Chez les enfants en cours de chimiothérapie (1), il est raison-
nable d’attendre un mois après la fin de celle-ci et un taux de
leucocytes supérieur à 1 000/mm3avant de proposer la vacci-
nation, avant la période épidémique. Chez les enfants VIH, elle
ne semble pas comporter de risque autre que celui de l’ineffi-
cacité vaccinale (CD4 < 300/ml). Chez l’enfant immunodé-
primé, un taux d’anticorps en hémagglutination de 1/32en’est
pas protecteur vis-à-vis de l’infection. Aux groupes proposés
par le Conseil supérieur d’hygiène et l’Académie américaine
de pédiatrie (tableau III), les affections neuromusculaires, dont
les myopathies, seraient à ajouter. Les bronchodysplasies des
prématurés ne sont pas abordées. La recommandation améri-
caine (6) de vacciner les femmes enceintes sans facteur de risque
à partir du deuxième trimestre de la grossesse et avec facteurs
de risque à tout moment de leur grossesse assure la protection
du petit enfant. Par extension, et cela n’est fait qu’au coup par
coup, la vaccination antigrippale de l’ensemble du personnel
s’occupant de la petite enfance, à l’hôpital ou en extrahospita-
lier serait utile, en particulier dans l’environnement des enfants
à risque.
Les événements indésirables liés au vaccin ne diffèrent pas
de ceux rencontrés chez l’adulte.
Malgré les avantages présentés, ce vaccin est peu utilisé (1)
chez les sujets de moins de 65 ans, et même dans les groupes
à risque. Le taux de vaccination dépasse rarement 30 à 50 %.
Différentes raisons sont revendiquées (méconnaissance de la
vaccination, oubli, coût vaccinal, absence de présentation pédia-
trique à 0,25 ml, nombre d’injections...). Il serait pertinent (6)
d’essayer d’augmenter les taux de couverture dans les
deux mois qui précèdent la période épidémique classique, lors
des visites médicales (en routine, fortuites à l’occasion d’un
autre symptôme) ou d’hospitalisation intercurrente.
L’évolution des tendances vaccinales pourrait dans un avenir
proche reposer sur l’introduction d’un vaccin vivant, atténué
(21-25), administré par voie nasale (gouttes ou spray). Ce
vaccin est issu d’un réassortiment génétique, adapté au froid,
mono-, bi- ou trivalent. L’implantation du virus vaccinal, directe
sur la muqueuse respiratoire, n’est pas gênée par la présence
d’autres virus respiratoires intercurrents. Il assure une protec-
tion muqueuse par l’immunité locale et générale. Il est phéno-
typiquement stable et non transmissible à des sujets contacts.
Son efficacité est proche de 100 % contre les variants antigé-
niques d’hémagglutinine. Les enfants vaccinés ayant eu la
grippe ont présenté des symptômes plus bénins que les enfants
non vaccinés. Dans la majorité des cas (23), deux doses vacci-
nales à un mois d’intervalle sont nécessaires pour une montée
correcte des anticorps, en particulier chez le jeune enfant. La
tolérance est bonne. L’intérêt de ce vaccin vient de sa facilité
d’administration, et donc de la simplicité de son renouvelle-
ment annuel chez les enfants. L’utilisation à large échelle (15)
repose sur l’ajustement annuel lié aux données épidémio-
logiques fournies par l’OMS et la nécessité de constitution d’un
lot de semence de la souche atténuée, avec construction sur
mesure de souche réassortante exprimant le sérotype approprié.
Ceci peut être difficile dans un laps de temps très court, si l’on
veut répondre aux critères de sécurité et de reproductibilité de
lot à lot demandés par les recommandations OMS.
Si ce vaccin faisait la preuve de son efficacité et de son accep-
tabilité, il serait envisageable d’étendre les indications en pro-
posant une vaccination universelle avant l’âge de 5 ans (6), ou
au moins à la population d’âge scolaire (visant à arrêter une
poussée épidémique). Pour cela, il faudrait démontrer (et des
études sont en cours) que le taux d’hospitalisation en période
épidémique est bien lié à l’influenza et non pas à d’autres virus
respiratoires concomitants. Dans le cadre de cette vaccination
universelle, outre la protection individuelle proposée aux
enfants, il y aurait à l’évidence un intérêt collectif important
(diminution de la diffusion épidémique).
Les médicaments antiviraux sont un complément important
à la vaccination antigrippale pour le contrôle et la prévention
de la maladie (6).Les dérivés de l’adamantane (26-33),aman-
tadine et rimantadine sont les plus anciens, et ont une AMM.
L’amantadine, proposée en traitement curatif, diminue la sévé-
rité et la durée des signes et symptômes de la seule grippe A.
Amantadine et rimantadine, administrées en prophylaxie à des
sujets sains, préviennent la survenue de la maladie dans 70 à
90 % des cas. Ils permettent l’infection infraclinique et, de ce
fait, la constitution d’une immunité protectrice contre les virus
circulants. La rimantadine n’est plus commercialisée en France
depuis 1993 (il existe une solution buvable aux États-Unis), elle
est mieux tolérée que l’amantadine, seule disponible, com-
mercialisée sous forme d’une gélule 100 mg, non sécable, non
ouvrable. Elle est très difficile à utiliser chez l’enfant (impos-
sible avant l’âge de 6 ans, très difficile après). Les posologies
admises sont de 5 mg/kg/j à partir de l’âge d’un an et jusqu’à
un poids de 40 kg, sans dépasser une dose optimale de 150 mg/j
avant 9 ans et 200 mg/j après 10 ans. L’indication reconnue en
France est une prophylaxie de la grippe et des infections res-
piratoires dues exclusivement au virus grippal A, en particulier
dans les collectivités, les établissements de long séjour et chez
les enfants à risque. Elle est proposée en complément à la vac-
cination, et peut être prescrite 8 à 10 jours en prophylaxie de
contact familial et 4 à 6 semaines en prophylaxie institution-
nelle. En traitement curatif, elle est réservée aux patients à haut
risque, proposée dans les 24 à 48 heures qui suivent l’appari-
tion des premiers symptômes, lorsqu’il y a certitude ou pré-
somption d’activité du virus A dans la collectivité. Le traite-
ment est interrompu dans les 24 à 48 heures qui suivent la
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La Lettre de l’Infectiologue - Tome XV - n° 3 - mars 2000
MISE AU POINT Clinique
Tableau III. Mode d’administration du vaccin influenza chez
l’enfant.
Âge Dose Nombre de doses/an Voie d’administration
6-35 mois 0,25 ml 1 ou 2 * i.m.
3-8 ans 0,50 ml 1 ou 2 * i.m.
> 9 ans 0,50 ml 1 i.m.
i.m. : intramusculaire
* 2 doses à 1 mois d'intervalle en primovaccination ou si absence de primo-
infection