre le ciel, la Terre et l’homme. Les « survivances » de
l’astrologie antique.
L’initiation. Tome I : Les rites d’adolescence et les mystères. Actes du colloque international
de Montpellier 11-14 avril 1991. Études rassemblées par Alain Moreau, Montpellier :
Publications de l’Université Paul Valéry - Montpellier III, 1992
L’initiation. Tome II : L’acquisition d’un savoir ou d’un pouvoir. Le lieu initiatique.
Parodies et perspectives. Actes du colloque international de Montpellier 11-14 avril 1991
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Études rassemblées par Alain Moreau, Montpellier : Publications de l’Université Paul Valéry
- Montpellier III, 1992
Les « Choéphores » d’Eschyle. Textes réuni par Alain Moreau et Pierre Sauzeau. Cahiers du
GITA nº 10, Montpellier : Publications de l’Université Paul Valéry, 1997, 360 p
Dans la collection « Cahiers du GITA » : Philomythia. Mélanges offerts à Alain Moreau.
Textes rassemblés et édités par Pierre Sauzeau et Jean-Claude Turpin
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HOMMAGE À JACQUELINE DE ROMILLY
Jacqueline de ROMILLY a rejoint les champs élyséens à la rencontre de Thucydide le 18
décembre 2010 : elle nous laisse orphelins de sa pensée et de sa présence roborative dans nos
luttes communes pour préserver et diffuser les humanités classiques.
De nombreux hommages lui ont été rendus dans la presse : il est inutile de revenir sur
l’importance de son décès pour tous ceux qui se passionnent pour la culture de la Grèce
antique et contemporaine. Nous rappellerons juste dans ses grandes lignes le parcours de vie
de ce professeur qui a su renverser les dernières barrières qui séparaient les hommes et les
femmes attirés par les lumières antiques.
Jacqueline David est née le 26 mars 1913 à Chartres ; son père, Maxime David, normalien,
professeur de philosophie est mort en 1914. Sa mère Jeanne Malvoisin est devenue écrivain
après la Grande Guerre.
Elle suit ses études à Paris, d'abord au lycée Molière, où elle est lauréate du concours général
de latin et deuxième prix en grec ancien en 1930. Après sa khâgne au lycée Louis-le-Grand,
elle est admise à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm (promotion 1933). Élève de
l'helléniste Paul Mazon, elle est reçue à l'agrégation de lettres en 1936. Elle se marie en 1940
avec Michel Worms de Romilly, dont elle divorce en 1973. D’origine juive par son père, elle
est suspendue de ses fonctions par le régime de Vichy en 1941, et alors obligée de se cacher.
Enfin, elle obtient son doctorat ès lettres en 1947.
Après avoir enseigné un temps au lycée, Jacqueline de Romilly devient professeur à
l'Université de Lille, puis à la Sorbonne de 1957 à 1973. En 1973, elle obtient la chaire de la
Grèce au Collège de France, où elle est la première femme professeur. En 1975, elle est élue à
l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres au fauteuil de l'helléniste Pierre Chantraine : elle
est la première femme élue dans cette académie, qu'elle préside en 1987. En 1989, elle devient
la deuxième femme, après Marguerite Yourcenar, à entrer à l'Académie Française : elle est
élue au 7ème fauteuil, occupé précédemment par André Roussin, le même jour que le
commandant Cousteau. Elle reçoit Hector Bianciotti en 1997, puis est déléguée à la Séance
publique annuelle des Cinq Académies en 1994 et en 2008. Elle devient « doyenne d’âge » de
l’Académie Française à la mort de Claude Lévi-Strauss en 2009. Obtenant la nationalité
grecque en 1995, elle est nommée « ambassadrice de l'hellénisme » en 2000. En 1992, elle
fonde l'association de Sauvegarde des Enseignements Littéraires, dont elle reste ensuite
présidente d'honneur. Elle préside l'association Guillaume Budé, puis en devient présidente
d'honneur. Ayant seulement reçu le baptême en 1940, Jacqueline de Romilly a achevé sa
conversion au catholicisme en 2008, à quatre-vingt-quinze ans. Elle meurt à 97 ans, presque
aveugle et sans enfant ni famille, à l'hôpital Ambroise-Paré de Boulogne-Billancourt, le 18
décembre 2010.
Jacqueline de Romilly disait d'elle-même ne pas avoir eu, « bien sûr », la vie qu'elle
souhaitait : « Avoir été juive sous l'Occupation, finir seule, presque aveugle, sans enfants et
sans famille, est-ce vraiment sensationnel ? Mais ma vie de professeur a été, d'un bout à
l'autre, celle que je souhaitais. » Citée par Le Figaro, le 19 décembre 2010
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Voici une bibliographie succincte des œuvres de madame de Romilly assortie de quelques
commentaires à l’usage des plus jeunes d’entre nous :
Thucydide et l'impérialisme athénien, la pensée de l'historien et la genèse de l'œuvre,
thèse de doctorat, 1947 ; 1951 ; Belles-Lettres, 1961 : incontournable !
Histoire et raison chez Thucydide, Belles-Lettres, 1956 ; Belles Lettres, 1967, coll.
Études anciennes
La Crainte et l'angoisse dans le théâtre d'Eschyle, Belles-Lettres, 1958 ; 1971
L'évolution du pathétique, d'Eschyle à Euripide, PUF, 1961 ; 1980
Nous autres professeurs, Fayard, 1969 : réflexion intéressante mais un peu dépassée
aujourd’hui, quoique ...
La Tragédie grecque, PUF, 1970 ; 1982 : il faut l’avoir dans sa bibliothèque quand on
enseigne le grec.
Le Temps dans la tragédie grecque, Vrin, 1971 : à lire dès qu’on s’intéresse au théâtre grec
et à sa réception.
La Loi dans la pensée grecque, des origines à Aristote, Belles-Lettres, 1971
Problèmes de la démocratie grecque, Hermann, 1975 ; Plon, Agora, 1986
La douceur dans la pensée grecque, Les Belles Lettres, 1979 ; Pluriel, 1995 : à lire pour
soi et pour enseigner.
Précis de littérature grecque, PUF, 1980 ; Quadrige, 2002 ; PUF, 2007, coll. Quadrige
Grands textes : à se procurer de toute urgence pour enseigner mais aussi pour sa propre
culture.
L'Enseignement en détresse, Julliard, 1984 ; 1991 : un pamphlet à lire, surtout en ce
moment, même si certains propos et postures ne sont pas ou plus les nôtres.
« Patience, mon cœur » : l'essor de la psychologie dans la littérature grecque
classique, Belles-Lettres, 1984 ; Plon, Agora, 1994 : un de ses plus beaux livres, peutêtre...
Homère, PUF, 1985 ; Que sais-je?
La Modernité d'Euripide, PUF, 1986
Sur les chemins de Sainte-Victoire, Julliard, 1987 ; de Fallois, 2002 : une récréation
agréable.
Les Grands Sophistes dans l'Athènes de Périclès, de Fallois, 1988
La Grèce à la découverte de la liberté, de Fallois, 1989
La construction de la vérité chez Thucydide, Julliard, 1990 ; Juliard, 1999, coll.
Ouverture à cœur, de Fallois, 1990
Écrits sur l'enseignement, de Fallois, 1991
Pourquoi la Grèce ?, de Fallois, 1992 ; LGF, 1994, poche
Lettres aux parents sur les choix scolaires, de Fallois, 1994
Rencontre avec la Grèce Antique, de Fallois, 1995
Alcibiade ou les dangers de l'ambition, de Fallois, 1995, 2 cartes, 282 p. ; Tallandier,
2008, coll. Texto, : très intéressant pour comprendre Alcibiade et la pensée grecque antique.
Hector, de Fallois, 1997 : très beau livre.
Le Trésor des savoirs oubliés, de Fallois, 1998 ; LGF, 1999, poche
10
Pour l'amour du grec avec Jean - Pierre Vernant, Bayard Culture, 2000
La Grèce antique contre la violence, de Fallois, 2000 : pour nourrir notre réflexion sur les
problèmes de notre temps et de notre métier.
Héros tragiques, héros lyriques, Fata Morgana, 2000
Au Louvre avec Jacqueline de Romilly et Jacques Lacarrière, Somogy, Éditions d'art,
Louvre : Service culturel, 2001 : à faire acheter au CDI !
Dictionnaire de littérature grecque ancienne et moderne, PUF, 2001 : à posséder dans sa
bibliothèque.
Sous des dehors si calmes, de Fallois, 2002
Une certaine idée de la Grèce, de Fallois, 2003 ; LGF, 2006, poche
La Grèce antique : Les plus beaux textes d'Homère à Origène, Bayard Centurion, 2003
De la Flûte à la Lyre, Fata Morgana, 2004
Les Grands Sophistes dans l'Athènes de Périclès, LGF, 2004, poche, coll. Références
L'Invention de l'histoire politique chez Thucydide, ENS, 2005, coll. Études de
littérature ancienne
L'Élan démocratique dans l'Athènes ancienne, de Fallois, 2005
Jacqueline de Romilly raconte l'Orestie d'Eschyle, Bayard Centurion, coll. La
mémoire des œuvres, 2006
La tragédie grecque, PUF, coll. Quadrige, Grands textes, 2006
Les Roses de la solitude, 2006 ; LGF, 2007, poche : émouvant.
Dans le jardin des mots, 2007 ; LGF, 2008, poche : vivifiant et souvent amusant, pour les
cours de collège ...
Petites leçons sur le grec ancien, avec Monique Trédé-Boulmer, Stock, 2008 ; LGF,
2010, poche : à lire absolument pour soi et pour ses élèves.
Le Sourire innombrable, de Fallois, 2008 ; LGF, 2009, poche : très beau.
La Grèce antique : Les plus beaux textes d'Homère à Origène, Bayard Centurion, 2003
avec Fabrice Amedeo, Actualité de la Démocratie Athénienne, 2009
Les Révélations de la mémoire, de Fallois, 2009 ; LGF, 2010, poche
La grandeur de l'homme au siècle de Périclès, de Fallois, 2010, coll, Littérature éd.
grecque : son testament intellectuel et spirituel, très émouvant.
Traductions de Jacqueline de Romilly :
Thucydide, La Guerre du Péloponnèse, édition bilingue français-grec, Belles Lettres
(1re éd. : 1953-1972), 2009, coll. Classiques en poche :
Tome 1, Livres I et II ; Tome 2, Livres III, IV, V ; Tome 3, Livres VI, VII et VIII
11
JACQUELINE DE ROMILLY ET LA CNARELA
La CNARELA et les associations qu’elle rassemble s'associent à la peine des proches de
Jacqueline de Romilly et tient à lui rendre hommage en rappelant son intervention
déterminante à nos côtés lors de l'appel lancé au cours de la réunion tenue à l'EHESS le 15
mai 2004.
Marie-Hélène Menaut, alors présidente de la CNARELA, nous rappelle ici les circonstances
de cette intervention.
En 2004, devant les attaques portées contre le latin et le grec dans l’enseignement
secondaire et au concours du CAPES, la CNARELA a initié l’APPEL pour le latin et le grec.
Huit associations ont participé à l’élaboration d’un texte commun qui a recueilli 70 000
signatures : Association Guillaume Budé, Association pour l’encouragement des études
grecques en France, l’AFPLA-prépa, l’APLAES, l’APL, Sauvez les Lettres et la SEL .
Cet Appel a eu pour point d’aboutissement une réunion publique de réflexion et de débat à
l’EHESS le 15 mai 2004. Mme Jacqueline de Romilly a présidé la séance.
Elle a pris la peine de se déplacer et a prononcé une allocution simple et percutante dont le
dernier mot était de nous encourager à affirmer dans notre vie quotidienne la valeur de
formation du latin et du grec pour les jeunes et de garder « espoir ».
Son engagement à cette occasion a entraîné une diffusion importante dans les médias, des
soutiens que nous n’aurions pas eus sans son intervention , des messages de personnalités
telles que Mme Hélène Carrère d’Encausse, de Monsieur Jean d’Ormesson , de Monsieur
Jacques Friedel ( Académie des Sciences), de Monsieur Gilbert Dagron ( Académie des
Inscriptions et Belles Lettres et professeur honoraire au Collège de France).On peut lire ces
interventions toujours d’actualité dans le recueil résumant cette action édité par les Belles
Lettres /CNARELA : Appel pour le latin et le grec 70 000 signatures.
Nous avons obtenu gain de cause en 2004.
Le meilleur hommage que nous puissions rendre à Jacqueline de Romilly est de continuer
à nous battre pour la diffusion de la langue et de la culture grecques auprès du plus grand
nombre de lycéens et d’étudiants à un moment où elles sont de nouveau en danger.
Marie-Hélène Menaut
Vice-présidente de la CNARELA
Présidente de la CNARELA en 2004
12
ALLOCUTION DE MADAME JACQUELINE DE ROMILLY
ECOLE PRATIQUE DES HAUTES ETUDES EN SCIENCES SOCIALES
LE 15 MAI 2004
Mes amis,
Je me réjouis de vous voir tous ici, venus nombreux. En fait, c'est une vraie chance que tous
les signataires qui se sont manifestés ne soient pas venus, car nous serions alors plus de
soixante mille personnes présentes, et cela poserait quelques problèmes.
La rencontre d'aujourd'hui, organisée principalement par la CNARELA, réunit les membres
des sept associations qui se sont mises ensemble pour protester contre les mesures
dramatiques prises récemment à l'égard du latin et du grec. Il s'agit donc avant tout d'une
crise. Mais je voudrais le dire nettement : il s'agit aussi de dépasser cette crise. Je pense que
tous ceux qui ont été mêlés de très près à l'action vous parleront de cette crise, vous diront
comment, brusquement, nous avons appris que, rectorat après rectorat, toutes les classes de
grec qui n'atteignaient pas un nombre d'élèves suffisant étaient supprimées ; qu'en plus ce
calcul du nombre d'élèves avait été fait, par mauvaise foi ou ignorance, de façon inexacte et
que, dorénavant, le latin dans certains cas, et le grec, seraient groupés dans un ou deux
établissements par rectorat. Et puis on a appris qu'il y aurait une règle, et qu'il fallait tant
d'élèves, mais cela changeait selon le rectorat, ici dix, là douze : un véritable gâchis !
Alors nous sommes entrés en bataille. C'était trop. Le résultat est que, après bien des
interventions, nous avons été largement suivis. Nous avons été suivis dans la presse, par des
journaux de tous bords et, personnellement, j'ai été très aidée par le Figaro, et par le
magazine Lire : il y a eu un véritable écho, dans tous les journaux de Paris et de province, et
la pétition a été rédigée, et les adhésions n'ont pas cessé d'arriver : chacun s'est donné un mal
énorme.
Résultat : on a retardé les mesures : on a dit que pour le moment, on allait refaire les calculs
et que l'on verrait. C'est tout. C'est déjà un petit avantage. Mais est-ce que vous mesurez
combien le projet est immoral, combien il est désastreux ? Comment voulez-vous que
réagissent des élèves, pour qui on a déjà pris tant de mesures, compliquant le fait de
s'inscrire, tant pour le grec que pour le latin, si on leur dit : "C'est supprimé", "non, ça va être
rétabli", "peut-être ce sera rétabli", "ce n'est pas certain, vous pouvez toujours aller voir
ailleurs...". Les mesures prises n'ont cessé de vouloir décourager les élèves et ces hésitations,
ces menaces ne font que les décourager encore davantage.
Nous ne sommes pas satisfaits de ces premiers résultats : il nous faut mieux. Il faut
reconnaître que la crise que je viens d'évoquer était déjà le résultat d'une longue série de
crises et qu'elle a été suivie par d'autres. J'ai l'impression, depuis quelques années, de n'avoir
pas cessé de protester. Juste avant ces suppressions dans le secondaire, nous nous battions
pour un poste de grec à la Sorbonne, arbitrairement supprimé, et encore une fois, par une
sorte de jeu de mots. Et nous sommes intervenus, nous nous sommes agités et, pour finir, les
choses ont été en partie réparées. Mais depuis, cela continue : les postes diminuent, on parie
d'une réforme du CAPES, qui consisterait à supprimer les épreuves écrites de latin et de
grec; on parle aussi d'une réforme des classes de Troisième. Bref, Je pense que cette dernière
mesure, contre laquelle nous nous sommes élevés, qui suscitait notre alliance et votre
présence, ne doit pas seulement être annulée, mais doit générer enfin un sursaut, un
mouvement de reconnaissance de l'importance de ces études dans la formation de l'esprit et
de leur rôle dans la culture française, afin que tout ne soit plus fait non plus pour les
13
décourager et les rendre difficiles. Ce n'est pas seulement une question d'une très légère
dépense conforme à la tradition que nous réclamons : c'est vraiment une prise de conscience
et un effort et une action.
Chacun de nous, dans sa sphère, peut participer à cette action : tous ensemble nous le
pouvons mieux encore. Et le moment est venu. Chacun sait que dans l'édition, dans la
presse, on voit se traduire un vif intérêt pour le latin et le grec. Partout on nous demande,
sauf dans l'enseignement ! Là on nous chasse et on nous rejette : cela doit cesser.
Les arguments, je ne les citerai pas, vous les connaissez. Et ils sont si évidents ! Il faut
vraiment être de mauvaise foi pour ne pas comprendre ce que représente pour des jeunes
cette initiation à des langues à la fois si proches de la nôtre, et si différentes. Cette initiation
les oblige à faire attention, à essayer de comprendre, à se rendre compte des raisons pour
lesquelles ils se sont trompés ; ils apprennent ainsi à gagner lentement, progressivement, le
sens ! Et ce sens les mène à un contact plus étroit avec des textes qui sont encore simples,
souvent concrets, souvent riches de rêves et de légendes, mais où se dessinent si fermement
les valeurs qui s'inventaient alors et qui sont encore aujourd'hui le fondement de nos
sociétés.
Et j'ajouterai que ces valeurs ne sont pas spécifiquement françaises : elles ont l'avantage de
pouvoir s'adapter à des élèves partis d'autres cultures et elles ont l'avantage d'être, dans une
très large mesure communes aux divers peuples de cette Europe que nous essayons
aujourd'hui de constituer et de consolider.
Les arguments ne manquent pas : ils sont divers et se retrouvent à divers niveaux. Chacun
peut les employer selon sa sensibilité, et le niveau de l'enseignement qui est en jeu : ils sont
tous vrais et tous forts. Il est certain, en tout cas, que le contact avec les textes, à quelque
niveau que ce soit, construit peu à peu la personnalité morale des élèves et leur donne
cette armature intérieure qui, si visiblement, fait défaut aujourd'hui. Il est temps de parler, et
de parler haut. Il est temps d'obtenir une reconnaissance officielle du rôle de ces études. Il est
donc temps qu'une propagande soit faite par chacun d'entre nous et par nous tous ensemble
et par les hommes, de quelque bord qu'ils soient, qui comprennent les choses et voudront
nous aider. Je fais partie d'une association qui s'appelle L'Elan nouveau des citoyens. Eh
bien, j'aimerais que surgisse un élan nouveau des défenseurs de nos études, des amis de la
culture, des gens qui sont indignés de voir refuser, pour de pauvres raisons d'économie et
par incompréhension, des études qui ont si clairement montré depuis longtemps leur valeur
de formation pour les jeunes. Il faudra donc qu'à partir d'aujourd'hui, dans les
manifestations et dans les négociations qui auront lieu avec ce ministère, mais aussi dans
notre vie quotidienne, nous l'affirmions sans réserve. J'ai parlé d'une crise et nous nous
sommes réunis pour une circonstance grave, où nous étions menacés de mort. Mais ce
moment d'extrême danger peut être le début d'une renaissance. Oui, une renaissance. Si nous
le faisons, ce sera si beau ! Et nous pouvons le faire. Et mon dernier mot, dans cette lutte pour
éviter un désastre, ce sera !e mot d'espoir. Merci.
Jacqueline de Romilly
14
HOMMAGE À CLAUDE NICOLET
Claude NICOLET est décédé le 24 décembre 2010 à Paris : cet historien français, spécialiste
de la Rome antique, des institutions et des idées politiques a enseigné dans les universités de
Tunis, de Caen, puis de Paris-I, avant d’être nommé directeur d'études émérite à l'École
pratique des hautes études en 1977. Élu membre de l'Académie des inscriptions et belleslettres en 1986, il fut le directeur de l'École française de Rome de 1992 à 1995.
Jean-Claude CARRIÈRE de l’ARTELA lui rend cet hommage :
Le 24 décembre, six jours après l’helléniste Jacqueline de Romilly, un autre immense savant,
un très grand latiniste, nous a quittés à l’âge de quatre-vingt ans : Claude Nicolet. C’est un
grand deuil pour tous les humanistes et antiquisants et une grande douleur pour ses amis.
Le trajet du savant est remarquable : normalien (1950), agrégé d’histoire (1954),
maîtreassistant à Tunis et à Caen (1959-1969), professeur à Paris et directeur à l’Ecole
Pratique des Hautes Etudes (1969), membre de l’Académie des inscriptions et belles lettres
(1986), directeur de l’Ecole Française de Rome (1992-1995), enfin professeur et directeur
d’études émérite. A vrai dire, une liste aussi squelettique et aussi incomplète éclaire mal une
existence d’autant plus riche que le savant a aussi été, dans la ligne de A. M. Desrousseaux,
de Fernand Robert, Pierre Lévêque, J.-P. Vernant et d’autres, un homme engagé : «
républicain de gauche, d’une famille radicale et tout ce qu’il y a de plus laïc », comme il se
définissait lui-même dans un entretien1.
Jeune agrégé professeur de lycée, il entre en rapport, en 1956, avec Pierre Mendès-France et
devient rédacteur en chef des Cahiers de la République (1956-57, 1961-63). Il se présente
même à la députation, mais essuie un échec. Ami de J.-P. Chevènement, il est chargé de
mission au MEN (1984, 1995), au ministère de la défense (1989-91), au ministère de l’intérieur
(1997). Le spécialiste du métier de citoyen à Rome, lui-même citoyen aux engagements
multiples, manifeste un souci constant des idéaux républicains et de l’apprentissage de la
citoyenneté à l’école. Il travaille sur la réception de l’Antiquité à l’époque moderne. Il se
passionne pour la singularité du pacte politico-social républicain en France, fondé sur un
complet refus de la transcendance et reposant sur un système de valeurs rationnelles et
laïques.
Son œuvre scientifique est de première importance pour le contenu et la méthode. Il ne s’agit
pas de recopier ici sa longue bibliographie. Rappelons seulement que sa thèse, L’ordre
équestre à l’Epoque républicaine, 312-43 av. J.-C. (2 vol., 1966, 1974) a fortement éclairé la
nature de cet ordre : les chevaliers n’étaient pas seulement des gens d’affaire, mais des
propriétaires fonciers constituant une sorte de noblesse militaire provinciale et une élite de
réserve pour le Sénat, en quelque sorte cooptée, en nombre clos (le second tome constitue
une très précieuse prosopographie). Qui n’a pas utilisé son ouvrage sur les Gracques (1967)
ou Le métier de citoyen dans la Rome républicaine (1976) , qui n’a jamais consulté les deux
tomes de la Nouvelle Clio aux PUF, Rome et la conquête du monde méditerranéen (1977,
1978) ? Passionnante aussi est sa réflexion historique sur la représentation romaine de
l’espace, L’inventaire du Monde, Géographie et politique aux origines de l’empire romain
(1988).
15
Son engagement civique a été, lui aussi, jalonné d’ouvrages : sur Pierre Mendès-France
(1959), sur l’Idée républicaine en France (1982/1994). Assez récemment encore, en 2003, a
paru, chez Perrin, La fabrique d’une nation, La France entre Rome et les Germains.
Une anecdote finale, afin de personnaliser ce portrait très académique. Il la racontait
volontiers, car ce radical qui ne cachait nullement son athéisme, même devant des autorités
religieuses romaines, prétendait assumer une (demi-)judéité (peut-être incertaine). Un jour,
en prenant un pot avec lui, trois autres grands savants, Ernst Badian, Emilio Gabba et Pierre
Vidal-Naquet, autre Marseillais, soutenaient en plaisantant qu’il fallait être d’origine juive
pour être un parfait historien. Et Nicolet : mais moi aussi le nom de mon père était Cittanova
et il descendait d’une famille d’armateurs juifs de Livourne (à Marseille, pendant la guerre,
précisait-il, il avait pris le nom de son oncle grâce au préfet de police Francfort – lequel avait
été son professeur et avait fait naître sa vocation d’historien, mais cela est une autre histoire).
Le sévère Emilio Gabba lui rétorqua que les Juifs de Livourne n’avaient jamais été de vrais
Juifs. Mais tout le ferme caractère et l’humour engagé du savant historien et du politique
radical que fut Claude Nicolet se montrent au vif dans sa revendication amusée.
J.-C. CARRIÈRE
1
Voir, sur Wikipédia, le lien vers le très significatif « Entretien avec Corinne Martin et Thierry Paquot » (6 déc.
2002)
16
Compte rendu de l’Assemblée Générale de l’AGAP du 9 octobre 2010
La séance est ouverte à 10 h15, salle 02 de la MMSH (Aix-en-Provence), en présence
de : Paulette BERNARDI, Jean-Pierre CÈBE, Anne-Marie CHAZAL, Arielle
CHOPARD, Florence CLAPIZ, André GILLES, Fabienne HERMARY, Chantal
MATRAY, Christine et Jacques MAUGER, Stéphanie PÉTRONE et Pascale
PEYRONNET
Excusés : Nicolas ANTOMARCHI, Anne BALANSARD, Christian BOUDIGNON,
Pascal BOULHOL, Yvette BRIOT, Arlette DEBOST, Gilles DORIVAL, Jean-Michel
IMBERT, Hélène JOUCLA, Nicole PAULI, Dolorès et Didier PRALON, Georges
SIGNORET, Edmée SUCAMELI, Christiane URVOY, Gaëlle VIARD.
Approbation du compte rendu de l’AG de 2009
Ce compte rendu a été diffusé sur le site internet de l’AGAP (section « Vie de
l’association »). Il est approuvé à l’unanimité.
Compte rendu financier
Le budget de l’AGAP était établi par année universitaire, ce qui pose problème par
rapport aux règles comptables actuelles. Il a donc été décidé de passer à une gestion
par année civile (toujours assurée par Edmée Sucamelli et Gaëlle Viard). En
conséquence, le rapport financier 2009-2010 ne pourra être établi qu’au cours du
premier trimestre 2011. Il sera communiqué à ce moment-là.
Quoi qu’il en soit le bilan est largement positif, avec un excédent significatif (de
l’ordre de 11000 euros début septembre), mais avant règlement des frais importants
du Bulletin.
L’AGAP dispose maintenant d’une carte bancaire et d’une assurance de ses moyens
de paiement auprès de la Caisse d’Epargne, les règlements par chèque étant dans
certains cas problématiques.
Faute de subventions, toutes nos ressources viennent des cotisations. Il reste donc
indispensable que chacun pense à renouveler son adhésion. Bulletin d’adhésion
2010-2011 ci-joint et dans le bulletin 2010-2011 ainsi que sur le site web :
http://agap.mmsh.univ-aix.fr
L’ordinateur utilisé par l’AGAP à la MMSH est hors d’usage. Anne-Marie Chazal
propose l’achat d’un ordinateur portable qui servira d’une part à la gestion de
l’association et d’autre part à la prise de notes dans les réunions auxquelles participe
l’AGAP. Après discussion, le choix sera fait entre un ultra portable (« netbook ») et
un portable classique, à compléter dans les deux cas par un disque externe de
sauvegarde.
17
Compte rendu moral
Anne-Marie Chazal rappelle les activités de l’année écoulée. Comme chacun le sait, la
situation des langues anciennes est actuellement très délicate.
• L’AGAP a participé (Anne-Marie Chazal, Pascale Peyronnet) aux journées de la
CNARELA les 26, 27 et 28 octobre 2009 à Besançon ; chaque association devait
demander une entrevue à chaque recteur d’académie. Comme la majorité des
associations, l’AGAP n’a reçu aucune réponse.
• Le stage organisé par l’AGAP (dans le cadre de la formation continue gérée par le
Rectorat) Le théâtre antique a bénéficié d’une excellente organisation par Valérie
BONET. L’association a reçu des lettres de remerciements suivies de
réinscriptions et d’inscriptions nouvelles à l’AGAP. Le compte rendu établi par
nos collègues de Manosque (Jean-Loup et Nicole MARTIN, Martine CASANOVA
et Mireille TOURREAU) et mis en page par Valérie BONET sera publié dans le
Bulletin de l’AGAP ainsi que sur le site web.
• L’assemble générale de la CNARELA a été marquée par l’émotion suscitée par la
disparition de Bernard VALETTE, président de Thalassa, dont l’activité
infatigable pour la défense dans langues anciennes et la découverte des cultures
antiques a donné vie à THALASSA. Un hommage lui sera rendu dans le prochain
bulletin.
• Des discussions difficiles ont eu lieu pour préparer des motions contre la réforme
des lycées et celle du CAPES de lettres classiques, et tout particulièrement contre
« l’épreuve orale pour devenir un bon fonctionnaire ». Ces discussions ont
continué par courrier électronique entre les associations après l’AG, certains
jugeant les motions originales trop virulentes. La CNARELA était partagée quant
à la démission du jury du CAPES. Depuis quelques discussions ont eu lieu avec le
ministère, mais les avancées sont minimes, le problème reste entier.
Anne-Marie CHAZAL rappelle qu’une compilation des discussions et des
positions arrêtées par la CNARELA a été envoyée aux membres de l’association
sous la forme d’une « Lettre aux adhérents » par courrier électronique au mois de
mars. L’envoi a été fait dans 4 formats différents (Word 2003, Word 2007,
OpenOffice, PDF). Ces documents sont également disponibles depuis mars sur le
site de l’association.
• Le Rallye 2010 a été marqué par une première ouverture aux classes de seconde.
Aux côtés de nombreuses enseignantes, nous avons eu le plaisir de voir participer
quelques enseignants, venant de tous les départements de l’académie. Au total 10
établissements publics, 4 établissements privés, 25 rallyes à corriger, 452 élèves
dont 427 latinistes et hellénistes et 25 élèves 6e en français. Le tout conclu par une
belle fête de fin d’année, avec de fort jolis lots (livres d’art, DVD, bandes
dessinées…) à côté des traditionnels coupes et tee-shirts. Le palmarès est sur le
site web depuis le mois de juin. On le retrouvera dans le Bulletin avec le sujet et le
corrigé.
18
•
•
•
Une discussion s’engage sur le Rallye. Anne-Marie CHAZAL suggère que le
questionnaire de cette année était peut-être un peu trop spécialisé, avec des
questions sur l’archéologie qui n’étaient pas accessibles à tous. Pascale Peyronnet
indique qu’un effort sera fait pour rendre les questions accessibles avec
l’utilisation d’outils disponibles sur internet ou courants dans les établissements.
Elle propose de rendre le rallye accessible aux professeurs d’histoire-géographie.
Fabienne Hermary demande s’il faut envisager de modifier le règlement qui
impose actuellement l’adhésion à l’AGAP pour participer au Rallye.
Rentrée 2010. L’association manque de retours du terrain pour faire un bilan
précis de la situation. Un appel pressant est adressé aux adhérents : RENVOYEZ
A l’AGAP UNE INFORMATION SUR LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES !
Ecrivez à : [email protected]
D’après des indications fragmentaires, il semble que parfois la rentrée se soit
déroulée sans problème, mais des situations difficiles ont été signalées. En lycée à
Gap, Anne-Marie Chazal ne dispose que de 2 heures de latin à chaque niveau au
lieu des 3 réglementaires : l’emploi du temps des élèves n’en permet pas
davantage. A Sisteron, l’emploi du temps d’un établissement a dû être
entièrement
refait
10
jours
après
la
rentrée…
L’enseignement d’exploration en seconde présente des difficultés considérables et
probablement insurmontables, comme le montrent les appels angoissés sur les
listes de diffusion professionnelles. Il semble placé aux mêmes horaires et dans
les mêmes groupes que les latinistes « standard » qui ont suivi des cours depuis la
5e du collège.
Les contacts avec l’Inspection Pédagogique Régionale (par courriel) sont difficiles
actuellement. Des problèmes techniques auraient été rencontrés.
Le Conseil d’administration ayant été renouvelé l’an dernier et ses membres étant
élus pour 3 ans, il n’y a pas lieu de voter à ce sujet.
En ce qui concerne le Bureau, Pascale Peyronnet est seule candidate à la succession
de Fabienne Hermary, qui a accompli cette année encore un travail considérable
(gestion des adhésions et remise en ordre des fichiers).
On procède au vote. 16 voix pour (dont 7 mandats), 1 abstention, 1 voix contre, au
motif que Pascale Peyronnet « est trop précieuse à la tête de la commission
Rallye pour assumer en plus le secrétariat».
