Les totalitarismes face aux démocraties dans les années 1930.

Arnaud LEONARD (d'après Nathan). Lycée Français de Tananarive. 2011-2012.
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Leçon n°11. Les totalitarismes face aux
démocraties dans les années 1930
Introduction
- définition du sujet (termes et cadrage) :
Antidémocratiques par nature, les régimes totalitaires définitivement établis au
début des années 1930 adoptent une attitude hostile envers les démocraties
européennes. Si le stalinisme reste sur une logique attentiste, l’AIIemagne nazie et
l'Italie fasciste mènent une politique de réarmement et d'expansion territoriale.
L'Allemagne se rapproche de l'Italie fasciste ; les deux puissances soutiennent
ouvertement le général Franco dans la guerre d'Espagne et défient dès 1936 la France
et la Grande-Bretagne. À partir de 1938, l'expansionnisme hitlérien triomphe face aux
démocraties paralysées. Les démocraties restent neutres, parce qu'elles redoutent le
déclenchement d'une guerre européenne. Cette attitude timorée pousse Staline à se
rapprocher d'Hitler en 1939. Les totalitarismes s'entendent et préparent la guerre.
- problématique :
Comment les régimes fasciste et nazi ont-ils profité des faiblesses des démocraties ?
Pourquoi l'URSS stalinienne et l'Allemagne nazie ont-elles signé un pacte de non-
agression ?
- annonce du plan :
Nous nous demanderons d’abord quelle place occupe la guerre dans les régimes
totalitaires. Puis nous étudierons pourquoi les régimes totalitaires s'imposent dans les
relations internationales.
Arnaud LEONARD. Lycée Français de Tananarive. 2011-2012.
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I. Régimes totalitaires, régimes de guerre
a. L'Allemagne nazie tournée vers la guerre
• Humiliation et brutalisation. Beaucoup d'Allemands attribuent la défaite de 1918 au
«coup de poignard dans le dos» dont l'armée aurait été victime. Ils reprochent à la
république de Weimar d'avoir accepté le Diktat de Versailles et voient dans la
démocratie un régime imposé par les vainqueurs. Par ailleurs, la guerre de 1914-1918
a produit une brutalisation de la société, très visible en Allemagne. Chaque parti
dispose d'une milice et la vie politique tourne souvent au combat de rue.
• La Grande Allemagne. Hitler veut en finir avec le traité de Versailles, qui a réduit le
territoire et la souveraineté de l'Allemagne. Son objectif est de unir tous les
germanophones dans un seul État, puis de leur donner un « espace vital ». Ce projet
est fondé sur le racisme et le darwinisme social. Pour lui, une guerre millénaire oppose
les aryens et les juifs qui contrôlent les démocraties et l'URSS.
Préparer la guerre. Pour gagner, il faut endurcir le peuple allemand. Les
Jeunesses hitlériennes exaltent les valeurs militaires (hiérarchie, discipline, esprit de
sacrifice) et les sports de combat. Depuis son arrivée au pouvoir, Hitler ordonne à
l'armée de se préparer à la prochaine guerre. En 1935, en violation du traité de
Versailles, il tablit le service militaire et augmente les effectifs de l'armée. Il veut
prendre de vitesse les démocraties et mise sur leurs faiblesses
b. L'Italie fasciste en quête de puissance
Un nationalisme frustré. Les fascistes dénoncent la « victoire mutilée ». L'Italie n'a
pas reçu les territoires promis par la France et le Royaume-Uni pour prix de son entrée
en guerre à leurs côtés en 1915. Dès son arrivée au pouvoir.Mussolini revendique les
terres irrédentes et un empire colonial plus vaste que celui que contrôle déjà l'Italie
(Libye, Érythrée, Somalie). En 1935, l'Italie attaque l'Ethiopie, État indépendant et
membre de la SDN, laquelle décide de sanctions économiques.
• Le durcissement. Seul Hitler affirme sa solidarité, ce qui lui vaut la reconnaissance
de Mussolini : c'est la naissance de l'Axe Rome-Berlin en 1936. La propagande
fasciste appelle la population à se mobiliser autour du Duce pour préparer les guerres
à venir. Elle évoque la renaissance d'un Empire romain s'étendant en Afrique et en
Europe. Mussolini affiche ses ambitions sur la Grèce, l'Albanie, la Corse et les
territoires dés par l'Italie à la France en 1860 (Nice et Savoie).
c. L'URSS stalinienne longtemps en retrait
De Lénine à Staline. Entre 1917 et 1921, Lénine espère étendre la révolution au
monde entier. Mais les « républiques des soviets » sont écrasées en Allemagne et en
Hongrie, tandis que les bolcheviks sont confrontés à une guerre civile et extérieure.
Ensuite, Staline veut faire de l'URSS une grande puissance, ce qu'exprimait dès 1924
le slogan du « socialisme dans un seul pays ». Il ne respecte pas le droit à l'autonomie
dont disposent théoriquement les peuples composant l'URSS. Il cherche à développer
un patriotisme soviétique et socialiste puis à partir de 1938 entreprend une brutale
russification.
L'évolution du Komintern. Il condamne d'abord les partis communistes à
l'isolement en leur interdisant de s'allier aux autres partis de gauche dits «bourgeois».
Cette tactique «classe contre class favorise l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Staline
craint alors une contagion fasciste en Europe. En 1934, le Komintern appelle au «front
populaire» entre les partis communistes et toutes les forces antifascistes.
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2. Les totalitarismes, maîtres du jeu international
a. Des démocraties affaiblies
Le libéralisme en crise. Les gouvernements libéraux sont passés par la crise
commencée en 1929. Elle a plongé des millions d'Allemands dans le chômage et
favorisé l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Celui-ci, en organisant une économie de guerre,
se vante d'avoir sorti son pays de la crise. Quant à l'URSS de Staline, avec son
économie planifiée et ses statistiques impressionnantes, elle paraît épargnée par les
problèmes du capitalisme. C'est pourquoi de nombreux intellectuels sont séduits par
des régimes totalitaires qui leur semblent plus efficaces.
Chacun pour soi. Les mécanismes de coopération économique mis en place dans
les années 1920 sont perturbés par la crise. Chaque pays cherche à résoudre ses
propres difficultés, dans une logique protectionniste. La politique extérieure devient une
préoccupation secondaire. Les gouvernements doivent en plus tenir compte d'une
opinion majoritairement pacifiste, à cause du traumatisme de la Grande Guerre. D'où
la politique timorée de la France et du Royaume-Uni, qu'on appelle l'appeasement.
b. Des régimes totalitaires conquérants
La stratégie du coup de force. Hitler retire l'Allemagne de la SDN dès 1933 et
remet en cause le traité de Versailles en 1935, en rétablissant le service militaire
obligatoire. Il franchit un pas supplémentaire en 1936 en remilitarisant la Rhénanie.
L'Italie fasciste, de son côté, conquiert l'Ethiopie en 1935-1936. La SDN se contente de
sanctions économiques qui poussent Mussolini à se rapprocher d'Hitler.
La contagion fasciste et nazie. En 1936, l'Italie et l'Allemagne soutiennent Franco
dans la guerre civile qui éclate en Espagne. Les régimes autoritaires se multiplient en
Europe. Il s'agit souvent de dictatures militaires prêtes à se rapprocher de l'Allemagne
et de l'Italie par peur de l'URSS.
Le « réveil » de Staline. Il sort de sa relative passivité face à Mussolini et Hitler en
1934, quand le Komintern appelle au «front populaire» contre le fascisme. L'URSS se
rallie à la sécurité collective et entre en 1934 à la SDN. Litvinov, commissaire du
peuple aux Affaires étrangères (de 1930 à mai 1939) et représentant de l'URSS à la
SDN, prône une alliance avec les démocraties.
c. L'alliance improbable entre Hitler et Staline
Une diplomatie confuse. Paris et Londres envisagent de se rapprocher de Moscou
contre Berlin. Mais les négociations sont freinées par l'anticommunisme viscéral de
nombreux dirigeants. La peur du bolchevisme, qui caractérise la droite française, est
ravivée en 1936 par le Front populaire et par la guerre d'Espagne.
La démission face à Hitler. Malgré le armement lanen 1937, la France reste
alignée sur la politique d'appeasement britannique, qui rencontre peu d'opposition.
Hitler peut ainsi réaliser l'Anschluss en mars 1938, puis annexer les Sudètes en
septembre 1938. À la conférence de Munich, la France et le Royaume-Uni
abandonnent la Tchécoslovaquie, pays allié et démocratique. Hitler ne respecte même
pas les accords de Munich, puisqu'en mars 1939 il démantèle la Tchécoslovaquie.
Le Pacte germano-soviétique. Hitler, qui veut éviter une guerre future sur deux
fronts, fait alors des propositions d'alliance à Staline. Celui-ci tente une dernière
démarche auprès de la France et du Royaume-Uni en août 1939, en vain. Le 23 août
1939, la nouvelle de la signature d'un pacte de non-agression entre l'Allemagne nazie
et l'URSS stupéfie le monde entier.
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Conclusion
- réponse à la problématique :
À la fin de la Première Guerre mondiale, le traité de Versailles, qui fonde la SDN,
veut créer un nouvel ordre international. Mais Hitler et Mussiloni refusent ce règlement
qui abaisse leur pays et qui est le fruit d'un accord entre démocraties. Les régimes
totalitaires partagent une même haine du régime mocratique. Le communisme veut
renverser ce régime bourgeois par une révolution. Le fascisme et le nazisme le
considèrent comme un régime de faiblesse. Ils n'hésitent pas à déstabiliser les
démocraties par la violence et la propagande.
Le régime nazi ne respecte pas le traité de Versailles : Hitler réarme l'Allemagne
puis, en 1936, remilitarise la Rhénanie. Mussolini conquiert l'Ethiopie en mai 1936.
Face à ces coups de force, les démocraties réagissent peu. Elles privilégient une
politique d'apaisement : elles cherchent des compromis avec les totalitarismes, pour
éviter le déclenchement d'une guerre. La SDN se révèle impuissante. La guerre
d'Espagne (1936-1939) est un tournant : elle montre la faiblesse des démocraties. En
effet, elles n'interviennent pas pour aider le gouvernement légalement élu à se
défendre contre une rébellion armée, alors que les totalitarismes soutiennent
activement l'un ou l'autre camp.
L'Allemagne profite de cette faiblesse pour s'étendre en Europe. Elle annexe d'abord
l'Autriche en mars 1938 puis exige de la Tchécoslovaquie la région des Sudètes. Le
règlement de cette crise vèle la force du pacifisme dans les démocraties et leur
aveuglement devant l'impérialisme nazi : à Munich en octobre 1938, France et
Royaume-Uni abdiquent devant les exigences d'Hitler. L’Allemagne nazie poursuit son
expansion avec l'annexion de la Bohême-Moravie en mars 1939, imitée par l'Italie qui
conquiert l'Albanie. Fort de la neutralité de l'URSS, obtenue par la signature du pacte
germano-soviétique le 23 août 1939, convaincu de l'impuissance des démocraties,
Hitler envahit la Pologne le 1er septembre 1939.
- ouverture du sujet :
Quand prennent fin ces totalitarismes ?
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Fiche bilan - Leçon n°11. Les totalitarismes face aux démocraties dans les
années 1930
Notions :
AXE ROME-BERLIN : nom donné par les fascistes et les nazis à l'alliance
militaire entre (Allemagne et l'Italie, annoncée en 1936 et officiellement conclue
en 1937
BRUTALISATION : concept créé par l'historien américain George Mosse pour
désigner la diffusion de la violence dans une société et l'accoutumance à cette
violence.
« ESPACE VITAL » (Lebensraum) : territoire auquel a droit le peuple allemand
selon les nazis pour assurer sa survie et sa puissance.
Vocabulaire et sigles :
Anschluss : rattachement de l'Autriche à l'Allemagne réalisé le 12 mars 1938.
Chantage hitlérien : méthode hitlérienne qui vise à poser des exigences aux
démocraties sous menace de guerre.
« Diktat » de Versailles : vision allemande du traité de Versailles imposé par la
force (dicté par les vainqueurs de la Première Guerre mondiale).
Expansionnisme : politique extérieure d'un État tourné vers la conquête de
nouveaux territoires.
Les Sudètes : région située à la frontière du Reich en Tchécoslovaquie, vit
une minorité allemande de 3 millions d'habitants.
Pacte antikomintern : alliance politique et militaire contre la IIIe Internationale
communiste.
Pacte germano-soviétique: signé le 23 août 1939 par Molotov et Ribbentrop,
ministres des Affaires étrangères de l'URSS et de l’Allemagne, ce traité
proclame que les deux puissances ne se feront jamais la guerre. Des clauses
secrètes prévoient que, en cas de guerre allemande contre la Pologne, l'URSS
et l’Allemagne se partageront ce pays.
Politique d'appeasement : politique britannique menée par Neville Chamberlain
consistant à négocier avec l'Allemagne nazie.
« Politique de la main tendue » : volonté stalinienne de se rapprocher des
démocraties afin de lutter contre le fascisme.
« Coup de poignard dans le dos » : mythe selon lequel l'armée allemande
n'aurait pas été vaincue militairement en 1918, mais trahie par les civils, «
poignardée » par les révolutionnaires.
Darwinisme social : application à la société des concepts créés par Darwin
pour le monde animal exclusivement (survie du plus fort, combat pour la vie).
Russification : politique visant à imposer la langue russe et l'alphabet cyrillique
aux peuples non russes, dans le cadre de l'Empire tsariste, puis de l'URSS.
Terres irrédentes : « terres non libérées », c'est-à-dire ayant une population
italienne mais restées en dehors de l'Italie après son unification (1861-1870).
L'Italie obtient le Trentin et le Tyrol du Sud (1919), Trieste et l'Istrie (1920),
Fiume (1924) ; elle revendique aussi la Dalmatie.
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