Cristine Ricateau / Les moires, paysage corporel - CMS

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L’Artothèque éphémère
de Champagne-Ardenne #3 / 2012 - 2014
Fiche pédagogique
Cristine Ricateau
Les moires, paysage corporel
dessin • sculpture
/ Cristine Ricateau
Peintre plasticienne et restauratrice d’œuvres peintes depuis
1990, Cristine Ricateau vit et travaille à Reims et à Avignon. En 1994, elle
obtient son diplôme de l’Ecole des beaux-arts d’Avignon puis en 2004 à
Venise, une Licence et enfin en 2010, un Master 1 arts plastiques à l’Université d’Aix-en-Provence. En 1997, elle est accueillie en résidence au
Portugal et y présente une exposition. Depuis 2005, elle anime des ateliers
de peinture et d’arts plastiques pour enfants et adultes.
Ses installations rassemblent à la fois peinture, photo, dessin, sculpture
et moulage. Le corps est au centre de son travail et c’est à partir de son
observation et de son exploration qu’elle s’attache à faire des états des
lieux et des « paysages corporels ». Depuis 2006, elle travaille sur le vêtement comme protection du corps, le rendant invisible et visible à la fois. Les
vêtements brodés qu’elle réalise dévoilent l’intérieur du corps, sortes de
paysages corporels.
2010
Tulle, fils de soie de coton et
métalliques, cintre en fer blanc,
technique mixte
170 cm x 80 cm
© Cristine Ricateau
/ Les moires, paysage corporel
Les robes sculptures confectionnées par l’artiste offrent une vraie transparence, celle-là même qui est si difficile à
tenir. Les robes en suspension flottent, le
corps évoqué au travers du vêtement laisse
passer la lumière. Cristine Ricateau y inscrit
des organes 1 dans une organisation indépendante du réel... Au Moyen-âge, les quatre
humeurs (le sang, la bile jaune, le phlegme,
la bile noire ou mélancolie) sont associées
aux quatre âges de l’homme, aux quatre saisons ou aux quatre éléments. Les humeurs
sont rattachées à l’humain et au terrestre, à
notre ambivalence. Les motifs qu’elle retient
deviennent symboliques et protecteurs. La
bile (noire), celle de la mélancolie, se fait
symbole de la tristesse, celle-là même qui
sait envahir le corps en entier. Les organes
exhibés sont sortis du corps, étalés et
deviennent des motifs décoratifs d’intercession. Broder sur la tarlatane, la toile, offre
une vraie barrière, celle désirée par l’artiste,
qui donne une force, un pouvoir de défense
au fil qui relie symboliquement l’intérieur
(l’intime) avec l’extérieur. Le travail est
presque arachnéen, mais Cristine Ricateau
évoque dans le titre de l’œuvre les Moires 2 :
ces filles de la nuit, Clotho (la fileuse, celle
qui donne naissance), Lachésis (la réparatrice qui enroule le fil, le déroulement de la
vie) et Atropos (l’implacable qui coupe le fil,
la donneuse de mort). « Je me suis inspirée
et attachée à des croyances d’hommes et de
femmes qui tissent et brodent leur vie pour
échapper à la mort, la maladie… », nous dit
l’artiste.
Les trois robes sculptures, en tulle noir et
vert, brodées de fils de soie et de coton
tournent sur elles-mêmes dans un mouvement lent et silencieux. L’artiste pose
la question : « comment vivre la fragilité de
notre corps à l’heure de la globalisation et
de la mondialisation ? À l’époque de l’effacement des particularités et des frontières ?
Dans une société où tout est rendu homogène et l’utile posé comme but – comme
valeur absolue ! » et de répondre que « le
corps apparaît alors comme un rempart
contre l’adversité… ».
Béatrice Meunier
/// 1 Voir le travail des artistes Eveline Tropéa, Céline Dachary, Carole Fromenty qui travaillent elles aussi les organes brodés… Voir les
œuvres de l’artiste Catherine Noury. 2 Dans la mythologie grecque, les Moires (en grec ancien / Moîrai, littéralement les « portions de destin assignées à chaque homme ») sont des divinités du Destin implacable. Elles sont assimilées aux Parques dans la mythologie romaine.
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