Composition du Conseil d’administration :
Christiane ALPHONSE
Anne BALANSARD
Dominique BAUDOUIN
Anne-Marie BERNARDI
Paulette BERNARDI
Marie-Christine DUFLAU
Brigitte FRANCESCHETTI
Anne FROIDURE
Anne-Marie GARCIN
Antoine HERMARY
19
Christine MAUGER
Jacques MAUGER
Jacques MILLET
Nicole PAULI
Françoise PELTIER
Valérie BONET
Pascal BOULHOL
Emmanuèle CAIRE
Jean-Louis CHARRIÈRE
Anne-Marie CHAZAL
Arielle CHOPARD
Suzanne DELEUZE
Gilles DORIVAL
Fabienne HERMARY
Claude HERNANDEZ
Carine LAURORA-MICONI
Gérard LEYDIER
Albert MACHIN
Jocelyne MARTIN-GOBERT
Pierre MARTIN
Chantal MATRAY
Lucien PERNÉE
Anne PETRUCCI
Pascale PEYRONNET
Dolorès PRALON-JULIA
Didier PRALON
Edmée SUCAMELI
Jean-Victor VERNHES
Gaëlle VIARD
Aline VIDIL
Composition du bureau :
Présidente : Anne-Marie CHAZAL,
Vice-présidents : Didier PRALON, Emmanuèle CAIRE, Pascal BOULHOL, Anne BALANSARD
Secrétaire : P. PEYRONNET
Trésorière : Gaëlle VIARD
Vice-Trésorière : Edmée SUCAMELI
Responsable du site Internet : Jacques MAUGER
Questions diverses
•
•
•
Les Journées CNARELA de Lyon à la Toussaint : Anne-Marie CHAZAL y
représentera l’AGAP.
Le stage AGAP : il portera sur « L’homme et l’animal » et aura lieu le 13 et 14
janvier 2011 à la MMSH. L’organisation du stage est pratiquement terminée (il
reste un intervenant à confirmer). IMPORTANT : un professeur non inscrit peut
encore appeler la DAFIP pour se faire ajouter sur la liste des participants.
La rétribution des intervenants et le remboursement de leurs frais par la DAFIP se
faisant avec difficulté, le principe est adopté d’une compensation de frais par
l’AGAP en cas de nécessité.
Une vive discussion est lancée par Arielle CHOPARD sur le « manque
d’information des adhérents » pendant l’année 2009-2010. Il est fait allusion à un
courriel envoyé par Brigitte FRANCESCHETTI à un certain nombre d’adhérents
sur l’inefficacité de l’association, mais la plupart des présents ne sont pas au
courant.
Sur le plan technique il apparaît que Brigitte FRANCESCHETTI a utilisé la
fonction « Répondre à tous » sur la convocation à l’AG envoyée par Anne-Marie
CHAZAL. Cette convocation ayant été envoyée en plusieurs « paquets » pour
éviter un filtrage opéré par certains fournisseurs d’accès ou certains logiciels
clients des destinataires, une partie seulement des adhérents ont reçu cette
réponse de Brigitte FRANCESCHETTI.
La discussion porte sur les moyens d’améliorer le dynamisme de l’association et
les outils à utiliser étant donné la grande dispersion géographique des adhérents.
Diverses solutions sont possibles. Jacques MAUGER rappelle l’existence d’une
plateforme de travail collaboratif disponible sur le site de l’AGAP, mais qui n’a
pas encore été utilisée. L’accès est protégé par des mots de passe individuels. Tout
20
•
•
•
•
adhérent intéressé peut demander l’attribution d’un mot de passe par un courriel
à l’AGAP.
Une réunion est programmée le 17 novembre à 18 h à la MMSH sur ce sujet. D’ici
là, la discussion doit se poursuivre par courriel.
Cette réunion sera aussi l’occasion de présenter des solutions pour la frappe des
textes grecs. Tout adhérent peut participer à la réunion.
Enfin, il faut rappeler que tous les membres du Bureau sont des bénévoles et que
l’activité de l’association ne peut être que le résultat de l’activité de l’ensemble de
ses membres. Les critiques ne peuvent être admises que si elles viennent de
personnes qui acceptent de prendre en charge une partie du travail commun.
Le rallye 2010 est évidemment en cours d'organisation. Les bonnes volontés
seront les bienvenues, car Pascale PEYRONNET sera accaparée par bien d’autres
tâches. Pour l’instant, seule Florence CLAPIZ a accepté de se joindre à la
commission Rallye, qu’elle en soit remerciée.
Anne-Marie CHAZAL lance un appel aux adhérents pour qu’ils adressent à
l’AGAP des contributions à caractère pédagogique. De telles contributions seront
présentées dans le compte rendu du stage 2011 (voir le Bulletin). Elle demande
aussi que les adhérents s’impliquent davantage dans les activités de l’Association
pour les Journées de l’Antiquité (AJA) dont il est rappelé qu’elle est une
émanation de l’AGAP. Françoise Hermary demande si l’AGAP peut financer des
activités de l’AJA. La question va être étudiée.
Pascale PEYRONNET souhaite que l’AGAP envisage d’accueillir en Arles en 2012
ou en 2013 l’Assemblée générale de la CNARELA (à la Toussaint). Elle signale
qu’en 2012 une grande exposition « Rodin et l’Antiquité » sera organisée par le
Musée de l’Arles Antique.
Une deuxième Assemblée générale pour l’année scolaire 2010-2011 est envisagée
au printemps 2011.
La séance est levée à 12 heures 20.
Le secrétaire de séance : Jacques MAUGER
Cette assemblée générale fut suivie d’un très agréable repas dans un restaurant de la place
des Cardeurs à Aix : L’Épicurien. Loin de nous l’idée de faire de la publicité mais le nom de
cet établissement était un appel trop fort pour que nous y résistions ... AMC
21
COMPTE RENDU DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Samedi 29 mai 2010 de 13H30 à 15H30
Lycée Saint-Sernin
Place Saint-Sernin
31000 TOULOUSE
ORDRE DU JOUR
1. Approbation du compte rendu de l’Assemblée Générale du 16 janvier 2010 ;
2. Informations à propos d’EUROCLASSICA : août 2011 à Paris ;
3. Journées d’Octobre de la CNARELA 2010 et 2011 ;
4. Point des actions dans le Supérieur ;
5. Point sur la réforme du lycée ;
6. Point sur le collège : Diplôme National du Brevet ; classes bilangues et sections
européennes ;
7. Bilan des journées inter-académiques 2010 ;
8. Point sur la préparation de la rentrée 2010 ;
9. Questions diverses.
13 associations présentes : AGAP (Aix-Marseille), ARDELAC (Créteil), ARELABOR
(Bordeaux), ARELAB (Besançon), APLG (Nantes), ARELACLER (Clermont-Ferrand),
ARELAM (Montpellier), ARELAS (Strasbourg), ARTELA (Toulouse), GELAHN (Rouen),
ALPLA (Nancy-Metz), ARELACOR (Corse), THALASSA.
8 associations représentées : ADLAP (Amiens), AUSPEX (Reims), ARELAN (Nice), ARELAG
(Grenoble), APLAG (Guadeloupe), Connaissance hellénique, ARELAD (Dijon), ARELALIM
(Limoges).
21 présentes ou représentées sur 28 : le quorum est atteint.
Sylvie Pédroaréna commence par remercier vivement M. Joël Olive, proviseur du lycée
Saint-Sernin, ainsi que Mme Sylvie Lavigne, proviseur-adjoint, qui nous ont accueillis
chaleureusement dans les murs de leur établissement. Elle remercie également Mme Louise
Monti, professeur du lycée, qui s’est chargée de l’organisation.
Des remerciements sont adressés également aux organisateurs des Assises des Lettres.
Sylvie Pédroaréna précise que la CNARELA s'associe pleinement à ces journées, dont
l'initiative revient à Jean-Claude Carrière, vice-président de l'ARTELA.
On procède à un tour de table. Sylvie Pédroaréna présente en particulier Lionel Sanchez,
représentant de THALASSA : elle lui demande de transmettre ses remerciements à Claire
Valette, qui a tout fait pour que Thalassa continue à être représentée à la CNARELA.
L’ordre du jour est adopté.
1. Approbation du compte rendu de l’Assemblée Générale du 16 janvier 2010.
Avant de procéder à l’adoption du compte rendu de l’Assemblée Générale précédente,
Sylvie Pédroaréna signale deux modifications :
a) une erreur de date s’était glissée concernant la tenue de la conférence annuelle
d’EUROCLASSICA : elle aura lieu en août 2011 et non en août 2010 comme il est écrit dans le
compte rendu.
22
b) À la suite des propos rapportés dans le compte rendu, l’Inspection Générale a fait savoir
son mécontentement : après un échange de courriers entre M. Patrice Soler et Sylvie
Pédroaréna, la situation s’est éclaircie et la volonté d’entretenir des relations sereines avec
l’Inspection générale a été réaffirmée par la CNARELA. Nous reproduisons en annexe I le
dernier courrier de M. Patrice Soler dont la lecture a été faite lors de l’assemblée générale.
Le compte rendu – ainsi amendé – est adopté à l’unanimité.
2. Informations à propos de la conférence annuelle d’EUROCLASSICAen août 2011 à
Paris.
Les dates retenues pour cette manifestation sont les suivantes : 26 et 27 août 2011.
Organisation : C’est Marie-Hélène Menaut qui pilote l’organisation des journées. Elle
représentera d’ailleurs la CNARELA à l’Assemblée Générale d’Euroclassica qui se tient cette
année à Madrid où elle prendra des contacts.
L’association Pallas est chargée de l’organisation. Marie-Hélène Menaut va se mettre en
relation avec cette association très prochainement pour évoquer le budget et l’organisation
prévisionnels.
Programme :
Il est prévu de consacrer la première journée à des interventions autour du thème suivant : «
La pédagogie des langues anciennes à la française ». Les membres des ARELA peuvent
proposer des communications (elles devront être en anglais). Les noms de Dominique Augé
et Mireille de Biasi ont été mentionnés. Lors de cette première journée aura lieu aussi
l’Assemblée Générale d’Euroclassica : il faut prévoir une durée de trois heures.
Le lieu prévu est la Sorbonne.
Des visites seront organisées le deuxième jour : on évoque la visite des Thermes de Cluny,
une visite-conférence à l’Académie française ; ou encore une visite du département des
Antiquités du Louvre. Une visite de la crypte archéologique est aussi proposée.
3. Journées d’Octobre de la CNARELA 2010 et 2011.
• Le CD des Journées d’Octobre de Nice a été envoyé au Ministère. Sylvie Pédroaréna lit la
lettre de remerciement écrite par le ministre Luc Chatel.
• Rappel : Les prochaines journées d’Octobre auront lieu à Lyon les 25 et 26 octobre 2010 sur
le thème « De l’eau au vin : commerces et échanges en Gaule romaine ». Les deux journées se
dérouleront à Lyon et à Saint-Romain-en-Gal. Le programme définitif est attendu dans les
prochaines semaines.
A venir :
Les Journées d’Octobre de 2011 auront lieu à Clermont-Ferrand les lundi 24 et mardi 25
octobre autour du thème alléchant « Culture et transmission dans l’antiquité tardive ».
Le premier jour sera consacré à des conférences :
Les manuels scolaires de l’époque et les cours de rhétorique à la fin de l’empire ;
Une conférence autour de Sidoine Apollinaire, « figure locale » ;
Une conférence sur la Bible et le grec biblique ;
Une conférence autour de l’arianisme ;
Une conférence sur la disparition du grec en Occident.
Notre Assemblée Générale aurait lieu en début d’après-midi.
Après le repas nous assisterons à la projection du film Agora.
Le deuxième jour s’organiserait comme suit :
Conférence autour du film Agora vu la veille ;
23
Commentaire sur les transmissions des savoirs scientifiques ;
Conférence sur les tablettes de défixion.
Visites :
14h : musée archéologique de Clermont pour y admirer en particulier les ex-voto
à but thérapeutique ;
Puis direction Lezoux pour aller voir le nouveau musée de la céramique.
Enfin, le troisième jour est proposée l’ascension du Puy de Dôme !
4. Journées inter-académiques de l’année.
Elles se sont déroulées cette année à Paris, Nantes, Toulouse et Lyon. Elles avaient pour
thème les nouveaux programmes de collège.
L’organisation était sensiblement la même partout :
- une intervention d’un Inspecteur Général organisateur de ces Journées, centrée autour de
l’inscription des programmes de langues anciennes dans le socle commun ;
- plusieurs interventions scientifiques ;
- ateliers.
Les comptes rendus de ces journées devraient être mis en ligne prochainement sur le site du
Ministère.
5. Journées de l’Antiquité : bilan de l’année.
• ARELAMontpellier : organisation, entre autres, d’un café-théâtre antique où ont été lus ou
représentés des textes sur le thème « fureur et déraison »; participation active de personnes
qui ne sont pas membres de l’ARELAM. Bilan positif ;
• Toulouse : ateliers de cuisine romaine à destination des étudiants et du personnel
administratif de l’Université du Mirail ; exposition sur ce thème à la Bibliothèque
universitaire centrale. Bilan positif ;
• Bordeaux : les premières Journées de l’Antiquité ont eu lieu du 8 mars au 26 mars 2010. De
nombreuses manifestations étaient destinées aux scolaires (ex : théâtre dans les lycées) ; il y a
eu beaucoup de conférences, de concerts, de promenades ; la venue de la legio augusta
octava a été très remarquée. Bilan : tout ce qui était grand public a connu un vif succès. Les
conférences qui visaient le public plus restreint des professeurs de langues anciennes ont été
moins fréquentées ;
• Strasbourg : une journée pour les lycéens de classes préparatoires ; organisation d’un cycle
de conférences sur le thème au programme : Le pouvoir du discours ;
• Corse : la collègue représentant l’ARELACorse expose le travail qui a été fait pendant
l’année en relation avec le Musée d’Aleria : les élèves et leurs professeurs ont composé une
nouvelle qui sera prochainement mise en ligne sur le site de l’ARELACorse et/ou du
rectorat.
IMPORTANT : N’OUBLIEZ PAS DE TRANSMETTRE LES COUPURES DE PRESSE
CONCERNANT VOS JOURNEES DE L’ANTIQUITÉ en format .pdf à Sylvie Pédroaréna :
elles seront publiées sur le site de la CNARELA.
24
6. Point des actions dans le Supérieur.
• Concernant les nouvelles épreuves du CAPES : les nombreuses actions menées par la
CNARELA et/ou les associations amies (les motions, les pétitions, les comptes rendus des
audiences…) ont été mises en ligne sur le site de la CNARELA.
À noter : des annales zéro concernant les nouvelles épreuves des concours sont disponibles à
l’adresse suivante : http://www.education.gouv.fr/cid49096/exemples-de-sujets.html.
S’y trouvent également les annales de la nouvelle « épreuve » Agir en fonctionnaire de l’Etat
et de façon éthique et responsable.
Action en cours : des démarches sont actuellement faites par les membres du jury du CAPES
de Lettres Classiques pour obtenir une audience au Ministère, afin de demander que
l’épreuve orale d’explication de texte ait lieu soit en français soit en langues anciennes (latin
ou grec) : le candidat tirerait au sort. Le candidat, lors de la deuxième épreuve orale (épreuve
sur dossier), serait alors interrogé dans la langue (français ou langues anciennes) qui n’a pas
été tirée au sort lors de la première épreuve orale.
La CNARELA s’associe à cette demande et soutient les démarches du jury du CAPES de
Lettres classiques. Sylvie Pédroaréna propose d’écrire une motion qui aille dans ce sens. Les
représentants des ARELA mandatent le bureau pour écrire cette motion.
• Forum des sociétés savantes.
La prochaine réunion a lieu le samedi 5 juin 2010. C’est Hélène Frangoulis qui représentera la
CNARELA. Il sera notamment demandé que les candidats à l’agrégation pour la session
2011 puissent s’inscrire en étant simplement titulaires d’un M1 et aient la possibilité de ne
valider leur M2 qu’après leur réussite au concours.
7. Point sur la réforme du lycée.
Sur EDUSCOL est annoncé que le programme de langues anciennes publié au BO de 2007 est
valable à la rentrée prochaine pour l’enseignement d’exploration comme pour
l’enseignement facultatif… Il n’y a donc pas de programme spécifique pour l’enseignement
d’exploration.
La réforme n’a rien changé concernant le logiciel qui permet de saisir les vœux des élèves en
lycée général (AFFELNET) : les enseignements facultatifs ne sont toujours pas pris en
compte. Il faut donc être particulièrement vigilant à la rentrée et s’assurer que tous les élèves
qui avaient choisi de suivre un enseignement de langues anciennes ont pu le faire. Il est
nécessaire aussi de se procurer la carte des langues de l’académie, établie par le rectorat
chaque année ; c’est elle qui fait foi.
Il serait souhaitable également que chaque ARELA fasse le point sur l’enseignement des
langues anciennes proposé dans son académie : dans quel lycée est proposé le latin et /ou le
grec en enseignement d’exploration, en enseignement facultatif ? Quelles sont les
conséquences de la réforme ?
N’OUBLIEZ PAS DE TRANSMETTRE LE COMPTE RENDU EVENTUEL DE
L’AUDIENCE AUPRES DU RECTEUR CONCERNANT LA REFORME DES LYCEES.
8. Point sur le collège : Diplôme National du Brevet ; classes bilangues et sections
européennes.
Sylvie Pédroaréna rappelle qu’elle a envoyé une lettre au ministère, à la DGESCO,
demandant que – pour cette année – soit accordée aux élèves de 3ème la possibilité de cumuler
les points de l’option de langue ancienne et ceux de l’histoire des arts. Le courrier n’a obtenu
aucune réponse.
25
Sections bilangues et classes européennes : il semble urgent d’évoquer le problème à la
rentrée. La concurrence semble rude entre ces classes et les langues anciennes au collège.
Sylvie Pédroaréna précise que la CNARELA va demander dès septembre une audience à la
DGESCO. Ce sera l’occasion de faire le point sur le secondaire.
Point sur la préparation de la rentrée 2010.
Attention : il faut être vigilant sur les départs en retraite : c’est souvent l’occasion de
supprimer un poste ou de le transformer en poste de lettres modernes. Par ailleurs, on peut
rappeler que de nombreux postes ont été bloqués pour les futurs « stagiaires ».
Pour la rentrée 2010 : n’hésitez pas à signaler les divers problèmes.
Dans un premier temps : prévenez les IPR et le recteur de votre académie.
Dans un second temps, signalez ces problèmes à la CNARELA qui préviendra M. Roser au
Ministère.
9. Questions diverses.
• ARELABOR : Des lycées non latinistes ont fait un film intitulé « Tous les chemins mènent
au latin ». Ce film a eu beaucoup de succès. Des collègues proposent de refaire le film, ce qui
permettrait de le vendre. Une co-production avec la CNARELA est envisagée. Une
projection du film lors des Journées d’Octobre de Lyon est envisagée également.
• Fédération des Œuvres Laïques : Sylvie Pédroaréna a bien envoyé un courrier pour
évoquer l’augmentation importante du nombre de postes au CAFEP.
• Epreuve « Agir en fonctionnaire » : Jeannette Boulay avait pris l'initiative d'alerter et de
contacter Stéphane Hessel qui avait proposé qu’on lui transmette le texte que venait de
rédiger Odile Mortier-Waldschmidt afin de lui donner une diffusion plus grande. Après
quelques modifications, le texte intitulé « Non à la mise au pas des fonctionnaires » et
accompagné d'une vingtaine de signatures éminentes (Heinz Wissmann, R. Aubrac, entre
autres) a paru une première fois sur le site de l'Appel des Appels. Par ailleurs et
parallèlement, le contact avait été établi avec Mediapart et le blog de Claude Lelièvre où le
texte a été relayé.
26
COMPTE RENDU DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Mardi 26 octobre 2010 de 9h30 à 11h00
À Chaponost
ORDRE DU JOUR
1. Approbation de l’ordre du jour.
2. Approbation du compte rendu de l’Assemblée Générale du 29 mai
2010.
3. CAPES de Lettres Classiques.
4. Bilan de la rentrée dans le supérieur (mastérisation…).
5. Bilan de la rentrée 2010 dans le secondaire.
6. Comptes rendus des audiences.
7. Euroclassica (Paris, août 2011).
8. Questions diverses.
16 associations présentes : AGAP (Aix-Marseille), ARDELAC (Créteil),
ARELABOR (Bordeaux), ARELABretagne, ARELAB (Besançon), APLG
(Nantes), ARELACLER (Clermont-Ferrand), ARELAM (Montpellier), ADLAP
(Amiens), AUSPEX (Reims), ARELAN (Nice), ARELAS (Strasbourg), ARTELA
(Toulouse), ARELAL (Lyon), PALLAS (Paris) et Thalassa.
8 associations représentées : GELAHN (Rouen), ARELAG (Grenoble),
APLAG (Guadeloupe), Connaissance hellénique, ALPLA (Nancy-Metz), APCELA
(Poitiers), ARELAD (Dijon), Athéna.
24 présentes ou représentées sur 28.
Le quorum est atteint.
****************
Mme Nathalie Vincent, conseillère municipale, adjointe au maire, chargée de la culture et du
patrimoine à la mairie de Chaponost, nous souhaite la bienvenue à la salle communale : la
commune, fière de son aqueduc gallo-romain, est ravie de nous accueillir. Mme Vincent nous
adresse tous ses encouragements dans la défense que nous menons pour les langues
anciennes.
Sylvie Pédroaréna demande à l’adjointe au maire de bien vouloir transmettre les
remerciements de la CNARELA à la mairie de Chaponost pour la mise à disposition de cette
salle. Elle remercie également chaleureusement l’ARELAL, en la personne de son président
Jean-Paul Dugand, pour l’organisation très réussie de ces Journées d’octobre.
C’est ensuite à Thalassa – représentée par Claire Valette et son assistante Margareth Gabriel –
que Sylvie Pédroaréna exprime notre reconnaissance pour l’aide apportée à l’organisation de
ces journées (prêt d’un car) et pour la distribution de brochures qui proposent notamment
des voyages scolaires permettant de visiter Lyon et Saint-Romain-en-Gal.
On procède ensuite à un tour de table où chaque représentant des ARELA se présente.
1. Approbation de l’ordre du jour. L’ordre du jour est approuvé.
2. Approbation du compte rendu de l’Assemblée Générale du 29 mai 2010. Le PV de la
dernière assemblée générale est approuvé à l’unanimité.
27
3. CAPES de Lettres Classiques :
Sylvie Pédroaréna commence par un rapide historique de la situation : la CNARELA a, dès
le début, refusé la réforme du concours ; elle a participé à plusieurs audiences, a rédigé des
motions allant dans ce sens, a soutenu et publié les motions du jury du CAPES de Lettres
classiques et, avec des personnalités du monde universitaire, d’autres associations et sociétés
savantes, a également signé la lettre rédigée par le président du jury du CAPES en juin
dernier. À l’oral, un tirage au sort entre français et langues anciennes y était proposé pour
l’épreuve d’explication de texte, l’épreuve sur dossier devant alors porter sur la discipline
qui n’aurait pas été évaluée lors de la première épreuve orale. Cette dernière lettre n’ayant
pas reçu de réponse avant la fin des épreuves orales du concours, 20 membres du jury sur 36
ont démissionné ; les enseignants qui n’ont pas démissionné ont fait savoir qu’ils
désapprouvaient la réforme, mais qu’ils restaient dans le jury afin de veiller sur les
conditions de recrutement des nouveaux enseignants.
Rappel des épreuves du « nouveau » CAPES de LC (session 2011) :
Ecrit
1° Composition française. Durée : six heures ; coefficient 3.
2° Epreuve de langues et cultures de l'Antiquité comportant :
Durée : cinq heures ; coefficient 3.
Partie A : 12 points : une version en langue ancienne (latin ou grec) consistant en la
traduction d'un passage, choisi dans un texte de deux à trois pages fourni en édition bilingue
(à l'exception du passage à traduire). La langue ancienne est choisie par le candidat au
moment de l'inscription ; et la réponse à une question d'ordre littéraire, culturel ou
historique portant sur l'ensemble du texte fourni.
Partie B : 8 points : une version en langue ancienne dans la valence qui n'a pas été choisie par
le candidat pour la artie A de l'épreuve, consistant en la traduction d'un texte.
Oral
1° Leçon portant sur les programmes des classes de collège et de lycée :
Durée de la préparation : trois heures ; durée totale de l'épreuve : une heure (exposé :
quarante minutes ;
entretien : vingt minutes) ; coefficient 3.
L'épreuve porte sur un texte de langue française. Elle consiste en une explication de texte
assortie d'une question de grammaire référée aux programmes des classes de collège ou de
lycée. La méthode d'explication est laissée aux choix du candidat. La présentation de la
question de grammaire prend la forme d'un développement organisé en relation avec les
programmes
La leçon est suivie d'un entretien avec le jury au cours duquel le candidat est invité à justifier
ses analyses et ses choix.
2° Epreuve sur dossier comportant deux parties : 14 points sont attribués à la première partie
et 6 points à la seconde. (Durée de la préparation : trois heures ; durée de l'épreuve : une
heure ; coefficient 3.)
Première partie : exposé prenant appui sur un dossier. (Présentation n'excédant pas vingt
minutes ; entretien avec le jury : vingt minutes.)
Seconde partie : interrogation portant sur la compétence « Agir en fonctionnaire de l'Etat et
de façon éthique et responsable ». (Présentation dix minutes, entretien avec le jury : dix
minutes.)
28
Le Ministère a réagi fin septembre dans une lettre adressée au Président du jury en acceptant
de modifier la première épreuve orale selon la proposition énoncée dans la lettre de juin
2010. Contrairement à ce qui a été dit sur France Culture par Mme Josette Théophile, DRH
au Ministère de l’Éducation Nationale, cette mesure prendra effet seulement à la session 2012
pour des raisons juridiques : ni les étudiants, ni les professeurs en effet n’ont été avertis
suffisamment tôt de ce changement.
Pour la session 2011, l’épreuve sur dossier – qui pourra porter sur une langue ancienne évaluera les connaissances linguistiques des candidats. Ce changement - certes important n’est pourtant pas suffisant à nos yeux :
• A l’oral, l’épreuve « Agir en fonctionnaire de l’Etat » ne convient pas. Il faut que soit
spécifié que les sujets seront limités à la sphère disciplinaire. D’autre part, le poids de cette
épreuve (6 points) est trop important et doit diminuer. Sur ce sujet, il est décidé d’agir dans
le cadre du Forum des Sociétés où Hélène Frangoulis représentera la CNARELA, le 27
novembre prochain. L’idée de contacter d’autres jurys est lancée ; il est proposé aussi de
contacter des personnalités pour essayer de faire fléchir les instances dirigeantes : les noms
de Michel Serres ou Marc Fumaroli sont prononcés…
• À l’écrit, l’épreuve écrite de langues anciennes pose également problème : outre sa
difficulté, le fait qu’il y ait une matière dominante et une matière secondaire est gênant pour
un CAPES qui doit être trivalent. Il est nécessaire de demander une redéfinition de cette
épreuve : il faut au moins rétablir l’égalité entre les deux langues en abandonnant les
notions de « majeure » et de « mineure ». On envisage aussi de demander la suppression de
la question de commentaire puisque l’explication de texte de langue ancienne a été rétablie à
l’oral.
Il est décidé d’attendre le déroulement des épreuves écrites du CAPES de cette session qui
ont lieu début novembre et de reparler du contenu des épreuves en janvier, lors de la
prochaine AG.
Lors de l’émission La Fabrique de l’Histoire diffusée le jeudi 7 octobre 2010. Celle-ci peut
être écoutée à l’adresse suivante : http://www.franceculture.com/emission-la-fabrique-de-lhistoire-histoire-de-la-culture-classique-44-2010-10-07.html
Toutes les réformes en cours dans le supérieur concernant la formation des enseignants
semblent menacer sérieusement le recrutement par concours. Le bureau demande alors à être
mandaté pour écrire une motion concernant le CAPES et rappeler l’attachement de la
CNARELA au recrutement des enseignants par un concours national : cette décision est
adoptée à l’unanimité. Sylvie Pédroaréna rappelle que le CAPES de Lettres classiques est en
outre menacé par les projets de fusion avec le concours de Lettres modernes, projets qui sont
loin d’être abandonnés. Il est nécessaire que les ARELA sensibilisent les collègues du
secondaire en passant l’information sur la réforme du CAPES qui, par ricochet, nous
concerne tous. Plusieurs collègues rappellent que la spécificité de notre enseignement est de
plus en plus menacé : de plus en plus de collègues de formation Lettres modernes sont
appelés à remplacer des collègues de Lettres classiques : cette situation, qui peut
exceptionnellement se produire, ne doit pas être pérennisée, d’autant plus qu’à partir de la
session 2011, les collègues candidats au CAPES de Lettres modernes n’auront plus la
possibilité de passer une langue ancienne à l’écrit.
Il est alors décidé d’écrire une MOTION pour rappeler notre attachement à la spécificité de
notre enseignement.
29
Odile Mortier-Waldschmidt intervient : il est nécessaire de se battre pour obtenir des
aménagements - c’est le moins que nous puissions faire -, dans ce nouveau CAPES, sur les
deux points qui viennent d’être évoqués (épreuve orale « Agir en fonctionnaire… » et
épreuve écrite de langues anciennes). Mais il faut dès maintenant se poser la question : que
ferons-nous si, comme il est probable, le ministère reste sourd à nos demandes ? Les
membres des ARELA-CNARELA membres du jury devront-ils accepter de faire passer le
CAPES dans sa forme actuelle, que la CNARELA condamne ? La question vaut la peine
d’être posée, car il en va de notre crédibilité. Et Odile Mortier-Waldschmidt de donner
l’exemple du jury de l’agrégation de philosophie : huit de ses membres ont démissionné le 18
octobre dernier à cause de leur désaccord avec l’épreuve « Agir en fonctionnaire… ».
Agnès Orosco (ADLAP Amiens) regrette le manque de précision des informations données
au cours de l’été au sujet de la démission de certains membres du jury du CAPES.
Sylvie Pédroaréna évoque la différence de stratégie des membres du jury, stratégie qui
n’était pas la même mais qui avait le même but. Certains membres d’ARELA, donc de la
CNARELA, ayant choisi de démissionner et d’autres non, il n’était possible que de dresser
un état des lieux, d’autant plus qu’un vote à ce sujet n’était pas faisable en plein été. Sylvie
Pédroaréna rappelle également que son choix était personnel et n’engageait pas la
CNARELA. Elle ajoute que la question posée par Odile Mortier-Waldschmidt demande
réflexion.
Florence Garambois (ARELAL) fait part de la baisse importante des inscrits au Capes de
Lettres classiques dans les Universités. Nous ne pourrons pas savoir avant la session
prochaine si elle n’est due qu’à la situation transitoire de cette année.
4. Bilan de la rentrée dans le supérieur (mastérisation…) :
Hélène Frangoulis prend la parole pour évoquer la dispersion des étudiants de M1 entre
Master enseignement et Master recherche. De plus, toutes les universités n’ayant pas adopté
des mesures transitoires, les étudiants titulaires d’une licence se retrouvent cette année dans
l’impossibilité de passer le concours, même s’ils ont été admissibles en 2010.
D’autre part, les épreuves placées début novembre ne sont pas en adéquation avec le
calendrier universitaire : ce calendrier oblige les étudiants à subir une préparation très
concentrée dans le temps. Le bureau est mandaté pour rédiger une motion concernant la
formation des enseignants et les conditions inadmissibles dans lesquelles les stagiaires
accomplissent leur année de stage.
L’idée de Sylvie Nourry-Namur (PALLAS-Paris) de présenter les différentes motions
proposées au cours de cette AG sur un même document avec un préambule est adoptée : ce
préambule expliquera que nous ne sommes pas dupes et que nous voyons bien que toutes
ces réformes vont dans un seul et même sens.
Florence Garambois évoque ensuite la mutualisation des moyens entre les Universités de
Saint-Étienne, de Lyon II et de Lyon III : les enseignants ont appris le 10 septembre que la
licence de Lettres classiques (qui comptait 7 étudiants inscrits alors que le président parlait
d’un « seuil » non atteint de 10 étudiants) fusionnerait avec celles de Lyon ; cette décision
est d’autant plus mal comprise que la maquette proposée par les enseignants avait été
évaluée A+ par l’instance nationale d’évaluation des maquettes ; trois jours après, les
étudiants apprenaient que le Master de Lettres classiques fermait aussi : les enseignants ont
ensuite été sommés par les présidents des universités - dont le pouvoir décisionnaire a été
fortement accru avec la LRU, on en voit là le terrible exemple - de faire des trois licences de
30
Lettres classiques une seule licence. 35 enseignants chercheurs sont concernés par cette «
mutualisation ».
D’autre part, d’autres matières, comme l’allemand ou l’arabe notamment, sont touchées de la
même façon et d’autres universités pourraient être très prochainement appelées à faire de
même…
Marie-Hélène Menaut fait remarquer que de plus en plus, les langues anciennes sont
associées aux langues dites « rares », ce qui ne correspond pas à leur importance, notamment
dans le secondaire. Il faut être très vigilant.
Florence Garembois communiquera les éléments concernant cette mutualisation entre Lyon
et Saint-Étienne afin que la CNARELA puisse réagir. On demandera aux ARELA d’alerter les
universitaires sur cette menace et de faire remonter toutes les informations sur le sujet, afin
d’envisager les actions qui s’imposeront.
5. Bilan de la rentrée 2010 dans le secondaire.
Au collège
Lors de cette rentrée, on note, dans toutes les académies, une concurrence accrue des classes
« bilangues » et des sections européennes ; en outre, cette concurrence entre ces sections et
les langues anciennes n’est pas la même dans tous les établissements car l’autonomie des
chefs d’établissement a été renforcée : Sylvie Pédroaréna rappelle qu’il y a compatibilité entre
ces sections et les langues anciennes. Aucun texte ne mentionne une impossibilité. Il faut le
rappeler aux collègues et leur demander d’être vigilants.
La demande d’audience auprès de M. Blanquer, directeur de la DGESCO, va être renouvelée.
S. Pédroaréna rappelle la procédure quand une difficulté se présente dans une académie :
• l’ARELA envoie un courrier aux IPR et au rectorat (le courrier accompagné d’une
démarche des parents a plus de poids)
• l’ARELA fait une copie de ce courrier à la CNARELA
• la CNARELA transmet alors au MEN et aux Inspecteurs généraux.
Concernant le Diplôme National du Brevet, la langue ancienne n’entrera pas en concurrence
avec l’Histoire des Arts cette année. Les Inspecteurs généraux l’ont confirmé.
Au Lycée
Le bilan de la réforme semble prématuré. Nous n’avons pas assez de données précises ; il
faudra attendre les chiffres communiqués par la DGESCO en janvier.
On note cependant d’ores et déjà deux dominantes :
• l’effondrement du grec.
• Les lycées de centre-ville semblent avoir moins souffert que les lycées ruraux.
Sylvie Pédroaréna annonce que contact va être pris avec le directeur de l’ONISEP, Pascal
Charvet. Les Inspecteurs généraux nous ont encouragés à le rencontrer. En effet, il est
nécessaire que la brochure d’entrée en 2nde soit plus claire, plus lisible et surtout soit éditée
plus tôt que l’an dernier : la mise en place tardive de la réforme l’avait empêché. Il sera
également demandé s’il est possible d’envisager de rééditer une plaquette spéciale « langues
anciennes au lycée et dans le supérieur ». Enfin, le logiciel AFFELNET sera évoqué :
pourquoi le logiciel ne prend-il pas en compte les options facultatives ? Il est rappelé qu’il
faut être vigilant sur la manière dont est rédigée la fiche d’inscription en lycée. Des exemples
des problèmes dus à la mise en place de la réforme sont ensuite mentionnés, comme, par
exemple, à Lyon ou encore à Nice.
31
6. Comptes rendus des audiences.
Le compte rendu de la réunion avec les Inspecteurs généraux, Mme Klein et M. Soler, sera
très prochainement envoyé aux ARELA.
Outre ceux déjà évoqués au fil de l’assemblée générale, les points suivants ont été abordés :
- La CNARELA a été reçue dans le cadre du rapport sur les langues et cultures de
l’Antiquité qui a été commandé aux Inspecteurs généraux par le Ministère.
- Les Inspecteurs généraux nous ont encouragés à rencontrer M. Charvet (directeur de
l’Onisep), M. Blanquer (directeur de la DGESCO), les IA-IPR de nos académies, malgré leur
emploi du temps chargé.
- La nouvelle banque d’épreuves littéraires au concours d’entrée des Écoles normales
supérieures a été également évoquée : il est nécessaire de faire passer l’information aux
collègues. Les informations sur ce point sont dans le compte rendu.
- Les publications des ARELA sont très intéressantes, il faut les « relooker » pour les diffuser
davantage ; Mme Klein nous a mis en contact avec le CNDP. Nous devons rencontrer la
directrice du CNDP et réfléchir aux modalités d’une éventuelle collaboration. On pense à
une édition du Florilège et d’un catalogue des publications des ARELA. Il est donc nécessaire
que les ARELA envoient à Florence Turpin ([email protected]), sous forme numérisée, les
meilleurs articles de leurs bulletins 2009-2010 avant l’AG de janvier 2011.
7. Euroclassica
Les journées EUROCLASSICA auront lieu en août 2011 à Paris : les 25, 26 et 27 août 2011.
Les demandes de subventions sont en cours
Programme :
25 août : atelier autour du certificat européen pour le latin et pour le grec ; les autres degrés
(à l’exemple du Vestibulum envoyé dernièrement aux ARELA)
Soirée : promenade sur la Seine.
26 août : matinée : parcours d’enseignement du latin et du grec en France ; trois interventions
sont envisagées.
Après-midi : AG d’Euroclassica.
Soirée : visite en nocturne du département des Antiquités du Louvre.
27 août : excursion à Versailles et promenade dans les jardins sur le thème des
Métamorphoses d’Ovide sous la conduite d’Annie Collognat.
Il est demandé aux ARELA de faire parvenir quelques-unes de leurs publications qui seront
distribuées gracieusement aux membres européens.
8. Questions diverses
- Pour éviter les délicates questions de droits, Sylvie Pédroaréna demande aux ARELA
d’envoyer plutôt une publication papier aux ARELA et de garder l’envoi numérique pour
leurs adhérents. Il ne faut pas oublier d’envoyer un exemplaire à chaque membre du bureau.
- A la demande d’une ARELA, la CNARELA va se renseigner pour savoir comment être
reconnue d’utilité publique. L’idée serait que si la CNARELA est ainsi estampillée, les
ARELA en profitent également.
- L’organisation des Journées d’octobre 2012 sera évoquée lors de l’Assemblée Générale du
15 janvier 2010 à Paris. Pour mémoire, les Journées d’octobre 2011 seront organisées à
Clermont-Ferrand.
Pour le bureau de la CNARELA,
La secrétaire, Claire Laimé-Couturier
32
ANNEXE - MOTION
Consciente que les diverses réformes concernant le système éducatif dans l’enseignement
secondaire (réforme du lycée) comme dans l’enseignement supérieur (« mastérisation »,
réforme du CAPES, formation des enseignants-stagiaires) sont le fruit d’une entreprise
cohérente de sape du système éducatif français et notamment de l’enseignement des
Langues anciennes, la CNARELA, réunie en Assemblée Générale le 26 octobre 2010, à
Chaponost (69), a adopté à l’unanimité les motions suivantes :
Devant les difficultés d’organisation et de préparation au CAPES que provoque la
« mastérisation », la CNARELA affirme son attachement à un recrutement des enseignants
par un concours national. C’est en effet la garantie d’une égale qualité de l’enseignement sur
tout le territoire. Elle demande instamment que la réforme soit revue et que le calendrier des
épreuves soit modifié afin de faciliter la préparation du concours.
Alors que de plus en plus souvent, l’enseignement du latin est confié à des professeurs de
Lettres modernes, la CNARELA réaffirme la spécificité des enseignants de Lettres
classiques. Eux seuls ont été formés à enseigner français, latin et grec, en établissant des liens
entre ces trois disciplines. De plus, à partir de la session 2011, le CAPES de Lettres modernes
ne comportera plus d’épreuve de Langue ancienne. Comment alors les candidats reçus
pourraient-ils assurer un enseignement en latin ou, a fortiori, en grec ?
La CNARELA dénonce les conditions scandaleuses d’entrée dans la profession des
nouveaux enseignants reçus à la session 2010 du concours. Outre une charge de travail
excessive, comme c’est le cas pour tous les stagiaires, les recrutés en Lettres classiques
rencontrent souvent un problème supplémentaire : ils sont encadrés par des tuteurs de
Lettres modernes. Leur formation pédagogique en Langues anciennes est de ce fait
inexistante. Nous exigeons que les stagiaires en Lettres classiques soient confiés à des tuteurs
spécialistes de Lettres classiques.
33
COMMUNIQUÉ DU FORUM DES SOCIETES SAVANTES DE JUIN 2010
Menaces persistantes sur les concours de recrutement des enseignants
Le Forum des Sociétés Savantes a pris position à plusieurs reprises sur les conséquences de la
réforme dite de mastérisation des concours d’enseignants, notamment en novembre 2009 («
Réformons la Réforme ») et en février 2010 (« Mastérisation : de mal en pis »). Les craintes
que nous exprimions s’intensifient et nous conduisent à préciser nos vives inquiétudes
quant aux nouvelles modalités de recrutement des enseignants de l’enseignement
secondaire et à leurs effets pervers sur l'enseignement supérieur.
L’arrêté du 28 décembre 2009 introduit dans les concours une nouvelle épreuve « Agir en
fonctionnaire de l’Etat et de façon éthique et responsable » dont le référentiel est défini dans
un arrêté du 19 décembre 2006.
Les exemples de « sujets zéro » mis en ligne sur le site du Ministère de l'Education Nationale
et les « pistes de réponses attendues » réclament des connaissances juridiques,
psychologiques, sociologiques et administratives considérables (voir l’annexe 2). Le corpus
de savoirs évoqués, aussi large que mal défini, interdit une évaluation objective des
candidats. De plus, l’épreuve se greffe artificiellement sur une épreuve disciplinaire
préexistante. Le candidat se voit remettre à la fois un sujet disciplinaire et un
questionnaire portant sur cette « compétence ». Comment en faire une évaluation
rigoureuse à partir d’attendus aussi disparates ? De nombreux professeurs, gênés par la
nature non-disciplinaire et potentiellement idéologique de cette épreuve, risquent de ne plus
être volontaires pour participer aux jurys.
Pour l’agrégation, l’adjonction de cette épreuve à l’une des épreuves orales disciplinaires
pré-existantes induit une modification arbitraire du coefficient de celle-ci, préjudiciable aux
équilibres établis de longue date entre les sous-disciplines d’un même concours. Qui plus
est, le poids de la compétence « Agir en fonctionnaire de l'Etat » varie en pourcentage de la
note finale du concours de 2,47% en lettres modernes à 8,33% en mathématiques, un comble
pour l’évaluation d’une compétence non disciplinaire.
Le décret du 28 mai 2010 et le guide SIAC du ministère de l'Education Nationale stipulent
l’obligation de justifier du certificat de compétences en langues CLES2 et du certificat de
compétences en informatique et internet pour enseignant C2i2e qui s'effectue devant des
élèves, ajoutant à la confusion générale. Le Forum rappelle qu’une éventuelle évaluation
faisant appel à des connaissances administratives trouverait beaucoup plus naturellement sa
place à l'issue de l'année de fonctionnaire stagiaire pour la titularisation. Les professeurs
agrégés sont destinés à l’enseignement secondaire mais aussi, selon leur statut, à
l’enseignement supérieur. Les textes parus récemment sont susceptibles de modifier en
profondeur la typologie du recrutement des futurs agrégés et les missions qui leur seront
confiées.
Le décret du 28 juillet 2009 stipule que « peuvent se présenter au concours externe les
candidats justifiant de la détention d’un master ou d’un titre ou diplôme reconnu équivalent
» ; le décret du 28 mai 2010 précise que la validité du diplôme s’apprécie à la date
d’admissibilité du concours, tandis que les informations du site du ministère de l'Education
Nationale évoquent la date de la rentrée suivante. Ne pourraient être admis que les
candidats titulaires d’un master ou équivalent à cette date variable. Cette demi-mesure ne
suffit pas à répondre à la demande du Forum de commutativité entre agrégation et M2 ;
nous demandons que les candidats à l’agrégation titulaires d’un M1 puissent passer les
34
épreuves d’admission et aient la possibilité de valider un M2 après leur réussite au concours.
Qui plus est, la note aux recteurs du 29 avril 2010 ne prévoit pas de report de stage pour cette
année pour les reçus à l’agrégation ou au CAPES désirant suivre un M2.
Dans certaines disciplines, ces restrictions s’ajoutent au découplage imposé par les
programmes des concours entre préparation CAPES et agrégation, que le Forum a déjà
dénoncé. Une diminution importante du flux de candidats à l’agrégation et une répercussion
sur le nombre de futurs docteurs est à prévoir. On peut craindre que les meilleurs candidats
renoncent à se présenter à l’agrégation ou inversement se détournent de la recherche. Il serait
dommageable que les futurs jeunes chercheurs, souvent très spécialisés, ne puissent plus
bénéficier de l’année de consolidation généraliste que constitue la préparation à
l’agrégation. On peut s’attendre à ce que les futurs agrégés soient beaucoup plus orientés
vers l’enseignement secondaire et que leurs contacts avec la recherche deviennent très ténus.
Un retour en arrière, avec des professeurs de CPGE non docteurs, contredirait la volonté
légitime de l’Inspection Générale de recruter, à ce niveau, des professeurs agrégés-docteurs.
Enfin, la disparition ou la perte de poids de certaines disciplines des programmes des
concours risque d’aboutir à leur disparition pure et simple de l’enseignement supérieur,
du fait d’une logique purement comptable de recrutement d’enseignants-chercheurs selon
l’effectif des étudiants concernés.
Le Forum s'inquiète de l'évolution des concours et demande qu'une large réflexion sur ses
conséquences sur l’ensemble de l’éducation nationale soit engagée dans les plus brefs délais.
Annexe 1 - Exemples disciplinaires :
Au CAPES de lettres modernes, la suppression de l’épreuve de langue ancienne ou moderne
ne permet plus de constituer un vivier de professeurs de français capables d’assurer dans
leur classe l’initiation au grec ou au latin.
Au CAPES de lettres classiques, le latin et le grec sont absents des épreuves orales, ce qui ne
permet pas d’évaluer comme il convient l’aptitude du candidat à expliquer à l’oral un texte
en langue ancienne. Il faut donc que soit introduit pour l’épreuve de leçon un tirage au
sort entre français et langues anciennes ; l’épreuve sur dossier porterait alors sur la
discipline non évaluée lors de la première épreuve.
A l'agrégation de mathématiques, les trois épreuves orales, algèbre-géométrie, analyseprobabilités, modélisation, étaient toutes affectées d’un coefficient 1. Les deux épreuves
analyse-probabilités, modélisation et leurs coefficients sont inchangés, mais l’épreuve
algèbre-géométrie est remplacée par une épreuve "algèbre-géométrie et compétence « agir en
fonctionnaire de l'Etat »" à coefficient 2, avec un quart des points pour la compétence « agir
en fonctionnaire de l'Etat ». Il est nécessaire qu'un équilibre entre algèbre et analyse soit
retrouvé.
Au CAPES de langues, la disparition des programmes en littérature et en civilisation et de
toute référence à l'explication grammaticale soulève une grande inquiétude et une demande
de constitution d'un large corpus de référence pour plusieurs années. Pour la littérature, cette
orientation entre en contradiction par exemple avec l'introduction de Shakespeare dans
l'enseignement de littérature étrangère en langue étrangère prévu dans le cycle terminal du
lycée.
Annexe 2 – Exemple de sujet zéro « Agir en fonctionnaire de l’État »
Thème : exercice de la liberté pédagogique
Référence à l’arrêté du 19/12/2006 :
35
« Il exerce sa liberté et sa responsabilité pédagogique dans le cadre des obligations
réglementaires et des textes officiels »
« Connaissance du rôle des différents conseils… »
Situation :
Dans un lycée de l’académie de Z, sur proposition du conseil pédagogique, le conseil
d’administration a adopté pour l’année scolaire suivante un mode d’organisation de l’aide
individualisée en seconde sur 27 semaines avec une mise en parallèle de deux classes afin de
diversifier davantage et de mieux cibler les aides apportées aux élèves en difficulté.
Deux professeurs de mathématiques qui depuis plusieurs années conduisaient dans leurs
classes respectives les séances d’aide individualisée considèrent que cette organisation porte
atteinte à leur liberté pédagogique, notamment en raison de son impact sur la
complémentarité entre le travail en classe entière et le travail en formation plus restreinte. Ils
disent ne pas se sentir liés par les orientations proposées par le conseil pédagogique et par
les décisions d’organisation votées au conseil d’administration.
Questions :
- Comment analyser vous cette situation ?
- Pensez-vous qu’un choix du conseil pédagogique ou du conseil d’administration peut
s’imposer aux options pédagogiques individuelles d’un professeur ?
- Quel est le champ précis d’exercice de liberté pédagogique ?
- Sur quelles références législatives et réglementaires s’appuyer pour analyser cette situation ?
- Dans une situation d’options différentes voire de désaccords en matière d’organisation des
enseignements et de répartition des services, quels sont les compétences du conseil
d’enseignement, du conseil pédagogique, du conseil d’administration, du chef
d’établissement ?
Quelques pistes de réponses attendues :
- Les responsabilités des enseignants et l’exercice de la liberté pédagogique (livre IX du Code
de l’éducation, partie législative, articles L.912-1 et L.912-1-1 (qui reprend l’article 48 de la loi
du 23 avril 2005).
- Les bases de l’organisation administrative des EPLE et les compétences des différents
instances : livre IV du Code de l’éducation et notamment les articles relatifs aux rôles des
différents conseils et instances dans la mise en oeuvre de l’autonomie pédagogique et
éducative des établissements (L.421-2 à L. 421-5).
Les textes cités sont disponibles sur le site de la SMF : http://smf.emath.fr
Sociétés signataires :
Association des Anglicistes pour les Etudes de Langue Orale dans l’Enseignement Supérieur,
Secondaire et Elémentaire
Assemblée des Directeurs d'IREM
Association (pour l'Encouragement) des Etudes Grecques (en France)
Association des Germanistes de l’Enseignement Supérieur
Association des Historiens Contemporanéistes de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche
Association des Historiens Modernistes des Universités Françaises
Association des Linguistes pour l’Enseignement de l’Oral dans l’Enseignement Supérieur,
Secondaire et Elémentaire
Association des Linguistes Anglicistes de l’Enseignement Supérieur
Association des Médiévistes Anglicistes de l'Enseignement Supérieur
Association des Professeurs d'Histoire et de Géographie
Association des Professeurs de Biologie-Géologie
36
Association des Professeurs de Biotechnologies, Santé, Environnement
Association des Professeurs de Langues Anciennes de l'Enseignement Supérieur
Association des Professeurs de Langues des IUT
Association des Professeurs de Langues Vivantes
Association des Professeurs de Lettres
Association des Professeurs de Mathématiques de l'Enseignement Public
Association des Professeurs de Musique et de Musicologie de l'Enseignement Supérieur
Association des Professeurs de Philosophie de l'Enseignement Public
Association des Sciences du Langage
Association Française d'Etudes Américaines
Association Française de Mécanique
Association Française des Catalanistes
Association Française des Enseignants Chercheurs en Cinéma et Audiovisuel
Association Française des Russisants
Association Française des Enseignants de Français
Association pour la Recherche en Didactique des Mathématiques
Commission Française pour l'Enseignement des Mathématiques
Coordination Nationale des Associations Régionales des Enseignants de Langues Anciennes
Femmes et Mathématiques
Rassemblement National des Centres de Langues de l’Enseignement Supérieur
Société Botanique de France
Société d'Etude de la Littérature Française du XXe siècle
Société d’Etude du XVIIe Siècle
Société de Langue et Littérature Médiévales d’Oc et d’Oïl
Société de Mathématiques Appliquées et Industrielles
Société de Philosophie des Sciences
Société des Anglicistes de l'Enseignement Supérieur
Société des Etudes Latines
Société des Etudes Romantiques et Dix-neuvièmistes
Société des Hispanistes Français
Société des Italianistes de l'Enseignement Supérieur
Société des Langues Néo-Latines
Société des Historiens Médiévistes de l’Enseignement Supérieur Public
Société des Personnels Enseignants et Chercheurs en Informatique de France
Société des Professeurs d’Histoire Ancienne de l’Université
Société Française d’Etude du Dix-huitième Siècle
Société Française d'Étude du Seizième Siècle
Société Française d'Etudes Médio- et Néo-Latines
Société Française de Littérature Générale et Comparée
Société Française de Physique
Société Française de Statistique
Société Française des Etudes Japonaises
Société Française Shakespeare
Société Mathématique de France
Union des Professeurs de Physique et de Chimie
Union des Professeurs de Spéciales
37
RÉUNION DU FORUM DES SOCIÉTÉS SAVANTES
DU 27 novembre 2010 (IHP).
1) Ouverture de la séance. Débat et votes sur la création d’une fédération des
sociétés du Forum
Plusieurs membres du bureau provisoire soulignent le besoin de constituer désormais une
structure officiellement reconnue par les pouvoirs publics et regroupant de nombreuses
sociétés (le Forum regroupe déjà une soixantaine de sociétés et plusieurs dizaines de milliers
d’adhérents) afin de rechercher le consensus sur les questions qui concernent toutes les
sociétés, et de peser sur les décisions.
Il est donc proposé aux sociétés du Forum de constituer ensemble une fédération
instituée qui leur permette, sinon de parler d’une seule voix, du moins de signer ensemble
des textes, et de se prononcer face aux pouvoirs publics et aux médias sur les grandes
questions touchant au fonctionnement de l’Education Nationale, de l'Enseignement
Supérieur, de la Recherche et des Universités, notamment sur les réformes en cours, qui
suscitent une vive inquiétude partagée par les enseignants et chercheurs de toutes
disciplines. Les textes seront préparés par le Forum et systématiquement soumis à
validation par chacune des sociétés. Les textes diffusés seront suivis des signatures des
sociétés les ayant validés.
Si le principe d’une institutionnalisation est acquis, un groupe devra rédiger ces nouveaux
statuts, conformément aux cadres définis par la loi de 1901. Les objectifs de la fédération
s’inspireront du texte de création du Forum. La structure devra être la plus légère possible.
Il est proposé, pour intégrer les sociétés du secondaire qui nous ont rejoints, et pour
remplacer le syntagme « sociétés savantes » mal perçu ou mal compris par de nombreux
interlocuteurs, de changer le nom en Forum des Sociétés d’Enseignants et de Chercheurs
(FSEC).
Vote sur le principe d’une institutionnalisation du Forum : adopté à la majorité (20 pour et 1
NPPV). Une Assemblée Générale sera convoquée ultérieurement pour formaliser
l’association.
Vote sur le remplacement du nom « Forum des Sociétés Savantes » par « Forum des
sociétés d’enseignants et de chercheurs » : adopté à la majorité (20 pour et 1 NPPV).
Vote sur la constitution du bureau provisoire : adopté à l’unanimité (21 pour).
Le bureau convoquera la première Assemblée Générale pour créer la structure.
Accord sur la formation d'un « groupe constituant » désigné pour lancer la constitution de la
structure et en rédiger les statuts, composé du bureau provisoire et de quelques autres
volontaires.
Composition du bureau :
Eric Barbazo, Association des Professeurs de Mathématiques de l'Enseignement Public,
Philippe Blanc, Association des Professeurs de Philosophie de l'Enseignement Public,
Joëlle Ducos, Société de Langue et Littérature Médiévales d’Oc et d’Oïl,
Hélène Frangoulis, Coordination Nationale des Associations Régionales d’Enseignants de
Langues Anciennes,
Anne-Florence Gillard-Estrada, Société des Anglicistes de l'EnseignementSupérieur,
Valérie Girardin, Société Mathématique de France,
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Jean-Yves Guillaumin, Association des Professeurs de Langues Anciennes de l'Enseignement
Supérieur,
Stéphane Jaffard, Société Mathématique de France,
Michèle Leduc, Société Française de Physique,
Christophe Mileschi, Société des Italianistes de l'Enseignement Supérieur,
Jean Vignes, Société Française d'Étude du Seizième Siècle.
2) Mastérisation
Problème du contenu des concours Exemplarité du CAPES de musique pour lequel le
nombre de sujets possibles de l’épreuve « culture musicale et artistique » se trouve
limité à une dizaine de par la restriction du programme à celui des collèges ; l’intitulé de
l'épreuve de novembre 2010 était identique au sujet donné au CNED (les documents
présentés étaient différents mais le sujet précisait que le candidat pouvait s'appuyer sur les
références de son choix), Baisse de niveau constatée dans certains concours du CAPES,
spécialement en SHS.
Sur la nouvelle épreuve « Agir en fonctionnaire… » Le jury sera celui des épreuves
disciplinaires. Pour le concours du CAPES, les sujets zéro diffusés au printemps dernier
semblent être la règle. Pour l’agrégation, la plupart des rapports n’évoquent pas
l’épreuve. Quelques jurys en ont donné leur interprétation. Le jury de l’agrégation de
lettres modernes propose par exemple une épreuve du type mini-épreuve de
didactique (réflexion sur l’utilisation de ce texte en classe, accompagné d’un groupement
de textes). Par ailleurs, un bon nombre des universités a repris pour la préparation à cette
épreuve les structures préexistant en IUFM. Quelques-unes ont mis en place des modules
spécifiques, y compris pour l'agrégation. Problème : certains jurys comportent moins
d’universitaires que d’autres ; l'importance du président du jury est remarquée.
Effectifs : manque criant de candidats, par exemple 135 présents pour 185 postes au CAPES
de lettres classiques. Les effectifs d'étudiants en Master Enseignement s'écroulent de
façon très inquiétante dans de nombreuses disciplines. Certains présidents de jurys de
concours se sont déjà inquiétés de la baisse du nombre d’inscrits aux concours et d'étudiants
en master.
CLES 2 (point abordé l'après-midi) Le report du CLES 2 à la session 2012 est rappelé. Il
faudrait que la certification puisse être accordée par l’intermédiaire des enseignements
déjà en place dans les Universités (les options pour non-spécialistes par exemple). Il faut
éviter que l’enseignement des langues et civilisations étrangères ne se transforme en un
enseignement proche de la méthode Assimil.
Proposition d’action du Forum La remise en perspective des textes diffusés depuis la
création du Forum serait un point d'appui. Un texte doit être écrit pour faire le point selon
les disciplines sur les contenus des concours et sur l’épreuve « Agir… », puisque les
pratiques sont différentes. Montrer le paradoxe d’un éclatement de cette épreuve alors
qu’il y a eu présentation de sujets « zéro » communs à tous les concours pour une
épreuve non disciplinaire. L’absence de visibilité de la carte des masters selon les
disciplines et les universités induit une diversité de formations avec rupture de l’égalité
entre étudiants. On peut craindre que les baisses d’effectifs ne conduisent à des
suppressions de postes. Il faut relier cela à une baisse de la qualité du recrutement,
39
en contradiction avec la hausse du niveau de recrutement, de même qu’à l’absence de
formation initiale pratique.
Présenter par exemple un rapport auprès des commissions des Affaires Culturelles du
Sénat et de l’Assemblée Nationale.
3) Stagiaires et formation continue
Les professeurs stagiaires après le concours L’APMEP vient d'alerter le ministère sur
les conditions difficiles imposées aux professeurs stagiaires depuis la rentrée et a
demandé au ministère un état des lieux. Le rôle du Forum est plutôt de réfléchir sur les
questions de fond qui se posent aux stagiaires : que vont-ils enseigner et comment ?
Les « stages » des étudiants inscrits en master On constate une grande inégalité selon
les académies et les disciplines. Par exemple, certaines universités ont refusé d'inclure le
stage en responsabilité dans les maquettes pour ne pas transformer les étudiants de master
en vivier de remplaçants. Dans certaines académies, les M1 ou M2 seront délivrés sans
les stages prévus dans les maquettes faute de réponse adéquate du rectorat. On note que
les stages en responsabilité avant le concours conduisent à mettre (seuls) devant les
élèves des enseignants sans véritable formation pédagogique. Une réponse est toujours
possible : c’est comme pour les vacataires...
La formation continue Elle est de plus en plus sinistrée, dans toutes les disciplines ; de
nombreux stages PAF sont supprimés ou maintenus avec des ordres de mission sans frais,
ce qui les vide de leurs effectifs. Le prétexte avancé est souvent que le financement
devait servir aux semaines de formation des stagiaires lauréats du concours 2010,
même lorsque ces semaines de formation sont elles aussi supprimées.
Il est utile de rappeler que la formation continue doit être une priorité nationale pour
tous les personnels de l’Education Nationale, au moment où la dimension nationale de cette
formation tend à disparaître. En particulier, l’INRP fait l’objet d’une dissolution et devrait
être intégré à l’ENS-Lyon.
L’APMPEP propose la création d’un Institut National de la Formation Continue (sur le
modèle des IREM qui, depuis 40 ans en mathématiques, arrivent à associer enseignement
supérieur et secondaire). Cet institut serait destiné au personnel enseignant et nonenseignant de l’Education Nationale. On remarque que cet Institut pourrait être perçu
comme hégémonique. Il faut donc éviter toute structure pyramidale ; il faut identifier les
réseaux qui existent déjà et les intégrer, identifier aussi les demandes des personnels
enseignants et des autres personnels de l’Education Nationale et mutualiser les moyens déjà
existants.
Proposition d’action du Forum La remise en perspective des textes diffusés depuis la
création du Forum serait un point d'appui. Rappeler la nécessité d'une formation des
stagiaires post-concours, qui devait représenter 1/3 du service. Un texte sur les stages de
masters et l’année de formation des lauréats au concours doit être écrit. Le texte de
l'APMEP pourrait servir de base à un texte du Forum sur la formation continue.
4) Réforme des lycées
La mise en place de la réforme en Seconde On constate des disparités importantes
entre les établissements, et donc un risque de spécialisation des établissements.
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La proposition du ministère d’étendre l’enseignement de la philosophie aux classes de
Seconde et de Première Le risque est grand de faire apparaître la philosophie uniquement
comme un regard sur les autres disciplines et non comme une discipline. Le nouveau
conseiller aux affaires pédagogiques a suggéré à l'APPEP la création de « groupes de
compétence », ce qui paraît incompatible avec la philosophie.
Proposition d’action du Forum Le Forum doit rappeler le principe que chacun puisse
bénéficier à la fois d’une formation scientifique et d’une formation humaniste équilibrées.
5) Enseignement supérieur et recherche
Rôle attribué au nouveau CNU d'évaluation des enseignants-chercheurs La CP-CNU
considère que c’est bien au CNU de tenir ce rôle. Cette évaluation étant dans le cahier des
charges des futurs nouveaux membres du CNU, ils ne pourront pas le refuser s'ils s'y portent
candidats. La politique de la chaise vide est également dangereuse. On note qu'en
Allemagne, l’évaluation est faite par une agence d’évaluation privée.
Quel sera le but de cette évaluation récurrente ? Le risque est qu’elle serve à une modulation
des services. Elle risque aussi de démotiver les chercheurs mal notés. Cela peut aboutir à
un effet pervers : le refus de toute charge administrative car les critères vont porter sur la
recherche. Il est question dans certaines sections de quotas pour l'évaluation individuelle
25% A, 25% B, 50% C, avec des conséquences pour 4 ans.
Enfin, quelle sera l’articulation entre l’évaluation des laboratoires par l’AERES et
l’évaluation individuelle ? Pour l’instant, les critères sont très différents mais il semble
impossible qu’il n’y ait pas de conséquence.
Conséquences de la LRU Elle crée des dysfonctionnements pour les recrutements. Il
était rare qu’un CA revienne sur un recrutement, c’est maintenant plus fréquent.
Pour les redéploiements de postes, certaines disciplines seraient touchées en priorité.
La question de la parité est abordée : selon les disciplines, il existe des jurys de thèse ou des
comités de sélection exclusivement féminins ou masculins, une mixité devrait être la règle.
Labex et Idex On se dirige vers un fonctionnement par projet de recherche, avec des
financements temporaires. Les décisions scientifiques se font de plus en plus localement, les
financements pérennes des laboratoires disparaissent. A cela s’ajoute la disparité des
équipes, dans des structures nées de fusions artificielles : l’idée d’interdisciplinarité et
d’interaction avec tout le monde n’a pas de sens et favorise les projets « bidon ».
Proposition d’action du Forum Se renseigner auprès du CNU sur le calendrier et sur ce qui
se prépare ; demander un RV au Ministère. Il est demandé a chaque membre du bureau qui
est en contact avec des membres de CNU (et a a fortiori de la CPCNU) de prendre
contact avec eux afin d'obtenir des informations sur ce point.
Enquête dans les universités sur les dysfonctionnements de la LRU via les correspondants
locaux d’associations membres du Forum. Puis demande de RV auprès de la commission de
suivi de la LRU. Une prise de contact avec la CPU est aussi envisagée.
41
DEUXIÈME MOTION DU JURY DE CAPES DE LETTRES CLASSIQUES
Les membres du jury du Capes de Lettres Classiques ont pris connaissance des conditions
dans lesquelles le Ministère, par l’intermédiaire de monsieur Santana, a convoqué
individuellement Mme S. Luciani, vice-présidente du jury, suite à leur première motion, fruit
d’une concertation collective et argumentée, votée à une large majorité, soutenue par la 8ème
section du CNU comme par toutes les associations de promotion des humanités classiques,
et visant à dénoncer le caractère pernicieux de la réforme mise en œuvre par l’Arrêté du 28
décembre 2009 fixant les sections et les modalités d’organisation des concours du certificat
d’aptitude au professorat du second degré, publié au Journal Officiel du 6 janvier 2010.
Après avoir été informé de la convocation et de la teneur de l’entretien, le jury du Capes de
Lettres Classiques tient à affirmer les points suivants :
1. Exprimer de façon publique et argumentée son opinion sur les réformes en cours est pour
tout enseignant un droit, garanti à tous les citoyens par la liberté d’expression ; ce droit
relève de la déontologie lorsque l’enseignant fait partie d’un jury habilité à apprécier les
connaissances et compétences d’un candidat au métier d’enseignant.
2. Les membres d’un jury de concours national d’enseignement, quel que soit leur statut, ne
sauraient être tenus pour des exécutants muets du Ministère, mais demeurent,
collectivement et individuellement, soucieux de la qualité de la formation et du recrutement
des enseignants ; seule cette qualité peut garantir la valeur des enseignements qui seront
dispensés par les futurs admis au concours, et l’égalité des conditions d’accès aux
connaissances et compétences que tout futur citoyen est en droit d’acquérir dans le cadre de
l’école publique. Or c’est cette qualité que la réforme en cours met gravement en péril.
3. Les membres du jury de Capes de Lettres Classiques demandent à nouveau instamment
l’ouverture de la concertation qui avait été promise par le Ministère comme préalable à la
publication des arrêtés, et qui n’a pas eu lieu. Cette concertation doit porter notamment sur
le calendrier et les modalités des épreuves écrites et orales du concours, dont ils continuent
d’estimer qu’ils ne permettront pas, en l’état des textes, d’évaluer équitablement les
candidats. À ce titre, les membres du jury renouvellent les remarques et propositions qui
faisaient l’objet de la première motion.
4. Tant que les discussions n’auront pas abouti, les membres du jury de Capes de Lettres
Classiques ayant approuvé et signé la première motion, forts de leur expérience en
matière de recrutement des professeurs de lycées et collèges comme en matière
d’enseignement, entendent persister dans leur intention et leur propos, et continueront
de faire connaître, au Ministère comme à l’opinion publique, les raisons argumentées de
leur opposition ferme à la réforme imposée sans concertation.
42
COMPTE RENDU DE LA RÉUNION À L’INSPECTION GÉNÉRALE
Mercredi 13 octobre 2010
107, rue de Grenelle – Paris
Mme Catherine Klein et M. Patrice Soler, Inspecteurs généraux des Lettres, ont reçu la
CNARELA, représentée par Sylvie Pédroaréna, présidente de la CNARELA, Sylvie DavidGuignard, présidente de l’ARELAB (Besançon), et Claire Laimé-Couturier, membre du
bureau de la CNARELA et présidente de l’APLG (Nantes).
L’entretien a duré trois heures environ.
Préambules
Un « audit » des langues anciennes dans le secondaire
Les Inspecteurs généraux rappellent pour commencer que cet entretien est en lien avec un
travail qui leur a été confié par le Ministre de l’Éducation nationale : en effet, il leur a été
demandé de faire un état des lieux de l’enseignement des « Langues et Cultures de
l’Antiquité » dans le secondaire. Mme Klein et M. Soler seront les rapporteurs de ce rapport
qui sera rendu en mai 2011.
Dans le cadre de cet « audit », ils rencontreront les IA-IPR, des chefs d’établissement, des
professeurs, des élèves et les représentants d’un certain nombre d’ARELA tout au long de
l’année. Ils s’intéresseront à la politique des recteurs et des IA-DSDEN en la matière. Un
premier entretien, très positif, a eu lieu avec le nouveau directeur de la DGESCO, M. JeanMichel Blanquer. Ils étudieront également les modalités de l’enseignement des Langues
anciennes en Allemagne, en Italie et en Angleterre.
Le bulletin de la CNARELA
Un premier point concernant les bulletins de la CNARELA est abordé.
M. Soler, lecteur très attentif de nos bulletins, déplore que le paragraphe concernant les
journées interacadémiques de formation (dans le compte rendu de notre dernière assemblée
générale) ait été si peu détaillé et parfois erroné : le travail effectué lors de ces journées a été
très important et a demandé une grande organisation aux Inspecteurs généraux, aux
Recteurs et aux IA-IPR ; nous aurions dû leur accorder davantage d’importance.
Nous répondons que nous ne savions pas s’il nous revenait de le faire mais que nous étions
prêts à relayer les informations.
Pour ce qui est de ces journées, les interventions de Mme Klein et de M. Soler, les exposés
des universitaires et les comptes rendus des ateliers seront très prochainement en ligne sur le
site Eduscol : les documents ont été donnés le 1er juillet, mais il faut du temps pour qu’ils
soient disponibles sur le site. Nous transmettrons l’information aux ARELA.
Précisions sur l’entretien avec M. Blanquer
Mme Klein et M. Soler nous font part ensuite de l’intérêt de l’entretien qu’ils ont eu la
semaine précédente avec M. Blanquer, directeur de la DGESCO (Direction Générale de
l’Enseignement Scolaire) – entretien qui entre aussi dans l’état des lieux qui leur est
demandé. M. Blanquer suit de très près le dossier des langues anciennes - on sait son
implication sur le terrain, quand il était recteur de l’académie de Créteil - ; M. Blanquer ne
voit pas, en effet, les langues anciennes comme un enseignement mineur au regard de
matières plus fondamentales ; les langues anciennes sont une source essentielle ; il ne veut
43
pas d’une conception « ultra-moderne » de l’enseignement qui sacrifierait les langues
anciennes. Il donne une « légitimation », selon les termes de M. Blanquer, à ces matières
auxquelles il trouve un intérêt réel, intellectuel et pédagogique ; il est également partisan de
veiller à bien garder l’aspect « étude de la langue » de la discipline et de l’articuler nettement
à l’enseignement de la culture antique.
Il a fait plusieurs ouvertures et propositions, qui ne nous ont pas été rapportées, mais qui
figureront dans le rapport.
Les Inspecteurs généraux nous invitent à renouveler notre demande d’audience à M.
Blanquer.
Nous abordons ensuite la place des langues anciennes au collège, au lycée puis dans l’enseignement
supérieur avant d’évoquer quelques questions diverses.
I. Le collège
Les nouveaux programmes : métanoia et poikilia
M. Soler rappelle l’importance du préambule des nouveaux programmes : il est nécessaire de
se l’approprier. Le professeur de Lettres classiques doit faire preuve de métanoia, c’est-àdire être capable d’opérer un mouvement de « conversion », par une attention aiguë portée
aux usages de l'Antique dans nos sociétés « postmodernes ». Les langues anciennes sont à la
fois partout et nulle part dans le socle des connaissances. Il s’agit donc d’établir un grand
nombre de liens entre les mondes antiques et le monde d’aujourd’hui et de saisir toutes les
occasions pour faire apparaître l’actualité des langues anciennes. Le professeur doit prouver
aux élèves que les Anciens sont des médiations indispensables pour lire les mondes
contemporains. Et M. Soler de citer le dernier livre de Jacques Huntzinger1, qui ouvre son
ouvrage sur le concept de mare nostrum, objet d’étude du programme de seconde, ou encore
l’essai de Thérèse Delpech2 : les professeurs de Lettres classiques doivent s’emparer de ce
genre d’ouvrages, qui ne sont pas des ouvrages de spécialistes en langues anciennes, mais
des ouvrages de réflexion plus large, qui font appel à des concepts propres à nos disciplines.
Mme Klein se demande si, dans la formation universitaire, il n’y a pas un décalage plus
grand pour les Lettres classiques que pour les Lettres modernes : le professeur de Lettres
classiques doit s’approprier et entretenir tout au long de sa carrière une culture plus
ouverte sur les langues et beaucoup plus ancrée dans le monde présent sans pour autant
renier sa spécificité.Mme Klein annonce également qu’avec M. Blanquer a été évoquée la
possibilité d’organiser un Plan National de Formation (PNF) sur les langues anciennes au
collège et au lycée pour encourager les enseignants à ne pas se scléroser et leur permettre de
varier leurs pratiques, en sortant du cadre trop étroit des manuels scolaires. Nous
approuvons cette idée.
Il nous est alors suggéré de faire des recensions de publications traitant moins de l’Antiquité
même que mettant en avant aussi ses réutilisations dans l’histoire et de nos jours : M. Soler
pensait au dernier livre de Lucien Jaume3 , ou encore à un article d’un journal allemand
définissant la piraterie en partant de Cicéron.
Bref, nous devons contribuer à la formation intellectuelle dans nos associations.
1
Jacques HUNTZINGER, Il était une fois la Méditerranée, Paris, CNRS, 2010.
Thérèse DELPECH, Puissances de l’irrationnel, Paris, Grasset, 2010.
3 Lucien JAUME, Qu’est-ce que l’esprit européen ?, Paris, Flammarion, coll. « Champs Essais », 2009.
2
44
Sylvie Pédroaréna répond que c’est bien le rôle que la CNARELA souhaite tenir, que notre
but est de poursuivre une réflexion de fond sur les langues anciennes, mais que
malheureusement : - nous sommes de plus en plus obligés de passer du temps sur la défense
des postes (lettres, démarches combatives de toutes sortes…) ; - les heures qui étaient
allouées à ce genre de formations (académiques) se réduisent comme une peau de chagrin !
Dans certaines académies, les stages traditionnellement assurés par des membres des
ARELA ne sont plus retenus.
Il faut inviter et pousser les collègues, insistent Mme Klein et M. Soler, à dépasser les
argumentaires convenus concernant les langues anciennes ; il faut mettre en perspective nos
matières en les reliant à des concepts d’aujourd’hui et penser à un « affichage relooké » de
nos disciplines. M. Soler insiste aussi sur l’importance des liens entre langues anciennes et
langues vivantes qu’il faut faire valoir.
Pour M. Soler, la poikilia, qui serait en quelque sorte le nom grec de la liberté pédagogique,
est la première conséquence de la metanoia : le professeur doit en effet concevoir des
séquences et des séances souples, passant aisément d'un aspect (étude de la langue latine) à
un autre (la langue latine comme source des langues romanes), et cela de façon régulière pas seulement en apéritif de début d'année - sachant interrompre la séquence pour faire état
d'un usage de l'Antique qu'il aura repéré dans les nouveautés du site Fabula4 , ou chez le
libraire.
Claire Laimé-Couturier pose alors le problème de la concurrence rencontrée avec les classes
européennes et les classes bilangues : sont évoqués le danger qu’elles représentent pour les
langues anciennes et la baisse notoire des effectifs constatée dans plusieurs établissements
quand le cumul (langue ancienne et classe bilangue ou européenne) n’est pas autorisé alors
que rien ne l’interdit ; chaque établissement mène une politique autonome dans ce domaine,
comme pour l’ouverture de plusieurs groupes par niveau. Bien que l’autonomie des chefs
d’établissement soit habituellement présentée comme positive, son corollaire est l’absence
d’équité entre les élèves à qui des enseignements sont proposés ou non, selon l’établissement
où ils sont scolarisés.
Sur ce sujet, Mme Klein et M. Soler affirment l’importance du principe d’équité sur le
territoire.
Relations avec les IA-IPR à renforcer
Mme Klein et M. Soler nous invitent à nous rapprocher des IPR de nos académies « au nom
de l’utile et de l’honestum ». Il ne faut pas hésiter à les solliciter pour un entretien-bilan en
début ou en fin d’année, malgré la charge de travail importante qui leur incombe. Il est
nécessaire aussi de dialoguer avec les IPR de Lettres modernes sur lesquels nous pouvons
compter.
Pratiques innovantes
Une mission des Inspecteurs généraux sera aussi de faire connaître des pratiques innovantes
dans les académies : on nous demande de communiquer les exemples de ce genre de
pratiques dont nous aurions connaissance.
4
http://www.fabula.org/
45
Latin-Grec et DNB
S. Pédroaréna demande à ce que soit bien reprécisée la question des langues anciennes au
Diplôme National du Brevet pour la prochaine session – question qui avait posé problème
l’an dernier avec l’introduction de l’option Histoire des Arts.
Mme Klein et M. Soler indiquent qu’ils n’ont pas eu le temps d’aborder ce point avec la
DGESCO. Il est aussi demandé que les élèves qui suivent un enseignement à la fois de latin
et de grec puissent voir comptabilisés les points supérieurs à 10 de chacune des deux langues
pour le brevet. Mme Klein et M. Soler prennent note et disent qu’il est possible de faire
évoluer le logiciel de manière à prendre en compte les deux notes.
II. Le lycée
Bilan de la réforme ?
S. Pédroaréna précise qu’il est difficile pour le moment encore de faire le bilan de la réforme
des lycées : il serait bon d’attendre les chiffres donnés par la DGESCO en janvier.
M. Soler demande la position de la CNARELA quant aux enseignements d’exploration. S.
Pédroaréna répond : cet enseignement a semblé pouvoir offrir une chance de toucher de
nouveaux élèves ; cependant, du fait du fréquent regroupement des élèves inscrits en option
et en enseignement d’exploration, avec des programmes et des évaluations différents, la mise
en œuvre s’avère très compliquée. Les Inspecteurs généraux ont reçu eux aussi plusieurs
témoignages qui vont dans notre sens, à savoir que l’enseignement d’exploration d’une
durée de trois heures a pu décourager des élèves, et qu’en outre, l’offre et la diversité des
enseignements provoquent un recul de nos disciplines. S. Pédroaréna précise que cela
semble encore plus vrai pour le grec.
ONISEP
La réforme, très tardive dans sa mise en place, avait empêché la parution en temps et en
heure des brochures ONISEP : on a pu regretter un certain manque de lisibilité, précise S.
Pédroaréna. Mme Klein et M. Soler sont d’accord et nous encouragent vivement à prendre
contact avec M. Pascal Charvet, directeur de l’ONISEP.
Il est nécessaire aussi de consulter les IA-IPR à ce sujet, en particulier sur la question de
l’offre des enseignements d’exploration dans les établissements. Il serait souhaitable
également de demander une nouvelle édition de la plaquette ONISEP qui exposait l’intérêt
des langues anciennes. On nous conseille en outre de faire part à M. Charvet des problèmes
de paramétrages du logiciel AFFELNET qui ne permettait pas la saisie des options
facultatives à l’entrée en seconde : qu’en est-il pour cette rentrée ?
La version en Terminale
M. Soler attire ensuite notre attention sur le problème de la version à l’épreuve écrite du
baccalauréat. Il est très difficile de trouver un texte de cinquante mots à la portée des élèves,
de manière à ce que l’épreuve ne soit pas dissuasive ; souvent, la version fait tomber la
moyenne à l’écrit. Certes, il faut maintenir cet exercice, mais en l’aménageant : il est
nécessaire de réfléchir à cette épreuve. Nous sommes invités à exprimer notre avis sur cette
question.
CPGE, revalorisation de la filière L
M. Soler évoque ensuite la question des débouchés de la filière L : il est essentiel de prévenir
les collègues de la mise en place de la banque d’épreuves littéraires des Écoles Normales
46
Supérieures : désormais quand un élève passera l’un des deux concours – ENS-Ulm ou ENSLyon –, il pourra se porter candidat également dans une quarantaine d’autres écoles (comme
c’est déjà le cas actuellement pour les concours des classes préparatoires aux écoles
scientifiques et commerciales) : en effet, ses notes dans les matières littéraires (dont le latin et
le grec pour Ulm notamment) seront prises en compte et il pourra se voir proposer une place
dans des Écoles de traducteurs, au CELSA5 de la Sorbonne, dans une École de commerce ou
dans un Institut d’Études Politiques. Ainsi, ce n’est plus 250 places dans les grandes écoles
mais entre 800 et 1000 places qui sont offertes aux Khâgneux. M. Soler ajoute que la liste des
sous-admissibles a été beaucoup rallongée : les candidats sérieux aux ENS, mais loin derrière
les 225 reçus, se voient donc faciliter l’accès direct à des oraux partiels menant à ces
débouchés variés.
C’est une avancée considérable et un argument important pour la poursuite du latin et du
grec en lycée.
M. Soler nous annonce aussi que le rapport concernant les classes préparatoires littéraires
établi l’an dernier est disponible : un exemplaire nous a été remis.
M. Soler pense qu’il est nécessaire d’user d’un langage « direct et offensif » pour relayer ce
genre d’informations.
III. L’Université (CAPES et Master)
Agir en fonctionnaire…
S. Pédroaréna commence par revenir sur l’épreuve « Agir en fonctionnaire de l’État » et
donne la position de la CNARELA, à savoir que cette épreuve ne doit pas promouvoir un
quelconque « ordre moral ». Les Inspecteurs généraux répondent qu’elle évalue une
compétence essentielle et qu’elle peut être articulée sur les préoccupations disciplinaires,
notamment avec la lecture des textes : qu’est-ce qu’être un fonctionnaire responsable quand
on propose un texte littéraire ? Il est nécessaire de s’interroger sur le choix des textes
proposés aux élèves et sur la manière de les aborder : et M. Soler de donner l’exemple du
Satiricon de Pétrone.
CAPES
S. Pédroaréna précise ensuite que la réintroduction des langues anciennes à l’oral du CAPES
est une bonne chose mais que ce n’est qu’un moindre mal. Elle précise que la CNARELA va
continuer à se battre pour demander un réaménagement de l’épreuve écrite : puisque
l’explication de texte réapparaît à l’oral, il serait bon de supprimer à l’écrit le commentaire et
de ne demander aux candidats qu’un exercice de traduction dans chaque langue ancienne.
M. Soler répond qu’il est important d’évaluer – dès l’écrit du concours – les futurs
professeurs en langues et cultures de l’Antiquité, qui doivent être capables de traduire et
commenter un texte comme on le demande aux élèves de Terminale.
Master
S. David-Guignard prend ensuite la parole pour parler des problèmes liés à l’université et à
la mastérisation des concours. Elle évoque la dichotomie entre Master d’enseignement et
Master de recherche, préjudiciable dans des sections à petits effectifs comme les nôtres. Il est
5
CELSA : Centre d’Etudes Littéraires et Scientifiques Appliquées.
L’information est disponible à l’adresse suivante : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid53038/denouveaux-debouches-pour-les-filieres-litteraires.html
6
47
nécessaire de ménager des passerelles entre les deux, pour permettre en particulier le
redoublement des étudiants ayant échoué au concours. Elle témoigne de la difficulté pour les
étudiants de préparer à la fois un mémoire de recherche et un concours, l’esprit de chacune
des deux formations étant très différent.
CAPES de Lettres modernes
S. Pédroaréna déplore aussi la suppression de l’épreuve de langue ancienne au CAPES de
Lettres modernes. C’est un véritable paradoxe puisqu’il est demandé de plus en plus souvent
à nos collègues de Lettres Modernes d’assurer des remplacements ou des enseignements en
latin.
IV. Points divers
Des ventilations de service un peu étranges…
S. Pédroaréna évoque un problème technique concernant les VS dans certaines académies :
les postes de certains enseignants de Lettres classiques se trouvent décomposés en langues
anciennes et complément en Lettres modernes. Cette pratique peut sembler inquiétante
quand on voit comment les enseignants de Lettres classiques sont amenés à exercer
uniquement en langues anciennes sur plusieurs établissements.
Mme Klein et M. Soler demandent que les documents leur soient communiqués.
Publions !
M. Soler félicite grandement les ARELA pour la qualité de leurs publications et invite les
associations à davantage les faire connaître et à procéder, quand cela est possible, à un «
toilettage » de ces fascicules : présentation, mise en forme…
Nous proposons d’envoyer à l’Inspection Générale un exemplaire de ces travaux.
Mme Klein nous invite aussi à nous mettre en relation avec Claude Renucci, directrice du
CNDP, et nous propose d’intervenir pour faciliter le premier contact.
Euroclassica
S. Pédroaréna annonce que la CNARELA organisera les journées Euroclassica en août 2011 et
invite, de manière informelle, Mme Klein et M. Soler. Elle leur communique le sujet de
l’épreuve du vestibulum, dont l’intérêt fait l’unanimité.
M. Soler précise que dans les écoles européennes, dont il a la charge avec son homologue
allemand, Euroclassica est bien représenté et que les élèves passent déjà des évaluations.
S. Pédroaréna donne enfin aux Inspecteurs généraux un document intitulé « Échos des
ARELA » dans lequel sont recensées les informations communiquées par les ARELA à
propos de cette rentrée. Le plus souvent, les cas signalés ont été évoqués au cours de
l’entretien.
Nous remercions Mme Klein et M. Soler pour leur attention et le temps qu’ils nous ont
consacré.
Sylvie Pédroaréna, Sylvie David et Claire Laimé-Couturier
Conclusion
Cette entrevue, très constructive, nous a permis de nous faire entendre et d’évoquer
l’ensemble des problèmes concrets que nous rencontrons sans jamais perdre de vue une
réflexion de fond sur la place et l’évolution de nos disciplines, le tout dans un esprit
d’ouverture. Nous avons trouvé une oreille attentive.
On nous propose d’intervenir et d’être présents sur de nombreux fronts : nous saurons le
faire !
48
Informations complémentaires
Depuis notre entrevue, Madame Klein a contacté Madame Renucci, Directrice de l’édition au
CNDP, afin de faciliter une première démarche de notre part.
De son côté, Monsieur Soler nous a écrit pour nous confirmer qu’à la session 2011 du Brevet,
les Langues anciennes ne se trouveraient plus en concurrence avec l’Histoire des Arts.
49
COMPTE-RENDU DU
STAGE AGAP-MMSH, AIX-EN-PROVENCE, 18 ET 19
JANVIER 2010
« LE THÂTRE ANTIQUE :
Théories, lieux, représentation »
rédigé par Jean-Loup MARTIN
d’après ses propres notes et celles
de Martine Casanova, de Nicole Martin et de Mireille Tourreau
Lundi 18 janvier 2010
I
Rôle du théâtre dans la vie sociale et politique à Rome
par Dolorès PRALON, Maître de Conférences honoraire en langue et littérature latines
(Aix-Marseille I)
1) Rôle du théâtre dans les jeux
La civilisation romaine est parfois définie comme une "civilisation du spectacle" : spectacle
du cortège des ancêtres lors des funérailles, (où les masques de cire des ancêtres, conservés
généralement dans l'atrium, étaient revêtus par des comédiens), spectacle des célébrations
religieuses ritualisées, des discours et plaidoiries, civils ou politiques, spectacles des jeux.
Le but des jeux est de rétablir les liens entre les dieux et la cité. C’est aussi de rassembler
toute la population, y compris les esclaves et les étrangers. Les jeux remontent à la plus haute
antiquité de Rome : ils auraient été, selon la tradition, institués dès la fondation de la ville
(Romulus et ses compagnons enlèvent les Sabines lors des jeux en l'honneur du dieu
Consus). Après leur première célébration, ils furent inscrits dans le calendrier romain.
Tarquin, premier souverain étrusque, institue les jeux les plus importants, les Ludi Romani en
l'honneur de Jupiter, et en fixe la date au 13 septembre. Puis les jeux se multiplient,
notamment lors de la seconde guerre punique, et leur durée se prolonge (les Ludi Romani
duraient 15 jours à l'époque de Jules César) . A l'origine, ce sont généralement des jeux votifs
qui sont peu à peu annalisés.
Sous Marc-Aurèle, il y a 135 jours de jeux publics, au milieu du IVème siècle ap. J.C., ils
occupent 175 jours de l'année. Parallèlement aux jeux réguliers, il existait des jeux privés et
occasionnels : jeux funèbres, jeux votifs, jeux triomphaux. Les jeux publics sont organisés et
présidés par les magistrats, qui, souvent, pour les financer, complètent les crédits alloués en
puisant dans leurs ressources personnelles, afin d'offrir au peuple un spectacle somptueux :
César se ruina lors des jeux qu'il offrit pour son édilité,
50
Les premiers jeux scéniques apparaissent en 364, après une épidémie de peste (cf. Tite-Live
VII 2). Ils sont constitués au départ de danses exécutées par des danseurs étrusques, appelés
"ludions" Le spectacle ainsi offert était censé conjurer le fléau. Puis, il fut intégré aux jeux
réguliers du calendrier.
En 240, Livius Andronicus, affranchi d'origine tarentine, compose, à la demande des
magistrats, des pièces latines adaptées du théâtre grec. La mise en scène faisait appel à deux
ou plusieurs acteurs et à un flûtiste. Ces jeux scéniques se situaient entre la procession
liminaire et les jeux du cirque, composante obligée de la célébration des jeux.
204-207: Première période du théâtre latin —"le théâtre des scribes" (selon l'expression de F.
Dupont). Livius Andronicus, Naevius et Plaute écrivent des pièces en latin, s'inspirant le
plus souvent du théâtre grec, mais créent aussi des tragédies sur des sujets romains (ou
tragédies "prétextes") : celles-ci, toutefois, semblent n'avoir obtenu qu'un succès limité.
207-150: Seconde période du théâtre latin — "le temps des poètes" : Ennius, Accius, Pacuvius,
Térence produisent des pièces plus originales, moins tributaires de leurs modèles
helléniques. Ils créent le genre de la comédie togata, dont il ne demeure que de rares
fragments.
À la fin de la république, les tragédies deviennent plus «rhétoriques». Elles furent peut-être
écrites pour être lues et non représentées. Sous l’Empire, le goût pour le théâtre et la théorie
dramatique demeure très vif, mais il n’y a plus ni production ni représentation dramatiques
proprement dites. L'Art Poétique d'Horace, inspiré de la Poétique d'Aristote reste fort éloigné
de la réalité contemporaine. Les spectacles représentés sont des pantomimes, genre apparu
sous Auguste (et créé par deux affranchis, Pylade et Bathylle) : le sujet en est souvent
mythologique, un seul acteur mime et tous les rôles, accompagné d'un orchestre et de
chanteurs. C’est du très grand spectacle, assez proche du music hall.
Au départ, les jeux scéniques font partie de cérémonies civiques dont l’un des buts est de
manifester la cohésion et la bonne entente du peuple romain sous le regard des dieux
tutélaires de la cité. Une procession ouvrait la cérémonie, et allait jusqu’au Capitole en
passant par le forum, sous la conduite du préteur et de l’éditeur des jeux. Des jeunes gens
dansaient au son des flûtes et ne devaient pas s’arrêter, même si la procession s’arrêtait.
C'était une reprise rituelle de la première procession de 364, destinée à conjurer la peste.
Pour Florence Dupont (L’Acteur roi, Le Théâtre latin), il s’agit là d’un rituel qui a pour
fonction de faire passer le peuple du temps de la guerre à celui de l’activité politique et à
celui de la paix, c’est-à-dire du negotium à l’otium; il accompagne et rend possible la réduction
à l’état civil des soldats qui doivent abandonner leur furor guerrier (qui leur permet de
remporter la victoire) pour revenir à un état plus pacifique nécessaire à la vie civique. Les
Ludi Romani ont lieu en octobre, après les campagnes militaires. Pendant plusieurs jours,
Rome oublie la guerre. La fonction de ce «ludisme» est de créer un espace de fiction, de
rendre admissible, dans un contexte pacifique, la présence de guerriers. Les événements qui
se déroulent sur scène sont dépourvus de toute réalité : c’est, soit un monde d’illusions,
emprunté à la mythologie grecque (que l’on pourrait qualifier de «Grèce d’opérette») qui
échappe à tout contexte politique ou guerrier, soit un ensemble complexe de situations
rocambolesques. C’est un «théâtre-événement», fondé sur le jeu physique de l’acteur et pas
du tout «intellectuel».
La position adoptée par Florence Dupont a été discutée, voire refusée à maintes reprises. Car
ces jeux ont d’abord une fonction intégratrice. Dénier toute «romanité» à la comédie latine,
c’est faire bon marché de ses éléments proprement latins : ainsi, les personnages de la
comédie latine débattent parfois de l'éducation à donner aux jeunes gens ; ces débats
51
reflètent plus ou moins directement les tensions de la société contemporaine, où
s'affrontaient les tenants du mos majorum et ceux qui souhaitaient une plus grande ouverture
au monde hellénique.
Les premiers jeux scéniques se déroulaient dans un certain désordre. Les spectateurs étaient
sans doute debout dans une aimable confusion. Mais, dès 67 avant notre ère, la loi Roscia
theatralis fixa la «stratification» de la population dans les gradins. Les sénateurs étaient
installés dans l’orchestra. Les chevaliers disposaient des quatorze premiers rangs des
gradins.
Le théâtre était aussi un lieu où pouvaient s’affirmer les antagonismes politiques. Les
spectateurs intervenaient souvent pendant les représentations pour exprimer leurs
préoccupations. Cicéron, dans le Pro Sextio 117, raconte que des spectateurs avaient perçu,
dans une tragédie d’Accius (l'Eurysacès), un rapprochement possible avec l'attitude de
Cicéron lors de la conjuration de Catilina et avaient applaudi l'orateur alors exilé. Les jeux
sont souvent liés à l'actualité politique et sociale. L’éditeur cherche à s’attirer la gratitude du
peuple.
Le théâtre est un lieu d’échanges complexes. Au début de l’empire, le théâtre devient le seul
lieu de confrontation du Prince et du peuple, puisque la démocratie n’est plus qu’un vain
mot, qu’il n’y a plus qu'un simulacre d’élections et que le pouvoir est monarchique. Dans ce
lieu, dans le cadre particulier d’un «jeu» scénique, le peuple peut exprimer ses demandes, ses
désirs face à l’empereur ou à son représentant. C’est une sorte d’exutoire à toute fronde.
L’empereur se réserve le droit d’accepter ou de refuser.
Entre 20 et 17 avant notre ère, Auguste fait promulguer une loi, la lex Julia theatralis, qui
réglemente l'attribution des places de théâtre suivant les catégories sociales (Cf Suétone, Vie
d'Auguste, XLIV). Les sénateurs sont placés dans l’orchestra, les pères de trois enfants ont des
places à part, les esclaves publics sont installés parmi la plèbe, car ils sont mieux considérés
que les esclaves privés. Martial, au Livre V de ses Epigrammes, évoque fréquemment des
litiges lors de l'installation des spectateurs. C'est là le signe que le peuple ne se satisfaisait
pas de la répartition, et que la loi n’était pas toujours respectée. Le public est assis face à la
statue impériale qui orne le mur de scène.
2) Lieux des spectacles dramatiques
En Grèce, l'édification des théâtres est contemporaine de la production des textes
dramatiques. A Rome, dans les premiers temps, bien que le théâtre fût fort apprécié, il
n'existait pas de lieu spécifique : on construisait parfois des bâtiments provisoires en bois, ou
bien on aménageait un espace pour le spectacle dramatique dans une partie du cirque, alors
qu’en Grande Grèce et même dans le Latium, il existait des théâtres construits dès le II° siècle
avant notre ère. Les spectateurs romains restaient donc debout. Le premier théâtre "en dur" à
Rome fut construit par Pompée entre 61 et 55 avant J.C., date de son inauguration. Il n'en
demeure aujourd'hui que des traces peu perceptibles.
Le refus des théâtres construits était sans doute dû au désir d'éviter des rassemblements
populaires non institutionnels, qui, dans une enceinte fermée, où les spectateurs étaient assis,
auraient pu tourner à la sédition. C'était aussi le signe, émanant de la partie la plus
conservatrice du sénat, d'un refus de l'hellénisation des moeurs.
Le théâtre construit par Pompée contournait habilement la prescription sénatoriale : Pompée
présentait son théâtre comme l' escalier d’accès au temple de Vénus Victrix, construit en
l’honneur de ses victoires… et qui se trouvait effectivement au sommet de la cavea. Le mur
52
de scène mesurait quarante-cinq mètres de haut. Ce théâtre constituait véritablement une
«ville dans la ville». Il était construit sur voûtes et non adossé à une colline (à la différence
des théâtres grecs). Il était orné de nombreuses statues représentant les nations vaincues.
Derrière le mur de scène, se trouvait un quadriportique construit autour d'un jardin, sorte de
galerie d’art abritant de nombreuses statues à la gloire de Pompée, notamment l'imperator en
personne, représenté dans la nudité héroïque et avec les attributs du cosmocrator, des femmes
célèbres, personnages mythiques ou historiques (hétaïres, poétesses, héroïnes remarquables
par leurs accouchements extraordinaires). G. Sauron (Quis deum, BEFAR 285, Paris 1994,
p.249-314) a interprété cette mise en scène comme une sorte de «Descente aux Enfers» de
Pompée, protégé de Vénus, la déesse tutélaire de l'amour, que de la fécondité, et du plaisir:
Pompée y était figuré comme un nouvel Ulysse ou un nouvel Alexandre, conquérant du
monde. Au fond du jardin se trouvait une nouvelle curie destinée à abriter les réunions du
sénat (celle où, en 44 fut assassiné César). Tout ce décor était donc destiné à glorifier Pompée,
et à assurer sa propagande. À partir d’Auguste, les théâtres se multiplient dans le monde
romain, car ils deviennent un élément constitutif essentiel et indispensable du paysage
urbain : dans l'Énéide, I Énée, débarquant à Carthage, voit se construire le théâtre de la ville
fondée par Didon.
3) Conclusion
Au départ, les jeux scéniques sont un spectacle offert par la cité à ses dieux tutélaires pour
établir ou rétablir avec eux la paix nécessaire à la survie de la cité. Puis, avec le pouvoir
monarchique, le théâtre devient peu à peu le lieu d’un face à face entre le peuple et le
souverain. La nature des pièces représentées devient secondaire : Rome se donne en
spectacle à elle-même, selon une hiérarchie voulue par le pouvoir. Ce type de monuments se
répand rapidement dans les provinces. Dans le monde romain, le théâtre devient le moyen
de diffuser une image de la Ville, que les autres cités cherchent à imiter, dans une émulation
évergétique où s'exercent rivalités politiques et ambitions municipales.
À l’époque flavienne, son importance décroît au profit de l’amphithéâtre, où sont mises en
scène brutalement la violence et la contrainte exercées par le vainqueur des contrées
nouvellement soumises.
4) Questions
Jean-Pierre Cèbe souligne la relation entre le théâtre antique et la fête archaïque, la religion,
la célébration des dieux. Le but du théâtre antique est effectivement de ramener la paix, mais
aussi d’effacer toute souillure, toutes les impuretés commises par les hommes. Pour cela, il
faut retourner au «chaos» primitif. Dans les Saturnales, les «petits» sont transformés en
«grands», les esclaves en maîtres, avec intervention de masques. Entre la fin d’une année et
le début d’une autre, se situe une période dangereuse. Le roi est remplacé par un
saturnalicius princeps, un roi de pacotille, qui se permet de donner des ordres saugrenus. On
assiste à un retournement de la situation sociale, comme dans la comédie antique et comme,
bien plus tard, chez Molière. Voir les ouvrages de psychocritique: les fils réagissent contre la
tyrannie des pères. Le principe de plaisir l’emporte sur le principe de réalité. Le pouvoir est
donné à la jeunesse. Il y a une alliance entre mères, fils et esclaves contre les pères pour faire
prévaloir le rire, l’amour, la fraternité, puis tout rentre dans l’ordre (cf. le théâtre de Plaute,
mais pas celui de Térence). L’ethnologie est indispensable pour comprendre la réussite de
53
Plaute et l’échec de Térence. Les masques sont portés par des personnages venus du
royaume des morts avant d'être renvoyés dans leur séjour propre (cf. la théorie de la fête
chez les ethnologues).
II
Des Bacchanales de comédie ?
Dionysos et le théâtre latin
par Stéphanie WYLER, Maître de conférences en langue et littérature latines (AixMarseille I)
1) Les origines du théâtre romain
Nous constatons un paradoxe: à partir de 240, le théâtre latin est éminemment inspiré par le
théâtre grec, lequel est très «dionysiaque». Comment donc se fait-il que le théâtre latin n’ait
pas «importé» Dionysos? Que reste-t-il de Dionysos dans les textes?
Quelles sont les origines du théâtre romain? Cf Tite-Live, VII. En 365, à la suite d’une
épidémie, on fait venir des danseurs étrusques, qui présentent des danses sacrées. La
«juventus» romaine parodie ces danseurs étrusques et ajoute des mots. C’est l’origine de la
«satura».
Livius Andronicus était-il un esclave tarentin? campanien? En 240, libre, il introduit à Rome
un théâtre sur le modèle grec, car le philhellénisme se répand au moment des guerres
puniques et de la conquête de la Grande Grèce. Rome veut devenir une capitale hellénistique
et avoir son théâtre à elle. Livius Andronicus est un Grec de Grande Grèce à qui les autorités
demandent de composer des pièces de théâtre en latin. C’est un «professionnel» de
l’adaptation d’œuvres grecques, qui commet quelques maladresses d’expression en latin,
lesquelles sont des traces de langages italiques.
Les «ludi scaenici» venaient des Étrusques. Le mot «histrion» viendrait de l’étrusque «hister»
(l’acteur). «Persona» viendrait de l’étrusque «phersu». Le mot «scaena» désigne la scène et
serait un mot grec déformé par l’étrusque. Tout un faisceau de présomptions conduirait à
penser que le théâtre romain a un rapport avec la culture étrusque. Les Étrusques sont de
fervents «dionysiaques». Dans la «pompa circensis» la plus ancienne, on trouve des satyres
qui dansent. Il n’y a donc pas d’opposition entre les Étrusques et Dionysos. Alors pourquoi
Dionysos est-il absent du théâtre latin?
En fait les «ludi» sont religieux, mais ils sont placés sous la protection des divinités
auxquelles ils sont consacrés. Par exemple les «ludi Romani» sont placés sous la protection
de Jupiter, les «ludi apollinares» sous celle d’Apollon, les «ludi megalenses» sous celle de
Cérès, les «ludi plebeis» sous celle de Jupiter et de la triade plébéienne Cérès, Liber et Libera,
plus tard associée à Dionysos, Déméter et Koré : à Rome, Dionysos s’appelle Liber (et non
Bacchus! En latin, le nom «Bacchus» n’apparaît qu’en poésie, avant de se répandre sous
l’Empire). Mais dans les «ludi plebei», Dionysos n’est que l’un des dieux auxquels sont
consacrés ces jeux.
Les collèges d’acteurs ne sont pas non plus placés sous la protection de Dionysos, mais sous
celle de différentes divinités. Le «Collège des Écrivains et des Histrions» se réunit dans le
temple de Minerve, qui est la patronne des «tibicines» (joueurs de flûtes) et en général des
54
artisans. Or les métiers du théâtre sont des métiers d’artisans, y compris les écrivains. Les
«Parasites d’Apollon» pratiquent le mime et la pantomime. Vraisemblablement il n’y a pas
d’opposition entre Apollon et Dionysos (C’est Nietzsche qui a inventé cette opposition). Les
technitai (professionnels) de Dionysos sont itinérants et ont pu jouer à Rome et en Campanie.
2) L’épisode des Bacchanales
C’est Tite-Live qui le raconte (Chapitre XXXIX, 8 et suivants). Son récit est bâti sur le modèle
de la naissance du théâtre, petite graine qui croît jusqu’à la débauche. Il en est de même pour
les Bacchanales. Ce récit de Tite-Live est corroboré par une plaque de bronze trouvée en
Calabre, sur laquelle est gravé un résumé du sénatus-consulte qui interdit les Bacchanales.
En 186, un «Graeculus» (petit Grec) passe par l’Étrurie pour développer sa secte, les
«Bacchanalia». Elle réunit des initiés qui pratiquent des cultes à mystères. Il arrive à Rome,
où il s’associe avec une prêtresse campanienne. Le culte, de diurne, devient nocturne. Il
devient aussi beaucoup plus fréquent (cinq fois par mois au lieu d’une seule). Il aboutit à de
nombreuses débauches. Cette secte recrute des jeunes gens et refuse les vieux. Elle mélange
les catégories sociales. Elle est accusée de commettre des crimes, des meurtres, des captations
d’héritages. Elle connaît un énorme succès, y compris chez les fils et filles de bonne famille.
Tite-Live raconte l’histoire romanesque d’un jeune homme qui est sauvé et qui se plaint au
consul. Le consul organise une énorme répression contre les «Bacchanalia», mais pas contre
les dieux. Cette répression sanglante s’étend à toute l’Italie. Sept mille condamnations sont
prononcées, dont deux mille condamnations à mort, ce qui est énorme. C’est l’une des
premières manifestations de l’impérialisme romain en Italie.
Cet épisode correspond donc à une montée du «Dionysisme» à Rome, laquelle inquiète les
autorités. On constate une méfiance à l’égard de ce type de «Dionysisme», ce qui peut
expliquer que le théâtre grec n’arrive pas avec Dionysos dans le théâtre romain.
Plaute est très intéressant car il a vécu à cheval sur deux périodes: avant et après cette affaire,
avant et après 186.
3) Que reste-t-il de Dionysos dans les textes?
a) Naevius
Naevius a combattu comme soldat dans la première Guerre Punique. Il est bien implanté à
Rome. Son épitaphe signale sa «superbia campania» (son «arrogance campanienne»). Est-il
donc d’origine campanienne? Il est peut-être originaire de Capoue. Or en 216, Capoue trahit
Rome en s’alliant à Hannibal. Naevius a été condamné en 204 ou 201, emprisonné, exilé à
Utique, où il est mort, parce qu’avec son «arrogance campanienne» ou «capouane», il s’en
serait pris, dans ses pièces, aux autorités. Mais cette raison est peu probable. Car le théâtre de
Naevius est un théâtre «officiel». Il y a sans doute d’autres raisons. Ainsi, après la prise de
Capoue, les Capouans étaient mal vus. Ou encore il y avait trop de «Dionysisme» dans son
théâtre.
Naevius est l’auteur d’un Lycurgue, peut-être d’après une tétralogie d’Eschyle. Lycurgue est
un des rois mythiques qui se sont opposés à Dionysos. Naevius réclame la liberté pour le
théâtre: «Si vous vous en prenez aux adeptes de Dionysos, vous allez voir ce qu’il va vous en
coûter». Il y a un jeu de mots certain entre «Liber» et «libertas». Dans son théâtre, on peut
voir une composante dionysiaque et «libertaire». D’où peut-être sa condamnation par les
55
autorités qui voyaient les Bacchanales se développer et craignaient la revendication d’une
liberté de parole.
Plaute l’a connu et a peut-être écrit en collaboration avec lui, mais il appartient à la
génération suivante. Il fait allusion à Naevius.
b) Plaute
Avec Plaute on change de registre, on passe à la comédie. Plaute, lui aussi, a un rapport avec
la Grande Grèce.
On peut formuler deux hypothèses, mais elles sont incompatibles:
- soit Plaute ne serait pas «Dionysiaque» et il condamnerait le «Dionysisme» par prudence ou
par indifférence;
- soit Plaute serait un «Dionysiaque» convaincu, mais le cacherait par prudence.
Plaute aurait rempli onze pièces de «clins d’œil» aux initiés dionysiaques. Il est souvent
question de Bacchantes chez Plaute: c’est un bon ressort de comédie. Dès qu’une femme est
un peu excitée, on dit qu’elle est une «Bacchante»!
Un certain nombre d’allusions reposent sur un double langage partagé entre l’auteur (Plaute)
et le public: s’agit-il de signes de connivence avec le public?
Dans les Ménechmes, un frère simule la folie pour se sortir d’une situation difficile.
Dans le Mercator, vers 464-470, allusion aux Bacchanales et à Penthée.
Dans le Miles gloriosus: une intrigue amoureuse, peut-être une allusion aux Bacchantes.
Dans l’Aulularia, 406, la cuisine devient un antre où tout le monde est fou!
Dans Amphitryon, allusion à une bacchante.
Dans les Bacchides, il y a deux jumelles (dont le nom «tombe bien»!). Ce sont deux courtisanes
qui séduisent un jeune homme, deux «bacchantes enragées». S’agit-il d’une allusion à
l’affaire des Bacchanales de 186?
Dans Casina, deux hommes (un maître et son esclave) convoitent la jeune Casina. Un jeune
homme se déguise en jeune femme, qu’un esclave va tenter de violer. Or, dans les
Bacchanales, il y a toujours des «phallus voilés» en terre-cuite, que l’on «dévoile».
Quand Plaute écrit: «On n’est pas en train de jouer les Bacchantes», il fait allusion à Euripide.
Cette phrase signifie en apparence: «On n’est pas un train de jouer une tragédie», mais c’est
peut-être une allusion aux «Bacchanales».
Plaute est-il ou non sympathisant du «Dionysisme»? Il est impossible de le dire. Peut-être en
fait ne s’agit-il que d’un simple ressort dramatique.
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Mardi 19 janvier 2010
III
Théâtre juif, théâtre chrétien dans l’Antiquité
par Gilles DORIVAL, Professeur de langue et littérature grecques (Aix-Marseille I)
(Note: M. Dorival a fourni aux stagiaires le texte de son intervention, que nous avons utilisé
complètement en y ajoutant nos propres notes à partir de ses commentaires oraux.)
1) Théâtre juif: l’Exagôgê d’Ézéchiel le Tragique
Les dix-sept fragments et les deux cent soixante-neuf vers de l’Exagôgê qui subsistent forment
les vestiges les plus importants de la tragédie hellénistique et du seul drame juif existant écrit
en Grec (sauf si Nicolas de Damas avait composé une pièce sur Suzanne). Malgré cela,
l’Exagôgê est souvent absent des ouvrages sur la poésie hellénistique, sur la tragédie, sur le
judaïsme. Et quand il est présent, c’est souvent pour un jugement sévère: «Alexandrie
Alexandrie a produit beaucoup de mauvais poètes. Parmi eux, le pire est Ézéchiel» (Cobet,
1866, en anglais). Mais les choses ont changé depuis l’édition du savant allemand Bruno
Snell, Tragicorum Graecorum Fragmenta, 1971 (Bruno Snell est le meilleur connaisseur de la
tragédie au XXe siècle), avec notamment les éditions de Howard Jacobson en 1983, de Carl
R. Holladay en 1989, de Pierluigi Lanfranchi en 2006 (en français). Ce drame national nonGrec, qui concerne le peuple hébreu, a peut-être des parallèles: Dymas de Iasos a écrit une
tragédie sur Dardanos, etc.
L’Exagôgê est connu par l’historien païen Alexandre Polyhistor (actif vers 50 avant notre ère),
Sur les Juifs (cité par Eusèbe de Césarée), par Clément d’Alexandrie (qui cite trente-neuf vers
dans les Stromates) et par Eusèbe de Césarée (qui cite deux cent soixante-neuf vers dans sa
Préparation évangélique, IX). Clément et Eusèbe se recoupent: on trouve chez ces deux auteurs
les mêmes vers. On trouve également dix vers supplémentaires chez Méthode (IIIe ou IVe
siècle) et Épiphane (fin du IVe siècle), mais ils ne proviennent peut-être pas de l’Exagôgê.
Faut-il identifier Ézéchiel (dont le nom signifie «Dieu affermit») avec l’auteur tragique grec
Théodecte (dont le nom signifie «Dieu accueille») qui est aussi inconnu qu’Ézéchiel? Ce
Théodecte est mentionné par Aristée (IIe siècle avant notre ère): il a été frappé de cécité par
Dieu pour s’être inspiré de scènes bibliques. En tout cas, il ne faut pas confondre Ézéchiel le
Tragique avec Ézéchiel le Prophète.
À quelle date l’Exagôgê a-t-il été écrit? Plus de vingt hypothèses ont été formulées! Selon
Jacobson, la plus vraisemblable serait le IIe siècle et plus précisément la dernière partie de ce
siècle.
Ce texte nous vient d’Alexandrie.
À quel public était-il destiné: les Juifs, les non-Juifs, les deux? (Vraisemblablement à la fois
les Juifs et les non-Juifs). Il ne faut pas projeter sur Alexandrie les interdits des Sages,
Rabbins des années 100 à 600 (interdits sur le théâtre que l’on a d’ailleurs exagérés). Les Juifs
d’Alexandrie fréquentaient le théâtre. Les pièces étaient vues, à l’époque, aussi bien par des
Juifs que par des non-Juifs.
L’Exagôgê était-il destiné à des représentations sur scène ou à de simples lectures publiques?
On hésite. Certes les changements de lieux sont très nombreux, mais cela n’empêche pas
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forcément des représentations sur scène. C’était d’ailleurs peut-être une caractéristique du
théâtre de l’époque.
Le sujet en est la sortie d’Égypte sous la conduite de Moïse, d’après l’Exode, 2-15, qui est le
deuxième des cinq livres du Pentateuque attribué à Moïse.
Que signifie le titre? Le mot «exagôgê» désigne, chez Aristobule, conseiller du roi Ptolémée,
personnage important (IIe siècle avant notre ère), et chez Philon (contemporain de JésusChrist), l’exode, qui est appelé «exodos» dans la Septante, chez Flavius Josèphe (I° siècle) et
par les Chrétiens.
Les sources de ce texte sont la Septante, mais Ézéchiel déborde le texte biblique. Il n’est pas
facile de faire la part personnelle de l’auteur et la part midrashique.
Les dix-sept fragments ont été classés en cinq groupes par Albert-Marie Denis (dans son
Introduction à la Littérature judéo-hellénistique, 2000, pages 1201-1216), qui suit d’ailleurs
l’ordre d’Eusèbe:
1) Monologue de Moïse: on y trouve évoqués l’arrivée de Jacob en Égypte avec soixante-dix
personnes; l’oppression des Juifs par Pharaon; le sauvetage de Moïse, sauvé des eaux par la
fille de Pharaon; le nom égyptien donné à Moïse, qui devient Moshé (ce n’est certes pas un
nom hébreu, mais est-ce vraiment un nom «égyptien»?); l’éducation de Moïse par la mère à
qui la princesse l’a confié; la fuite de Moïse en terre étrangère, en l’occurrence le Territoire de
Madian ou Madiam, parce qu’il a tué un homme (dans cette pièce Madian est situé en Libye,
alors que généralement on le situe vers le Sinaï); la rencontre de Moïse et de Sepphora, qui
est l’une des sept filles de Ragouel ou Jethro, prêtre d’une ville de Libye, peuplée
d’Éthiopiens. Puis dialogue de Sepphora. Puis dialogue de Sepphora et de Choum ou Chous,
qui est sans doute le frère de Sepphora: Choum n’accepte pas le mariage de Sepphora avec
l’«étranger» Moïse. Moïse a été marié deux fois. Sa seconde femme est une Éthiopienne.
2) Dialogue entre Moïse et Ragouel: Moïse raconte le songe où il a vu Dieu trôner au sommet
d’une montagne. Dieu l’invite à s’asseoir sur le trône divin et lui remet les insignes royaux
du pouvoir. Moïse contemple la terre, le ciel et les astres qui défilent en bon ordre. Ce songe
est inconnu de la Bible et rappelle des songes tragiques, comme celui d’Atossa (Ἄτοσσα dans
Les Perses d’Eschyle), mais aussi bibliques, comme ceux de Jacob avec le ciel ouvert, de
Joseph qui voit le soleil, la lune et les étoiles, d’Isaïe. Ragouel interprète le songe comme
l’annonce de la royauté de Moïse sur l’univers et de sa science astrale et prophétique, ce qui
ne se trouve pas dans la Bible: Moïse est astrologue, astronome et prophète et même le plus
grand des prophètes, mais la Bible ne mentionne jamais un pouvoir «politique» de Moïse.
Les Pharisiens refusent la confusion entre rôle politique et rôle prophétique; d’où la
suppression des livres des Maccabées dans la Bible juive. Moïse, qui appartient à la tribu de
Lévi, avait été «mis de côté» pour des fonctions religieuses. Suit immédiatement un dialogue
entre Dieu et Moïse sur le buisson ardent, sur Aaron, sur le signe du bâton devenu serpent,
sur la lèpre de la main aussitôt guérie.
3) Dialogue entre Moïse et Dieu: Dieu donne ses ordres sur les plaies d’Égypte, réalisées par
le bâton.
58
4) Récit du passage de la Mer Rouge par un messager égyptien rescapé (Les rôles de
messagers sont nombreux dans la tragédie antique).
5) «Quelqu’un» (s’agit-il d’un éclaireur hébreu?) fait un rapport à Moïse en vue d’établir le
camp aux douze sources et soixante-dix palmiers (les «phoinikes») de l’oasis d’Élim. Il décrit
le roi des oiseaux (le Phénix en fait, mais le mot n’est pas employé) qu’il a vu dans le désert.
Le même mot grec désigne le Phénix et le palmier. Il affirme que les armes des Hébreux,
partis désarmés, sont les armes des noyés. Il s’agit en fait, dans ce fragment, de l’organisation
du voyage du peuple dans le désert.
À partir de ces cinq fragments, peut-on reconstituer la structure dramatique? L’Exagôgê est-il
un drame en cinq actes, structure qui semble être apparue à l’époque hellénistique et que
l’on connaît par comparaison avec Ménandre et Sénèque? Chez ce dernier, seul auteur latin
dont subsistent des tragédies complètes, c’est la présence d’odes chorales qui marque les
divisions entre les actes. Or on ne connaît aucun vers lyrique dans l’Exagôgê. Il est donc de
difficile de suivre la reconstitution en cinq actes d’Holladay, qui a fait un travail utile et
méritoire, mais discutable:
Acte I: monologue de Moïse (vers 1-58), puis dialogue Moïse-Sepphora (59-65); ce dialogue a
lieu avant leur mariage puisque Sepphora appelle Moïse «l’étranger».
Acte II: dialogue Chous-Sepphora (66-67); ce dialogue est postérieur au mariage; rêve de
Moïse (68-82); interprétation de Ragouel, beau-père de Moïse (83-89).
Acte III: dialogue entre Moïse et Dieu auprès du buisson ardent (90-192).
Acte IV: rapport du messager (193-242).
Acte V: l’éclaireur décrit Élim (243-269).
Jacobson est sceptique, à juste titre, sur la possibilité d’identifier cinq actes. Il propose une
reconstitution dans laquelle il suggère de restituer des scènes. Par exemple: après le
monologue, l’arrivée des filles de Ragouel et l’épisode des bergers qui les tourmentent et les
brutalisent. Après le buisson ardent, un dialogue entre Moïse et Aaron, petit frère de Moïse:
scène centrale, qui est longuement racontée dans la Bible. Puis la confrontation entre Moïse
et Pharaon, etc. Jacobson propose de détacher les vers 175-192 de ce qui précède et d’y voir
un dialogue entre Moïse et les Anciens.
L’action de la pièce occupe un long temps (beaucoup plus de vingt-quatre heures!). Elle se
déroule dans plusieurs lieux: trois au minimum (Madian, Égypte, Élim), peut-être quatre (si
l’on ajoute l’Horeb, où se déroule l’épisode du buisson ardent) et même cinq (si l’on ajoute la
maison de Ragouel), voire davantage.
La pièce comportait-elle un chœur? Aucun vers lyrique n’a subsisté. L’hypothèse la plus
fréquente est que le chœur aurait été constitué par les filles de Ragouel (au nombre de six).
Mais peut-être la pièce ne comportait-elle pas de chœur.
Combien fallait-il d’acteurs? Trois suffisent, selon Jacobson. Mais il a pu y en avoir quatre. Le
théâtre hellénistique a connu une inflation du nombre d’acteurs.
2) Théâtre juif: la Passion du Christ du Pseudo-Grégoire de Nazianze
a) Ce texte comprend 2602 vers iambiques. Il est attribué à Grégoire le Théologien (Grégoire
de Nazianze). Il a été publié en 1542 à Rome: cette édition est mauvaise.
59
Ce texte a-t-il été réellement écrit par Grégoire de Nazianze? Son authenticité a été mise en
doute dès la fin du XVIe siècle, car un homme aussi sérieux, aussi important que Grégoire ne
saurait être l’auteur de cette «futilité» qui n’est qu’un centon d’Euripide; certains arguments
stylistiques sont aussi pris en compte pour refuser cette attribution. À la fin du XVIIe siècle et
jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, on considère que ce texte est bien de Grégoire de Nazianze.
La première édition critique est établie par un Allemand qui travaille en France, F. Dübner,
en 1848. Il se prononce contre l’authenticité. C’est d’ailleurs l’opinion majoritaire, mais
André Tuilier, auteur du volume de «Sources Chrétiennes» en 1969, est favorable à
l’authenticité, car les vingt-cinq manuscrits sont unanimes sur ce point. André Tuilier avait
consacré sa thèse à Euripide. Sa conviction est que «si ce n’est pas Grégoire qui est l’auteur,
c’est quelqu’un qui ressemble beaucoup à Grégoire». De plus la pièce est sûrement ancienne:
en effet Euripide n’est pas cité dans la tradition médiévale, mais dans la tradition des
citateurs antiques et des papyri. Romanos le Mélode, qui vivait au VIe siècle, fait allusion à
cette pièce. Elle est forcément l’œuvre d’un penseur, d’un théologien et d’un artiste:
pourquoi pas Grégoire? Condisciple du futur empereur Julien, Grégoire de Nazianze était un
ami de Basile, évêque de Césarée de Cappadoce, frère de Grégoire de Nysse. Il avait été élu
évêque de Nazianze. C’est un notable de Cappadoce, un érudit, un philosophe, un grand
poète, dont on possède environ dix mille vers, en particulier un poème intitulé Sur ma vie,
autobiographie en vers, texte extrêmement intéressant mais très difficile.
Depuis l’édition princeps, le titre est Χριστὸς πάσχων ou Christus Patiens (en latin), c’est-àdire Christ souffrant.
Le genre littéraire est le «centon». Au départ le «centon» est un vêtement fait de morceaux de
vêtements récupérés. Près de la moitié des vers proviennent de pièces d’Euripide: Hécube,
Oreste, Hippolyte, Médée, Les Troyennes, Rhésos et Les Bacchantes, qui sont les pièces les plus
lues à l’époque, mais aussi d’Eschyle: Agamemnon et Prométhée, et de Lycophron: Cassandre. Il
y aurait même un vers d’Homère: le vers 2127 de la Passion du Christ viendrait d’Homère,
Iliade, III, 342; mais le parallèle est ténu, et d’ailleurs ce rapprochement est une erreur
d’André Tuilier, car un hexamètre dactylique ne peut pas être transformé en trimètre
iambique. En revanche aucun vers ne provient de Sophocle.
Cette pièce commence par un prologue de trente vers, qui a un sens et une portée
dogmatiques, qui présente les souffrances de la Vierge Marie au moment de la Passion. Les
personnages sont Marie, Jean et le chœur des femmes. Mais cette «préface» ne fait pas partie
de la pièce.
La Passion du Christ est en fait une trilogie. Ressemble-t-elle aux trilogies grecques classiques?
On n’en sait rien. Cette trilogie comprend:
- Passion et mort du Christ (vers 1-1133);
- Christ au tombeau (vers 1134-1905);
- Résurrection (vers 1906-2602).
Le contexte général est celui d’une part du refus du théâtre par les chrétiens; il n’existe pas
d’autre pièce chrétienne à l’époque patristique; d’autre part de la culture grecque considérée
comme «propaideia», c’est-à-dire préparatoire à la culture chrétienne; la culture classique
serait préchrétienne, mais en fait ces deux éléments sont contradictoires.
60
b) Analyse des vers 501-515. Ils sont prononcés par la Vierge Marie, nommée ici Θεοτόκος
(«Théotokos»), c’est-à-dire «Celle qui enfante Dieu». Marie est la mère de Dieu: cette
affirmation se trouve ailleurs sous la plume de Grégoire de Nazianze bien avant les Conciles
qui l’ont affirmé.
Tous les vers ne proviennent pas d’Euripide. C’est en quelque sorte un «demi-centon», ce qui
est très surprenant. Mais il est vrai que le «centon» n’est pas quelque chose de «mécanique».
C’est beaucoup plus créatif qu’on ne le croit généralement. Pour les éditeurs d’Euripide, il est
très intéressant de consulter Grégoire de Nazianze pour ne pas «délirer» dans leurs
corrections au texte grec!
3) Questions
En réponse à une question, M. Dorival précise que l’on ne sait rien de la tragédie
hellénistique.
M. Jean-Victor Vernhes demande si l’on a pu écrire du théâtre destiné uniquement à la
lecture. M. Dorival répond qu’on l’a beaucoup dit de Sénèque. Quand on redonnait Eschyle,
Sophocle, Euripide, qui ont souvent été représentés, cela se faisait peut-être sous forme de
lecture publique, mais à vrai dire, on n’en sait rien.
IV
Théâtre et rituel en Inde
par Sylvain BROCQUET, Professeur de linguistique et littérature comparée (AixMarseille I)
(Note: M. Brocquet a fourni aux stagiaires un document recto-verso,comprenant notamment des
tableaux, des définitions, une bibliographie,que nous avons utilisés.)
Introduction
Le théâtre indien est à la fois riche et prolifique. Il est méconnu en occident, ce qui n’a pas
toujours été le cas.
En 1905, Guillaume Apollinaire fait cadeau à Pablo Picasso d’un poème, dont il existe deux
versions, la seconde annulant la première. Ce poème comprend deux quatrains. Il est intitulé
Sakountala. Cette seconde version commence ainsi: «Quatre étoiles tournant aux cieux / Se
ressemblent de même entre elles…». Sakountala est l’héroïne d’une pièce de théâtre du poète
Kālidāsa intitulée Sakountala au signe de reconnaissance, qui date du IV° ou du V° siècle après
Jésus-Christ. Elle a été traduite en 1789 par le savant anglais William Joyce. Goethe en a eu
connaissance et en a dit: «C’est la plus belle œuvre littéraire que je connaisse». Cette œuvre
connaît un grand rayonnement au XIX° siècle. Les écrivains romantiques de l’Europe entière
l’ont admirée. C’est l’œuvre sanskrite la plus connue en occident.
61
Plan de l’exposé:
I - Aspects historiques du théâtre indien.
II - Les caractéristiques du théâtre indien.
III - Les mythes de fondation.
IV - La théorie qui comprend deux aspects:
- structuration du geste théâtral;
- théorie du «rasa», élément le plus important de l’esthétique indienne.
V - Le théâtre, en Inde, est l’équivalent d’un sacrifice, d’un rituel. Il en a les mêmes effets,
qu’il s’agisse du cosmos ou du salut individuel.
I) Historique du théâtre indien. Le répertoire
Le répertoire est prolifique. Pendant une période relativement brève, du I° au X° siècle après
Jésus-Christ, on connaît plus de trois cent soixante pièces, dont plusieurs dizaines sont
«représentables», les autres se présentant sous forme de fragments. Il est souvent difficile de
dater ces textes. L’«Âge d’Or» va du I° au V° siècles. Les plus anciens textes datent des I° ou
II° siècles après Jésus-Christ. Il n’y a aucun texte au III° siècle, ni au VI°. Au IV° siècle, il y a
deux auteurs importants: Sūdraka et Kālidāsa; ce dernier est l’auteur de Sakountalā au signe de
reconnaissance, le chef d’œuvre du théâtre indien. On peut citer d’autres auteurs: au VII°
siècle Harşavardhana, qui est l’auteur de trois pièces, dont deux ont été publiés dans le
volume de la «Pléiade» consacré au théâtre de l’Inde (qui rassemble dix-huit pièces); au VIII°
siècle Bhavabhūti. À partir des X°-XI° siècles, on peut parler d’une relative décadence, du
moins dans l’état actuel de nos connaissances.
Quelques exemples de pièces de théâtre: au II° siècle après Jésus-Christ, Ūrubhańga (Les
Cuisses brisées), attribué à Bhāsa; au IV°-V° siècles après Jésus-Christ, Abhijñānaśakuntala
(Sakountalā au signe de reconnaissance) de Kālidāsa, qui raconte l’histoire de Sakountala élevée
dans la forêt par un ascète et qui peut faire penser à Pelléas et Mélisande de Maurice
Maeterlinck (où l’on retrouve l’histoire de l’anneau); au VII° siècle, Ratnāvalī de
Harşavardhana, qui est une espèce de comédie.
Le théâtre est un art de cour, patronné par les rois. Il exalte la souveraineté. Or, aux X°-XI°
siècles, à cause des invasions successives, les royaumes hindous disparaissent ou du moins
sont amoindris. La culture persane remplace la culture hindoue, surtout dans le Nord de
l’Inde. Au XX° siècle, on écrit encore en sanskrit, mais ce sont des jeux de lettrés, d’érudits.
Toutefois, des éléments antiques subsistent dans le théâtre d’aujourd’hui. Dans le Kerala,
état le plus au Sud de l’Inde, deux traditions sont encore vivantes: la tradition du Kathakali,
qui remonte au VI° siècle, et celle du Kuṭṭiyatam du X° siècle, héritage de pièces en sanskrit
dans la langue d’aujourd’hui, qui est proche du Tamoul.
On joue un seul acte d’une pièce, mais on l’enrichit. Une pièce peut être représentée sur cinq
ou six jours, avec des interruptions. On peut comparer ces pièces aux pièces les plus longues
de Shakespeare. Pour Lyne Bansat-Bourdon, si l’on voulait comparer le théâtre indien, qui
associe texte, danse et musique, à quelque chose en Occident, il faudrait penser à l’opéra
baroque.
L’auteur est souvent un protégé du roi. Le prologue place la pièce sous la protection du roi et
lui adresse des compliments. À la fin de la pièce, l’auteur exprime des vœux pour le roi.
Les représentations ont lieu à la cour, au palais royal. Les sujets ont souvent trait à la
problématique de la royauté; par exemple: qu’est-ce qu’un bon roi? Le personnage principal
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est souvent un roi. Plusieurs auteurs de ces pièces sont des rois (On peut citer notamment
Śūdraka). Sont-ils eux-mêmes écrivains? Ou bien avaient-ils des «nègres»? Un roi doit être
écrivain et grammairien. Il doit être cultivé et même être un fin lettré: pour cela, il doit
posséder les soixante-quatre formes d’art.
II) Caractéristiques principales du théâtre indien
1) Il existe une très grande variété générique. Les traités recensent dix genres principaux,
auxquels il faut ajouter dix genres secondaires. Les plus courants sont:
a) nātaka: drame noble, mais pas tragique (le dénouement est heureux), le plus noble des
genres dramatiques, mettant en scène des dieux ou des héros du temps passé, empruntés à
une épopée, Mahābhārata, Rāmāyaņa, Purāņa.
b) prakaraņa: «comédie de mœurs», mettant en scène des hommes au noble caractère. Le
personnage principal est toujours un roi (et son entourage), mais un roi humain, c’est-à-dire
qu’il n’est ni un dieu ni un héros d’épopée. Le sujet est souvent emprunté à la Grande Histoire
(Bŗhatkathā) de Guņādhya, grand cycle narratif perdu mais connu à travers ses imitations. On
y trouve aussi des scènes que l’on pourrait qualifier de «passages de vaudeville».
c) nātikā: «comédie de harem», proche du prakaraņa, qui s’inspire également de la Grande
Histoire (Bŗhatkathā) de Guņādhya. Il n’est pas toujours facile de distinguer nātikā et
prakaraņa; c’est le prologue qui indique auquel des deux genres appartient la pièce.
d) prahasana: «farce satirique», comédie bouffonne, comme celle de Mahendravarman qui
met en scène des moines gourmands, cupides, peureux, veules, dont l’un est bouddhiste,
mais il se moque aussi des brahmanes.
e) ańka: pièce en un acte.
2) Il n’y a pas de tragédie. Le dénouement heureux est nécessaire. Toute pièce est
l’expression et l’exaltation de l’ordre parfait de l’univers («dharma»). La pièce non seulement
dit cet ordre mais l’enseigne. La leçon serait sans valeur si le dénouement était malheureux.
Tout le théâtre est didactique, accomplit une œuvre édificatrice. C’est différent de la théorie
d’Aristote, pour qui c’est la vision de la souffrance qui remplit la fonction didactique.
Il y a quatre âges:
- l’âge parfait;
- deux âges intermédiaires: les héros essaient de rétablir l’ordre;
- l’âge contemporain («âge de Kali»): le pire des quatre!
La fonction du roi est de faire régner l’ordre, d’établir une bonne relation entre les dieux et le
monde par l’intermédiaire des sacrifices. Le rituel ne peut se développer que si l’ordre social
est respecté. Il faut que certains offrent des sacrifices, que d’autres les effectuent. Le roi, par
l’exercice de l’autorité, doit rétablir le dharma, dont il est le garant. Le théâtre joue un rôle
comparable. Le roi est l’appareil répressif, le théâtre est l’appareil idéologique.
Pour les Indiens, l’univers perçu par les sens est une illusion. Les dieux recouvrent la réalité
d’un «voile» qu’il faut déchirer, la Māyā. Pour les spectateurs, le dénouement a la fonction
d’un dévoilement pour que la vérité soit révélée.
3) Hétérogénéité de chaque pièce.
a) Hétérogénéité stylistique. Chaque pièce comporte des passages en vers très savants,
raffinés, dans lesquels sont décrits l’univers, les impressions et sentiments, et des passages en
prose, plus simples, qui servent au déroulement de l’intrigue.
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b) Hétérogénéité linguistique. En Inde, la langue est associée au statut. Dans une pièce de
théâtre, il peut y avoir trois ou quatre langues différentes suivant le statut social des
personnages. Le roi, le brahmane, les ministres s’expriment en sanskrit, la reine dans une
autre langue (car les femmes n’ont pas le droit de s’exprimer en sanskrit), les serviteurs dans
une autre, le bouffon (qui est un brahmane dégénéré) dans une autre langue encore.
c) Hétérogénéité générique. Dans beaucoup de pièces on trouve des passages «nobles» qui
racontent les exploits des rois et des «passages de vaudeville» dans lesquels on verra par
exemple le roi qui veut avoir une aventure avec une servante. On trouve le même mélange
de genres chez Shakespeare ou dans le drame romantique.
4) Art complet au service d’un «spectacle total». Il faut faire «voir et entendre». Ce théâtre est
à la fois littéraire, gestuel, musical, chorégraphique. Le texte n’est qu’une partie d’un
ensemble.
5) Emprise extrêmement importante de la théorie. Le Nāţyaśāstra (attribué à Bharata) est un
ensemble de prescriptions compilé au II° siècle. Toutes les œuvres s’y réfèrent et le
respectent strictement. Il y a beaucoup de scènes de «théâtre dans le théâtre», de scènes de
«critique littéraire», au cours desquelles on constate que telle scène est conforme au
Nāţyaśāstra et telle autre non.
6) La théorie du «rasa». Au-delà du théâtre, cette théorie concerne toutes les formes d’art. Le
«rasa» est la «saveur» d’une œuvre d’art, quelle qu’elle soit. Le théâtre est le modèle de toute
création esthétique. En Occident, on considère que le théâtre est une partie de la littérature.
En Inde, au contraire, la littérature est une partie du théâtre.
III) Les mythes de fondation
Le mythe de la fondation comprend plusieurs épisodes.
Le premier livre du Nāţyaśāstra est consacré à l’une des deux légendes de fondation, le
dernier livre à la suite de cette légende. Il s’agit de la légende de l’installation du théâtre sur
terre.
Nahuşa est invité chez les dieux. Un festin est donné. Les dieux aiment le théâtre et en font.
Au cours de ces festivités, Nahuşa assiste à une représentation théâtrale qui l’émerveille, et
qui suscite chez lui le souvenir qu’il a déjà vécu cette expérience quand il avait quatre ou
cinq ans. En effet, enfant, il venait chez Purūravas, ex-époux d’Urvaśi. Désespéré, Purūravas
est devenu fou et a abandonné le théâtre. Nahuşa demande aux dieux de faire descendre le
théâtre sur terre.
Dans l’Inde ancienne, il y a quatre catégories d’hommes: d’une part les brahmanes, les
guerriers et les paysans qui constituent les Āryas, qui sacrifient aux dieux, et d’autre part les
śudras, qui sont des serviteurs, qui ne participent pas aux sacrifices, qui n’ont pas le droit de
parler sanskrit.
Les dieux confient aux cent fils de Bharata, les Bharatides, la mission de descendre sur terre
et d’enseigner le théâtre aux hommes. Les cent fils ont créé la comédie et se sont moqués des
sages qui les ont condamnés à descendre sur la terre, pour y être des śudras. Ils pourront
redevenir brahmanes. Sur terre, ils s’unissent à des femmes et engendrent une lignée
d’acteurs. Les acteurs sont des śudras. Ils peuvent donc jouer tous les statuts sociaux.
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Ce mythe apparaît comme l’accomplissement d’un dessein du dieu créateur Brahmā qui
n’avait pas été achevé et qui est exposé au premier livre: faire que les hommes se comportent
comme Rāma (héros d’épopée qui incarne la justice, le respect du dharma).
Ceci se passe au deuxième âge du monde. Le dharma se dégrade. Les hommes se
comportent mal et renaissent śudra. Ils sont éternellement victimes de l’illusion. Ils ne
peuvent plus étudier. Donc ils ne peuvent pas progresser. Il faut donc les éduquer, les
édifier: le seul moyen, c’est le théâtre, qui est à la fois didactique et divertissant («apprendre
en s’amusant» comme dans… la pédagogie moderne!). Les śudras n’ont pas accès aux Vedas.
Il faut un cinquième Veda, accessible à tous les hommes, pour restaurer le dharma.
Les dieux disent: «Il faut connaître le malheur pour faire du théâtre». Donc les dieux sont
incompétents. Il faut s’adresser aux hommes par l’intermédiaire des fils de Bharata. Le
théâtre ainsi créé se développe d’abord chez les dieux pendant deux générations humaines
(ce qui n’est rien pour les dieux).
Brahmā fait appel à Bharata pour fixer le savoir théâtral dans un traité d’art dramatique. Siva
va lui recommander d’introduire la danse. L’épouse de Siva va introduire une danse d’un
autre type, une danse féminine. Le théâtre est d’abord transmis aux dieux. Les dieux euxmêmes écrivent. Brahmā est l’auteur de deux pièces de théâtre: Amŗtamanthana (Le Barattage
de l’ambroisie) et Tripuradāha (L’Incendie de Tripura). Les représentations ont lieu dans un
théâtre construit au ciel. Les acteurs sont les cent fils de Bharata et les apsaras, les nymphes
célestes. Puis Saravastī, déesse de l’éloquence et de la poésie, écrit Lakşmīsvayamvāra (Le
Mariage par libre choix de Lakşmī), joué par Urvaśi, qui commet un lapsus: au lieu de s’adresser
au dieu des dieux, être suprême, elle nomme l’humain dont elle est amoureuse, Purūravas.
Elle est alors chassée du ciel et rejoint sur terre celui qu’elle aime.
IV) Architecture du théâtre, du «nāţyaveda» («savoir dramatique»)
Le théâtre est le cinquième véda, tiré des quatre premiers. Le théâtre implique que les êtres
connaissent le bonheur et le malheur. Les dieux ne peuvent donc pas enseigner le théâtre
puisqu’ils ne connaissent que le bonheur.
1) Chacun des quatre hymnes védiques est la source d’un aspect du théâtre.
Le «nāţya» (c’est-à-dire art dramatique) est constitué de la représentation (prayoga) et du
texte (itivŗtta). La représentation associe danse, chant, musique instrumentale et jeu de
l’acteur.
Le jeu de l’acteur associe:
a) le jeu corporel (avec des gestes très précis),
b) la diction,
c) les costumes et le maquillage,
d) le jeu émotionnel (source du rasa).
Il n’y a pas de masque. C’est un maquillage extrêmement important qui permet de
reconnaître les personnages.
Il y a ce qui s’apprend et ce qui ne s’apprend pas. Ce qui ne s’apprend pas, c’est le «sattva»,
c’est-à-dire le «jeu émotionnel». Le «sattva», c’est en fait la vérité, la présence, c’est ce qui va
différencier le grand acteur de l’acteur moyen, et ça ne s’enseigne pas.
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2) Théorie du «rasa».
a) Le «rasa» est la base unique de la poésie, de la création artistique en général. Le mot «rasa»
désigne en fait le suc d’une plante; d’où, par métonymie, la saveur de cette plante. Il peut
désigner tout liquide, et même l’eau. Dans le Nāţyaśāstra, en libérant les eaux emprisonnées
par un serpent, Indra a également libéré les différentes saveurs esthétiques (rasa), les arts.
Pour la signification du mot «rasa» dans l’ordre esthétique, cf Louis Renou, qui met en
évidence le phénomène de transfert, d’identification.
Le mot «rasa» désigne l’état subjectif du spectateur, par lequel les émotions endormies sont
réveillées. Le spectateur reçoit en lui l’expérience émotionnelle originelle du poète. Le «rasa»
implique un phénomène d’identification, de transmission.
Le «rasa» n’est pas source de plaisir immédiat. Il faut une distanciation qui permette de
sentir que cette émotion est universelle, propre à toute l’humanité. C’est différent de la
«catharsis» aristotélicienne, par laquelle le spectateur s’affranchit des passions en les voyant
développées sur scène et la souffrance qu’elles procurent, qui lui inspirent terreur et pitié.
Le mot «rasa» désigne le plaisir littéraire, le plaisir esthétique que procure le partage d’une
émotion, mais vécue comme un phénomène universel. D’où la dimension didactique du
théâtre car le spectateur accède à l’universel.
b) Le «rasa» se décline en huit «rasa». D’après le rasasūtra (Nāţyaśāstra, VI), «Le rasa naît de la
combinaison des déterminants, des conséquents et des transitoires».
C’est un phénomène de «cristallisation», associé à la théorie de la transmigration des âmes:
chaque être a en lui une imprégnation psychique, la vāsanā (parfum), qui est enfouie en lui
par son existence présente et par ses existences antérieures, qui est inconscient, susceptible
d’être «actualisé» ou «cristallisé» par l’œuvre d’art en un état psychique stable. Les émotions
constituent une sorte de trésor psychique dormant qui peut être actualisé par le théâtre,
transformé en «émotion cristallisée». C’est une rencontre qui va provoquer un choc
émotionnel, une expérience existentielle. Cette cristallisation est provoquée par une
combinaison d’éléments complémentaires :
Les déterminants (par exemple pour le rasa érotique, le déterminant est l’homme ou la femme,
l’être aimé).
Les conséquents (manifestations de l’émotion) sont une codification des gestes et des
inflexions de la voix. Ils sont de deux sortes: les manifestations que l’on produit parce qu’on
sait les faire, on les a apprises, et les manifestations que l’on produit spontanément.
Les transitoires sont des émotions associées à l’émotion dominante. Par exemple, la jalousie
va être associée au sentiment amoureux. Il y a donc une sorte de nœud émotionnel. Les
transitoires sont à la base des intrigues. S’il s’agit d’une intrigue amoureuse, il y a une espèce
de «carte du tendre»: rencontre, coup de foudre, séparation, union impossible, puis
possible…
V) Théâtre (représentation théâtrale) et rituel (en particulier rituel de salvation)
Le théâtre est l’équivalent d’un sacrifice. Le sacrifice est l’acte par lequel les humains
entretiennent un rapport avec les dieux qui permet à l’univers de perdurer. Les sages
considèrent le théâtre comme un acte qui plaît aux dieux à l’égal du sacrifice. Le théâtre est le
cinquième Veda, qui permet aux humains d’accéder à la vérité. Il est d’ailleurs le lieu d’un
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rituel. L’hommage que l’on rend aux dieux avec des parfums et des fleurs ne leur plaît pas
autant que le théâtre.
Les hommes, devenus śudras, ne pouvaient plus sacrifier. Le théâtre a été inventé pour
combler ce manque. C’est un hommage aux dieux. Toute représentation commence et se
termine par une bénédiction. Le théâtre, à l’origine, est une célébration du roi des trente-trois
mille dieux, Indra.
1) Dans le mythe de fondation, les représentations théâtrales devant les dieux ont eu lieu lors
d’une fête en l’honneur du dieu des dieux. À la fin de la représentation, Indra donne en
récompense aux acteurs son bâton, symbole de l’axe du monde.
2) Le théâtre (la salle de spectacle) est l’équivalent d’un temple (dans le mythe de fondation,
c’est le même architecte, Viśvakarman, qui a construit le théâtre et le temple). Le théâtre est
une représentation miniature de l’univers: il y a quatre piliers qui représentent les quatre
catégories sociales. La salle, comme la pièce de théâtre, représente le monde. Le théâtre
s’adresse à tous les hommes.
3) L’organisation de la représentation:
a) les dix-sept préalables: on commence par quelque chose de purement rituel pour aboutir
petit à petit au théâtre; c’est un chemin initiatique, comme celui du fidèle qui, dans le temple,
approche progressivement du dieu;
b) les deux prologues: le premier a une fonction rituelle, est assimilé à un sacrement (on
demande aux dieux leur bénédiction). Ce sacrement est approprié à la dégustation du rasa,
qui est offerte aux spectateurs. La représentation est donc perçue comme un sacrifice: on dit
le monde.
Le théâtre est révélateur du caractère illusoire de la réalité, puisqu’on peut la jouer sur scène.
Ce qui se passe sur la scène est une illusion. Donc ce qui se passe dans le monde est une
illusion. On trouve une conception analogue dans le théâtre baroque, chez Shakespeare (par
exemple dans As you like it). Donc, en allant au théâtre, le spectateur va avoir un choc et se
rendre compte du caractère illusoire de la vie. En effet il ne sait pas que le monde est illusion,
et le rôle du théâtre est de dissiper cette ignorance. Le théâtre est le monde, mais aussi la
révélation du caractère illusoire du monde. Indra, en tant que maître du théâtre, va libérer la
conscience de l’illusion. Les émotions antérieures vont disparaître dans la contemplation de
l’œuvre d’art. On fait une expérience psychique de nature mystique.
Le théâtre est à la fois un lieu et un temps initiatiques. C’est le lieu d’une initiation collective
et individuelle, d’une salvation, d’un processus psychique salvateur, mis en valeur par
exemple dans Sakountalā. Sakountalā est une princesse élevée dans un ermitage par un
ascète. Le roi passe, l’aime, lui remet un anneau. Elle est enceinte. L’ascète l’envoie à la cour,
mais elle perd l’anneau et se fait chasser… Plus tard, un pêcheur est retrouvé avec cet
anneau. Le roi voit l’anneau et se souvient de Sakountalā. Il retrouve finalement sa femme et
son fils : son esprit a été pris dans les rets de l’illusion, puis s’en est libéré – d’où le
dénouement heureux.
Le rasa réveille des états émotionnels dormants, souvenirs de vies antérieures. Il provoque
l’oubli du présent, l’abolition du temps. La perception immédiate nettoie le miroir de l’âme.
C’est un dépassement de l’ego, de la subjectivité, du spatio-temporel, pour accéder à
l’universel. L’expérience du rasa est purifiante. C’est bien une «catharsis», mais pas au sens
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d’Aristote. Le spectateur est identifié à l’univers tout entier. C’est une expérience à la fois
psychique et mystique, au-delà de l’esthétique. Le théâtre indien est relié à toute une
conception philosophique du monde et de l’homme dans le monde.
V
Les espaces scéniques dans le théâtre grec et dans le
théâtre romain
par Jean-Charles MORETTI, Directeur de recherche CNRS-IRAA (Lyon)
Que peuvent nous apprendre l’archéologie et l’architecture sur les pièces
de théâtre antiques?
I - LA GRÈCE
1) L’origine du théâtre grec.
a) L’origine du théâtre grec se situe à l’époque archaïque, au VI° siècle avant Jésus-Christ, à
une époque où se définissent la périodicité et les règles des grands concours. Les épreuves
«musicales» (c’est-à-dire liées aux Muses) se déroulaient dans les théâtres. Les épreuves
gymniques se déroulaient dans les stades. Les épreuves hippiques, dans les hippodromes.
À l’époque archaïque, sont institués quatre grands concours sacrés, «stéphanites» (ainsi
nommés car le prix était une couronne, en Grec: «στέφανος»):
- à Olympie, concours uniquement sportifs, tous les quatre ans, on ne sait pas à partir de
quand;
- les Pythia de Delphes, tous les quatre ans, à partir de 582 avant Jésus-Christ;
- à l’Isthme, tous les deux ans, à partir de 582 avant Jésus-Christ;
- à Némée, tous les deux ans, à partir de 573 avant Jésus-Christ.
Les Panathénées se déroulaient à Athènes à partir de 566. Le premier concours de tragédie a
eu lieu en 534 à Athènes.
Pour tous ces concours réguliers, on construit des édifices spécifiques: stades, théâtres,
hippodromes… On assiste au développement d’une «architecture de spectacle».
b) Les concours musicaux commençaient par des épreuves de hérauts et de trompettes. Il
fallait qualifier le héraut qui annoncerait les noms des concurrents et ceux des vainqueurs et
le trompettiste qui annoncerait le début des épreuves. Les Grecs n’ont retenu que deux
instruments de musique pour les concours: la cithare, instrument d’Apollon, et l’aulos,
instrument double avec deux chalumeaux en bois, avec double anche (dont le son était donc
plus proche de celui du hautbois que de la flûte): le musicien soufflait alternativement dans
un des deux tuyaux puis dans l’autre. Il y avait des citharèdes, qui chantaient en
s’accompagnant eux-mêmes à la cithare; des chanteurs, les aulodes, qui chantaient en étant
accompagnés par des aulètes (qui jouaient de l’aulos); des rhapsodes, qui psalmodiaient des
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poèmes, notamment d’Homère, sans accompagnement musical, des auteurs d'éloges, de
poèmes épiques ou parodiques.
Il y avait des épreuves de chœur (avec aulos), en particulier des dithyrambes, par cinquante
personnes (jeunes gens ou hommes), ce qui explique les dimensions des orchestras.
Puis des «drames»: tragédies et drames satyriques, comédies, interprétés par des acteurs et
par un chœur (avec un aulète).
c) Au VI° siècle, les Grecs construisent, pour tous ces concours, des édifices: les «theatra»
(«θέατρον» au singulier, «θέατρα» au pluriel), dont le nom signifie «observatoires». Ce n’est
pas le lieu où l’on joue des pièces de théâtre, mais le lieu d’où l’on voit, le lieu où sont
installés les spectateurs, alors que le «stadion» («στάδιον») est bien le lieu où se passent les
concours sportifs et l’hippodrome («ἱππόδρομος») celui où se passent les courses de
chevaux. Sur les vases du VI° siècle, on ne trouve pas de représentation de théâtre, mais on
trouve en revanche une représentation de courses de chars lors des funérailles de Patrocle;
cette coupe représente des gradins où sont assis des spectateurs.
À partir du V° siècle avant Jésus-Christ, les vestiges de théâtre sont visibles. On n’a plus le
bâtiment de scène qui était en bois. Ces bâtiments se concentrent en Attique, à Athènes, dans
une partie de la Béotie et au nord-est du Péloponnèse. Athènes est à l’origine du succès du
théâtre. De nombreux théâtres nous sont connus par des vestiges et par des inscriptions.
2) Présentation de deux théâtres: Thorikos, Euonymon.
a) À Thorikos («Θορικός»), se trouve le théâtre classique le mieux conservé du monde grec.
Construit vers 450 avant Jésus-Christ, il comporte une orchestra à peu près rectangulaire,
plus longue que profonde, des gradins et un mur de soutènement. À cette époque, on choisit
une pente, plus précisément un lieu de rupture de pente, pour que l’orchestra soit
horizontale, sinon il faut un mur de soutènement.
L’orchestra est bordée par les gradins, mais aussi par un temple de Dionysos. Il y a
également un autel dédié au même dieu. L’orchestra est donc le «parvis» du temple. Le
bâtiment de scène était en bois, démontable. Il était monté pour chaque spectacle.
Il y avait aussi une «scénothèque» où l’on stockait peut-être le bâtiment de scène démonté.
b) Le théâtre d’Euonymon, près de l’aéroport d’Athènes, a été découvert récemment.
L’orchestra est rectangulaire. Les gradins sont en trois volées rectilignes, avec des angles
droits. Le bâtiment de scène est plus tardif, d’époque hellénistique.
3) Les caractéristiques des théâtres classiques:
On connaît une dizaine de ces théâtres dans la région d’Athènes, ce qui permet de définir les
caractéristiques du théâtre classique:
- L’orchestra est plus longue que profonde.
- Il y a une ou plusieurs volées de gradins rectilignes.
- Il n’y a pas de bâtiment de scène en pierre. Le bâtiment de scène est en bois.
- Il n’y a jamais d’autel au centre de l’orchestra. On en trouve quelquefois un en bordure.
- Il n’y a jamais d’orchestra circulaire. L’orchestra est toujours rectangulaire ou en forme de
polygone.
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4) À Athènes.
a) C’est le théâtre le plus anciennement connu par les textes. C’était un théâtre en bois (en fait
des «échafaudages») sur l’Agora, qui s’est effondré vers 500. Il se trouvait au-dessus du
sanctuaire de Dionysos Éleuthéreus, sur les pentes sud de l’Acropole. Mais il n’a jamais fait
partie du sanctuaire (Cf Pausanias). Il était placé entre deux sanctuaires, ceux de Dionysos et
d’Athéna. Il servait pour les Panathénées et pour les Dionysies. Il date du V° siècle.
On le connaît mal par les vestiges, parce qu’il était en grande partie en bois et qu’il a été
recouvert par d’autres théâtres de l’époque hellénistique et impériale. On ne connaît que des
gradins de calcaire rectilignes. Des inscriptions figurent sur ces gradins: elles montrent qu’ils
étaient réservés à certains magistrats ou prêtres, ce qui indique une société ordonnée en
fonction du statut religieux ou social. Il reste aussi de nombreux fragments d’encastrements,
de caniveaux. Les fouilles actuelles montrent qu’il y avait des gradins en bois en plus des
gradins en pierre.
b) Au V° siècle avant Jésus-Christ, les images sont d’un intérêt médiocre. Aucune ne montre
l’architecture, très peu montrent des spectacles. À Athènes, quatre vases seulement montrent
des chœurs de tragédies. Un vase représente peut-être un chœur des Oiseaux d’Aristophane.
Il existe quelques représentations de troupes de drames satyriques. On ne connaît qu’une
seule représentation d’architecture théâtrale sur un petit vase attique qui montre deux
spectateurs assis sur des chaises et un acteur sur une estrade, jouant Persée et portant un
justaucorps qui le fait paraître nu. Le vase de Pronomos, du nom d’un aulète thébain, montre
l’ensemble des acteurs et du chœur satyrique autour des personnages de Dionysos et Ariane.
À partir de la fin du V° siècle, on connaît de très nombreuses figurines, dont le «Groupe de
New York», trouvé dans une tombe attique. Elles portent des costumes de comédie et sont
intéressantes pour la gestuelle, mais ne donnent aucune indication sur les espaces scéniques.
c) Tous les textes de théâtre que nous possédons ont été écrits pour une seule représentation,
par quelqu’un qui avait sous les yeux le théâtre où ils allaient être joués et qui en connaissait
les possibilités scéniques. D’où l’intérêt de réfléchir sur ces textes, en particulier sur un texte
des Thesmophories d’Aristophane (vers 395): «Dès qu’ils [les spectateurs] quittent les
échafaudages…». Donc à cette époque les spectateurs sont encore assis sur des gradins en
bois («ἲκρια»). Vraisemblablement le premier rang de gradins était en pierre, les autres en
bois.
À Athènes, les gradins étaient sans doute disposés sur trois ailes. C’est en effet le plus grand
théâtre de l’Attique. L’orchestra était relativement vaste: on y accédait par des «πάροδοι». Le
bâtiment de scène était en bois et devait être démontable. On pouvait y créer trois ouvertures
(trois portes). Sa «couverture» était sûrement en terrasse (Cf le début d’Agamemnon
d’Eschyle: un veilleur est sur le toit. Cf aussi le début d’Ajax de Sophocle). On pouvait
tourner autour de ce bâtiment: les acteurs pouvaient donc entrer d’un côté et sortir de l’autre.
On en ignore la longueur. Il mesurait trois à quatre mètres de haut. C’était sans doute un
édifice très simple, mais deux machines lui sont associées:
- La «μηχανή» («mékhané»). Ce terme est assez vague et peut désigner toutes sortes de
«machines»: bélier, grue et naturellement la grue scénique. Cf La Paix d’Aristophane (vers
173-175): «Misère! C’est que j’ai peur sans rire. Hé! Machiniste («Ὤ μηχανοποιέ»), fais bien
attention, car je sens déjà une espèce de vent qui me tourne autour du nombril!…». Cf aussi
Antiphane, auteur comique du IV° siècle, dont on ne connaît que des fragments. À propos
70
des poètes qui n’ont plus rien à dire, Antiphane (189 K-A, PCG, II) écrit: «Ensuite, lorsqu’ils
[les poètes dramatiques] ne peuvent plus rien dire, mais qu’ils sont à bout de forces dans
leurs pièces, ils lèvent la machine («μηχανή») comme un doigt («δάκτυλος»), et cela suffit
aux spectateurs…» (En effet les sportifs levaient le doigt pour demander l’arrêt du combat
quand ils «n’en pouvaient plus»). Il existait une sorte de ressemblance entre cette machine et
un doigt: la «μηχανή» comprenait en effet un «bras» avec un contrepoids horizontal, associé
à un treuil. Seule une branche de la «mékhané» devait passer au-dessus du toit. On pouvait
lever ou baisser le bras et donc l’acteur qui y était installé.
- L’«ἐκκύκλημα» («ekkukléma», «eccyclème») était une machine qui montrait ce qui était
censé se passer à l’intérieur de la «σκηνή» («skênê»). Cf Les Acharniens d’Aristophane où
Euripide dit: «Je vais prendre l’eccyclème, mais je n’ai pas le temps de descendre». Pollux,
professeur de rhétorique à Athènes à l’époque de Commode, la définit ainsi, dans son
Onomasticon (IV, 127-128): «Podium élevé sur des poutres, sur lequel se trouve un trône. Il
montre les actions qui se sont accomplies en secret, dans les maisons.». Le mot «ekkukléma»
n’est utilisé que pour le théâtre. Il implique à la fois l’idée de faire tourner en rond, que ce
mouvement circulaire soit horizontal ou vertical, ainsi qu’un mouvement de l’intérieur vers
l’extérieur, comme l’indique le préfixe «ἐκ» ou «ἐξ» («hors de»). Donc on peut imaginer un
«ekkukléma» sur roulettes ou bien un plateau tournant sur lui-même ou faisant pivoter un
panneau. Ce dispositif était placé à chaque porte de la «σκηνή» (Ce principe a été repris par
Ariane Mnouchkine pour Les Atrides).
Dans ce type de théâtre, on ne peut pas masquer l’espace scénique, car il n’y a pas de rideau
de scène (Celui-ci n’apparaît que chez les Romains). Les éléments apportés ou enlevés le sont
soit par les acteurs soit par les membres du chœur. Sur un vase, on voit des satyres portant
les éléments d’un trône qu’ils vont monter sur l’orchestra. Chez Aristophane, on trouve des
allusions à des acteurs qui portent des éléments de décor sur l’orchestra.
d) À la fin du IV° siècle, les édifices sont de plus grande ampleur, comme par exemple le
«théâtre de Lycurgue» (achevé vers 325 avant Jésus-Christ), dont la construction a duré
longtemps et qui a remplacé le théâtre du V° siècle. Lycurgue a été loué d’avoir réussi à
terminer le chantier, mais quand a commencé la construction? est-ce à l’époque de Périclès?
ou plus tard? (Les fouilles en cours actuellement le montreront peut-être). La construction de
ce théâtre a sans doute duré quarante à cinquante ans. Les Athéniens parlaient de travaux
qui traînaient en longueur.
C’est un théâtre classique qui comprend des gradins en pierre et non en bois, semi-circulaires
et non rectilignes. L’orchestra est plus profonde que large: elle associe un cercle et un
rectangle. Il n’y a pas d’autel. À la base, se trouvent de très beaux trônes en marbre
pentélique. Les gradins ne sont pas de simples degrés: ils sont plus élaborés et en particulier
ils comportent des repose-pieds. Le bâtiment de scène avait sûrement un étage. Y avait-il des
colonnes? Derrière ce bâtiment, se trouvait un portique. Donc on ne pouvait pas tourner
autour. De chaque côté, des portes latérales permettaient de le traverser.
5) À Épidaure et à Délos.
Il n’y a pas de transformation à l’époque hellénistique.
a) À Épidaure, l’orchestra est circulaire. Toutefois le bâtiment de scène comporte deux
niveaux, avec un petit portique, devant la «σκηνή» («skênê»). Dans le «προσκήνιον»
(«proskênion»), se trouvent une porte centrale double et deux portes latérales. En bas, il y a
71
une colonnade avec des «πίνακες» («pinakes»), c’est-à-dire des tableaux peints, et un
«proskênion» de trois mètres de haut, auquel on accède par des rampes. À l’étage, un
plancher avec une partie couverte et une partie découverte accessible depuis l’extérieur.
L’étage comporte des baies donnant sur l’intérieur, visible de l’extérieur. L’action se passe
souvent dans l’orchestra, mais aussi un peu sur le toit du «proskênion».
Ce type de bâtiments va se développer en Asie Mineure, dans certaines colonies grecques, en
Égypte, à Alexandrie.
b) Le théâtre de Délos est achevé peu après le milieu du III° siècle avant Jésus-Christ. Le
«proskênion» est accessible par un escalier. L’orchestra est un demi-cercle outrepassé. Des
passages souterrains relient l’orchestra et le bâtiment de scène. Les acteurs jouent sur
l’orchestra et utilisent peu la terrasse du «proskênion».
II – LE THÉÂTRE LATIN (surtout le théâtre impérial)
1) Théâtre latin et théâtre grec.
a) L’architecte latin Vitruve vivait à la fin du I° siècle avant Jésus-Christ, au début de
l’époque augustéenne. Dans son De Architectura (livre V), il mentionne deux types de théâtre:
le «theatrum Graecorum» et le «theatrum Latinum», alors que, jusque là, on n’en connaissait
qu’un seul. Nicolas de Damas, contemporain de Vitruve, parle lui aussi de deux types de
théâtre: le théâtre grec et le théâtre romain. Dans ce cas, le «théâtre romain» est sans doute en
bois, et le «théâtre grec», en pierre, est sans doute le «théâtre de Pompée».
Dans la seconde moitié du II° siècle après Jésus-Christ, Pausanias décrit le théâtre d’Épidaure
(II, 27, 5). Lui aussi distingue deux types de théâtres. Pour lui, le «théâtre des Romains» est
un «théâtre remarquable» qui surpasse tous les autres par l’ornementation («κόσμος»). Mais,
pour «l’harmonie», quel architecte pourrait surpasser Polyclète?
Pour Vitruve, il s’agit non seulement d’une distinction morphologique, mais aussi d’une
distinction fonctionnelle (dans le type de spectacles) et d’une distinction sociale (en ce qui
concerne le public).
b) La distinction morphologique:
Le théâtre grec est plus harmonieux que le théâtre romain.
Chez les Romains, comme chez les Grecs, on part d’un cercle. Mais chez les Grecs on inscrit
dans ce cercle trois carrés, qui délimitent dans les gradins sept secteurs, à diviser en deux. La
tangente définit la limite du «proskênion». Le diamètre en définit la longueur. Les angles
définissent les escaliers, au nombre de huit. L’orchestra grecque est plus vaste que l’orchestra
romaine. La scène est plus en retrait. Seuls les acteurs jouent sur la scène.
Chez les Romains, quatre triangles équilatéraux, inscrits dans le cercle, permettent de définir
l’emplacement du front de scène, et l’estrade est plus profonde que dans le théâtre grec, car
tous les artistes sont sur scène. Et l’on trouve six secteurs et non sept dans les gradins. En
outre un bâtiment de scène est associé à la cavea. La possibilité de construire sur un terrain
plat n’est pas considérée comme caractéristique.
Vitruve n’insiste pas sur le fait que le théâtre latin est un monument unitaire, contrairement
au théâtre grec qui est composé de plusieurs bâtiments. Le «front de scène» comporte trois
72
colonnades superposées (mais Vitruve ne précise pas s’il s’agit du théâtre romain ou grec ou
des deux).
c) La distinction fonctionnelle et sociale:
Pour Vitruve, les spectacles romains et les spectacles grecs sont différents: le «theatrum
Latinum» présente, dans des théâtres temporaires en bois, des spectacles de type latin, en
langue latine, les «ludi Latini», qui sont différents des «ludi Graeci», ces derniers étant des
pièces adaptées du Grec, jouées, en langue grecque, par des acteurs grecs. Lors des jeux
séculaires augustéens, il y eut les deux.
Dans le théâtre grec, il y a deux lieux scéniques: l’orchestra et la skênê. Dans le théâtre latin,
il n’y en a qu’un: le «pulpitum», qui est une estrade basse devant le front de scène;
l’orchestra n’est pas utilisée par les artistes, mais par… les sénateurs, qui y ont des places
réservées! Ils sont assis sur des trônes en bois installés sur des gradins bas, séparés des autres
par une balustrade. Cf le théâtre de Sabratha.
D’après d’autres textes, notamment des textes de lois, en particulier la «Lex Julia theatralis»,
on sait que l’ensemble des gradins correspond à une répartition sociale très précise: de bas en
haut, les sénateurs, les chevaliers, les esclaves, les femmes tout à fait en haut. Les esclaves
sont mieux placés que les femmes!
Le théâtre latin dérive du théâtre grec. Dans l’évolution du théâtre grec en Italie du sud et en
Sicile, on peut voir comment s’est développé un théâtre différent qui se formalise dans la
définition de Vitruve.
2) «Préhistoire» du théâtre latin.
Aux VIII°-VII° siècles avant Jésus-Christ, le théâtre grec n’existe pas quand les Grecs
commencent à coloniser l’Occident. Les colons ne partent pas avec leur «image» du théâtre.
On sait néanmoins qu’à l’époque classique, existaient, dans certaines villes de l’Italie du Sud
et de Sicile, des types de spectacles différents de ceux qui se sont développés en Grèce. Mais,
à partir de l’époque classique, des théâtres sont construits en Grèce, en Italie du Sud, en
Sicile. Dans l’Orient grec, à l’époque hellénistique, on trouve des théâtres d’un type
comparable à celui d’Épidaure. Ce n’est pas ce type de théâtre que l’on trouve en Italie du
Sud et en Sicile, comme le montrent les représentations que l’on trouve sur les vases
phlyaques, produits à Tarente, Métaponte et Paestum: on y voit des scènes du théâtre
attique, avec des inscriptions en ionien-attique alors que ce sont des cités doriennes.
Des vases permettent des rapprochements avec des textes athéniens des V° et IV° siècles
avant Jésus-Christ:
- un vase produit à Tarente vers 380 avant Jésus-Christ, en relation avec Les Thesmophories
d’Aristophane;
- un cratère produit à Tarente en 380, qui montre des «chorégies», alors qu’il n’y a pas de
chorégie en Italie du Sud;
- un vase de Sicile, montrant un messager qui annonce à Œdipe la mort de son père.
D’autres vases permettent des rapprochements avec des textes écrits en Sicile ou en Italie du
Sud, en particulier un vase qui représente la naissance d’Hélène sortant d’un œuf: les acteurs
sont sur une estrade, avec une porte et une fenêtre; c’est une scène comique à partir du
mythe. Les estrades sont fréquentes: ce sont des estrades basses. Beaucoup de scènes sont des
parodies de tragédies, ce que l’on nomme des «hilaro-tragédies», qui sont propres à l’Italie
du Sud, de même que les mimes, alors qu’il y en a peu en Grèce.
73
En Grèce aussi, il y a eu des estrades pour des représentations ambulantes (Cf Platon, Lois,
VII, 817c. Contemporain de ces représentations, Platon les condamne: «N’allez pas croire que
nous vous laisserons venir chez nous, planter vos scènes et présenter des acteurs à la belle
voix…»). Ces spectacles se sont développés en dehors des concours. Les bâtiments de scène
représentés ont une estrade basse, lieu scénique principal, sur lequel débouchent des portes.
Ce développement des estrades basses avec un mur percé de portes et de fenêtres, c’est ce
que l’on trouve dans le théâtre latin.
Certains édifices en Sicile et en Grande Grèce présentent certaines caractéristiques du théâtre
latin de Vitruve, par exemple ceux de Ségeste ou de Solonte (en Sicile). À Ségeste, on trouve
une orchestra semi-circulaire. À Solonte, on trouve une orchestra bétonnée, une estrade basse
associée à un front de scène à trois portes avec des colonnes engagées doriques et ioniques.
Le théâtre grec en Italie du Sud et en Sicile donne naissance peu à peu au théâtre latin. Pour
arriver vraiment au théâtre latin, il faut encore qu’il y ait une cavea portée sur une structure
creuse, un bâtiment de scène accolé à la cavea, un front de scène à ordres dégagés et
superposés, ce qui apparaît pour la première fois à Pompéi.
Le rôle de Rome est relativement réduit dans la genèse du théâtre latin. Les pièces de théâtre
de Plaute et de Térence sont représentées sur des théâtres en bois, car le théâtre en pierre est
interdit par le Sénat au milieu du II° siècle. Les premiers théâtres en pierre datent du I° siècle
avant Jésus-Christ. On les connaît par Pline et par Ammien Marcellin, qui décrivent un
théâtre construit en 58 avant Jésus-Christ: ce théâtre, qui contenait quatre vingt mille places,
comportait trois rangs de colonnes en pierre, en bronze et en bois décoré.
Deux éléments nouveaux interviennent: le velum et le rideau de scène. Le velum apparaît en
69 avant Jésus-Christ. Cicéron parle du rideau de scène en 56 dans le Pro Caelio. C’est à Rome
que se développent le mime et la pantomime, qui sont les spectacles les plus importants de
l’empire romain.
Le théâtre en pierre à Rome n’apparaît qu’avec le théâtre de Pompée, sur le Champ de Mars,
lequel est associé à un énorme quadriportique; le bâtiment de scène a peut-être été en bois au
début. Il recevait les spectacles grecs.
Le théâtre de Marcellus est inauguré en 10 avant Jésus-Christ. Il avait un front de scène
rectiligne à colonnes, plutôt réduit, alors que la cavea était extraordinairement développée.
Les théâtres que nous connaissons se développent surtout dans les provinces, juste après
Vitruve, dans les dernières décennies du I° siècle avant Jésus-Christ. Par exemple le théâtre
d’Arles, qui comprend des gradins bas pour les décurions; le front de scène n’était pas
rectiligne et comportait des niches. On y trouvait des statues, liées au culte d’Auguste. Ce
type de théâtre se développe dans tout l’empire, notamment à Orange, à Carthagène…
Le rideau est au sol, sous le pulpitum. Il mesure trois mètres de haut. On le monte avant le
spectacle. Pour les spectateurs qui sont en bas, il «masque» vraiment. Pour ceux qui sont en
haut, il ne «masque» pas grand-chose.
L’espace scénique se réduit pulpitum. De nombreuses ouvertures sont pratiquées dans le
mur de scène du théâtre d’Orange. Les acteurs peuvent donc apparaître en différents
endroits: le théâtre romain est un «art de l’étonnement». Ce genre de théâtre va se diffuser
dans tout l’empire, mais il y aura quand même une certaine diversité. Le pulpitum et le front
de scène ne sont pas diffusés partout. À Aspendos, on garde une grande orchestra. Les
théâtres en Gaule sont beaucoup plus modestes. D’autres sont transformés pour des chasses,
des combats de gladiateurs, des ballets aquatiques. En Asie Mineure, on va continuer à jouer
dans l’orchestra (il y a donc deux lieux scéniques).
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On trouve une grande variété de théâtres un peu partout dans l’empire romain: des théâtres
latins, mais aussi des théâtres grecs dont l’histoire s’étend du VI° siècle avant Jésus-Christ au
V° siècle après J.-C..
II – QUESTIONS
1) Mireille Tourreau demande comment fonctionnait le rideau de scène. Réponse: C’était un
système assez complexe avec des mâts mobiles associés à des contrepoids. Sur le rideau il
pouvait y avoir des «images».
2) Autre question: Que sont les «πίνακες» («pinakes»)? S’agit-il de décor, d’ornements?
Réponse: Ces peintures étaient probablement ornementales et ne jouaient sans doute aucun
rôle dans la représentation.
VI
Le théâtre d’Orange
par Alain BADIE, Ingénieur CNRS-IRAA (Aix-en-Provence)
Ia) Le théâtre d’Orange date de l’époque impériale. C’est, avec le théâtre d’Aspendos, l’un des
mieux conservés du monde romain (du moins le bâtiment de scène; c’est moins vrai pour la
cavea). C’est l’un des rares théâtres romains auxquels une monographie ait été consacrée dès
le XIX° siècle (en 1856). Tout au long des XIX° et XX° siècles, les architectes ont travaillé sur
ce théâtre pour le restaurer et pour l’étudier (aujourd’hui, ces deux activités sont dissociées).
Ils avaient une visée patrimoniale et une visée d’étude: préserver le bâtiment, rendre
praticable la cavea. Aujourd’hui on veut en faire un bâtiment fonctionnel et conserver ce qui
ne dérange pas trop.
Il est connu dès la fin du XVI° siècle. À cette époque, des maisons occupaient l’intérieur de ce
théâtre, qui formait un quartier. Mais on voyait bien le mur de scène et on arrivait quand
même à se faire une idée de la cavea. Louis XIV aurait dit: «La plus belle muraille de mon
royaume, c’est le théâtre d’Orange». Au XIX° siècle, on l’a dégagé. Après la Révolution, on a
le souci d’en faire un objet patrimonial.
b) Augustin Caristie est un grand architecte qui travaille à Orange, sur le théâtre et sur l’arc
de triomphe, de 1823 à 1856. Il était Grand Prix de Rome: c’est pourquoi Ingres a fait son
portrait. Il a exercé des responsabilités dans tous les postes de direction du patrimoine. Il
appartient à la génération qui précède celle de Viollet-le-Duc. Il a publié une monographie
sur le théâtre d’Orange: il y présente l’état du monument après la destruction des maisons,
avec la cavea dégradée, ainsi que l’état «initial» restitué. Aujourd’hui encore on procède
ainsi: on présente d’abord l’état actuel, puis on essaie de retrouver l’état initial. Augustin
Caristie fait des plans et dessine de nombreux détails: corniches en marbre, partie centrale du
mur de scène, blocs errants… Son grand souci est d’inscrire ce bâtiment dans le corpus des
75
théâtres connus à l’époque pour lui rendre sa place dans l’histoire du théâtre romain, parmi
d’autres bâtiments, qu’il dessine aussi. Les conditions de travail sont difficiles.
Après l’avoir étudié, il passe, à la restitution. Il met en place le front de scène avec trois
portes et les deux ordres superposés autour de la porte centrale, trois ordres ailleurs, les trois
volées de la cavea, les portiques, la toiture sur la scène (mais elle ne protège pas de la pluie!).
Au XVII° siècle, Perrault traduit Vitruve et accompagne cette traduction d’illustrations: on
voit que la toiture ne recouvre pas la scène!
Augustin Caristie a observé le théâtre. Il a repéré des encoches monumentales en haut du
mur, des trous pour l’écoulement de l’eau, une «saignée» en oblique. À un endroit où la
pierre a brûlé, est devenue rouge, il repère une empreinte plus claire. Tout cela l’amène à
déduire qu’il y a une toiture, une charpente en porte-à-faux de quinze mètres, ce qui pose un
grand problème dans l’Antiquité, ce qui en pose encore plus à Augustin Caristie. La seule
chose qui correspond, ce sont les grues de l’époque. Tout au long de son texte, il expose ses
déductions et ses doutes avec une grande humilité: il n’est pas sûr de la forme de la toiture et
invite ses successeurs à reprendre la restitution du toit, car un toit en porte-à-faux est difficile
à concevoir sans architecture métallique ou en béton.
À partir de ses travaux, on reconstitue des toitures en porte-à-faux sur tous les théâtres, alors
qu’il indiquait clairement qu’il n’était pas du tout sûr de la forme de la toiture.
c) Au XIX° siècle, la cavea était très dégradée, envahie par l’herbe, comme le montre la
maquette du Nîmois Auguste Pelet, en 1856.
En 1873, Pierre-Honoré Daumet, architecte, fait de nouveaux relevés et de belles aquarelles
dans le styles des envois de Rome. L’état est identique.
Dans la seconde moitié du XIX° siècle, on a l’idée de faire des représentations théâtrales,
alors qu’Augustin Caristie n’en parle jamais. La Comédie-Française a joué dans ce théâtre,
dans l’état dans lequel il était à l’époque, sans gradins, avant sa restauration. Les politiques
voient l’intérêt d’utiliser ce bâtiment.
En 1892, Jean-Camille Formigé est chargé de reconstruire la cavea en se servant des travaux
d’Augustin Caristie. Il travaille avec un matériel très proche de celui de l’Antiquité, comme
le montrent les photographies prises sur le chantier. Les architectes du XIX° siècle sont plus
proches des architectes antiques que les architectes du XX° siècle ne le sont de ceux du XIX°
siècle! Ces photos montrent la première volée des gradins reconstruits, puis les deuxième et
troisième; on y voit des traces des gradins antiques.
La plus grande partie de la cavea telle qu’elle est aujourd’hui a été construite au XIX° siècle!
Mais la reconstitution est assez sûre, il n’y a pas de grosses erreurs.
En 1920, Jules Formigé, fils de Jean-Camille Formigé, restaure une partie des ordres dégagés
du front de scène. En outre, il ajoute des gradins en bois entre les gradins en pierre pour
augmenter la capacité d’accueil (l’impératif est donc économique!). Pour aller sur les deux
volées, on ne peut pas monter par les gradins, on est obligé de faire le tour, ce qui est
conforme à l’état antique, mais n’a pas été conservé aujourd’hui.
En 1929-1931, Jules Formigé fouille la scène et dégage le rideau et des milliers de fragments.
En 1950, Robert Amy, architecte qui travaillait aux Bâtiments de France avant de devenir un
des premiers membres de l’IRAA-CNRS, fait de nouveau relevés et décrit des milliers de
blocs. Il faut souligner, dans son cas, le lien entre étude et restauration.
En 1982, Dominique Ronseray, architecte des Monuments Historiques, prévoit de construire
une toiture, d’aménager les deux «basiliques» (pièces latérales), au-dessus desquelles il
prévoit de bâtir un étage pour installer des loges. En fait, de plus en plus on veut en faire un
76
bâtiment «moderne» et fonctionnel. Les Monuments Historiques demandent son avis à
Pierre Gros. Le projet de Dominique Ronseray est en partie abandonné, mais une toiture est
quand même construite sans étude archéologique sur l’une des basiliques.
En 1995, ce projet ressurgit, car la scène se dégrade. Mais cet argument est discutable, car en
fait cette toiture ne protégerait que le sommet du mur. Les agents du CNRS n’ont découvert
une partie de travaux qu’après leurs débuts. Certaines traces antiques ont disparu.
II –
Les travaux du CNRS se poursuivent de 1999 à 2009. Ils concernent la circulation dans la
cavea, les toitures du bâtiment de scène, les ordres du front de scène, en profitant des
découvertes des années 1930. Toute une série de plans et de coupes de la cavea a été établie,
contredisant parfois les conclusions d’Augustin Caristie: par exemple, il avait vu un triangle
pour la toiture, ce qui est une erreur. En fait, il y avait sans doute plusieurs toitures.
On arrive aux premiers gradins par des couloirs latéraux, à la partie médiane de la cavea et
aux gradins du haut par un escalier extérieur. De hauts murs empêchent de passer d’une
volée de gradins à l’autre. Des gradins en bois ont été installés en 1930.
Il y a des matériaux différents. Il y avait donc peut-être eu des restaurations dès l’Antiquité
ou lors des différentes étapes du chantier. Pour construire l’auvent de quinze mètres, les
architectes romains s’y seraient repris à plusieurs fois.
Sur le front de scène, il y avait, au premier niveau, une frise représentant des Centaures et,
au second niveau, une frise représentant des Victoires. Le premier niveau a la dimension de
la «Maison Carrée» de Nîmes, le second niveau celle du temple de Vernègues: donc en
somme ce théâtre a la dimension de deux temples superposés!
En fait, on précise les travaux d’Augustin Caristie, on va plus loin que lui, mais dans la
direction qu’il a lui-même indiquée.
77
VOYAGES DE MARCUS DANS LA PROVENCE ANTIQUE
Quatrième promenade (concours 2009-2010)
AVE, discipule ! Je suis Marcus et voici Kallistè, ma cousine ! Nous
sommes toujours à Arles car, depuis le mariage de Fabia et Capito, nous
goûtons la douceur de vivre auprès des nouveaux époux.
Aujourd’hui, nous flânons autour de l’amphithéâtre, découvrons avec
surprise les objets insolites proposés par les marchands ambulants en
nous acheminant vers les quais qui bordent le Rhône.
Kallistè n’arrête pas de me poser toutes sortes de questions : aide-moi à
lui répondre !
1. Quels sont les différents noms antiques connus de notre cité ?
Noms de la cité
Arelate
Thelinè
Origine supposée de ce nom
Peut-être d’origine celtique, de
*are = près et *lat- = étang ou
marécage.
Peut-être d’origine grecque : ce
terme serait en rapport avec le
grec ἡ θηλής = le sein.
Signification supposée
[lieu] entouré de marécages
la nourricière
2. Comment nomme-t-on le Rhône dans l’Antiquité ? En grec, à quels autres mots ce
nom ressemble-t-il ? Écrivez-les en grec et donnez leur traduction.
Nom latin
Rhodanus
Nom en grec
Rhodanos / ὁ Ῥοδανός
Ce nom fait penser à l’adjectif ῥοδανός, ή, όν =
souple, flexible ou au nom τὸ ῥοδόν, οῦ qui désigne
la rose ... En provençal, on le nomme lou Rose !
Cf . Lou Pouèmo dou Rose de Frédéric Mistral
3. Ah ! voici Capito avec ses esclaves : ils vont chercher des provisions. Il nous invite à
monter dans sa barque pour une expédition à travers les marécages qui nous mènera
dans un endroit que vous nommez Barbegal.
a. Comment nomme-ton exactement le bâtiment original que nous pouvons voir
à cet endroit ?
b. Explique la particularité de cette construction.
c. Quelle denrée vient y chercher Capito ?
a. Ce bâtiment est une meunerie hydraulique, un moulin qui utilise la force de l’eau pour
faire tourner sa meule.
b. Pour actionner la mécanique du moulin, les Arlésiens ont construit un aqueduc pour
amener l’eau en amont du bâtiment construit sur la pente. Cette eau coule dans un bief qui
permet d’actionner les roues à augets qui font tourner les meules en basalte dans les
chambres de moutures.
c. Capiton vient y chercher de la farine.
78
4. Complète le schéma avec le vocabulaire suivant : bief – escalier de service –goulotte –
meule – roue à augets et donne-lui un titre :
meule
goulotte
escalier de
roue à augets
bief
ief
Mécanisme du moulin de Barbegal
Quand Capito a fini de charger sa cargaison, nous rentrons à Arles. Sur le quai règne une
grande agitation car on décharge un navire en provenance de Bétique. Kallistè ne peut
s’empêcher de poser encore des questions ...
5. Où se trouve la Bétique ?
La province romaine de Bétique ou Hispania Baetica se trouve dans le sud de l'Espagne, et
correspond à peu près à l’actuelle Andalousie. Elle tire son nom du Baetis, nom latin du fleuve
Guadalquivir.
6. Quels sont l’étymologie et le sens du mot « amphore » ? Tu peux écrire le mot en grec
si tu veux ...
Le mot amphore est issu du grec amphiphoreus ou
amphoreus, en grec ὁ ἀμφιφορεύς, έως ou ὁ
ἀμφορεύς, έως qui est un grand vase à deux anses.
Ce terme est composé de la préposition ἀμφί = autour et
du nom ὁ φορεύς, έως issu du verbe φορεῖν, qui se dit
en latin ferre et signifie porter, transporter (cf. transférer,
en français).
7. Que contiennent en général les amphores venant de Bétique ?
La Bétique était déjà célèbre pour son huile d’olive.
79
8. Comment peut-on connaître avec précision la provenance du contenu des amphores ?
Pour fermer l’amphore, le marchand utilisait un bouchon de liège qu’il imperméabilisait
avec un opercule de chaux sur lequel il appliquait son timbre ; il pouvait aussi peindre
sa marque sur le col ou la panse de l’amphore avec une solution à base de noir de fumée.
9. Comment le chargement est-il fixé dans la cale du navire ?
Dans la cale du navire, on rangeait d’abord les amphores à fond plat puis on installait
les autres amphores verticalement, en les encastrant dans les cols de la rangée
inférieure ; on les séparait par des bourrelets de paille ou de branchages attachés par
des cordes pour les caler correctement et éviter la casse durant la navigation.
10. Quels sont les six produits les plus courants qu’on trouve dans les amphores
transportées par bateau ?
Les produits ainsi transportés sont essentiellement le vin et le vinaigre, l’huile, les
sauces (le garum, notamment), les olives, les fruits, le miel, la résine et les
conserves de poissons.
11. Comment utilise-t-on les amphores quand elles sont vides ? Donne deux exemples.
Une fois vides, les amphores servent encore à stocker les produits domestiques comme
les olives, l’huile, le vin ou l’eau douce. Mais, cassées au bout puis emboîtées, elles
peuvent aussi devenir des canalisations ou des drains pour assainir le sol. Les pauvres
s’en servaient aussi pour la sépulture des enfants, notamment.
12. Oh ! quelle merveille ! Quelle prouesse technique, là, sur le fleuve ! Qu’est-ce que
c’est ?
C’est un pont de bateaux.
13. Quel est l’intérêt et la particularité de cet
ouvrage ?
Ce type de construction a l’avantage de mieux résister aux crues brutales du fleuve grâce aux
ponts levis qui assurent une liaison souple avec les parties en pierre. Il permet aussi le passage
des navires de faible tonnage qui remontent le fleuve.
Ce pont de bateaux a la particularité d’être un pont permanent destiné à un usage civil
contrairement à ceux qui étaient mis en œuvre par le génie militaire pour faciliter la circulation
des troupes.
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14. Je ne peux m’empêcher de taquiner cette insatiable curieuse : j’ai déjà vu ce type de
construction à Ostie ! Oui !
Mais où exactement ? Et sous quelle forme ?
Marcus a pu admirer une mosaïque représentant un de ces ponts de bateaux sur le
forum des corporations à Ostie, le port de Rome.
Détail de la mosaïque du forum des corporations à
Ostie (Ostia antica < ostium, ii, n. = entrée,
embouchure) port à l'embouchure du Tibre, à 35 km au
sud-ouest de Rome ; réputée pour ses marais salants et
pour son port, qui accueillait les cargaisons de céréales,
d'huile, de vin et de garum en provenance de tout le
monde romain, sa situation était d'autant plus
avantageuse, qu'à l'inverse des autres fleuves
méditerranéens, le Tibre était navigable toute l'année.
15. Peux-tu citer les trois corps de métiers regroupés en corporations qui sont liés à une
forme précise de navigation dans Arles et ses environs ? Précise la forme de
navigation pour chaque corporation.
Les trois corporations sont celles des nautes, ou nautae, des utriculaires ou utricularii et des
naviculaires ou navicularii.
La première corporation est celle des navigateurs fluviaux, qui circulent à bord de bateaux à fond
plat, seuls capables d’affronter les caprices du fleuve ; ces barques, qui peuvent mesurer jusqu’à 15
mètres de long pour 3 à 4 mètres de large, sont mues à la voile ou aux rames.
Les utricularii circulent sur des radeaux soutenus par des outres gonflées (<uter, utris, m. =
outre) sur les rivières et les étangs qui jouxtent le fleuve.
Quant aux navicularii, ce sont les armateurs qui financent l’achat des bateaux et contrôlent le
trafic maritime ; ils sont les correspondants des services de l’annone* et, pour cela, ont en charge
l’approvisionnement de Rome en blé et en huile.
16. Sur
feuille
supplémentaire,
dessine
deux modèles
d’amphores retrouvées à
*annona,
ae, une
f. < annus
= production
annuelle (aliments)
> approvisionnement
en denrées
Arelate :
• une amphore de Bétique de type Dressel 20B,
• une amphore gauloise 5.
N’oublie pas d’intituler chaque dessin !
81
PALMARÈS DU RALLYE 2010
Niveau 3ème
Niveau 6ème
PRIX SPÉCIAL DU JURY
EX AEQUO
CLG Achille Mauzan
GAP
Mme Maryline Chappa
25 élèves
CLG Louis Pasteur
ISTRES
Mme Mireille Martinez-Coudin
5 latinistes de 3ème C
Niveau 5ème
CLG René Cassin
TARASCON
Mme Maryline Jullian
2 latinistes de 3ème 5 et 3ème 6
CLG Louis Pasteur
ISTRES
Mme Mireille Martinez-Coudin
2 latinistes
Niveau 2nde
Niveau 4ème
LYCÉE René Char
AVIGNON
M. Brice Courtin
3 latinistes
CLG Albert camus
MIRAMAS
Mme Marion Isoard
27 latinistes de 4ème A B
PRIX SPÉCIAL DU JURY
LYCÉE Paul Arène
SISTERON
M. Nicolas Antomarchi
14 latinistes
7 hellénistes
FÉLICITATIONS AUX LAURÉATS !
Merci à tous les élèves et à leurs enseignants qui ont éprouvé du plaisir à travers cette
nouvelle aventure !
82
SUJETS DU BACCALAURÉAT 2010
OVIDE, L'Art d'aimer.
TEXTE
Charme de la voix, charme de la poésie
5
10
15
20
25
30
35
Monstra maris Sirenes erant, quae voce canora
Quamlibet admissas detinuere rates ;
His sua Sisyphides auditis paene resolvit
Corpora ; nam sociis inlita cera fuit.
Res est blanda canor ; discant cantare puellae
(Pro facie multis vox sua lena fuit),
Et modo marmoreis referant audita theatris
Et modo Niliacis carmina lusa modis.
Nec plectrum dextra, citharam tenuisse sinistra
Nesciat arbitrio femina docta meo.
Saxa feras que lyra movit Rhodopeius Orpheus
Tartareosque lacus tergeminumque canem ;
Saxa tuo cantu, vindex justissime matris,
Fecerunt muros officiosa novos ;
Quamvis mutus erat, voci favisse putatur
Piscis (Arioniae fabula nota lyrae).
Disce etiam duplici genialia nablia palma
Verrere : conveniunt dulcibus illa jocis.
Sit tibi Callimachi, sit Coi nota poetae,
Sit quoque vinosi Teia Musa senis ;
Nota sit et Sappho (quid enim lascivius illa ?)
Cuique pater vafri luditur arte Getae.
Et teneri possis carmen legisse Properti,
Sive aliquid Galli, sive, Tibulle, tuum,
Dictaque Varroni fulvis insignia villis
Vellera germanae, Phrixe, querenda tuae,
Et profugum Aenean, altae primordia Romae,
Quo nullum Latio clarius exstat opus.
Forsitan et nostrum nomen miscebitur istis,
Nec mea Lethaeis scripta dabuntur aquis,
Atque aliquis dicet « nostri lege culta magistri
Carmina, quis partes instruit ille duas,
Deve tribus libris, titulo quos signat Amorum,
Elige, quod docili molliter ore legas,
Vel tibi composita cantetur Epistula voce ;
Ignotum hoc aliis ille novavit opus ».
O ita, Phoebe, velis, ita vos, pia numina vatum,
Insignis cornu Bacche novemque deae.
Ovide, L'Art d'aimer, Livre III, vers 311 à 348.
Texte latin établi par Henry Bomecque, Les Belles Lettres, C.U.F., 1924.
83
TRADUCTION
Les Sirènes étaient des monstres marins, dont la voix mélodieuse arrêtait les vaisseaux dans
leur course, si rapide fût-elle. Le fils de Sisyphe1, en les entendant, fut sur le point de rompre
les liens qui l'attachaient ; car ses compagnons avaient l'oreille bouchée de cire.
C'est un charme qu'une voix mélodieuse: que les jeunes filles apprennent à chanter (à défaut
de beauté, beaucoup de femmes ont eu leur voix comme entremetteuse) et qu'elles répètent
tantôt les airs entendus dans nos théâtres de marbre, tantôt des chants du Nil avec leur
rythme.
(Texte de la version).
Connaissez les poésies de Callimaque, celles du poète de Cos2, et celles du vieillard de Téos3
ami du vin. Connaissez également Sapho (est-il rien de plus voluptueux que ses vers?) et le
poète qui nous représente un père dupé par les artifices du fourbe Géta 4. Vous pouvez avoir
lu aussi les vers du tendre Properce, quelque chose de Gallus, ou tes œuvres, Tibulle, et la
célèbre toison aux poils d'or, chantée par Varron 5, toison si fatale, Phrixus, à ta sœur, et les
voyages d'Enée fugitif, l'origine de la haute Rome, chef-d'œuvre le plus éclatant qu'ait
produit le Latium. Peut-être mon nom aussi sera-t-il mêlé au leur; peut-être mes œuvres ne
seront-elles pas englouties sous les eaux du Léthé, et quelqu'un dira-t-il:
« Si tu es vraiment une femme cultivée, lis ces vers où notre maître instruit les deux sexes 6,
ou bien dans les trois livres, qu'il met sous l'invocation des Amours, choisis quelque poésie
que tu liras d'une voix souple et tendre, ou bien déclame avec art l'une de ses lettres 7 : c'est
un genre inconnu avant lui et qu'il a créé ». Que ce soit ta volonté, Phébus, et la vôtre,
divinités sacrées qui protégez les poètes, Bacchus puissant dieu comu 8, et vous, troupe des
neuf Muses.
Ovide, L'Art d'aimer, Livre III, vers 311 à 348.
Traduction: Henry Bornecque, 1924, revue par Philippe Heuzé, les Belles Lettres, 1994.
Ulysse, dont la mère avait subi les violences de Sisyphe.
Philétas, maître de Théocrite.
3 Anacréon
4 Ovide pense sans doute à Ménandre.
5 Il s'agit de Varron d'Atax, auteur d'un poème épique.
6 Ovide évoque ici sa propre œuvre.
7 Ovide évoque ici les Héroïdes
8 Les cornes sont un symbole de force.
1
2
84
PREMIERE PARTIE
QUESTIONS (60 points)
Vous traiterez les trois questions suivantes en rappelant chaque fois le numéro de la question
à laquelle vous répondez. Les réponses, rédigées, s'appuieront sur le texte latin cité dans la langue.
Question 1 (15 points) :
Analysez les pronoms relatifs quae (vers 1), quo (vers 28), quis (= quibus) (vers 32), quos (vers
33), quod (vers 34) : antécédent, cas, genre, nombre, fonction.
Quelle remarque grammaticale pouvez-vous faire à partir de l'observation des modes employés dans
ces relatives ?
Question 2 (15 points) :
Vous comparerez et commenterez les traductions des vers 5 et 6 tant du point de vue lexical
que grammatical :
Res est blanda canor : discant cantare puellae
(Pro facie multis vox sua lena fuit)
Traduction l : Desaintange (1807) :
« La douce mélodie a le don d'enchanter:
Belles, dès votre enfance apprenez à chanter.
La voix a sa beauté, que le coeur idolâtre ».
Traduction 2 : Ch. Héguin de Guerle (1836) :
« C'est une chose charmante qu'un chant agréable. Femmes, apprenez donc à chanter;
il en est plus d'une à qui la beauté de sa voix a tenu lieu d'attraits ».
Traduction 3 : H. Bomecque (1924) :
« C'est un charme qu'une voix mélodieuse : que les jeunes filles apprennent à chanter
(à défaut de beauté, beaucoup de femmes ont eu leur voix comme moyen de
séduction) ».
Traduction 4 : H. Bomecque (1924) revu par P. Heuzé (Les Belles Lettres 1994) :
« C'est un charme qu'une voix mélodieuse : que les jeunes filles apprennent à chanter
(à défaut de beauté, beaucoup de femmes ont eu leur voix comme entremetteuse) ».
Traduction 5 : J. Gayraud (Mille et une nuits, 2000) :
« C'est une chose charmante qu'une jolie voix: les femmes devraient apprendre à
chanter; et d'ailleurs beaucoup d'entre vous, à défaut de beauté, ont séduit par leur
voix ».
Question 3 (30 points) :
Vous montrerez que cet extrait de L'Art d'aimer constitue une histoire de la poésie ainsi qu'un
éloge de son pouvoir. Puis, à partir du vers 29, vous examinerez plus particulièrement quelle place
Ovide s'attribue dans cette histoire et cet éloge.
85
DEUXIEME PARTIE
VERSION (40 points)
Nec plectrum dextra, citharam tenuisse sinistra
Nesciat arbitrio femina docta meo.
Saxa ferasque lyra movit Rhodopeius 9 Orpheus
Tartareosque lacus tergeminumque canem ;
5
Saxa tuo cantu, vindex 10 justissime matris,
Fecerunt muros officiosa novos ;
Quamvis mutus erat, voci favisse putatur
Piscis (Arioniae 11 fabula nota lyrae).
Disce etiam duplici genialia nablia palma
10
Verrere : conveniunt dulcibus illa jocis.
9
Montagne de Thrace, pays d’où Orphée était originaire.
Il s'agit d'Amphion, qui vengea sa mère Antiope victime des outrages de son oncle et qui bâtit Thèbes en faisant
mouvoir les pierres aux sons de sa lyre.
11
Arion, poète lyrique sauvé par un dauphin qu'il avait charmé par sa musique.
10
86
SOPHOCLE, Œdipe-Roi,
587-621
TEXTE
5
10
15
20
25
30
35
Κρέων
Ἐγὼ μὲν οὖν οὔτ' αὐτὸς ἱμείρων ἔφυν
τύραννος εἶναι μᾶλλον ἢ τύραννα δρᾶν,
οὔτ' ἄλλος ὅστις σωφρονεῖν ἐπίσταται.
Νῦν μὲν γὰρ ἐκ σοῦ πάντ' ἄνευ φόϐου φέρω,
εἰ δ' αὐτὸς ἦρχον, πολλὰ κἂν ἄκων ἔδρων.
Πῶς δῆτ' ἐμοὶ τυραννὶς ἡδίων ἔχειν
ἀρχῆς ἀλύπου καὶ δυναστείας ἔφυ ;
οὔπω τοσοῦτον ἠπατημένος κυρῶ
ὥστ' ἄλλα χρῄζειν ἢ τὰ σὺν κέρδει καλά.
Νῦν πᾶσι χαίρω, νῦν με πᾶς ἀσπάζεται,
νῦν οἱ σέθεν χρῄζοντες ἐκκαλοῦσί με ·
τὸ γὰρ τυχεῖν αὐτοῖσι πᾶν ἐνταῦθ' ἔνι.
Πῶς δῆτ' ἐγὼ κεῖν' ἂν λάϐοιμ' ἀφεὶς τάδε ;
οὐκ ἂν γένοιτο νοῦς κακὸς καλῶς φρονῶν.
Ἀλλ' οὔτ' ἐραστὴς τῆσδε τῆς γνώμης ἔφυν
οὔτ' ἂν μετ' ἄλλου δρῶντος ἂν τλαίην ποτέ.
Καὶ τῶνδ' ἔλεγχον τοῦτο μὲν Πυθώδ' ἰὼν
πεύθου τὰ χρησθέντ' εἰ σαφῶς ἤγγειλά σοι ·
τοῦτ' ἄλλ', ἐάν με τῷ τερασκόπῳ λάϐῃς
κοινῇ τι βουλεύσαντα, μή μ' ἁπλῇ κτάνῃς
ψήφῳ, διπλῇ δέ, τῇ τ' ἐμῇ καὶ σῇ, λαϐών,
γνώμῃ δ' ἀδήλῳ μή με χωρὶς αἰτιῶ.
Οὐ γὰρ δίκαιον οὔτε τοὺς κακοὺς μάτην
χρηστοὺς νομίζειν οὔτε τοὺς χρηστοὺς κακούς.
φίλον γὰρ ἐσθλὸν ἐκϐαλεῖν ἴσον λέγω
καὶ τὸν παρ' αὑτῷ βίοτον, ὃν πλεῖστον, φιλεῖ.
Ἀλλ' ἐν χρόνῳ γνώσει τάδ' ἀσφαλῶς, ἐπεὶ
χρόνος δίκαιον ἄνδρα δείκνυσιν μόνος ·
κακὸν δὲ κἂν ἐν ἡμέρᾳ γνοίης μιᾷ.
Χορός
Καλῶς ἔλεξεν εὐλαϐουμένῳ πεσεῖν,
ἄναξ · φρονεῖν γὰρ οἱ ταχεῖς οὐκ ἀσφαλεῖς.
Οἰδίπους
Ὅταν ταχύς τις οὑπιϐουλεύων λάθρᾳ
χωρῇ, ταχὺν δεῖ κἀμὲ βουλεύειν πάλιν.
Εἰ δ' ἡσυχάζων προσμενῶ, τὰ τοῦδε μὲν
πεπραγμέν' ἔσται, τἀμὰ δ' ἡμαρτημένα.
87
590
595
600
605
610
615
620
TRADUCTION
Traduction de Paul Mazon, revue par Alphonse Dain (1958) - Edition Les Belles Lettres
Accusé par Œdipe de comploter avec Tirésias pour s'emparer du pouvoir, Créon se défend.
Pour moi, je ne suis pas né avec le désir d'être roi, mais bien avec celui de
vivre comme un roi. Et de même quiconque est doué de raison. Aujourd'hui, j'obtiens
tout de toi, sans le payer d'aucune crainte : (5) si je régnais moi-même, que de choses
je devrais faire malgré moi ! Comment pourrais-je donc trouver le trône préférable à
un pouvoir, à une autorité qui ne m'apportent aucun souci ? Je ne me leurre pas au
point de souhaiter plus qu'honneur uni à profit.(10) Aujourd'hui je me trouve à mon
aise avec tous, aujourd'hui chacun me fête, aujourd'hui quiconque a besoin de toi
vient me chercher jusque chez moi : pour eux, le succès est là tout entier. Et je
lâcherais ceci pour cela ? Non, raison ne saurait devenir déraison. (15) Jamais je n'eus
de goût pour une telle idée. Et je n'aurais pas admis davantage de m'allier à qui
aurait agi ainsi. La preuve? Va à Pythô tout d'abord, et demande si je t'ai rapporté
exactement l'oracle. (19) Après quoi, si tu peux prouver que j'ai comploté avec le
devin, fais-moi mettre à mort : ce n'est pas ta voix seule qui me condamnera, ce sont
nos deux voix, la mienne et la tienne. Mais ne va pas, sur un simple soupçon,
m'incriminer sans m'avoir entendu. Il n'est pas équitable de prendre à la légère les
méchants pour les bons, les bons pour les méchants.(25) Rejeter un ami loyal, c'est en
fait se priver d'une part de sa propre vie, autant dire de ce qu'on chérit plus que tout.
(texte de la version, vers 27 à 35)
Les numéros signalent les vers grecs correspondants.
88
PREMIÈRE PARTIE
QUESTIONS (60 points)
Vous traiterez les trois questions suivantes en rappelant chaque fois le numéro de la
question à laquelle vous répondez. Les réponses, rédigées, s'appuieront sur le texte grec cité
dans la langue.
QUESTION 1 (15 points)
Dans les vers 13 et 14, analysez les formes verbales précédées de ἄν. Transposez-les à la
personne correspondante du pluriel.
QUESTION 2 (15 points)
Comparez les traductions suivantes des trois premiers vers.
Vous vous intéresserez particulièrement à la traduction de σωφρονεῖν (v. 3), à celle du vers
2 et à la construction οὔτε … οὔτε. Laquelle de ces traductions, selon vous, traduit-elle le
mieux la position de Créon ? Justifiez votre choix.
Ἐγὼ μὲν οὖν οὔτ' αὐτὸς ἱμείρων ἔφυν
τύραννος εἶναι μᾶλλον ἢ τύραννα δρᾶν,
οὔτ' ἄλλος ὅστις σωφρονεῖν ἐπίσταται.
Traduction de Leconte de Lisle (1877)
Pour moi, certes, j'aime mieux faire ce que font les rois qu'être roi, et tout homme sage pense ainsi.
Traduction de Paul Mazon, revue par Alphonse Dain (1958)
Pour moi, je ne suis pas né avec le désir d'être roi, mais bien avec celui de vivre comme un roi. Et de
même quiconque est doué de raison.
Traduction de Robert Pignarre (1964)
Pour moi, si j'aime à régner, je ne tiens pas au titre. Quiconque sait régler ses désirs raisonne de
même.
QUESTION 3 (30 points)
Quelle conception de l'existence Créon fait-il apparaître dans ses propos?
Vous inclurez dans votre réponse des références à d'autres passages de la pièce. Vous
pourrez également faire référence à des œuvres culturelles et artistiques postérieures.
89
DEUXIÈME PARTIE
VERSION (40 points)
30
35
Ἀλλ' ἐν χρόνῳ γνώσει τάδ' ἀσφαλῶς, ἐπεὶ
χρόνος δίκαιον ἄνδρα δείκνυσιν μόνος ·
κακὸν δὲ κἂν ἐν ἡμέρᾳ γνοίης μιᾷ.
Χορός
Καλῶς ἔλεξεν εὐλαϐουμένῳ πεσεῖν,
ἄναξ · φρονεῖν γὰρ οἱ ταχεῖς οὐκ ἀσφαλεῖς.
Οἰδίπους
Ὅταν ταχύς τις οὑπιϐουλεύων λάθρᾳ
χωρῇ, ταχὺν δεῖ κἀμὲ βουλεύειν πάλιν.
Εἰ δ' ἡσυχάζων προσμενῶ, τὰ τοῦδε μὲν
πεπραγμέν' ἔσται, τἀμὰ δ' ἡμαρτημένα.
_____________________________
1 εὐλαϐουμένῳ πεσεῖν: traduire par: « aux yeux de qui veut éviter les erreurs. »
2 φρονεῖν : complète l'adjectif substantivé οἱ ταχεῖς
3 ταχύς : donner à l'adjectif une valeur adverbiale
4 οὑπιϐουλεύων = ὁ ἐπιϐουλεύων
90
615
620
EXTRA MUROS SCHOLAE
UNE EXPÉRIENCE ORIGINALE
LA CLASSE TRANSPLANTÉE À SAINT-RÉMY-DE-PROVENCE
4 jours pour découvrir le patrimoine de sa région (du 28 au 31 mars 2010).
La classe patrimoine ou classe transplantée est un projet mené avec une classe de 6ème et
encadré par les enseignants de français, de SVT et d’Arts Plastiques.
À travers des activités pluridisciplinaires (histoire, géographie, développement durable,
lettres, arts plastiques et histoire des arts), les élèves apprécient la richesse du patrimoine
antique et contemporain de Saint- Rémy-de-Provence et de sa région.
1er jour : Les Trésors du Rhône.
Afin de sensibiliser les élèves au patrimoine antique de leur région, nous avons longé les
berges du Rhône, du pont de Trinquetaille jusqu’au Musée Départemental Arles Antique.
Nous avons ainsi repéré le lieu des fouilles subaquatiques et découvert un Rhône aux eaux
gonflées et verdâtres.
Les élèves, répartis en deux groupes, ont déambulé à travers les collections permanentes du
Musée sous la férule du professeur de SVT et ont visité l’exposition temporaire « César, le
Rhône pour mémoire » en compagnie de leurs professeurs de Lettres et d’Arts Plastiques.
Ce premier contact avec l’objet archéologique et son environnement permet aux élèves de
réfléchir sur le rôle du Musée et les différentes façons de conserver le patrimoine antique.
Avant d’arriver au lycée agricole de Saint-Rémy, nous avons fait une halte à Barbegal pour
travailler sur les aqueducs et la meunerie antique.
2ème jour : L’eau et la forêt dans les Alpilles.
Le matin au cœur du massif, les enfants se
questionnent sur la présence de l’eau dans les
Alpilles : y en a-t-il beaucoup ? Est-elle toujours
présente ? Comment l’homme et les plantes
l’utilisent-elle ?
Un parcours avec une animatrice de l’association
«Chemin Faisan» nous fait découvrir la richesse des
cultures (grâce aux canaux d’irrigation) et la flore
typique des Alpilles.
Au bord du lac de Peiroou, les élèves découvrent
un lieu artificiel créé par la main de l’homme au IVème
siècle et qui sert aujourd’hui à alimenter en eau les
fontaines de Saint-Rémy.
Les élèves étudient le lac de Peiroou situé au
cœur des Alpilles.
L’observation de la végétation permet de comprendre l’adaptation des plantes à la
sécheresse et amène naturellement à étudier le dispositif de lutte contre les incendies mis en
place dans le massif.
Les élèves sont partis à la recherche des différentes plantes velues, grasses, odorantes et
autres feuilles vernies pour constituer un herbier et compléter des fiches pédagogiques.
En rentrant vers le centre-ville, ils ont compris le rôle de l’eau dans les activités humaines à
travers l’irrigation et ses traces laissées dans le paysage.
91
3ème journée : Saint-Rémy et l’eau.
Les élèves ont étudié des aquarelles contemporaines du peintre Estève au Musée Estrine,
situé dans le centre-ville de Saint-Rémy.
Un atelier très ludique leur est proposé autour des fontaines pour leur permettre de créer
eux-mêmes leurs propres aquarelles sous forme de carnet de dessins.
Un parcours sur le thème de l’eau au XIXème au Musée des Alpilles met en valeur le rôle du
Rhône et de la Durance pour la production des graines de semences.
4ème journée : L’eau dans l’Antiquité (Glanum).
Les élèves deviennent des apprentis archéologues en manipulant la truelle, la brosse et le
tamis dans un bac à fouilles créé par les
animateurs du site de Glanum.
Au préalable, une animatrice leur a expliqué la
notion de coupe stratigraphique à travers une
maquette qui superpose les différentes
évolutions de la cité.
Les élèves ont appris à se repérer à travers le
carroyage et ont dessiné les objets trouvés dans
leur espace de fouilles.
Après deux heures de dur labeur, il est temps
de faire le bilan des fouilles.
Les questions fourmillent : quel est cet objet ?
Découverte de l’archéologie dans le bac à fouilles.
En quelle matière ? Pourquoi est-il placé là ?
Peu à peu, les élèves ont construit des hypothèses et ont fini par délimiter un espace
d’habitation avec une cuisine et une salle à manger.
Nunc est bibendum. La classe et les enseignants sont invités à déguster un repas romain à la
Taberna Romana avec une vue imprenable sur le site.
Mireille Chérubini, notre coquus pretii, nous a expliqué les différents ustensiles utilisés pour
manger et nous fait une démonstration avec une cochlear.
Au menu, de la purée de pois-chiches (cicerona), du poulet (pullus) à la moutarde et au miel et
des lentilles, des douceurs (dulcia) et la fameuse potio Valetudo.
Felix convivium.
L’après-midi, toute l’équipe reprend le chemin de Glanum pour une visite orientée sur
l’utilisation de l’eau dans cette cité : la source sacrée (le
nymphée) ; la fontaine ; le puits à dromos ; le bassin de
la maison des antes (impluvium) ; les thermes.
Les élèves ont appris in situ quelques notions
d’architecture antique et de civilisation.
Leur professeure de Lettres Classiques n’a pu
s’empêcher de faire une initiation très modeste à
l’épigraphie latine pour les conforter dans leur choix
de l’option latin en 5ème.
Observation des restes des temples géminés.
CLG YVES MONTAND, ALLAUCH (13).
Mme Pascale PEYRONNET, professeur de Lettres
Classiques et responsable du projet.
92
INFORMATIONS DIVERSES ET ANNONCES
Nous vous rappelons que l’AGAP soutient et participe activement aux journées de
l’Antiquité organisées par l’AJA dont la nouvelle présidente est Gaëlle VIARD depuis
l’assemblée générale du 12 janvier 2011.
Nous ne saurons trop vous inciter à adhérer à l’AJA et à organiser, autant que vous le
pouvez, des journées de l’Antiquité dans vos établissements. Voici l’adresse du site de l’AJA
sur lequel vous trouverez un bulletin d’adhésion et une fiche d’inscription pour les journées
de l’Antiquité :
http://sciencesantiquite.mmsh.univ-aix.fr/aja/aja_accueil.htm
De même, nous vous rappelons que Connaissance Hellénique, qui fait partie de la
CNARELA, est une association qui propose à tous les publics un enseignement de grec de
qualité. L’association publie une revue trimestrielle que vous pouvez vous procurer pour
3,50€ : Ὁ Λύχνος .
Nous vous recommandons particulièrement la « Petite chronique linguistique sur les mots
grecs du français populaire » de Christian BOUDIGNON qui éclaire de nombreux mystères
de notre langue ...
Nous vous rappelons aussi que, pour recevoir le bulletin de l’AGAP sous forme
informatique ou sous format papier, il faut être adhérent à notre association : un bulletin
d’adhésion se trouve en annexe.
Nous souhaitons élargir la composition de nos commissions qui sont réduites, depuis
quelque temps, à la portion congrue. Il faudrait reconstituer une commission chargée de
recueillir les informations dans les collèges et les lycées de notre académie, une commission
chargée de recenser les textes officiels et il faudrait aussi que certains de vous nous
rejoignent pour élaborer les rallyes : il faut des volontaires pour l’élaborer et pour le
corriger !
Enfin, notre association est dotée d’une plateforme collaborative qui, pour le moment, ne
fonctionne qu’avec les membres du bureau qui s’y sont inscrits ; n’hésitez pas à nous
réclamer un mot de passe pour y accéder : vous pouvez y dialoguer avec les membres
actuels du bureau et entre vous, y déposer des documents, des billets d’humeur et vous
informer sur les activités de l’AGAP.
Enfin, nous souhaitons améliorer la communication entre tous les membres de l’association :
n’hésitez pas à écrire à l’adresse de l’AGAP ou à mon adrélec :
[email protected] ou [email protected]
Pensez à vous rendre sur le site des différentes ARELAs pour vous informer des nouveautés
des différentes académies : leurs adresses se trouvent sur la quatrième de couverture de ce
bulletin.
Anne-Marie Chazal
93
Festival Européen Latin et Grec (FELG)
C'est parti pour un 7ème Festival !
Il va se dérouler à Paris, les jeudi 17 et vendredi18 mars 2011, de 18h à 23h, et le samedi 19
mars toute la journée (10h-18h), à la SORBONNE, péristyle et grand salon les jeudi et
samedi, grand amphithéâtre le vendredi soir. Pour le vendredi 17 mars, de 9h 30 à
17h, THEÂTRE DEJAZET.
Parrainage S.E.L., patronage et partenariat Mairie de Paris, partenariat LE
POINT Etudiants.
Comme eût dit Magritte "Ceci n'est pas vraiment du latin et du grec", c'est le FESTIVAL DU
PATRIMOINE HUMANISTE DANS L'ANCIEN ET LE NOUVEAU MONDE.
Il s'agit en effet de préciser ce qui fait de l'Europe, ce petit morceau au bout de l'Asie comme
le disait Emmanuel Berl, un continent à lui seul. Pourquoi cette obsession de la démocratie,
du dialogue - lié au théâtre et à la représentation -, ce besoin de philosophie que n'ont pas
d'autres civilisations ? Pourquoi l'Europe est-elle mère des sciences et surtout des techniques
? Pourquoi ces notions si spéciales d'utopie, de conquête de la nature (y compris pour
l'écologie), de pédagogie, de libération des femmes, voire de laïcité ou sécularisation ?
Et en Europe-même, pourquoi de tels clivages entre pays du Nord avec
leur Weltanschauung ou Way of Life, et pays du Sud avec leurs points de vue ? Pourquoi ces
nuances de la langue qui font qu'ich liebe dich, I love you, Ya vas lioublous'apparentent au désir
(libet), je t'aime et ti amo au sentiment, te quiero à la conquête (quaero). Ou que le
Polonais Kocham Che s'apparente, comme le Breton da garout a ran, au latin Carus, "chéri" ?
94
Jeudi 17 Mars 2011, grande "Soirée
spéciale Justice" avec Procès des Humanités !
Le Vendredi soir 18 Mars 2011 : SOIREE CONCERT EXCEPTIONNELLE, suivie d'une
représentation théâtrale, dans un lieu prestigieux : le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne
95
Samedi 19 Mars 2011, des Académiciens français, des
Sciences, de Médecine vous donnent rendez-vous,
avec la merveilleuse linguiste Henriette Walter, auteur
de tant de livres, et le directeur de la troupe des Avocats
du Barreau de Paris qui monte un "Cabaret drôlatique
latino-grec" en français.
ET AUSSI : le "Point Métier/Curriculum" ("ça va
l'CV?") avec grands témoins ayant réussi dans le monde
de l'industrie avec cursus littéraire sera dirigé par
Bertrand Carroy de Crescendo - formation continue en
entreprise. Avec participation de jeunes gens de
l'opération Phénix orchestrée par Bernard Deforge,
conseiller Pricewaterhouse Cooper. Et celle de Marcel Botton (Agence Nomen)dans une
saynète spéciale.
Le FELG est aussi au programme la même semaine du Printemps des Poètes et de
la Semaine de la Langue Française et de la Francophonie, dont les 10 mots retenus sont
tous ... d'origine grecque ou latine !
Patronages : Mme la Commissaire européenne à la culture ; en France, MM. les Ministres
de la Culture et de l'Education Nationale, Mme la Ministre de l'Enseignement Supérieur,
M. le délégué général à la langue française et aux langues de France.
Et peut-être, si nous y parvenons, le Dimanche 13 Mars 2011 nous lancerons l'Antique
Parade, avec chars et costumes, défilé des dieux, des héros, des mythes, des animaux
légendaires, de la Chimère et du Minotaure en son labyrinthe, avec hoplites, gladiateurs et
défilé de mode, arrêts poésie ou vaticinations de la Pythie qui dira l'avenir. Avec appel à tous
les collèges, lycées, grandes écoles et universités de France, de Navarre et d'Europe pour y
participer ! Ainsi que les chocolats Leonidas ou la crème Nivea ... l'imagination est au
pouvoir et nous rendrons le Latin (et le Grec) au Quartier latin !
Que les collèges, lycées, universités, grandes Ecoles qui voudraient participer au Festival
proprement dit ou à l'Antique Parade ou aux deux veuillent bien nous contacter assez tôt.
bulletin-d-inscription-imprimer1.pdf (imprimer et nous l'envoyer par poste).
Et rappelez-vous : sans vos suggestions et vos participations, le Festival ne serait pas ce
qu'il est. Contactez-nous le plus vite possible pour participer avec vos élèves à cette 7ème
année - l'âge de raison et l'entrée dans le monde de Tintin ! Nous attendons vos
interventions, votre participation, en particulier pour la parade.
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POLITIQUES 02/12/2010 À 00H00
L’excellence, ce faux ami de la science
Par PHILIPPE BUTTGEN Chercheur au CNRS, BARBARA CASSIN Chercheur au CNRS
L’ «excellence» est en train de tuer la science. Primes d’excellence, chaires d’excellence,
équipements d’excellence, laboratoires d’excellence, initiatives d’excellence, périmètres
d’excellence, pôles d’excellence. Attention, un «laboratoire d’excellence» n’est pas un
laboratoire, c’est un monceau de laboratoires qui obéit à une logique de pouvoir maquillée
en logique scientifique : la logique d’excellence. La manière forte a échoué ; ce dont le
pouvoir ne voulait plus est toujours là. La manière douce va peut-être réussir. On finance, on
arrose, en perpendiculaire aux anciennes structures, et on empile.
Prenons l’appel à projets qui promet des «initiatives d’excellence» pour les universités
françaises. C’est à l’occasion d’un emprunt d’Etat, le «grand emprunt», à peu près aussi
grand que notre président. Nous lisons des phrases insensées en novlangue, comme celleci : «Une Initiative d’excellence assure la promotion et le développement d’un périmètre d’excellence et
impulse autour de lui une dynamique de structuration du site par la mise en œuvre d’actions de
recherche et de formation innovantes dans le cadre d’une gouvernance rénovée et performante.» Le
bégaiement revient dans la célébration infantile du «niveau» : «Les candidatures, qui seront
évaluées par un jury international de très haut niveau, devront faire la démonstration de leurs forces
actuelles, mais également de leur niveau d’ambition pour l’avenir et de leur capacité à mettre en œuvre
leur stratégie.»
Abîmes
de
l’intelligence
gouvernementale :
Valérie
Pécresse
confiait
récemment
à Libération que «l’excellence, c’est le meilleur». L’excellence est le nom d’un truisme énorme et
d’un désastre scientifique. De très bons laboratoires, d’excellents laboratoires, se sont
déchirés, ont dissous leurs équipes, changé leurs programmes, exclu des chercheurs, en ont
débauché d’autres, rien que pour entrer dans un «laboratoire d’excellence». Pour le beau titre
de «Pôles d’excellence», les universités se regroupent dans des monstres d’inefficacité qui
n’ont rien à envier aux combinats de jadis. Les projets qu’elles rédigent ont la grâce d’un
dictionnaire des idées reçues, on y parle de nanotechnologies et des défis du futur, des mots
qui plaisent aux sous-préfets.
Tout cela se passe depuis moins de six mois, sous l’attentive férule des ministères, dans une
panique et une opacité jamais vues : six mois pour préempter dix ans de recherche ; dix ans
de hiérarchies figées. L’excellence s’expédie. Peu importe que les excellents d’aujourd’hui ne
le soient pas demain. Ce qui compte, c’est que le pouvoir ait la haute main sur l’excellence.
Les experts, les jurys, les critères et les grilles n’ont aucune importance ; personne ne fait
semblant d’y croire. L’excellence se décrète là où il convient. On sait déjà à peu de chose près
qui seront les heureux gagnants. La France sarkozyste est un pays où l’agitation du pouvoir
crée la qualité de la science. Les scientifiques, transformés en hommes de dossiers inutiles
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pleins de work package,track records, deliverables et dissemination, désespèrent, tandis que les
officines de rédaction, traducteurs en globish et consultants managers, prospèrent.
L’excellence est un nom de code. On parlait déjà de plans sociaux pour ne pas parler de
licenciements. L’euphémisme évolue. Il adopte maintenant le superlatif : excellent, le
meilleur. Mais il ne s’agit jamais d’identifier des singularités, où qu’elles soient. Il s’agit de
virer le grand nombre, downsizer. L’excellence est le plan social de la science.
La panique du grand emprunt part d’une histoire longue, celle de la mise en coupe de
l’université européenne par l’«économie de la connaissance». On a persuadé les chercheurs
et les universitaires qu’ils n’ont pas d’autre choix que de répondre à ces appels à projets qui
opèrent, comme à l’école, comme à l’hôpital, comme ailleurs, la restructurationdéstructuration de leur milieu de travail. Quand vous n’avez plus rien ou presque depuis
longtemps, la loterie est votre dernier espoir. Bien sûr, la loterie appauvrit le gros des
joueurs. Déjà, dans les laboratoires et les universités, les budgets baissent et les faillites
commencent. Il faut rembourser un emprunt dont les revenus n’ont pas encore été versés.
Les perdants de l’excellence cotisent pour les gagnants.
Ce qui est maintenant en cause, c’est notre métier de chercheurs et l’idée que nous nous en
faisons. Ceux qui ânonnent «l’excellence, c’est le meilleur», ceux qui nous font remplir à
longueur de journée des grilles encore plus verrouillées qu’eux, ceux-là ont-ils quoi que ce
soit à nous dire de la science ? Quel rapport entre leur excellence et le travail, la découverte,
la rigueur, l’ouverture, l’esprit et l’invention ? Combien de temps continuerons-nous à ne
plus faire ce à quoi nous consacrons nos vies ?
Les Grecs, les Arabes et nous (collectif, Fayard, 2009). Il n’y a pas de rapport sexuel (avec
Alain Badiou, Fayard 2010)
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SOMMAIRE
Éditorial
p.1
Hommages à Bernard VALETTE, Alain MOREAU, Jacqueline de
ROMILLY et Claude NICOLET
p.3
Compte rendu de l’Assemblée Générale de l’AGAP du 9 octobre 2010
p.17
Compte rendu de l'Assemblée Générale de la CNARELA du 29 mai 2010
p.22
Compte rendu de l'Assemblée Générale de la CNARELA du 26 octobre
2010
p.27
Communiqué du Forum des Sociétés savantes de juin 2010
p.34
Réunion de Forum des Sociétés savantes du 27 novembre 2010
p.38
2ème motion du jury de CAPES de Lettres classiques
p.42
Compte rendu de la réunion à l’Inspection Générale du 13 octobre 2010
p.43
Compte rendu du stage de l’AGAP 2010 : Le Théâtre antique
p.50
Rallye 2010 : corrigé et palmarès
p.80
Sujets de latin et de grec du baccalauréat 2010
p.85
Extra muros scholae - Une expérience originale : la classe transplantée à
Saint-Rémy-de-Provence
p.93
p.95
Informations diverses et annonces
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Association pour la promotion et la défense du
Grec et du latin à Aix et en Provence
(association loi de 1901 dans le but de promouvoir les Cultures
DEMANDE D’ADHÉSION POUR L’ANNÉE 2010-2011
À renseigner et à retourner à A.-M. CHAZAL 26 rue du Guil 05000 GAP
Je soussigné(e)
NOM (M., Mme, Melle) : ………………………………...................................................................……..
Prénom : ……………………………………...............................................................…..................…....
Adresse personnelle : ……………………………….....................................................................................
N° de téléphone personnel : …………………………………………..
Adresse électronique (écrire très lisiblement s.v.p.) : ……........……………………………...................…
Pour les enseignants :
Discipline : ………………………………………..........................................................…..
Établissement : …………………………………………....................................................................................................................
Adresse postale : ...............................................................................................................................................................................
Adresse électronique de l’établissement (important) : .........................................................................................
Pour ceux qui ne sont pas enseignants :
Profession : ……………………………………........................................................……..
désire adhérer à l’AGAP / renouvelle mon adhésion à l’AGAP*
*Barrer la mention inutile.
et joins à cet effet un chèque d’un montant de :
• 30 euros : membre bienfaiteur, adhésion d’un couple actif
• 22 euros : membre actif
• 7 euros : première adhésion
• 5 euros : membre actif, tarif étudiant
à l’ordre de Mme la Trésorière de l’A.G.AP.
Fait à ........................................................................................... le ........................................................................
Signature :
N.B. Si vous voulez recevoir votre carte annuelle, joignez à votre règlement une enveloppe timbrée à vos nom et
adresse. Merci.
Vos données personnelles ne seront pas transmises à l’extérieur de l’association. Conformément à la loi n° 78-17
du 6janvier 1978, vous disposez d’un droit d’accès et de rectification que vous pouvez exercer auprès de l’ AGAP .
AGAP-CNARELA MMSH 5 rue du Château de l’Horloge 13094 AIX-EN-PROVENCE CEDEX 2
[email protected] – http://agap.mmsh.univ-aix.fr
100
C.N.A.R.E.L.A
Coordination Nationale des Associations Régionales des Enseignants de Langues Anciennes
Présidente : Sylvie PEDROARENA, 11 rue Champ Saint-Pierre 39170 SAINT-LUPICIN
[email protected]
ADLAP (Amiens) : Agnès OROSCO, 3 rue du Cul-de-Sac, 80800 Vaire-sous-Corbie - [email protected]
AGAP (Aix-Marseille) : Anne-Marie CHAZAL, MMSH, 5 rue du Château de l’Horloge, 13094 Aix-en-Provence
Cedex 2 - [email protected] [email protected]
http://agap.mmsh.univ-aix-marseille.fr
ALPLA (Nancy-Metz) : L. PAGÈS, 30 rue Saint-Lambert, 54000 Nancy - [email protected]
APCELA (Poitiers) : M. COZIC, 15 square du Bois Gaillard, 17290 Aigrefeuille d'Aunis - [email protected]
www.apcela.org
APLAG (Guadeloupe) : Patricia SABLIER, Lycée de Providence, 97139 Les Abymes - [email protected]
APLG (Nantes) : Faculté des Lettres, Chemin de la Censive du Tertre, B.P. 81227, 44312 Nantes Cedex 03 –
Correspondante : Claire LAIMÉ-COUTURIER, Le Bourg, 72600 Contilly - [email protected]
http://pagesperso-orange.fr/aplg
ARDELAC (Créteil) : Mireille KO, 44 avenue de Stalingrad, 93230 Romainville - [email protected]
ARELABOR (Bordeaux) : Sylvie BERTON, 4 rue du Maréchal Maunoury, 33200 Bordeaux,
[email protected] www.arelabor.fr
ARELAB (Besançon) : ARELAB, B.P. 241, 25016 Besançon Cedex ; Siège social : 30 rue Mégevand 25000
Besançon - Sylvie PEDROARENA, 11 rue Champ Saint-Pierre, 39170 Saint-Lupicin
ARELABretagne (Bretagne) : Benoît JEANJEAN, 38 allée des Lilas, 29800 Landerneau - [email protected]
www.arela-bretagne.levillage.org
ARELACLER (Clermond-Ferrand) : Danielle NADAL, [email protected] ; bulletin à adresser à Emmanuelle
LACHAUME, 32 route de Paris, 63200 Le Cheix - [email protected] http://arelacler.free.fr
ARELACORse (Ajaccio) : Sandrine COLOMBANI, Immeuble Pacrosi, rue Sylvestre Frasseto, 20000 Ajaccio
[email protected] arelacor.corsicadream.net
ARELADijon (Dijon) : Corine CHERRIER-CHAUDAT, 3bis rue de la Prévôté, 21000 Dijon [email protected]
ARELAG (Grenoble) : Dominique AUGÉ, 210 rue du Clos Saint-Jacques, 73000 Chambéry - [email protected] http://arelag.free.fr/index.htm
APLAAL(Lille) : Laurie LEFEBVRE, 62 rue de l'abbé Bonpain, 59700 Marcq-en-Baroeul - [email protected]
ARELALIM (Limoges) : C. GALTAYRIES, 29 rue Roger Salengro, 87000 Limoges - [email protected]
ARELAL (Lyon) : C.R.D.P., 47-49 rue Philippe de Lassalle, 69316 Lyon Cedex 4 - Correspondant : N. EL HAFCI, 6
rue Peyhorgue, 69100 Villeurbanne - [email protected] [email protected]
http://arelal.free.fr
ARELAM (Montpellier) : Université Paul Valéry, route de Mende, 34199 Montpellier Cedex 5 - Correspondant :
Jean-Noël MICHAUD, 7 rue Les Câpriers, 34790 Grabels - [email protected]
ARELANice (Nice) : Claire BOSC, 3 boulevard du Parc Impérial, 06000 Nice - [email protected]
www.acnice.fr/lettres/arelan/index.php
ARELAStrasbourg (Strasbourg) : Jean-Luc VIX, 9 allée Spach, 67000 Strasbourg - [email protected] ou
[email protected] (F. SCHNITZLER) - www.crdp-strasbourg.fr/siteStatique/lettres/arelas/index.htm
ARTELA (Toulouse) : Hélène FRANGOULIS, 30 rue du Taur, 31000 Toulouse - [email protected]
artela.cnarela.free.fr
AUSPEX (Reims) : Hélène GALLOIS, 19 rue Louis Mony, 10000 Troyes - [email protected]
GELAHN (Rouen) : François GRÉGOIRE, 49 quai Henri IV, 76200 Dieppe - [email protected]
www.gelahn.asso.fr
PALLAS (Paris) : Gisèle DRONNE, 42 rue de la Py, 75020 Paris - [email protected]
http://pallas.zeblog.com
Athéna : Roger Massé, 6 rue Saint-Michel, 49300 Cholet [email protected] www.athenavoyages.com
Connaissance hellénique : Pascal BOULHOL, MMSH, 5 rue du Château de l’Horloge, 13094 Aix-en-Provence
Cedex 2
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www.up.univ-mrs.fr/~whellen/.
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