
EXP : Faisons un point sur les marchés. Pouvez-vous
nous donner votre avis sur la situation actuelle et vos
anticipations pour les prochains mois ?
JPR : La situation est purgée et même très sainement
purgée. Deux développements se sont matérialisés et
sont prometteurs pour les marchés actions :
1. La partie visible, qui est la baisse de moins 10%,
2. La partie moins visible, qui est la baisse des
taux longs obligataires en 6 mois d’environ
20%, puisqu’on est passé en moyenne en
Europe de 3% à 2,40% sur le 10 ans. Le marché
action lui n’a pas du tout réagi à cette baisse
des taux obligataires ce qui aurait dû être le cas
notamment dans l’actualisation des flux.
Cette baisse des taux obligataires a constitué une des
forces de rappel du mois d’octobre. Le début de panique
d’octobre a été coupé net par 3 forces de rappel qui
constituent au pire un fort soutien de marché pour
2015, au mieux une série de facteurs de protection des
marchés pour 2015.
En conclusion, je vois le potentiel de baisse limité à la
fois par ces taux bas obligataires, et à la fois par la
reprise américaine. L’économie américaine est, en effet,
« un homme qui sort de l’hôpital en bonne forme ». Le
pays sort du Quantitative easing, et tous les indicateurs
sont sains.
Dans un cycle de croissance en 4 phases, les Etats-Unis
sont actuellement en fin de première phase c’est à dire
que les Etats-Unis sont en début de croissance
économique, mais une croissance économique qui n’est
pas encore tirée par la consommation (le seul bien
renouvelé actuellement par les américains est la
voiture), l’immobilier remonte légèrement et les
entreprises investissent.
« Il faut être vigilant en tant qu’investisseur
français à ne pas se laisser gagner par la
morosité française »
Cette reprise américaine se propage désormais en
Grande Bretagne. Cette reprise britannique est assez
forte. Par ailleurs, la Scandinavie va bien, l’Allemagne va
bien après un moment de doute, l’Espagne repart (1ère
reprise en 7 ans du trafic autoroutier) et l’Italie est
stabilisée.
Il n’y a guère que la France qui continue de stagner. Il
faut donc être vigilant en tant qu’investisseur français à
ne pas se laisser gagner par la morosité française. Le
monde n’est pas la France et le monde va bien. Les pays
émergents vont bien. Les pays émergents, en effet, ne
se limitent pas à la Russie et au Brésil. Il y a aussi la Chine
dont le taux de croissance est de 7% ce qui est
remarquable compte tenu de sa taille. C’est aussi toute
l’Asie du sud-est qui est en plein boom, c’est aussi
l’Afrique qui va bien, c’est aussi tout le reste de
l’Amérique Latine qui va bien.
Tous ces pays sont donc rentrés dans un cycle normal
après le traumatisme de 2007.
Cette reprise américaine stimule le dollar, puisque la
devise d’un pays ne fait que refléter la cotation de ce
pays en bourse. Et le dollar reflète enfin ces sains
fondamentaux, ce qui est bon pour les actions car les
actions sont une classe d’actif fondamentalement pricée
en dollar. Pour les actions européennes, la moitié des
valeurs du marché est très orientée à l’export et pour
ces valeurs c’est un fort soutien et un facteur de
progression.
Le troisième facteur est la baisse des commoditites qui
ont toutes baissées d’environ 20% au cours des 6
derniers mois. C’est un facteur positif pour les
économies de l’OCDE. Une étude de l’université
d’Oxford vient de paraître et affirme que cette baisse
des matières premières devrait ajouter 0,50% au PIB de
l’économie européenne.
Enfin le quatrième facteur favorable est que le
sentiment de marché n’est pas bon. Beaucoup
d’investisseurs sont hésitants et c’est souvent un signe
positif.
En 2015, nous pouvons donc attendre un marché plutôt
sain avec néanmoins 4 points de tensions :
1. Elément principal : le Japon. Le Japon est en
fuite en avant économique. Les taux
obligataires sont au bord du krach. Ils ne
reflètent pas les fondamentaux de l’économie
qui a un taux d’inflation structurelle de 1,3% en
progression. Ajouté à l’augmentation du taux
de TVA de 2%, on passe alors à 3,3%. Tout cela
génère une préoccupation sur le système
financier Japonais.