ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2015 PERSISTANCE ET TROPISME DES HANTAVIRUS : CONTRIBUTION À L’ÉTUDE DES GLYCOPROTÉINES D’ENVELOPPE THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL le…………… par Alexandra Caroline Elodie HARDY Née le 8 juillet 1989 à Tassin-la-Demi-Lune (Rhône) JURY Président : Pr. Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL Membres Directeur : Sophie Le Poder Maitre de conférences en virologie à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort Assesseur : Nadia Haddad Professeur de maladies contagieuses à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort Invité : Marc Eloit Directeur de la société Pathoquest LISTE DES MEMBRES DU CORPS ENSEIGNANT Directeur : M. le Professeur GOGNY Marc Directeurs honoraires : MM. les Professeurs : COTARD Jean-Pierre, MIALOT Jean-Paul, MORAILLON Robert, PARODI André-Laurent, PILET Charles, TOMA Bernard. Professeurs honoraires : Mme et MM. : BENET Jean-Jacques, BRUGERE Henri, BRUGERE-PICOUX Jeanne, BUSSIERAS Jean, CERF Olivier, CLERC Bernard, CRESPEAU François, DEPUTTE Bertrand, MOUTHON Gilbert, MILHAUD Guy, POUCHELON Jean-Louis, ROZIER Jacques. - DEPARTEMENT D’ELEVAGE ET DE PATHOLOGIE DES EQUIDES ET DES CARNIVORES (DEPEC) Chef du département par intérim : M. GRANDJEAN Dominique, Professeur - Adjoint : M. BLOT Stéphane, Professeur UNITE DE CARDIOLOGIE - Mme CHETBOUL Valérie, Professeur * - Mme GKOUNI Vassiliki, Praticien hospitalier - Mme SECHI-TREHIOU Emilie, Praticien hospitalier DISCIPLINE : NUTRITION-ALIMENTATION - M. PARAGON Bernard, Professeur DISCIPLINE : OPHTALMOLOGIE - Mme CHAHORY Sabine, Maître de conférences UNITE DE CLINIQUE EQUINE - M. AUDIGIE Fabrice, Professeur - Mme BERTONI Lélia, Maître de conférences contractuel - Mme BOURZAC Céline, Maître de conférences contractuel - M. DENOIX Jean-Marie, Professeur - Mme GIRAUDET Aude, Praticien hospitalier * - Mme MESPOULHES-RIVIERE Céline, Praticien hospitalier - Mme TRACHSEL Dagmar, Maître de conférences contractuel UNITE DE PARASITOLOGIE ET MALADIES PARASITAIRES - M. BLAGA Radu Gheorghe, Maître de conférences (rattaché au DPASP) - M. CHERMETTE René, Professeur (rattaché au DSBP) - Mme COCHET-FAIVRE Noëlle, Praticien hospitalier - M. GUILLOT Jacques, Professeur * - Mme MARIGNAC Geneviève, Maître de conférences - M. POLACK Bruno, Maître de conférences - Mme RISCO CASTILLO Véronica, Maître de conférences (rattachée au DSBP) UNITE D’IMAGERIE MEDICALE - Mme PEY Pascaline, Maître de conférences contractuel - Mme STAMBOULI Fouzia, Praticien hospitalier UNITE DE PATHOLOGIE CHIRURGICALE - M. FAYOLLE Pascal, Professeur - M. MAILHAC Jean-Marie, Maître de conférences - M. MANASSERO Mathieu, Maître de conférences - M. MOISSONNIER Pierre, Professeur* - Mme RAVARY-PLUMIOEN Bérangère, Maître de conférences (rattachée au DPASP) - Mme VIATEAU-DUVAL Véronique, Professeur - M. ZILBERSTEIN Luca, Maître de conférences UNITE DE MEDECINE - Mme BENCHEKROUN Ghita, Maître de conférences - M. BLOT Stéphane, Professeur* - M. CAMPOS Miguel, Maître de conférences associé - Mme FREICHE-LEGROS Valérie, Praticien hospitalier - Mme MAUREY-GUENEC Christelle, Maître de conférences UNITE DE MEDECINE DE L’ELEVAGE ET DU SPORT - Mme CLERO Delphine, Maître de conférences contractuel - M. FONTBONNE Alain, Maître de conférences - M. GRANDJEAN Dominique, Professeur * - Mme MAENHOUDT Cindy, Praticien hospitalier - M. NUDELMANN Nicolas, Maître de conférences - Mme YAGUIYAN-COLLIARD Laurence, Maître de conférences contractuel DISCIPLINE : URGENCE SOINS INTENSIFS - Mme STEBLAJ Barbara, Praticien Hospitalier DISCIPLINE : NOUVEAUX ANIMAUX DE COMPAGNIE - M. PIGNON Charly, Praticien hospitalier DEPARTEMENT DES PRODUCTIONS ANIMALES ET DE LA SANTE PUBLIQUE (DPASP) Chef du département : M. MILLEMANN Yves, Professeur - Adjoint : Mme DUFOUR Barbara, Professeur UNITE D’HYGIENE QUALITE ET SECURITE DES ALIMENTS - M. AUGUSTIN Jean-Christophe, Professeur - M. BOLNOT François, Maître de conférences * - M. CARLIER Vincent, Professeur UNITE DE REPRODUCTION ANIMALE - Mme CONSTANT Fabienne, Maître de conférences - M. DESBOIS Christophe, Maître de conférences (rattaché au DEPEC) - Mme MASSE-MOREL Gaëlle, Maître de conférences contractuel - M. MAUFFRE Vincent, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel - Mme EL BAY Sarah, Praticien hospitalier UNITE DES MALADIES CONTAGIEUSES - Mme DUFOUR Barbara, Professeur* - Mme HADDAD/HOANG-XUAN Nadia, Professeur - Mme PRAUD Anne, Maître de conférences - Mme RIVIERE Julie, Maître de conférences contractuel UNITE DE PATHOLOGIE DES ANIMAUX DE PRODUCTION - M. ADJOU Karim, Maître de conférences * - M. BELBIS Guillaume, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel - M. MILLEMANN Yves, Professeur - Mme ROUANNE Sophie, Praticien hospitalier UNITE DE ZOOTECHNIE, ECONOMIE RURALE - M. ARNE Pascal, Maître de conférences - M. BOSSE Philippe, Professeur* - M. COURREAU Jean-François, Professeur - Mme DE PAULA-REIS Alline, Maître de conférences contractuel - Mme GRIMARD-BALLIF Bénédicte, Professeur - Mme LEROY-BARASSIN Isabelle, Maître de conférences - M. PONTER Andrew, Professeur - Mme WOLGUST Valérie, Praticien hospitalier DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES ET PHARMACEUTIQUES (DSBP) Chef du département : Mme COMBRISSON Hélène, Professeur - Adjoint : Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences UNITE D’ANATOMIE DES ANIMAUX DOMESTIQUES - M. CHATEAU Henry, Maître de conférences* - Mme CREVIER-DENOIX Nathalie, Professeur - M. DEGUEURCE Christophe, Professeur - Mme ROBERT Céline, Maître de conférences UNITE D’HISTOLOGIE, ANATOMIE PATHOLOGIQUE - Mme CORDONNIER-LEFORT Nathalie, Maître de conférences* - M. FONTAINE Jean-Jacques, Professeur - Mme LALOY Eve, Maître de conférences contractuel - M. REYES GOMEZ Edouard, Maître de conférences DISCIPLINE : ANGLAIS - Mme CONAN Muriel, Professeur certifié UNITE DE PATHOLOGIE GENERALE MICROBIOLOGIE, IMMUNOLOGIE - M. BOULOUIS Henri-Jean, Professeur - Mme LE ROUX Delphine, Maître de conférences - Mme QUINTIN-COLONNA Françoise, Professeur* UNITE DE BIOCHIMIE - M. BELLIER Sylvain, Maître de conférences* - Mme LAGRANGE Isabelle, Praticien hospitalier - M. MICHAUX Jean-Michel, Maître de conférences DISCIPLINE : BIOSTATISTIQUES - M. DESQUILBET Loïc, Maître de conférences DISCIPLINE : EDUCATION PHYSIQUE ET SPORTIVE - M. PHILIPS Pascal, Professeur certifié DISCIPLINE : ETHOLOGIE - Mme GILBERT Caroline, Maître de conférences UNITE DE GENETIQUE MEDICALE ET MOLECULAIRE - Mme ABITBOL Marie, Maître de conférences - M. PANTHIER Jean-Jacques, Professeur* UNITE DE PHARMACIE ET TOXICOLOGIE - Mme ENRIQUEZ Brigitte, Professeur - M. PERROT Sébastien, Maître de conférences - M. TISSIER Renaud, Professeur* UNITE DE PHYSIOLOGIE ET THERAPEUTIQUE - Mme COMBRISSON Hélène, Professeur - Mme PILOT-STORCK Fanny, Maître de conférences - M. TIRET Laurent, Professeur * DISCIPLINE : VIROLOGIE - Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences * DISCIPLINE : SCIENCES DE GESTION ET DE MANAGEMENT - Mme FOURNEL Christelle, Maître de conférences contractuel * responsable d’unité REMERCIEMENTS Au Professeur de la Faculté de Médecine de Créteil, Qui me fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury, Hommage respectueux. A Madame le Docteur Sophie Le Poder, Pour avoir accepté d’encadrer ce travail et pour ses précieux conseils, Sincères remerciements. A Madame le Docteur Nadia Haddad, Pour avoir accepté d’être mon assesseur et pour sa relecture attentive, Trouvez ici l’expression de ma reconnaissance. A Monsieur le Docteur Marc Eloit, Pour son aide dans l’encadrement de ce projet et pour sa grande disponibilité. Sincères remerciements. Au Docteur Noël Tordo, Responsable d’Unité des Stratégies Antivirales à l’Institut Pasteur, Merci de m’avoir accueillie dans votre laboratoire très agréable et sympathique au cours de mon stage de M2. Au Docteur Myriam Ermonval, Chargée de recherche à l’Institut Pasteur, Pour m’avoir encadrée tout au long du stage, et pour sa grande disponibilité. Un grand merci pour tout ce que tu m’as transmis en termes de connaissances, de raisonnement et d’organisation. Je suis extrêmement reconnaissante de tes propositions toujours constructives et de ton investissement, notamment à la toute fin du projet. Sincères remerciements. A ma famille, Ma chère maman pour ton soutien inconditionnel, et mon papa adoré pour ta grande patience, tes encouragements et ta science infuse. C’est grâce à vous que j’en suis là aujourd’hui, merci pour tout ce que vous avez fait et continuez de faire pour moi. A mes petites sœurs, que j’adore pour leur folie et leur côté déjanté. A mes grands parents, cousins, oncles et tantes, j’ai beaucoup de chance de vous avoir et d’être si bien entourée. A mes amis, le groupe 6, mes compas, les poulots, mes colloques et tous les autres que j’ai pu côtoyer au cours de ces 5 années, Pour tous ces bons moments passés ensemble et surtout pour tous les bons moments qu’il nous reste à venir. Merci d’avoir rendu ces années d’études aussi incroyables et agréables. A Kader, Merci de me supporter depuis un petit bout de temps déjà et d’être toujours là pour moi. Tu es mon équilibre, merci pour tout. TABLE DES MATIERES INTRODUCTION ............................................................................................................................... 7 I/ Partie bibliographique : les infections à Hantavirus ......................................................................... 9 1. Historique et généralités........................................................................................................... 9 2. Hôtes et pathologies associées ............................................................................................... 12 3. 4. 2.1. Les hôtes réservoirs ......................................................................................................... 12 a) Évolution des hantavirus avec leur hôte ...................................................................... 13 b) Infection des rongeurs .................................................................................................. 15 2.2. Infection humaine ............................................................................................................ 17 a) Fièvre hémorragique avec syndrome rénal (FHSR) .................................................... 18 b) Syndrome cardiopulmonaire à hantavirus (SCPH) ...................................................... 20 c) Physiopathologie et réponse immunitaire .................................................................... 21 2.3. Cycle infectieux et transmission ...................................................................................... 27 a) Transmission de rongeur à rongeur .............................................................................. 27 b) Transmission des rongeurs aux humains ..................................................................... 28 Agent étiologique ................................................................................................................... 31 a) Entrée ........................................................................................................................... 32 b) Transcription et réplication .......................................................................................... 33 c) Synthèse des particules virales et bourgeonnement ..................................................... 37 Les glycoprotéines d’enveloppe............................................................................................. 39 4.1. Maturation des glycoprotéines d’enveloppe .................................................................... 39 4.2. Fonctions des glycoprotéines d’enveloppe ...................................................................... 41 a) Entrée des particules virales ......................................................................................... 41 b) Morphogénèse des particules virales ........................................................................... 41 c) Interaction avec les facteurs cellulaires ....................................................................... 42 II / Partie expérimentale : étude des glycoprotéines d’enveloppe ..................................................... 43 1. Objectifs du travail ................................................................................................................. 43 2. Matériel et méthodes .............................................................................................................. 43 2.1. Plasmides et gènes viraux ................................................................................................ 43 2.2. Lignées cellulaires ........................................................................................................... 45 2.3. Anticorps disponibles ...................................................................................................... 45 2.4. Préparation des plasmides d’expression des glycoprotéines ........................................... 46 1 3. 4. 2.5. Construction de plasmides d’expression des glycoprotéines ........................................... 47 2.6. Transfections.................................................................................................................... 47 a) Transfection transitoire ................................................................................................ 47 b) Transfection stable ....................................................................................................... 48 2.7. Détection des glycoprotéines ........................................................................................... 48 a) Immunofluorescence intra-cytoplasmique ................................................................... 48 b) Immuno-précipitation................................................................................................... 49 c) Immunodétection sur membrane de nitrocellulose (Western Blot) ............................. 49 Résultats ................................................................................................................................. 50 3.1. Préparation des vecteurs pour l’expression de glycoprotéines Gn et Gc......................... 50 a) Clonage de GPC des virus Puumala et Tula ................................................................ 50 b) Ligations des inserts amplifiés par PCR ...................................................................... 52 3.2. Mise au point des outils de détection ............................................................................... 52 a) Détection des protéines virales par WB ....................................................................... 52 b) Détection des protéines virales par immunofluorescence intracytoplasmique ............ 54 3.3. Expression des glycoprotéines d’enveloppe en cellules de Mammifères ........................ 57 a) Mise au point des conditions de transfection ............................................................... 57 b) Transfection transitoire ................................................................................................ 57 Discussion .............................................................................................................................. 64 CONCLUSION .................................................................................................................................. 69 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................. 71 ANNEXE ........................................................................................................................................... 77 2 TABLE DES ILLUSTRATIONS Liste des figures Figure 1 : Répartition des cas confirmés en laboratoire de FHSR et de SCPH à travers le monde (Watson et al., 2014) .......................................................................................................................... 11 Figure 2: Rongeurs associés aux trois espèces de Hantavirus présents en France ............................ 12 Figure 3: Arbre phylogénétique des hantavirus (Zhang, 2014) ......................................................... 14 Figure 4 : Représentation graphique de la réponse immunitaire lors de l’infection des rongeurs (Schountz et Prescott, 2014) .............................................................................................................. 17 Figure 5: Présentation clinique typique de la NE (Vapalahti et al., 2003) ........................................ 19 Figure 6: Modèle proposé pour la pathogénie de l’infection à Hantavirus (Spiropoulou et Srikiatkhachorn, 2013) ....................................................................................................................... 26 Figure 7: Cycle infectieux des hantavirus .......................................................................................... 30 Figure 8: Organisation de la particule virale (Vaheri et al., 2013) .................................................... 31 Figure 9: Mécanisme de capture de coiffe pour l’initiation de la transcription des ARNm (PicardJean et al., 2013) ................................................................................................................................ 34 Figure 10: Mécanisme d’amorçage et de réalignement (Garcin et al., 1995) .................................... 35 Figure 11: Stratégie de transcription et réplication des hantavirus .................................................... 36 Figure 12: Cycle viral des hantavirus (Jonsson et al., 2010) ............................................................. 38 Figure 13: Représentation schématique des glycoprotéines des hantavirus (Cifuentes-Muñoz et al., 2014) ............................................................................................................................................ 40 Figure 14: Organisation des glycoprotéines à la surface des particules virales ................................. 41 Figure 15: Organisation des plasmides donneurs d’insert GPC ........................................................ 44 Figure 16: Étude des inserts GPC-PUUV présents dans le plasmide pET-30a-GPC-PUUV après sous clonage ....................................................................................................................................... 51 Figure 17: Immunodétection des protéines virales dans des lysats de cellules infectées par Western Blot. ..................................................................................................................................... 53 3 Figure 18: Détection des nucléoprotéines et des glycoprotéines virales par immunofluorescence intracytoplasmique dans des cellules VeroE6 infectées. ................................................................... 55 Figure 19: Détection de Gc PUUV dans différentes lignées cellulaires transfectées avec pcDNA3-GPC-PUUV par immunofluorescence intracytoplasmique................................................ 58 Figure 20: Révélation de Gc par immunoblot à partir de lysats de cellules HEK transfectées ou infectées par PUUV puis immunoprécipités avec un anti-Gc............................................................ 59 Figure 21: Détection de la nucléoprotéine N de TULV et de l’eGFP par immunofluorescence intracytoplasmique dans le contexte d’expression transitoire............................................................ 60 Figure 22: Détection de la glycoprotéine Gc de TULV avec le mAb 10B8 dans le contexte d’expression transitoire ...................................................................................................................... 62 Liste des tableaux Tableau 1 : Génome des hantavirus et protéines virales exprimées .................................................. 32 Tableau 2 : Anticorps disponibles contre les hantavirus ............................................................... 46 Tableau 3: Récapitulatif des réactivités des anticorps testés sur cellules VeroE6 infectées par les virus PUUV et TULV ........................................................................................................................ 56 Tableau 4 : Tableau récapitulatif des épitopes reconnus par les anticorps 4G2, 10B8 et A1C5 avec les séquences protéiques associées de PUUV Sotkamo et TULV Moravia .............................. 63 Annexe Annexe 1: Liste des hantavirus et leur hôtes associés ....................................................................... 77 4 ABREVIATIONS Aa : Acide aminé ANDV : Andes Virus CT : Queue cytosolique (Cytosolic tail) FA : Formaldéhyde GFP : Protéine fluorescente verte (Green Fluorescent Protein) GPC : Précurseur des glycoprotéines (Glycoprotein Precursor) SCPH : Syndrome cardio-pulmonaire à hantavirus (Hantavirus Cardio-pulmonary Syndrome) FHSR : Fièvre hémorragique à syndrome rénal (Heamorrhagic Fever with Renal Syndrome) HTNV : Hantaan virus IF : Immunofluorescence LT: Lymphocyte T LTC : Lymphocyte T cytotoxique mAb : Anticorps monoclonal (monoclonal antibody) N : Nucléoprotéine NE : Nephropatica epidemica ORF : Cadre ouvert de lecture (Open Reading Frame) PCR : Réaction de polymérisation en chaîne (Polymerase Chain Reaction) PBS : Phosphate Buffer Saline PBST : PBS + 0,05 % Tween 20 PUUV : Puumala virus RdRp : ARN dépendante ARN polymérase (RNA-dependant RNA polymerase) RE : Rériculum endoplasmique RNP : Ribonucléoprotéine SEOV : Seoul virus TULV : Tula virus VEGF : Vascular Endothelial Growth Factor 5 6 INTRODUCTION Les rongeurs sont capables de véhiculer de nombreux agent infectieux, pouvant être pathogènes pour l’homme. Parmi eux, nous pouvons citer la leptospirose, la peste, les arenaviroses et les hantaviroses. Les hantaviroses sont des maladies zoonotiques émergentes, qui représentent actuellement une menace en termes de santé publique. En effet, de nouveaux hantavirus ont récemment été isolés, et le nombre de cas recensés est en constante augmentation (que ce soit dû à des meilleurs outils diagnostiques ou à une véritable augmentation de la prévalence). Les hantavirus ont pour hôtes naturels des petits rongeurs (mulots, souris, campagnols…), mais également des insectivores (chauves-souris, taupes, musaraignes). Contrairement à l’infection des hôtes réservoirs qui est considérée comme chronique et asymptomatique, les humains peuvent se contaminer via les rongeurs et développer deux types de syndromes. Très peu de données sont actuellement disponibles concernant les mécanismes de pathogénicité pour l’homme de certains hantavirus, et l’établissement d’un état de persistance chez leurs hôtes naturels. Ce travail portera dans un premier temps sur une étude bibliographique des infections à hantavirus chez leurs hôtes réservoirs et chez les humains. Une deuxième partie s’intéressera plus particulièrement à l’étude expérimentale des glycoprotéines de deux hantavirus qui diffèrent selon leur pathogénicité. En effet, les glycoprotéines d’enveloppe jouent un rôle important lors du cycle viral, et interagissent avec de nombreux partenaires. Comprendre leurs modalités d’interaction avec leurs hôtes humains et réservoirs représente un enjeu de santé publique important. Cette étude des glycoprotéines d’enveloppe des hantavirus a été réalisée lors du cadre du stage de Master 2 de Virologie Fondamentale. Ce stage a été encadré par le Dr. Myriam Ermonval et a été entrepris au sein de l’Unité Postulante des Stratégies Antivirales à l’Institut Pasteur, dirigée par le Dr Noël Tordo. 7 8 I/ Partie bibliographique : les infections à Hantavirus 1. Historique et généralités Les hantavirus ont récemment été identifiés comme agents responsables de deux types de syndromes : les fièvres hémorragiques avec syndrome rénal (FHSR) en Europe et en Asie, et les syndromes cardio-pulmonaires à hantavirus (SCPH) en Amérique. L’infection par des hantavirus est cependant connue depuis longtemps puisqu’une première description de la maladie, datant du premier millénaire, a été découverte en Chine (McCaughey et Hart, 2000). D’autres épidémies ont été rapportées (Casals et al., 1970), notamment une « fièvre de Tula » qui aurait touché la Russie en 1930 (Heyman et al., 2009). En Europe, une forme modérée de FHSR a été décrite dès 1934 par Myrhman et Zetterholm, deux physiciens suédois, qui lui donnent le nom de « nephropathia epidemica » (NE) (Lee et al., 2014). Une épidémie de néphrites aigües atteint au printemps et en été 1942, un millier de soldats allemands et finlandais stationnés en Laponie. La maladie sévit également lors de la Seconde Guerre Mondiale, avec plus de 12 000 soldats japonais souffrant d’une « fièvre de Mandchourie » (Gajdusek, 1962). Les recherches s’amorcent alors et une origine virale est suspectée par des chercheurs russes et japonais. Ces derniers réussissent à reproduire la maladie chez des prisonniers en leur injectant du sérum et de l’urine filtrés issus de patients (Le Guenno et al., 1994). C’est lors de la guerre de Corée que la maladie attire l’intérêt des chercheurs occidentaux. En effet, de 1950 à 1953, plus de 3200 soldats de l’ONU sont victimes d’une « fièvre hémorragique de Corée » (Gajdusek, 1962 ; Smadel, 1953). Cette maladie d’apparition aigue est caractérisée par de la fièvre, des maux de tête intenses, une insuffisance rénale, des manifestations hémorragiques et induit une létalité d’environ 10 %. Les premiers essais d’isolement du virus en culture cellulaire sont sans résultat et il faudra attendre 1976 pour 9 que Lee mette en évidence l’agent étiologique et confirme le rôle des rongeurs en tant qu’hôte réservoir : il parvient à détecter l’antigène viral par immunofluorescence sur des coupes de poumon du mulot rayé Apodemus agrarius en utilisant comme antisérum le sérum de patient convalescent (Lee et al., 2004). Le virus est nommé virus Hantaan (HTNV) du nom de la rivière séparant les deux Corées, et devient le prototype du genre hantavirus. Il est adapté à la culture cellulaire en 1980 (French et al., 1981), ce qui permet aux scientifiques de le classer dans un nouveau genre de la famille des Bunyaviridae. En parallèle, le virus Puumala (PUUV), responsable de la nephropathia epidemica dans les pays scandinaves est isolé chez le campagnol roussâtre Myodes glareolus. D’autres agents pathogènes responsables de fièvres hémorragiques sont ensuite rapidement identifiés, comme les virus Seoul (SEOV) et Dobrava (DOBV), trouvés respectivement chez le rat Rattus norvegicus et le mulot à collier Apodemus flavicollis (Lee et al., 2014). L’ensemble des maladies causées par ces virus retrouvés sur les continents européen et asiatique sont alors regroupées sous le nom de fièvres hémorragiques avec syndrome rénal (FHSR). L’intérêt pour les hantavirus est renouvelé en 1993 quand une épidémie de détresse respiratoire éclate dans la région de Four Corners aux Etats-Unis, avec un taux de létalité élevé (plus de plus de 40 %). Les premières recherches révèlent que les anticorps des patients affectés réagissent avec des antigènes d’hantavirus, et un nouvel hantavirus est identifié chez la souris Peromyscus maniculatus (Zaki et al., 1995). Ce virus est baptisé Sin Nombre virus (SNV), et fait partie d’un nouveau groupe d’hantavirus responsables de syndromes cardiopulmonaires (SCPH). Il est intéressant de noter que le virus Hantaan n’était pas le premier hantavirus à avoir été découvert. En 1964, le virus Thottapalayam est isolé à partir d’une musaraigne capturée en Inde. Ce virus n’est pas pathogène pour l’homme et c’est seulement en 1989 qu’il a été classé dans le genre Hantavirus suite à l’étude de sa morphologie et de son organisation génomique (Zhang, 2014). A l’heure actuelle, 24 hantavirus ont été reconnus par l’International Committee on Taxonomy of Viruses (ICTV), avec pour hôtes réservoirs de nombreuses espèces d’insectivores, en plus des rongeurs. Beaucoup de hantavirus ont été isolés chez de nouvelles espèces animales comme des chauves-souris, des musaraignes et des taupes depuis une dizaine d’années, et leur statut taxonomique est actuellement en attente. 10 Les hantavirus sont présents dans le monde entier du fait de la large répartition géographique des hôtes qu’ils infectent. Seuls les hantavirus présents chez les rongeurs ont été décrits comme pouvant être à l’origine de maladies chez l’homme. La répartition mondiale des deux formes cliniques, FHSR et SCPH, causées respectivement par les hantavirus de l’Ancien et du Nouveau Monde, est donnée dans la figure 1. La sévérité de la maladie dépend beaucoup du virus concerné : en Europe et Asie, le virus Puumala est responsable d’une néphropathie modérée (nephropathia epidemica), tandis que le virus Hantaan est à l’origine d’une forme mortelle dans 5 % des cas. Entre 2005 et 2010, plus de 600 cas ont été rapportés en France, 1 500 en Belgique, 3 500 en Suède, 4 000 en Allemagne et 11 000 en Finlande, la majorité dus à PUUV (Ayral, 2013). En Amérique, dans le cas d’infections par des hantavirus comme les virus Sin Nombre (SNV) et Andes (ANDV), la maladie peut être mortelle dans 25 à 45 % des cas (détresse respiratoire aigüe puis choc). On estime qu’il y a entre 150 000 et 200 000 cas annuels de FHSR dans le monde, la plupart recensés en Chine, contre environ 200 cas annuels de SCPH. Toutefois, les études de prévalence suggèrent que les infections humaines sont encore sous-diagnostiquées (Krüger et al., 2011). Figure 1 : Répartition des cas confirmés en laboratoire de FHSR et de SCPH à travers le monde (Watson et al., 2014) 11 La gravité des maladies associées aux hantavirus combinée à l’absence de vaccin ou de traitement antiviral ainsi qu'à leur présence dans le monde entier en font un problème majeur de santé publique. De plus, aucun modèle animal permettant de reproduire les maladies humaines n’est actuellement disponible. Les hantavirus étant des virus avec un génome segmenté, l’émergence d’éventuels réassortants consécutive à la co-circulation de différents hantavirus dans une même zone géographique est également une préoccupation majeure. 2. Hôtes et pathologies associées 2.1. Les hôtes réservoirs Contrairement aux autres genres de la famille des Bunyaviridae, les Hantavirus ne sont pas transmis par des vecteurs arthropodes. Ils infectent de façon persistante et sans symptôme apparent des rongeurs qui sont considérés comme leurs hôtes naturels (Fig. 2). À ce jour, les rongeurs sont les seuls à être associés à des hantavirus pathogènes pour l’homme. De ce fait, les rongeurs ont longtemps été la cible principale de la surveillance et des recherches. L’identification de nouveaux génotypes d’hantavirus chez des insectivores a rapidement augmenté depuis la découverte d’un deuxième hantavirus chez la musaraigne en 2007 (Tanganya virus). Depuis, les recherches se sont poursuivies et des hantavirus ont également été isolés chez des chauves-souris capturées en Asie et en Afrique (Guo et al., 2013 ; Weiss et al., 2012). Figure 2: Rongeurs associés aux trois espèces de Hantavirus présents en France 12 L’ensemble de ces données récentes suggèrent qu’il y a une grande diversité d’hantavirus qui circulent chez un large spectre d’hôtes réservoirs (Guo et al., 2013). La caractérisation de ces hantavirus fournira non seulement des informations concernant la phylogénie et les origines des hantavirus, mais permettra également de comprendre les mécanismes de leur émergence chez les animaux et les humains (Zhang, 2014). a) Évolution des hantavirus avec leur hôte On peut noter une association assez étroite des différentes souches d’hantavirus avec leurs espèces réservoirs. Le tableau en annexe 1 recense les différents hantavirus et leurs hôtes correspondants. Ces associations spécifiques mettent en lumière une co-spéciation ancienne. En effet, la comparaison de la phylogénie des hantavirus avec celle de leurs hôtes réservoirs révèle une certaine congruence (Plyusnin et al., 1996), avec l’observation de trois clades d’hantavirus qui correspondent à trois sous-familles de rongeurs : les Murinae, les Arvicolinae et les Sigmodontinae/Neotminae. Il est actuellement admis que les hantavirus ont co-évolué avec leur hôte depuis des milliers d’années (Plyusnin et Sironen, 2014). L’analyse phylogénétique de l’ensemble des séquences disponibles du segment S permet de distinguer 4 phylogroupes qui sont représentés sur l’arbre phylogénétique ci-dessous (Fig. 3) : - Le premier comprend uniquement des virus retrouvés chez les Soricidae, tel que le TPMV. - Le deuxième contient des hantavirus isolés chez des chauves-souris en Chine tels que les virus Huangpi (HUPV) et Longquan (LQUV), ainsi que le virus Nova, plus divergent, qui est présent chez la taupe européenne. - Le phylogroupe III est composé de tous les virus transmis par les Murinae, et d’autres virus transmis par les Soricidae. - Enfin, le phylogroupe IV regroupe l’ensemble des virus échantillonnés chez les sous-familles Arvicolinae, Neotominae et Sigmodontinae de rongeurs. 13 Figure 3: Arbre phylogénétique des hantavirus (Zhang, 2014) La notion de quasi-exclusivité du virus pour son hôte doit cependant être nuancée car de nombreux exemples de changement d’hôte (host-switching) ont été décrits. Le virus semble capable de passer la barrière d’espèce et d’infecter un autre hôte réservoir. C’est le cas, par exemple, du virus Saaremmaa (SAAV) trouvé chez le mulot rayé Apodemus agrarius, qui est également l’hôte réservoir du virus Hantaan (HTNV). Cependant, même si HTNV et SAAV sont transmis par le même rongeur, celui-ci est réparti dans deux zones géographiques distinctes qui ne se recoupent pas : SAAV est présent en Europe de l’Est tandis qu’HTNV est présent en Corée, en Chine, dans l’Est de la Russie et à Taiwan. Les alignements de séquences révèlent que SAAV est plus proche génétiquement d’un autre hantavirus, le virus Dobrava (DOBV) isolé chez Apodemus flavicollis, que d’HTNV. En Europe de l’Est, A. agrarius et A. flavicollis partagent la même aire géographique et la transmission d’un virus ancestral DOBV depuis A. flavicollis vers A. agrarius serait ainsi à l’origine de SAAV (Nemirov et al., 2002). 14 Les hantavirus possédant un génome tri-segmenté, des réassortiments sont également possibles entre des virus très proches. Ce phénomène est notamment décrit pour différents isolats du virus Sin Nombre (SNV). Les arbres phylogénétiques obtenus diffèrent les uns des autres selon le segment étudié : certains isolats sont génétiquement proches pour deux segments mais le sont beaucoup moins pour le troisième segment (Henderson et al., 1995). La découverte récente des nouveaux hantavirus chez les chauves-souris, les taupes et les musaraignes a permis d’en apprendre plus sur les origines et l’évolution des hantavirus (Bennett et al., 2014). Les dernières données de la littérature indiquent une plus grande diversité génétique parmi les hantavirus retrouvés chez les chauves-souris et les insectivores que parmi ceux retrouvés chez les rongeurs (Plyusnin et Elliott 2011). De plus, les données phylogénétiques révèlent que les hantavirus présents chez les Chiroptera et les Soricomorpha sont toujours localisés en position basale sur les arbres phylogénétiques, ce qui pourrait indiquer que les hantavirus auraient émergé chez ces espèces avant d’infecter des rongeurs (Guo et al., 2013). Les chauves-souris sont déjà des sources connues ou supposées de beaucoup d’agents pathogènes émergents tels que certains Coronavirus, des Filoviridae, des Henipavirus. Leur large répartition géographique, leur capacité à voler sur de longues distances et leurs importantes densités de population sont autant de facteurs qui favorisent le maintien, l’évolution et la transmission de nombreux virus. Néanmoins, davantage de données et de séquences complètes sont nécessaires afin de pouvoir comprendre en détail l’histoire évolutive complexe des hantavirus. b) Infection des rongeurs L’infection des hôtes réservoirs est considérée comme chronique et asymptomatique. Cependant, des travaux décrivent un effet néfaste de l’infection avec une diminution de la survie de certains hôtes réservoirs dans leur milieu naturel. C’est par exemple ce qui est évoqué pour SNV (Luis et al., 2012), pour lequel les auteurs ont réalisé des captures de souris sur 15 ans. Ils observent une diminution de 13.4 % de la survie des mâles possédant des anticorps anti-SNV par rapport aux rongeurs sans trace d’infection, mais ces résultats ne s’affranchissent pas de multiples biais tels que l’âge ou la co-exposition à plusieurs agents 15 pathogènes. De même, la survie hivernale des campagnols infectés par PUUV serait affectée (Jonsson et al., 2010). Des études d’infection expérimentale de rongeurs ont montré que les hantavirus persistent chez leur hôte et sont excrétés dans les fèces, l’urine et la salive. Dans le cas de l’infection du campagnol roussâtre par le virus Puumala, une virémie transitoire est observée du 10ème au 14ème jour (Yanagihara et al., 1985). Le virus est ensuite disséminé dans différents organes dont le poumon (notamment dans les macrophages alvéolaires et les cellules épithéliales), le foie, la rate, les reins, le pancréas, les glandes salivaires et l’intestin grêle. Des antigènes viraux ont été observés dans les poumons par immunofluorescence jusqu’au 270ème jour post-infection, et aucune lésion anatomo-pathologique n’a pu être observée dans les différents tissus. On distingue ainsi deux phases lors de l’infection : une phase aigüe caractérisée par une virémie, une dissémination du virus et sa réplication dans les organes cibles, suivie d’une phase de persistance pendant laquelle la réplication virale semble avoir lieu à plus bas bruit (Easterbrook et Klein 2008a). De manière générale, la réponse immunitaire des hôtes réservoirs ne permet pas une clairance virale. Les anticorps neutralisants sont détectables lors de la phase aigüe dès deux semaines post-infection. Leur titre augmente ensuite pendant quelques semaines avant de diminuer et de se stabiliser. Ils sont détectables pendant la vie entière de l’animal, mais ne permettent pas d’éliminer complètement le virus (Easterbrook et Klein 2008a). Des anticorps maternels, quant à eux, peuvent protéger les jeunes rongeurs de l’infection jusqu’à deux mois. Cette différence de protection entre l’adulte et les rongeurs nouveau-nés peut être due à la différence dans la chronologie de l’infection : lorsque les rongeurs adultes sont infectés, le virus peut se répliquer jusqu'à un titre élevé qui empêche la clairance virale une fois la production d’anticorps amorcée. Les jeunes rongeurs, quant à eux, vont acquérir des anticorps maternels qui peuvent neutraliser le virus avant qu’une infection persistante ne soit établie. La réponse immunitaire est également caractérisée par une activation des cellules T régulatrices (T reg), ce qui contribuerait au maintien du virus chez les rongeurs. En effet, la réponse T reg prédomine, en particulier au niveau de sites de réplication virale comme les poumons (Easterbrook et Klein 2008b). Elle est associée à une inhibition de la synthèse de 16 cytokines pro-inflammatoires et limiterait donc la pathogénicité associée à une réponse inflammatoire trop importante, comme c’est le cas lors d’infections humaines. Cette réponse immunitaire a été beaucoup étudiée pour SEOV (Easterbrook et al., 2007) et SNV (Schountz et al., 2007). L’inactivation fonctionnelle des cellules T reg est à l’origine d’une diminution de la quantité de particules virales excrétés quantifiées en qRTPCR (Easterbrook et al., 2007). Le modèle de la réponse immunitaire chez les rongeurs est résumé schématiquement dans la figure 4 : au départ, une réponse inflammatoire modeste limite la réplication virale mais cette dernière peut reprendre épisodiquement lorsque la réponse T régulatrice se met en place par la suite, empêchant ainsi toute élimination complète du virus. Figure 4 : Représentation graphique de la réponse immunitaire lors de l’infection des rongeurs (Schountz et Prescott, 2014) 2.2. Infection humaine A la différence des infections chez les rongeurs, les hantavirus peuvent être à l’origine de deux types de syndromes chez les humains : FHSR et SCPH. Bien que les deux maladies diffèrent selon l’organe cible affecté (reins versus poumons), elles présentent des similitudes en terme de mécanismes de pathogénicité. Dans les deux cas, les affections humaines sont caractérisées par une atteinte de l’endothélium vasculaire à l’origine de fuites plasmatiques et d’hémorragies, et résulteraient toutes les deux d’une dérégulation de la réponse immunitaire de l’hôte plutôt que d’effets cytopathiques liés au virus même. 17 a) Fièvre hémorragique avec syndrome rénal (FHSR) Il existe plusieurs formes de FHSR et la sévérité des symptômes ainsi que le pronostic varient considérablement selon le virus incriminé. En effet, nous avons vu précédemment que PUUV était responsable d’une atteinte rénale modérée, nommée NE, alors que les maladies causées par HTNV en Asie et DOBV en Europe de l’Est sont beaucoup plus sévères. De façon générale, la période d’incubation est de trois semaines environ et la maladie évolue selon 5 phases distinctes : fébrile, hypotensive, oligurique, polyurique et convalescente (Jonsson et al., 2010 ; Hussein et al., 2011). - La phase fébrile : elle dure entre 3 à 5 jours et est caractérisée par des maux de tête intenses d’apparition aigue. De la fièvre, des frissons et des douleurs au dos sont également présents. Des nausées et des vomissements associés à des douleurs abdominales sont rapportés (Schmaljohn et Hjelle 1997). Les hémorragies, si elles ont lieu, apparaissent à la fin de ce stade sous forme de rougeurs au visage ou sur les muqueuses, ou de pétéchies au niveau du palais. - La phase hypotensive : elle dure de quelques heures jusqu’à 2 jours, et elle est accompagnée de manifestations hémorragiques pouvant être des pétéchies, mais aussi des injections conjonctivales et de l’épistaxis. Une thrombocytopénie et une leucocytose sont caractéristiques de cette phase. - La phase oligurique : il s’agit de la phase d’insuffisance rénale aigue, pouvant durer plusieurs jours à plusieurs semaines. Des épanchements dans l’espace rétropéritonéal ont également été rapportés (Vapalahti et al., 2003). Les résultats de laboratoire les plus souvent associés à cette phase sont une augmentation de l’urémie et de la créatinémie, une protéinurie, une hématurie microscopique et un taux élevé de protéine C-réactive. C’est une phase souvent déterminante dans l’évolution de la maladie, qui est fatale dans 50 % des cas. Le pronostic vital peut être engagé à cause de complications liées à l’insuffisance rénale, à une augmentation de la perméabilité vasculaire et à un syndrome de choc (Hussein et al., 2011 ; Manigold et Vial, 2014). 18 - La phase polyurique : cette phase correspond au début du rétablissement. La fonction rénale s’améliore, et la production d’urine augmente progressivement. - La phase de convalescence : en général les patients se remettent sans séquelles mais certaines complications peuvent survenir telles qu’une insuffisance rénale chronique et de l’hypertension (Avšič-Županc et al., 2013). La présentation clinique de la NE, qui est une maladie associée à une faible létalité (inférieure à 0.1 %), est globalement similaire à celle décrite précédemment (Fig. 5). Les symptômes sont plus modérés : il n’y a pas de manifestations hémorragiques sévères mais des pétéchies peuvent-être observées. Les 5 phases ne sont pas distinguables les unes des autres, et une simple hypotension est décrite plutôt qu’un syndrome de choc. Des symptômes oculaires, notamment une myopie aigue, ont été décrit dans 30 % des cas. Cette myopie est pathognomonique de la NE et serait causée par un épaississement du cristallin (Vapalahti et al., 2003). Les signes cliniques de la maladie étant peu spécifiques et ressemblant à une atteinte fébrile accompagnée de douleurs abdominales, la NE est très souvent sousdiagnostiquée (Avšič-Županc et al., 2013). Figure 5: Présentation clinique typique de la NE (Vapalahti et al., 2003) 19 b) Syndrome cardiopulmonaire à hantavirus (SCPH) Le syndrome cardio-pulmonaire à hantavirus est une affection sévère, causée par les hantavirus du Nouveau Monde. Il existe de nombreuses ressemblances avec la FHSR, les cellules cibles des hantavirus étant les cellules endothéliales vasculaires. À la différence de la FHSR, les poumons sont préférentiellement atteints, même si des atteintes rénales ont été rapportées (Jonsson et al., 2010). La maladie est d’apparition aigüe, avec une phase fébrile ressemblant à celle de la FHSR : on peut noter des signes non spécifiques comme de la fièvre, des douleurs musculaires et abdominales, des frissons, des maux de tête, des vomissements et de la diarrhée (AvšičŽupanc et al., 2013). Les premiers symptômes apparaissent après une période d’incubation variant de 9 à 33 jours. Cette première phase peut durer jusqu’à 5 jours, mais les patients progressent rapidement vers la phase cardio-pulmonaire, caractérisée par de la toux et une dyspnée. Une tachycardie et une hypotension sont également associées à cette phase. L’atteinte respiratoire est due à une augmentation de la perméabilité des capillaires au niveau des poumons, à l’origine de fuite plasmatique et d’œdèmes pulmonaires. Dans les cas sévères, une ventilation mécanique est nécessaire. Cette phase, souvent mortelle, peut être compliquée par un choc cardiogénique, une acidose lactique et une hémoconcentration. Une thrombocytopénie et des troubles de la coagulation sont à l’origine de manifestations hémorragiques telles que des saignements intestinaux, une hématurie ou une métrorragie. Ces symptômes sont associés à un pronostic plus réservé (Manigold et Vial 2014). Les patients qui survivent à l’insuffisance respiratoire entrent alors dans la phase diurétique. La convalescence est longue, et est marquée par la résolution des œdèmes pulmonaires. La présentation clinique des cas de SCPH suit globalement la description générale cidessus pour les différents hantavirus d’Amérique, mais elle peut être légèrement différente selon l’hantavirus concerné. Les hantavirus d’Amérique du Sud, comme ANDV, sont associés à des manifestations hémorragiques et à certaines atteintes rénales, ce qui n’est pas une caractéristique de SNV qui est retrouvé aux Etats-Unis (Pini 2004). De plus, certains hantavirus sont plus pathogènes que d’autres : ANDV et SNV sont associés à une létalité de 35 20 à 40 % (Jonsson et al., 2010), tandis que d’autres sont considérés comme étant responsables de maladies plus modérées, voire comme non pathogènes. C’est le cas par exemple du virus Choclo au Panama, où 21 % des cas diagnostiqués ne présentent pas de formes pulmonaires et où la séroprévalence de 60 % dans la population est associée à une très faible mortalité (Armien et al., 2013). Ainsi, la dichotomie entre les hantavirus du Nouveau et de l’Ancien Monde doit aujourd’hui être nuancée. Des cas de SCPH associés à des atteintes rénales ont été décrits, notamment lors d’infection en Amérique du Sud par les virus Bayou et Black Creek Canal (Macneil et al., 2011). Inversement, des manifestations pulmonaires modérées ont été rapportées chez des individus atteints de FHSR. En effet, l’étude de radiographies thoraciques (Paakkala et Mustonen 2007) révèle que plus d’un tiers de patients infectés par PUUV présenterait des affections pulmonaires modérées (atélectasie, légères effusions pleurales, infiltrats interstitiels). Malgré les différentes formes cliniques, les deux syndromes seraient la manifestation d’un même processus pathologique. c) Physiopathologie et réponse immunitaire Les cellules vasculaires préférentiellement atteintes diffèrent selon les deux syndromes associés aux hantavirus: les capillaires pulmonaires lors de SCPH et les capillaires médullaires rénaux lors de NE et de FHSR. Les cellules vasculaires endothéliales sont donc les cibles primaires des hantavirus. Si l’on tient compte de la voie de contamination des humains, c’est l’épithélium pulmonaire et les cellules endothéliales vasculaires sous-jacentes qui sont infectés en premier par inhalation. Cependant, les modalités de propagation de virus au sein de l’organisme et l’atteinte préférentielle du rein ou du poumon restent encore peu connues. Les hantavirus sont également capables d’infecter des cellules du système immunitaire telles que les macrophages, les cellules dendritiques, les lymphocytes et les neutrophiles. Une implication de certaines cellules du système immunitaire, comme les cellules dendritiques (CD) ou les macrophages alvéolaires, a été proposée (Schönrich et al., 2008 ; Rang, 2010). En effet, des CD sont présentes dans les voies respiratoires et les alvéoles, et sont capables de phagocyter les agents pathogènes. Ces CD pourraient servir à transporter les virions jusqu’aux nœuds lymphatiques régionaux, où d’autres cellules immunitaires pourraient être infectées. Après plusieurs cycles de réplication, les virions atteindraient les cellules endothéliales. 21 Quelle que soit la voie de transmission considérée, des CD immatures localisées au niveau de la peau et des muqueuses sont probablement un des premiers types cellulaires à entrer en contact avec le virus. Nous avons vu que les deux maladies étaient caractérisées par une thrombocytopénie et une augmentation de la perméabilité vasculaire à l’origine d’œdèmes pulmonaires et d’épanchements. Les fuites au niveau des capillaires seraient ainsi à l'origine des troubles systémiques, tels que l'hypotension et le choc, et de l'insuffisance rénale dans le cas de la FHSR. Les hémorragies dans la FHSR seraient le résultat d'une consommation plaquettaire accrue associée aux lésions vasculaires. Les mécanismes pathogéniques exacts restent encore mal compris aujourd’hui, et on ne sait pas encore expliquer complètement la perte de fonction de l’endothélium vasculaire. Les hantavirus n’ont pas d’effets cytopathiques directs sur les cellules qu’ils infectent in vivo et in vitro. De plus, l’infection de monocouches de cellules endothéliales in vitro avec des hantavirus pathogènes n’est pas suffisante en elle-même pour modifier la perméabilité vasculaire (Gavrilovskaya et al., 2008). À la différence d’autres virus responsables de fièvres hémorragiques, comme le virus Ebola, qui sont responsables de fuites plasmatiques par atteinte directe des cellules endothéliales, d’autres mécanismes impliquant principalement la réponse immunitaire de l’hôte ont été proposés pour les hantavirus. En effet, une réponse antivirale disproportionnée serait liée à la physiopathologie de la maladie (Manigold et Vial, 2014 ; Vaheri et al., 2013). La réponse immunitaire innée est la première ligne de défense à entrer en jeu, et permet de contrer rapidement la réplication de l’agent pathogène. Les cellules infectées possèdent notamment des Pathogen Recognition Receptors (PRR), comme la molécule RIG-I, qui sont impliqués dans l’activation de la réponse interféron (IFN) et dans la synthèse de cytokines pro-inflammatoires. Les hantavirus ont développé de nombreux mécanismes afin d’éviter la réponse IFN de type I de l’hôte. Un de ces mécanismes est l’échappement de la reconnaissance des ARN viraux par RIG-I, ce dernier reconnaissant les ARN dont l’extrémité 5’ contient un nucléotide tri-phosphate. Grâce au clivage en 5’ du premier nucléotide par la RdRp, les ARN viraux sont mono-phosphorylés en 5’ et peuvent passer inaperçus de RIG-I. Les glycoprotéines Gn et Gc sont aussi capables de sous-réguler la réponse IFN, en inhibant directement un facteur de transcription nécessaire pour l’expression d’IFN et de gènes inductibles par IFN (Macneil et al., 2011). 22 Il existe une différence dans la capacité des hantavirus pathogènes et non pathogènes à induire une réponse IFN, et ceci contribuerait, entre autres, à leur différence de pathogénicité. Le virus Prospect Hill n’est pas associé à une maladie, et est capable d’induire une réponse IFN très robuste, rapidement après l’infection, alors que les hantavirus pathogènes comme HTNV le sont moins (Macneil et al., 2011). Malgré l’existence de mécanismes pour limiter cette réponse innée, toutes les infections à hantavirus aboutissent néanmoins à la mise en place d’une réponse immunitaire humorale de longue durée. Des anticorps neutralisants apparaissent rapidement, et dans le cas de SCPH, un taux élevé d’anticorps est corrélé à une évolution positive de la maladie (Schönrich et al., 2008). Les infections à hantavirus chez les humains induisent également une forte réponse lymphocytaire. La présence de lymphocytes T CD8+ est corrélée à la sévérité de la maladie (Spiropoulou et Srikiatkhachorn 2013). De nombreuses données suggèrent que la réponse des lymphocytes T cytotoxiques (CTL) serait impliquée dans l’augmentation de la perméabilité vasculaire, en causant des dommages aux cellules endothéliales infectées (Klingström et Ahlm, 2011). Contrairement à la réponse immunitaire chez les rongeurs, il n’y a pas de régulation par les T reg. Ainsi, une forte réponse immunitaire permettrait d’éliminer rapidement et efficacement le virus chez les humains, au prix de « dommages collatéraux » sur l’endothélium vasculaire. Les cytokines pro-inflammatoires sont aussi impliquées dans la réponse immunitaire et la pathogénicité qui en découle (Hart et Bennett, 1999). Des cytokines comme le TNF-α, qui sont produites par les macrophages et les CD après leur activation, sont capables d’agir sur l’intégrité de la barrière endothéliale, en augmentant l’adhésion des leucocytes, leur migration trans-endothéliale et la fuite vasculaire (Macneil et al., 2011). Des taux élevés d’autres cytokines vasoactives telles que l’IL-1, l’IL-6, l’IFN-γ sont également retrouvés lors de la phase aigüe des deux maladies (Klingström et Ahlm, 2011). Les cytokines peuvent recruter des cellules immunitaires capables de sécréter de nouvelles molécules pro-inflammatoires, intensifiant ainsi la « tempête cytokinique » qui déstabilise l’endothélium. 23 Des études récentes ont également mis en lumière un effet direct des hantavirus sur l’endothélium, en plus de l’effet délétère du système immunitaire (Dalrymple et Mackow 2014). Un lien important entre les hantavirus et les désordres liés à la perméabilité vasculaire découle du rôle des 3 intégrines dans les atteintes hémorragiques et leur dérégulation lors d’infection à hantavirus. Les intégrines sont des protéines transmembranaires qui interviennent dans le maintien des jonctions cellulaires ainsi que dans l’adhérence des cellules à la matrice extracellulaire. Elles sont également impliquées dans la migration de cellules endothéliales, qui est une fonction essentielle pour l’angiogenèse, la réparation des vaisseaux et le maintien de l’intégrité vasculaire. En effet, des mutations ou une dérégulation des 3 intégrines sont à l’origine de manifestations hémorragiques et d’une augmentation de la perméabilité vasculaire (Schönrich et al., 2008 ; Gavrilovskaya et al., 2008). Les 3 intégrines sont présentes sous deux conformations : une conformation dépliée qui est active, et une forme repliée inactive. Il est intéressant de noter que les hantavirus pathogènes interagissent avec les 3 intégrines lors de l’entrée virale. Les hantavirus non pathogènes, quant à eux, utilisent les intégrines 1 (Dalrymple et Mackow 2014). Il a été montré que l’interaction des hantavirus avec les intégrines αvβ3 présentes à la surface des cellules endothéliales empêche la migration cellulaire médiée par les intégrines. La dérégulation des fonctions régies par les intégrines αvβ3 s’explique par le fait que les hantavirus interagissent avec les formes repliées et inactivées de ces molécules (Macneil et al., 2011 ; Gavrilovskaya et al., 2008). Les 3 intégrines contrôlent la perméabilité vasculaire de concert avec le facteur de croissance de l'endothélium vasculaire ou VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor). Ce dernier est un puissant inducteur de la perméabilité vasculaire. Il est capable de dissocier les jonctions d’adhérence formées de Vascular Endothelial cadherin (VE-cadhérines) impliquées dans le maintien de la barrière endothéliale en se liant à son récepteur : le VEGF-Receptor 2 (VEGF-R2). Cette interaction induit une internalisation de la VE-cadhérine et une perte de l’intégrité de la barrière endothéliale. Les 3 intégrines forment également des complexes avec le VEGF-Receptor 2 et leur inactivation dans des cellules knock-out induit une hyperperméabilité en réponse au VEGF, soulignant le rôle des intégrines dans la régulation du VEGF et de la perméabilité vasculaire (Mackow et Gavrilovskaya, 2009). 24 Des expériences in vitro ont montré que la perméabilité de cellules endothéliales n’était pas affectée suite à une simple infection de ces cellules par des hantavirus. Cependant, les cellules infectées sont beaucoup plus sensibles à l’action du VEGF : une induction de la perméabilité vasculaire suite à l’ajout de VEGF sur les cellules endothéliales a été observée 3 jours post infection pour ANDV, HTNV et le New York virus (Gavrilovskaya et al., 2008). C’est donc l’inhibition des 3 intégrines suite à l’infection par les hantavirus qui est à l’origine d’une dérégulation de leurs fonctions. Le VEGF peut être synthétisé par des LT activés, des macrophages, et des plaquettes (Spiropoulou et Srikiatkhachorn, 2013). Des conditions d’hypoxie peuvent aussi être responsables de la libération de VEGF par les cellules endothéliales. De plus, une autre caractéristique des infections à hantavirus est une thrombocytopénie marquée. Le mécanisme exact de cette thrombocyopénie n’est pas encore bien compris aujourd’hui mais il a été observé que les hantavirus interagissent également avec les 3 intégrines de plaquettes quiescentes. Ainsi, les plaquettes pourraient adhérer aux cellules endothéliales infectées via les hantavirus qui sont présents à la surface de ces dernières (Gavrilovskaya et al., 2010). Cette interaction des plaquettes au niveau de l’endothélium modifie radicalement les propriétés de celui-ci et peut également contribuer à créer des conditions d’hypoxie. Le modèle suivant concernant la pathogénicité des hantavirus et leurs effets sur les cellules endothéliales est actuellement accepté (Schönrich et al., 2008 ; Spiropoulou et Srikiatkhachorn, 2013) : dans un premier temps, les hantavirus infectent l’endothélium respiratoire et/ou les CD se trouvant dans l’appareil respiratoire. La dissémination du virus dans l’organisme se fait par le biais des cellules immunitaires (Fig. 6B). Une réplication efficace peut avoir lieu dans les cellules cibles, grâce à la capacité des hantavirus à retarder et à inhiber la réponse IFN, mais ils ne sont pas cytopathogènes en soi. Les cellules infectées produisent des cytokines pro-inflammatoires, attirant des monocytes, des macrophages et des LT qui, à leur tour, produisent de nouvelles molécules pro-inflammatoires comme le TNF-α. Due à l’absence d’une réponse T régulatrice, une réponse immunitaire intense et délétère impliquant les LTC a lieu dans l’endothélium et une sécrétion précoce de VEGF perturbent également l’organisation de l’endothélium via la sous-régulation des VE-cadhérines qui sont internalisées. Au final, les jonctions d’adhérence ont désorganisées (Fig. 6D). 25 Figure 6: Modèle proposé pour la pathogénie de l’infection à Hantavirus (Spiropoulou et Srikiatkhachorn, 2013) La pathogénie est complexe et multifactorielle. Les données récentes de la littérature tendent à montrer que l’hypoxie, l’induction de VEGF et l’augmentation de la sensibilité des cellules endothéliales au VEGF suite à l’interaction des hantavirus avec les intégrines sont des paramètres importants à prendre en compte pour expliquer le mécanisme de perméabilité vasculaire. 26 2.3. Cycle infectieux et transmission a) Transmission de rongeur à rongeur La transmission entre les rongeurs est horizontale. Les rongeurs excrètent le virus dans leur salive, leurs urines et leurs fèces. La durée de l’excrétion varie pour chaque virus/rongeur. De manière générale, c’est lors du premier mois que la réplication du virus est maximale et que le risque de transmission est le plus important. Le virus persiste néanmoins à vie chez son hôte et peut donc être transmis pendant de longues périodes au sein du réservoir animal (Meyer et Schmaljohn, 2000 ; Vaheri et al., 2013). Des excrétas de campagnols roussâtres infectés par PUUV ont été testés par RT-PCR et de l’ARN viral a été trouvé de 14 à 28 jours post-infection (p.i) dans la salive, de 14 à 21 jours p.i dans les urines, et de 11 à 28 jours p.i dans les fèces (Hardestam et al., 2008). La présence d’ARN viral évalué par RT-PCR témoigne de la présence de particules virales infectieuses et des rongeurs séronégatifs inoculés par voie intranasale avec ces différents excrétas subissent une séroconversion.. Dans la nature, la transmission par voie aérienne est considérée comme la voie principale de contamination entre les rongeurs. La transmission directe par morsure est un autre mode de contamination. Des injections par voie intramusculaire sont efficaces pour infecter des rongeurs, et il existe une association significative entre la présence de plaies chez des rongeurs capturés et leur statut séropositif (Glass et al., 1988). La prévalence de l’infection est plus élevée chez les mâles adultes, dont l’agressivité accrue par rapport aux femelles augmente leur chance d’entrer en contact avec le virus (Jonsson et al., 2010). Une transmission sans contacts rapprochés entre rongeurs a également été décrite (Kallio et al., 2006). Des rongeurs ont été infectés indirectement par PUUV en laboratoire, après exposition à de la litière contaminée, et ce jusqu’à 15 jours après retrait des animaux contaminés. Cette étude suggère que la transmission indirecte jouerait un rôle important dans le maintien du virus dans la population de rongeurs. 27 La transmission est donc horizontale, et se fait par contact et par voie aérienne. Aucun cas de transmission verticale n’a été rapporté, et la transmission par ingestion nécessite encore d’être explorée. b) Transmission des rongeurs aux humains Contrairement aux autres genres de la famille des Bunyaviridae (Phlebovirus, Tospovirus, Orthobunyavirus, Nairovirus), les hantavirus ne sont pas transmis par des vecteurs arthropodes. La transmission aux humains se fait par inhalation d’aérosols provenant d’excrétas de rongeurs infectés (Watson et al., 2014). Ainsi la répartition des cas humains est à mettre en relation étroite avec la répartition géographique et temporelle des rongeurs auxquels sont associés les virus. Seulement deux cas de transmission transcutanée ont été décrits alors que la transmission par morsure est très répandue au sein du réservoir animal. Dans les deux cas, il s’agit de contamination de laboratoire : l’une causée par une morsure de rongeur infecté et l’autre après exposition percutanée à du matériel biologique infecté (Pedrosa et Cardoso, 2011). Le virus Andes constitue quant à lui une exception puisque de rares cas de transmission d’homme à homme, sans contact avec des rongeurs, ont été rapportés. Lors d’une épidémie en Argentine en 1996, 20 cas de SCPH ont été étudiés et les enquêtes épidémiologiques ont révélé que certaines infections seraient dues à des contacts rapprochés avec les malades (Wells et al., 1997). D’autres cas de transmission interhumaine ont été décrits pour ANDV, et l’exposition à des fluides contaminés (salive, urine, semence) pourrait être une voie d’infection (Watson et al., 2014). Le nombre de cas humains est directement lié à la population de rongeurs et à la prévalence des hantavirus dans le réservoir animal. Les épidémies humaines sont généralement associées à une forte augmentation de la densité des rongeurs, puisque le risque d’entrer en contact avec des animaux infectés est alors accru. La densité des populations des rongeurs subit elle-même des fluctuations dont les mécanismes sont complexes. Parmi les facteurs écologiques, on peut notamment citer les conditions climatiques, l’abondance de la nourriture, la présence de prédateurs et les modifications de leur écosystème (déforestation, urbanisation). Par exemple, lors de l’hiver 2007, 28 particulièrement doux, la Suède a connu une importante épidémie d’hantavirose: la couverture de neige peu épaisse aurait conduit un nombre anormalement élevé de rongeurs à envahir les maisons et ainsi à entrer en contact avec les humains (Reusken et Heyman 2013). Des contacts directs ou indirects avec les excrétas de rongeurs constituent donc la modalité principale de contamination humaine. Les individus les plus à risque sont ceux qui travaillent à proximité de ce réservoir comme les gardes forestiers, les agriculteurs, les trappeurs ou les chasseurs (Avšič-Županc et al., 2013). L’exposition à des excrétas de rongeurs infectés peut également se faire lors de contacts avec des nids de rongeurs, lors de travaux de réparation ou de nettoyage d’habitats infestés. Les greniers, garages, granges, cabanes de jardin, chalets d’été sont souvent des endroits mal ventilés, propices à l’installation de rongeurs, et leur nettoyage peut créer des aérosols infectieux. Le camping en forêt et l’entrainement militaire, s’il a lieu pendant de longues périodes à l’extérieur dans des zones de forte prévalence de rongeurs infectés, sont aussi considérés comme des activités à risque (Watson et al., 2014 ; Reusken et Heyman, 2013). En ce qui concerne les animaux de compagnie, la possession d’un chat ou d’un chien a été identifiée comme facteur de risque (Watson et al., 2014). Aucune donnée n’a démontré la capacité des animaux domestiques à transmettre le virus, seules quelques études sérologiques ont mis en évidence des anticorps dirigés contre des hantavirus chez ces espèces (Dobly et al., 2012). Leur rôle potentiel en tant que facteur de risque pourrait être lié au fait que les chats chassent les rongeurs à proximité des habitations, ce qui augmenterait la probabilité d’entrer en contact avec des animaux morts. Les rongeurs domestiques constituent un facteur de risque pour la santé publique, un cas de transmission de SEOV par des rats domestiques ayant par exemple récemment été reconnu au Royaume Uni. Les deux rats domestiques du patient (Rattus norvegicus) se sont avérés positifs en RT-PCR pour une souche de SEOV, nommée « Cherwell », différente des souches précédemment isolées chez les rats sauvages. Le dépistage des vingt-et-un rats de l’élevage dont ils étaient issus a révélé qu’un tiers des animaux avait une RT-PCR positive pour SEOV et HTNV. Une étude épidémiologique rétrospective a montré que le conjoint de l’éleveur avait été hospitalisé onze mois plus tôt pour une infection virale non diagnostiquée à l’origine d’une thrombocytopénie et d’une insuffisance rénale (Jameson et al., 2013). A l’heure 29 actuelle des études de prévalence de l’infection par le virus chez les rats domestiques et sauvages doivent être mises en œuvre afin de déterminer le risque de transmission à l’homme. Leur résultat permettrait d’évaluer la pertinence et la nature de contrôles sanitaires réguliers dans les élevages et les lieux de vente. Jusqu’à présent, les hantavirus présents chez les chauves-souris et les Soricomorphae n’ont pas été détectés chez les humains. Il est nécessaire de mettre en place des tests sérologiques afin de pouvoir tester des échantillons de sérums et d’évaluer le potentiel zoonotique de ces hantavirus. Le schéma récapitulant le cycle infectieux des hantavirus conduisant à la contamination humaine est donné dans la figure 7. Figure 7: Cycle infectieux des hantavirus Source : http://www/everything-taxidermy.com/hantavirus 30 3. Agent étiologique 3.1. Structure de la particule virale Les hantavirus, tout comme les autres genres de la famille des Bunyaviridae, sont des virus enveloppés dont le génome est constitué de trois segments d’ARN négatif monocaténaire (Plyusnin et Elliott 2011). Ces trois segments appelés small (S), medium (M) et large (L) selon leur taille relative, sont associés aux nucléoprotéines (N) et à l'ARNdépendante ARN polymérase (RdRp) sous forme de ribonucléoprotéines RNP (Fig. 8). Les extrémités non codantes 5’ et 3’ de chaque segment sont conservées pour les différents virus et pour les segments. Elles sont complémentaires l’une de l’autre et peuvent s’apparier de façon stable pour former des structures circulaires de type « queue de poêle » qui fonctionnent comme des promoteurs pour la transcription virale (Plyusnin et al., 1996). Figure 8: Organisation de la particule virale (Vaheri et al., 2013) Les trois segments S (1,6-2kb), M (3,6kb) et L (6kb) codent respectivement pour la nucléoprotéine N, pour le précurseur GPC des glycoprotéines d’enveloppe Gn et Gc, et pour la 31 RdRp (tab. 1). Cette dernière assure la transcription ainsi que la réplication des ARN messagers (ARNm), et est également dotée d’une activité de capture de coiffe, permettant d’initier la transcription. En plus de coder pour N, le segment S des hantavirus portés par les rongeurs de la famille des Cricetidae code pour une protéine non structurale NSs. Sa phase ouverte de lecture se trouve sur une région chevauchante avec la phase ouverte de lecture de la nucléoprotéine N (Vaheri et al., 2013). Tableau 1 : Génome des hantavirus et protéines virales exprimées Segment Taille (kb) Protéines exprimées S (small) 1.6 - 2 Nucléoprotéine N Protéine non structurale NSs M (medium) 3.6 Glycoprotéines d’enveloppe Gn et Gc L (large) 6 ARN dépendante ARN polymérase Les particules virales sont pléomorphes, leur taille varie de 100 à 170 nm. Elles possèdent à leur surface des glycoprotéines Gn et Gc enchâssées dans la membrane sous forme d’oligomères. Ces glycoprotéines forment des projections (ou « spikes ») dépassant de 5 à 10 nm de la surface de la particule virale, qui sont révélées en microscopie électronique (Plyusnin et Elliott 2011). 3.2. Cycle viral a) Entrée Les différences de tropisme cellulaire entre les hantavirus responsables de FHSR et de SCPH sont mal documentées. L’utilisation de modèles cellulaires a conduit à proposer la fonction de récepteur à différentes protéines cellulaires. L’entrée dans la cellule se fait via l’attachement des glycoprotéines de surface Gn et Gc sur les récepteurs des cellules cibles. Parmi les facteurs cellulaires interagissant avec les glycoprotéines lors de l’entrée, on peut citer les intégrines αv3, le decay-accelerating factor (DAF/CD55) et le récepteur du 32 complément C1q (gC1qR/p32), mais leur rôle direct nécessite encore d’être confirmé par des études in vivo (Cifuentes-Muñoz et al., 2014). Une fois les particules virales fixées au niveau des cellules cibles, elles sont internalisées par endocytose. Le mécanisme exact d’endocytose demeure largement méconnu. Des études ont montré que le BCCV, HTNV, et SEOV utilisent la voie clathrine-dépendante, tandis que ANDV emprunterait une voie n’impliquant pas la clathrine (Cifuentes-Muñoz et al., 2014 ; Ramanathan et Jonsson, 2008). Afin de libérer le matériel génétique dans le cytoplasme, une étape de fusion de l’enveloppe virale avec la membrane de l’endosome doit avoir lieu. Cette étape est médiée par une protéine de fusion. Pour les hantavirus, une séquence hautement conservée interagissant avec des liposomes in vitro a été identifié comme peptide de fusion candidat. Des modélisations du repliement et de la structure de Gc suggèrent qu’il s’agit d’une protéine de fusion de classe II (Tischler et al., 2005). Pour les autres Bunyaviridae, Gc est également associé à une activité fusogénique. Récemment, la structure cristallographique de la glycoprotéine Gc du virus de la Fièvre de la Vallée du Rift a confirmé qu’elle possédait beaucoup de similarités avec les protéines de fusion de classe II (Dessau et Modis, 2013). C’est la baisse du pH dans l’endosome qui est à l’origine d’une modification de la conformation de la Gc. Le peptide de fusion est alors exposé et va s’insérer dans la membrane cellulaire pour permettre son rapprochement et sa fusion avec l’enveloppe virale (Plyusnin et Elliott, 2011). b) Transcription et réplication La synthèse d’ARN viral nécessite une étape de transcription, pour synthétiser des ARNm codant pour les protéines virales, puis de réplication, pour produire de l’ARN génomique. Ces étapes de transcription et de réplication sont similaires à celles décrites pour les autres virus à ARN de polarité négative. Ici, le génome n’est pas directement infectieux, la première étape de transcription d’ARN – en ARN + est donc nécessaire. Chez les hantavirus, la RdRp utilise un mécanisme particulier, décrit pour les virus appartenant à la famille des 33 Orthomyxoviridae tel que le virus influenza, pour initier la transcription : le mécanisme de capture de coiffe (Fig. 9). La synthèse des ARNm viraux est initiée grâce à un oligoribonucléotide coiffé d’origine cellulaire, de 10 à 18 nucléotides de long, obtenu par clivage de son extrémité 5’ grâce à l’activité endonucléasique associée à la polymérase (Vaheri et al., 2013). Figure 9: Mécanisme de capture de coiffe pour l’initiation de la transcription des ARNm (Picard-Jean et al., 2013) La polymérase est un complexe constitué de plusieurs domaines dont un se lie à l’ARN viral, alors qu’un autre fixe la coiffe d’ARNm cellulaires. La polymérase possède une activité endonucléasique qui clive l’ARNm cellulaire, puis l’élongation et la synthèse d’un ARN de polarité positive peuvent commencer, en utilisant l’ARN viral comme matrice. Les hantavirus possèdent des répétitions de séquences AUG au niveau de leur extrémités 3’ et un deuxième mécanisme original appelé « prime and realign » a été décrit 34 pour le début de la transcription (Garcin et al., 1995). Les amorces d’origine cellulaire possèdent un résidu G au niveau de leur extrémité 3’ qui s’apparie avec le C du premier AUC de l’ARN viral servant de matrice, c’est-à-dire qu’elle s’apparie en position +3. L’amorce est ensuite allongée de quelques bases, avant de glisser en arrière de trois nucléotides et de se réaligner avec les AUC répétés de l’ARN viral (Fig. 10). Le résidu G de l’amorce se retrouverait ainsi en position -1 et permet une copie exacte de l’ARN viral. De plus, la répétition de ce mécanisme est à l’origine de la répétition de la séquence terminale sur le brin d’ARN naissant. Figure 10: Mécanisme d’amorçage et de réalignement (Garcin et al., 1995) Après l’initiation et la transcription de la répétition de la séquence terminale, la polymérase « glisse », réaligne l’ARNm naissant, puis continue la transcription. En ce qui concerne le segment S, la protéine NSs est traduite à partir d’un deuxième codon AUG. Le ribosome effectue un balayage de l’ARNm et peut initier la traduction à partir 35 du premier AUG pour la nucléprotéine N ou à partir d’un deuxième AUG plus en aval pour la NSs (Fig. 11). Figure 11: Stratégie de transcription et réplication des hantavirus La réplication peut ensuite avoir lieu quand des quantités suffisantes de N ont été synthétisées. En effet, pour l’étape de réplication, il doit y avoir assez de nucléoprotéines pour encapsider l’antigénome. Cet antigénome, de polarité positive, est une copie exacte de l’ARN viral et sert alors de matrice pour la synthèse des molécules d’ARN viral. L’initiation de la réplication suivrait le même mécanisme d’amorçage puis de réalignement décrit pour la transcription, à la différence que l’initiation se fait avec un GTP plutôt qu’un oligonucléotide coiffé. De plus, une étape supplémentaire de clivage du résidu G qui se retrouve en position -1 de l’ARN naissant a été proposée. Ce clivage de l’extrémité 5’ triphosphate est réalisé via 36 l’activité endonucléasique de la polymérase et permet de générer une extrémité 5’ monophosphate, qui ne pourra pas être reconnue par les systèmes de défense antiviraux de la cellule hôte (Garcin et al., 1995). De manière générale, les avancées concernant la compréhension approfondie des mécanismes moléculaires impliqués dans la transcription et la réplication sont limitées, à l’heure actuelle, par l’absence d’un modèle de génétique inverse pour les hantavirus. La localisation cytoplasmique précise de ces différentes étapes n’est pas encore clairement établie. D’autres membres de la famille des Bunyaviridae, comme le Bunyamwera virus, exploitent les membranes de l’appareil de Golgi pour la réplication et constituent des usines virales (Vaheri et al., 2013), mais cela n’a pas été décrit pour les hantavirus. Il a été proposé que la transcription puisse avoir lieu au niveau de « Processing bodies » (P bodies), qui représentent un pool d’ARNm cellulaires utilisables pour initier la transcription par vol de coiffe. c) Synthèse des particules virales et bourgeonnement La traduction des protéines virales se fait dans le cytoplasme pour la N et la RdRP, tandis que les glycoprotéines sont synthétisées et subissent leur maturation au niveau du réticulum endoplasmique, puis de l’appareil de Golgi. Nous verrons plus tard le détail de la biogénèse des glycoprotéines Gn et Gc. Après les étapes de transcription, traduction et réplication, c’est au niveau de la membrane de l’appareil de Golgi que va être initiée la morphogénèse des particules virales. Il s’agit là d’une caractéristique des Bunyaviridae : le processus de morphogénèse s’effectue par l’intermédiaire des glycoprotéines qui s’accumulent dans l’appareil de Golgi et vont assurer le recrutement des RNP néoformées. Il semblerait que certains hantavirus, notamment ceux du Nouveau Monde comme SNV, (Deyde et al., 2005) puissent également s’assembler au niveau de la membrane plasmique, et bourgeonner directement à ce niveau, en sus de la voie de sécrétion. L’ensemble du cycle viral des hantavirus est représenté dans la figure 12 ci-dessous. 37 Figure 12: Cycle viral des hantavirus (Jonsson et al., 2010) Le cycle viral des hantavirus : 1. Le virion s’attache à la surface de la particule virale via des interactions entre les glycoprotéines d’enveloppe et les récepteurs cellulaires. 2. L’entrée se fait par endocytose et le génome viral est libéré dans le cytoplasme. 3. La transcription génère de l’ARN copie (ARNc) à partir de l’ARN viral (ARNv). 4. La traduction des ARNm des segments S, M et L par la machinerie cellulaire donne les protéines virales. 5. l’ARNv est répliqué, s’associe aux nucléoprotéines pour former les ribonucléoprotéines (RNP), puis les RNP sont transportées jusqu’à l’appareil de Golgi. 6. L’assemblage des particules virales se déroule au niveau du Golgi, ou au niveau de la membrane pour certains hantavirus du Nouveau Monde. 7. Le bourgeonnement se fait via la fusion des vésicules contenant le virion mature avec la membrane plasmique. Les glycoprotéines virales interviennent à plusieurs niveaux du cycle viral par interaction avec les facteurs cellulaires lors de l’entrée et du trafic intracellulaire, mais aussi avec des facteurs viraux lors de la morphogénèse des particules virales. Par ailleurs, elles sont 38 également importantes lors des phases d’infection puisqu’elles vont présenter différents tropismes et induire différentes activations et interactions avec le système immunitaire et les endothéliums vasculaires chez l’homme et le réservoir naturel, et en fonction de l’espèce de virus et de la maladie associée (Vaheri et al., 2013). 4. Les glycoprotéines d’enveloppe 4.1. Maturation des glycoprotéines d’enveloppe Les glycoprotéines d’enveloppe Gn et Gc sont codées par un précurseur glycoprotéique (GPC) qui contient en région N-terminale une séquence signal permettant son entrée dans le réticulum endoplasmique (RE) après clivage du peptide signal. Ce polypeptide subit par ailleurs un clivage co-traductionnel dans la lumière du RE de la séquence signal conservée chez les hantavirus, WASAA, pour générer Gn et Gc (Plyusnin et Elliott, 2011). Elles possèdent chacune un ectodomaine orienté vers la lumière du RE, un domaine transmembranaire ainsi qu’une queue cytosolique (CT). Ce domaine cytosolique est plus long, 150 acides aminés (aa) pour Gn, comparé au court domaine cytoplasmique d’une dizaine d’aa de Gc (Fig. 13). Peu de données sont disponibles concernant la maturation des glycoprotéines des hantavirus, dont les mécanismes d’adressage entre le RE et le Golgi sont par ailleurs étudiés chez d’autres Bunyaviridae. L’assemblage de Gn avec Gc se fait au niveau du RE à partir duquel l’hétérodimère est transporté jusqu’au Golgi. Ainsi, bien que les séquences des domaines cytosoliques de bunyavirus soient très variables selon l’espèce, un signal d’adressage au Golgi a été identifié dans le domaine GnCT alors que la queue cytosolique de Gc possèderait un signal de rétention dans le RE (Plyusnin et Elliott, 2011). L’interaction Gn-Gc permettrait le transport et la localisation de l’hétérodimère dans le Golgi. 39 Figure 13: Représentation schématique des glycoprotéines des hantavirus (Cifuentes-Muñoz et al., 2014) Les ectodomaines, les régions transmembranaires et les queues cytosoliques sont représentées par rapport à leur position relative à la membrane. Le peptide signal (SP) ainsi que la séquence WASAA indiquent les deux sites de clivage de GPC à l’origine des deux glycoprotéines Gn et Gc. N représente la localisation des résidus asparagine susceptibles de subir des glycosylations, et les numéros correspondent à la numérotation des acides aminés de la GPC d’ANDV. ZF signale la localisation des domaines en doigts de zinc, FL indique la localisation du domaine de fusion putatif d’ANDV et RNC-BS correspond aux sites suggérés de liaison des glycoprotéines aux RNP. Des structures originales d’hantavirus, mises en évidence à la surface des particules virales notamment pour TULV, montrent que les hétérodimères sont capables de former des complexes de symétrie d’ordre 4 (Huiskonen et al., 2010), à la différence des structures décrites pour les autres virus de la famille des Bunyaviridae (pentamères et hexamères décrits pour le virus de la fièvre de la vallée du Rift, par exemple). Les glycoprotéines sont organisées en pics appelés « spike complexes » enchâssés dans l’enveloppe virale dans lesquels 4 molécules de Gn sont associées à 4 molécules de Gc (Fig. 14). 40 Figure 14: Organisation des glycoprotéines à la surface des particules virales A. Modèle de l’organisation de la surface des particules virales de TULV (Huiskonen et al., 2010) B. Détail de l’organisation des complexes oligomériques Gn-Gc (Jussi Hepojoki et al., 2010) 4.2. Fonctions des glycoprotéines d’enveloppe a) Entrée des particules virales Les glycoprotéines permettent l’attachement des particules virales aux cellules cibles (à l’origine du tropisme cellulaire des virus) puis leur entrée par endocytose via la fusion des membranes virales et cellulaires. L’activité fusogénique est attribuée à Gc et les dernières données tendent à confirmer l’hypothèse qu’il s’agit d’une protéine de fusion de classe II (Tischler et al., 2005). Une séquence hautement conservée de Gc interagissant in vitro avec des liposomes a été identifiée comme peptide de fusion putatif chez ANDV (Fig. 13). b) Morphogénèse des particules virales Lors du cycle viral, le site d’accumulation des glycoprotéines détermine le lieu de l’assemblage des particules virales. Les hantavirus ne possédant pas de protéines de matrice, il semblerait que les queues cytosoliques des glycoprotéines puissent jouer un rôle de matrice et interviendraient dans le recrutement des RNP (Hepojoki et al., 2012). Des expériences de co-immunoprécipitation ont en effet montré une interaction entre la nucléoprotéine N et les 41 queues cytosoliques de Gn et Gc exposées dans le cytosol après formation des hétérotétramères (Hepojoki et al., 2010b). Le repliement des deux domaines en doigts de zinc ainsi que le rôle de certains résidus à proximité de ces derniers sont nécessaires pour la liaison de la N aux glycoprotéines (Cifuentes-Muñoz et al., 2014). c) Interaction avec les facteurs cellulaires Les glycoprotéines d’hantavirus, par leur possibilité à interagir avec différents constituants cellulaires, ont été impliquées dans certains mécanismes physiopathologiques. En particulier leur rôle au niveau de l’endothélium a été bien étudié pour des virus pouvant être facilement cultivés in vitro tels que SNV et HTNV (Mackow et Gavrilovskaya 2009). Comme nous l’avons décrit, l’inactivation des récepteurs 3-intégrines lors de l’attachement des glycoprotéines d’enveloppe virale est notamment à l’origine d’une augmentation de sécrétion du facteur de croissance cellulaire endothélial VEGF, lui-même responsable de l’augmentation de la perméabilité vasculaire caractéristique des pathologies FHSR et SCPH. Par ailleurs, les glycoprotéines ont été identifiées comme étant associées à la virulence, puisqu’un changement d’acide aminé dans Gn serait responsable de la différence de pathogénicité observée dans un modèle de souriceaux nouveau-nés infectés avec des souches virulentes ou atténuées d’HTNV (Ebihara et al., 2000). Les glycoprotéines interviennent également dans le cadre d’interactions avec le système immunitaire de l’hôte. En effet, une diminution de l’induction de la voie de synthèse de l’interféron dans des cellules infectées a été associée au domaine cytosolique de Gn (Matthys et al., 2011), révélant ainsi l’importance des glycoprotéines dans l’échappement de la réponse innée et l’établissement d’une infection virale productive. Il est à noter que de nombreux interacteurs ont été mis en évidence mais sont souvent restreints à un type de virus sur un type de cellule et peu de comparaisons sont disponibles. 42 II / Partie expérimentale : étude des glycoprotéines d’enveloppe 1. Objectifs du travail Dans le cadre des études menées par l’unité visant à mieux comprendre les mécanismes de persistance chez les hôtes réservoirs et de pathogénicité chez les humains, le but du projet est de comparer les modalités d’interaction des glycoprotéines virales dans différentes situations avec des facteurs cellulaires de l’hôte animal ou humain. La comparaison a été faite à partir des glycoprotéines d’enveloppe de deux Hantavirus qui diffèrent par leur pathogénicité : le virus Puumala (PUUV) et Tula (TULV). Ces deux virus, récemment isolés en France, sont respectivement hébergés par le campagnol roussâtre (Myodes glareolus) et le campagnol commun (Microtus arvalis). PUUV est considéré comme faiblement pathogène pour l’homme puisqu’il est lié à une faible létalité (0,1 à 0,4 %), tandis que TULV est considéré comme non zoonotique (un seul cas de maladie rapporté chez l’Homme). L’objectif de ce travail est tout d’abord de construire des vecteurs d’expression des glycoprotéines de PUUV et TULV. La deuxième étape vise à mettre en place et à optimiser les conditions permettant d’exprimer les glycoprotéines dans différentes cellules de mammifères. L’objectif sur le long terme est d’identifier par analyse protéomique des partenaires cellulaires par co-immunoprécipitation de complexes avec les glycoprotéines. 2. Matériel et méthodes 2.1. Plasmides et gènes viraux Le plasmide pcDNA3.1 (Invitrogen) utilisé pour l’expression en cellules de mammifères possède un site multiple de clonage en aval d’un promoteur du cytomégalovirus (CMV) et porte les gènes de résistance à l’ampicilline et à la néomycine. Le plasmide p-eGFP (Clontech) 43 codant pour la protéine fluorescente verte (GFP) a été utilisé pour contrôler l’efficacité de transfection, et le plasmide p-puro fourni par T. Krey (Unité de Biologie Structurale, Institut Pasteur, Paris) pour la sélection puromycine en cellules de mammifères. Les plasmides utilisés comme donneurs d’insert sont pET-30a-GPC-PUUV et pCMVTulv M. Le premier provient de la synthèse chimique réalisée par GeneCust. La séquence codante de GPC-PUUV (souche Puumala Sotkamo GenBank: HE801634.1) est insérée aux sites NotI-BamHI du vecteur pET-30a(+), kanamycine résistant (Fig. 15A). Figure 15: Organisation des plasmides donneurs d’insert GPC A. Le plasmide pET-30a(+) dans lequel est inséré GPC PUUV entre les sites de restriction NotI et BamHI. Le plasmide porte le gène de résistance à la kanamycine (KanR), l’opéron lactose (lacO) et le répresseur lactose (lacI). Les origines de réplication F1 et ColE1 sont également représentées. B. Le plasmide pCMV-Tul M contenant le segment M complet de TULV flanqué des séquences hammerhead et de la séquence ribozyme hépatite delta sous contrôle du promoteur CMV porte un gène de résistance à l’ampicilline (AmpR) et une origine de réplication ColE1. Les cartes des plasmides sont réalisées grâce au logiciel Snapgene Viewer. Les plasmides pCMV-Tul S et pCMV-Tul M (ampicilline résistants) codant respectivement pour les segments S et M de la souche Tula Moravia (GenBank: Z69993.1) nous ont été fournis par le Dr. A. Plyusnin (Haartman Institute, University of Helsinki, 44 Finlande). Ces segments viraux complets (cadre de lecture ouvert et séquences non codantes en 3’ et 5’) sont présents dans l’orientation antigénomique sous contrôle du promoteur CMV (Fig. 15B). Ils sont flanqués d’une séquence hammerhead et d’une séquence ribozyme dérivée du virus de l’hépatite delta, qui permettent l’obtention d’ARNc après clivage précis de part et d’autre des régions non codantes en 5’ et 3’. 2.2. Lignées cellulaires Les cellules VeroE6 dérivées de cellules épithéliales de rein du singe vert africain sont utilisées pour la production d’hantavirus. Elles nous ont été fournies par le Dr. A. Rang (University Hospital Charité, Berlin, Allemagne), ainsi que la souche Puumala Sotkamo adaptée à ces cellules. La lignée cellulaire HEK 293 est dérivée de cellules rénales embryonnaires humaines. La lignée cellulaire humaine A549 est issue d’un adénocarcinome pulmonaire. Ces trois lignées ont été cultivées en milieu DMEM (Dulbecco’s Modified Eagle Medium, Invitrogen) complémenté avec 10 % de sérum de veau fœtal (SVF), de pénicilline (50UI/mL, Invitrogen) et de streptomycine (50µg/mL, Invitrogen). Les cellules Mygla AEC6 (cellules épithéliales alvéolaires de poumons de campagnol roussâtre, immortalisées par l’antigène T de SV40) ont été fournies par le Dr. Marcel Müller (Institut de virologie, Bonn, Allemagne). Elles ont été cultivées en DMEM-10 % SVF additionné de pyruvate de sodium 1mM (Invitrogen) et de 1 % d’acides aminés non-essentiels (Invitrogen). Les cellules sont passées deux fois par semaine selon leur courbe de croissance préalablement établie, et incubées à 37°C sous atmosphère à 5 % de CO2. 2.3. Anticorps disponibles L’ensemble des anticorps utilisés pour détecter les protéines des hantavirus sont présentés dans le tableau 2. L’anticorps monoclonal (mAb) A1C5 (Anticorps-enligne.fr) est spécifique de la nucléoprotéine N de la souche Puumala CG18-20. Le mAb 10B8 de souris généré contre la glycoprotéine Gc du virus Puumala Kazan nous a été fourni par A. Zvirbliene (Vilnius University, Vilnius, Lithuanie) sous forme de surnageant d’hybridome et de suspension d’anticorps précipités en sulfate d’ammonium (Zvirbliene et al., 2014). Les anticorps 5A2, 4G2, 5E1 (Lundkvist et Niklasson, 1992) sont des mAb dérivés d’immunoglobulines de campagnols reconnaissant respectivement Gn, Gc et N de Puumala Sotkamo et nous ont été transmis par A. Lundkvist (Swedish Institute of Infectious Disease Control, Stockholm, Suède), 45 ainsi qu’un mAb 1C9 spécifique de Gc et dérivé d’immunoglobulines humaines (Lundkvist et al., 1993). L’ascite de souris anti-HNTV et le sérum de hamster anti Puumala CG nous ont été fournis par le groupe de M. Bouloy, à l’Institut Pasteur. L’anticorps utilisé pour le marquage du Golgi est un anti-giantin dérivé d’immunoglobulines de lapin (Abcam). Nous avons utilisé comme conjugué de détection pour l’immunofluorescence les anticorps AlexaFluor (Invitrogen) reconnaissant des immunoglobulines de souris, hamster et humaines, et couplés à Alexa488. En ce qui concerne l’immunodétection sur membrane, des anticorps dirigés contre ces mêmes espèces couplés à la peroxydase de raifort ou horse-radish peroxidase HRP (SouthernBiotech) ont été utilisés. Tableau 2 : Anticorps disponibles contre les hantavirus Espèce d’origine Type d’anticorps Nom de l’anticorps Protéine reconnue monoclonal A1C5 N de Puumala Sotkamo monoclonal 10B8 Gc de Puumala Kazan monoclonal 5A2 Gn de Puumala Sotkamo monoclonal 4G2 Gc de Puumala Sotkamo monoclonal 5E1 N de Puumala Sotkamo humain monoclonal 1C9 Gc de Puumala Sotkamo souris polyclonal Ascite de souris N,Gn, Gc d’HTNV hamster polyclonal Sérum de hamster N, Gn, Gc de Puumala GC souris campagnol 2.4. Préparation des plasmides d’expression des glycoprotéines Les bactéries compétentes ont été transformées par la technique de choc thermique puis étalées en milieu gélosé additionné de l’antibiotique de sélection (50µg/mL de kanamycine ou de 100µg/mL d’ampicilline). Des bactéries One Shot TOP10 (Invitrogen), Subcloning Efficiency DH5α (Invitrogen) et Max Efficiency Stbl2 (Invitrogen) ont été utilisées, les deux dernières étant déficientes pour la recombinaison et permettent le clonage d’inserts instables. Après clonage, les bactéries sont cultivées en milieu LB (Luria-Bertani) additionné d’antibiotique pour amplification du plasmide. Les plasmides sont purifiés avec les kits QIAprep Spin Miniprep (Qiagen) et QiaFilter Plasmid Midiprep (Qiagen), selon les indications 46 du fournisseur. Les étapes de culture bactérienne en milieu gélosé et en milieu liquide sont par ailleurs effectuées à 30°C pour diminuer l’apparition de mutations. 2.5. Construction de plasmides d’expression des glycoprotéines Les constructions ont été réalisées par ligation dans le vecteur pcDNA3 des séquences codant GPC purifiées sur gel, soit après digestion des plasmides, soit après amplification du fragment par polymérisation en chaîne (PCR) à partir de ces mêmes plasmides. La digestion tspGW1-Nae1 de pCMV-Tul M a permis de récupérer l’insert codant GPC TULV avec des extrémités franches, et la digestion BamHI-NotI (New England Biolabs) de pET-30a-GPCPUUV a permis de récupérer l’insert GPC-PUUV. L’amplification des inserts en utilisant l’ADN polymérase Platinum High Fidelity (Invitrogen) a permis, via des amorces dotées d’extensions (Hind Tulv-Forward : TAATAAGCTTAGTATGTTTTGTCTGTGTTTGAG, NotTulv-Reverse: GTCAGAATTATAAGAAAAATAAATAACGCCGGCGATTA), d’ajouter un site de restriction HindIII à l’extrémité 5’ ainsi qu’un site NotI en 3’ de l’insert GPC de pCMV-Tul M. Les primers pETForward (CAGCCGGATCTCAGTGGTG) et pET-Reverse (CGAACGCCAGCACATGGAC) ont été utilisés pour amplifier le segment GPC-PUUV en englobant les sites BamHI et NotI présents de part et d’autres de ce dernier. Le vecteur pcDNA3 digéré BamHI-NotI, HindIII-NotI ou avec des extrémités franches a été déphosphorylé au moyen de l’enzyme Antartic Phosphatase (New England Biolabs) puis purifié sur gel avec l’ensemble des inserts digérés en utilisant le kit QIAquick gel Extraction (Qiagen). Les ligations ont été réalisées avec la Ready-to-Go T4 DNA Ligase (Amersham Biosciences) en testant différents rapports insert/vecteur, et les plasmides contenant les inserts ont été amplifiés dans les bactéries DH5. Les clones ont ensuite été sélectionnés en fonction de leur profil de digestion enzymatique après migration en gel d’agarose 0,8 % et contrôlés par séquençage pour l’absence de mutations. 2.6. Transfections a) Transfection transitoire Les lignées cellulaires ensemencées en plaque 24 puits (24P) sont transfectées 24h plus tard avec les plasmides d’expression repris dans de l’Opti-MEM (Invitrogen) en utilisant différents agents de transfection, selon les protocoles préconisés par les fabricants. Les 47 cellules ont été transfectées à 80 % de confluence soit avec 1g d’ADN plasmidique et 2L d’agent de transfection TurboFect (ThermoScientifique), soit 0.5g d’ADN plasmidique et 2L de Lipofectamine 2000 (Invitrogen), et pour FuGene 6 (Promega) soit 200ng d’ADN plasmidique et 0,6L de FuGene 6 soit 200ng d’ADN plasmidique et 1L de FuGene 6. Ces conditions sont ensuite adaptées en fonction de la surface des puits des microplaques utilisées (96P, 24P, 12P, 6P). Les cellules sont cultivées pendant 48 h à 37°C. b) Transfection stable Des cellules VeroE6 ensemencées en plaque 6P à 9x105 cellules par puits ont été cotransfectées 48 h après mise en culture avec pCMV-Tul S ou pCMV-Tul M en présence d’1g de plasmide de sélection p-Puro selon un rapport de 10 moles de plasmide d’intérêt pour 1 mole de plasmide de résistance. L’ADN plasmidique, précipité à l’éthanol, est repris dans de l’OptiMEM auquel est ajouté l’agent de transfection TurboFect choisi pour ces cellules. 24 h post transfection, les cellules sont décrochées par traitement à l’Accutase (Invitrogen), qui est ensuite inactivée par ajout de milieu DMEM 10 % SVF. Les cellules sont distribuées dans des plaques 96P à raison de 104, 103, 102 et 10 cellules par puits (une microplaque par dilution). Le milieu sélectif (100L de puromycine à 20g/mL par puits) est ajouté 48 h post transfection et les cellules sont maintenues en culture pendant 2 semaines minimum en changeant le milieu chaque semaine pour la sélection de clones individuels exprimant le gène d’intérêt. 2.7. Détection des glycoprotéines a) Immunofluorescence intra-cytoplasmique Les cellules cultivées sur lamelles en plaques 24P ou 12P sont fixées 15 min en formaldéhyde (FA) 3.7 % puis lavées 2 fois en PBS. Les sites réactifs sont bloqués par incubation pendant 15min en glycine 20mM diluée dans du PBS, puis les cellules sont perméabilisées par traitement 7 min avec 0.5 % de Triton X-100 en PBS. Les cellules sont incubées 1 h avec l’anticorps primaire dilué dans du PBS contenant 0,05 % Tween-20 (PBST) et 1 % d’albumine de sérum bovin (BSA). L’excès d’anticorps non lié est éliminé par incubation 5 min en PBST. La réaction est révélée par incubation 1 h à l’abri de la lumière avec 48 l’anticorps secondaire couplé à un fluorochrome dilué en PBST-1 % BSA, avant montage sur lame avec du Fluoromount-G (Southern Biotechnology) contenant du DAPI pour la contrecoloration du noyau. Des conditions de fixation en présence d’éthanol absolu 5 min à -20°C ou de l’acétone 80 % glacial pendant 15min sur glace ont également été testées. L’observation se fait en microscopie à épifluorescence avec les filtres appropriés. Les images sont obtenues grâce à une caméra couplée à un système vidéo, et sont analysées avec le logiciel Leica Application Suite. b) Immuno-précipitation Les différents anticorps en solution dans un tampon 40mM Hepes (Sigma-Aldrich) additionné de 0,1 % d’ovalbumine et de 1 % de BSA ont été couplés à des billes de protéines A-sépharose CL-4B (GE Healthcare) par incubation 1 h sous agitation à 4°C. L’excès d’anticorps est éliminé par plusieurs lavages des billes en PBS. Les billes couplées aux anticorps sont incubées avec les lysats cellulaires sur la nuit en rotation à 4°C. Après cette réaction, les protéines adsorbées de manière non spécifique sont éliminées par lavages en tampon NET haut sel (0,5M NaCl, 50mM Tris-HCl pH=7.4, 5mM EDTA, 1 % Triton X-100) puis les billes sont traitées en tampon 40mM Hepes (Sigma Aldrich). Elles sont séchées et resuspendues dans 45L de tampon d’électrophorèse pour détacher les complexes immunoprécipités qui sont ensuite déposés pour migration en gel polyacrylamide. c) Immunodétection sur membrane de nitrocellulose (Western Blot) Les cellules transfectées ou infectées sont lysées à l’aide d’une solution de tampon NET (150mM naCl, 50mM Tris-HCl pH=7.4, 5mM EDTA) contenant 1 % de Triton X-100 ou 2% de dodecylsulfate de sodium (SDS). Les protéines présentes dans les lysats cellulaires sont repris en tampon Laemmli, séparées sur gel de polyacrylamide pré-coulé en gradient 4-15% (BioRad) en conditions réductrices (5 % de –mercaptoéthanol) ou non réductrices, puis transférées sur membrane de nitrocellulose. Les membranes sont colorées 15 min au rouge Ponceau pour la détection globale des protéines transférées et des poids moléculaires standards de migration (BioRad). