1ère partie. Genèse et affirmation des régimes totalitaires (soviétique, fasciste et nazi) (6 h) Profond traumatisme de la Première Guerre mondiale en Europe : importante instabilité politique dès 1917-1918 qui conduit à l'émergence de régimes autoritaires, notamment dans les nouveaux pays d'Europe centrale. Parmi eux, trois régimes totalitaires, qui apparaissent comme la menace la plus importante contre la démocratie libérale : • Europe centrale : une seule véritable démocratie, Tchécoslovaquie • Europe occidentale : menace d'une nouvelle guerre dans les années trente Problématique : en quoi les régimes totalitaires représentent-ils, dans l'entre-deux-guerres, une menace fondamentale pour la démocratie ? […] C. Quelles sont les pratiques de pouvoir totalitaires ? Exercice du pouvoir avec des pratiques plus ou moins voisines 1. • • 2. • • Le chef, le parti, l'État un chef : ◦ concentration du pouvoir dans un personnage : le dictateur, source de toute légitimité ▪ système très hiérarchisé, pyramidal ▪ qualification : • Führer, Duce : conducteur, guide à suivre • Staline : chef (Vojd), « grand guide des peuples » : vision plus paternelle, mais qui implique un peuple-enfant, mineur, que le père (détenteur de l'autorité) doit conduire sur la voie de l'autonomie ◦ culte de la personnalité : étude de documents ▪ p. 172-173, p. 176 (foule d'anonymes), 1 p. 190 ▪ 2 p. 183 : Staline, héritier de Lénine et de la Révolution de 1917 ◦ => pouvoir personnel appui du dictateur sur un parti unique, monopolistique ◦ partis de masse (1939) : cf. 3 p. 183 ▪ PCUS : environ 2 millions de membres ▪ parti nazi : entre 5 et 7 millions ▪ PNF : entre 600 000 et 2,6 millions ◦ souvent confondu avec l'État : ▪ PCUS (pouvoir réel) en parallèle de l'État ▪ Allemagne : plus de réunion du gouvernement à partir de 1938 ▪ Italie : gouvernement remplacé par le Grand Conseil fasciste => emprise personnel du dictateur Un contrôle plus ou moins étroit de l'économie Deux cas : ◦ Allemagne, Italie : contrôle inégalement ▪ maintien du secteur privé ▪ mais contrôle par le régime : attribution des matières premières, de la main-d'œuvre selon les priorités de l'État ▪ volonté d'aller vers une large autonomie (autarcie) dans le cadre d'une économie de guerre • plan quadriennal (1936-1940) allemand pour bâtir une armée puissante • Italie : « batailles » (blé 1935…) pour réduire les importations ◦ contrôle encore plus important en URSS : instauration d'une économie socialiste (1929) ▪ plans quinquennaux autoritaires (normes de production) ▪ priorité : industrialisation ▪ collectivisation des moyens de production : • abolition de la propriété privée • confiscation de la terre des koulaks (déportations, fusillades…) : kolkhozes (coopératives d'État), sovkhozes (fermes d'État). 1 p. 192 résultats : inférieurs aux espérances ◦ Allemagne, Italie : priorité à l'économie de guerre ▪ réduction des biens de consommation ▪ baisse du niveau de vie des populations ◦ URSS : ▪ désorganisation de l'économie : faible production de biens de consommation ▪ désorganisation de la production agricole : famines (Ukraine, Kazakhstan, Caucase, 1931-33 : 6 millions de morts) 3. • • • • • Des populations dominées répression permanente exercée par les polices politiques : ◦ Gestapo ◦ OVRA ◦ NKVD oppression qui touche des groupes : ◦ koulaks (1929-1931), présumés opposants (notamment les anciens compagnons de Lénine, porteurs d'une légitimité historique) : Grands procès de Moscou (1936-1938 : 750 000 morts, 800 000 déportés) ◦ ségrégation des juifs en Allemagne : législation spécifique (lois de Nuremberg 4 p. 193 : « mort civile ») camps d'internement : ◦ goulags : Sibérie, régions polaires… 1930-1953 : 7 millions de déportés ◦ bagnes des îles Lipari (« Sibérie de feu ») ◦ camps de concentration nazis (6 p. 193) encadrement des « masses », notamment de la jeunesse ◦ propagande incessante : radio, affiches, cinéma… ◦ organisations d'encadrement : ▪ jeunesse : Komsomols, Balillas (5 p. 191), Jeunesses hitlériennes (2 p. 189) => forger un homme nouveau (cf. B. 2.) ▪ organisations de loisirs : clubs d'usine soviétiques, Kraft durch Freude, Dopolavoro (Opera nazionale Dopolavoro) ▪ organisations de travail (corporatisme fasciste et nazi : Arbeitsfront, Arbeitskorps), etc. => encadrement permanent de la population mais existence de mouvements d'opposition, de résistance : 5-6 p. 195 D. Combattre la démocratie Les totalitarismes face aux démocraties dans les années trente (voir aussi les démocraties face aux totalitarismes) Rappel : projet totalitaire anti-démocratique (idéologies universalistes) 1. • • 2. • • • Des démocraties mal défendues démocraties qui se défendent avec un système de sécurité collective constitué de : ◦ leurs propres alliances : France avec États de l'Europe centrale (Tchécoslovaquie, Pologne…) ◦ Société des nations or, fragilisation de la SDN : ◦ absence de pays importants : EU, URSS (acceptée tardivement : 1934, avant son exclusion en 1939) ◦ incapacité à s'opposer efficacement à des membres de la SDN : ▪ Japon : invasion de la Mandchourie (1931) ▪ expansion italienne en Éthiopie (1935-36) ▪ expansion allemande en Europe (à partir de 1936 : Rhénanie démilitarisée ; Autriche et Tchécoslovaquie, 1938…) ◦ départ des pays de la SDN : Japon et Allemagne (1933), Italie (1937) Des attitudes totalitaires différenciées face aux démocraties Hitler : ◦ stratégie : ▪ mélange de négociations, de provocations, de chantages et de coups de force ▪ profite des dissensions entre les démocraties : volontarisme français paralysé par le Royaume-Uni (ne veut pas d'une hégémonie française en Europe) ◦ résultats : parvient à ronger le traité de Versailles (cf. carte p. 180) ▪ réarmer son pays (1934) ▪ rétablir service militaire (1935) ▪ remilitariser la Rhénanie (1936) => conséquences : • fragilisation des démocraties (incapables de répondre à sa politique) • redonne confiance à sa population (revanche sur la défaite de 1918, jamais acceptée : diktat) Mussolini : plus fluctuant ◦ pas perçu comme une menace par les démocraties (Italie : alliée de 1915-18) ◦ inquiet de l'expansion allemande : s'allie à la France et au RU face aux menaces allemandes en Autriche (Front de Stresa, 1935) ◦ revirement lors de l'invasion de l'Éthiopie (1935-36) : désapprouvée par les démocraties, mais soutien de Hitler ◦ => rapprochement ▪ 1936 : accord de coopération militaire (intervention en Espagne). Axe ▪ 1939 : Pacte d'Acier, complété par le pacte anti-Komintern avec le Japon Staline : ◦ opposition initiale des démocraties : communisme, bolchevisme = révolution ◦ ◦ 3. • • • • • début des années trente : meilleure perception de la menace nazi => conciliation possible les démocraties (temporairement : il s'agit de se protéger de l'Allemagne nazie) ▪ 1934 : entre à la SDN (parrainage de la France) ▪ 1935 : traité d'assistance mutuelle avec la France (qui renforce ses alliances en Europe orientale : Tchécoslovaquie, Pologne…) ▪ 1936 : engagement de l'URSS dans la guerre d'Espagne aux côtés des Républicains 1938-39 : revirement de Staline ▪ accords de Munich : abandon de la Tchécoslovaquie par la France et le RU => Staline sait qu'il ne peut compter sur les démocraties occidentales => pacte de non-agression germano-soviétique (23/8/1939) : Staline cherche à gagner du temps (il a décapité l'Armée rouge avec les procès de Moscou) avant l'affrontement avec l'Allemagne Une guerre inévitable 1936 : tournant dans les relations internationales : ◦ alliance Italie-Allemagne ◦ internationalisation de la guerre d'Espagne : ▪ renfort italo-germanique pour les nationalistes de Franco ▪ implication soviétique aux côtés des Républicains, aidés par des combattants démocrates (Brigades internationales) => camps fixés mais démocraties toujours enlisées dans la passivité (4 p. 199) ◦ non-intervention de la France, sous pression britannique – 6 p. 201 – (mais organisation de convois d'armes clandestins), août 1936 ◦ paralysie lors de l'Anschluß (mars-avril 1938) ◦ idem avec les accords de Munich (septembre 1938) sur l'annexion des Sudètes (mobilisation française) ◦ idem lors de l'invasion du reste de la Tchécoslovaquie : mars 1939 raisons : ◦ pression britannique : s'opposer à toute menace hégémonie française en Europe ◦ divisions en France : ▪ gauche : fort courant pacifiste (jusqu'à l'aveuglement) ▪ droite : opposition au gouvernement de Front populaire (« plutôt Hitler que Blum ») ▪ extrême-droite très influente : veut l'établissement d'un pouvoir fort, une dictature en France (la défaite de la France peut aider à l'établissement de ce genre de régime) résultats : ◦ renforcement militaire des régimes nazi et fasciste ◦ démocraties en situation très défavorable : ▪ perte d'alliés importants : Tchécoslovaquie ▪ déception des démocrates allemands et italiens ▪ Staline : sait ne pas compter sur les démocraties 1939 : ◦ revendication par Hitler du couloir de Dantzig (août 1939) au détriment de la Pologne ◦ échec des négociations ◦ pacte de non-agression germano-soviétique (23/8/39) : pas d'engagement militaire de l'URSS à l'Est ◦ 1/9/1939 : invasion de la Pologne => entrée en guerre de la France et du RU Conclusion • régimes totalitaires : bien une menace contre la démocratie libérale ◦ objectifs universalistes : l'enjeu est la suprématie mondiale ◦ entreprises qui révèlent les faiblesses des démocraties • guerre : ◦ point d'aboutissement logique, car but politique délibéré des régimes nazi et fasciste (éliminer les démocraties) ◦ affrontement ultime prévisible contre l'URSS (pacte anti-Komintern), qu'il faut éliminer => guerre mondiale qui a donc les caractères d'une guerre d'extermination : lutte des démocraties et de l'URSS pour leur survie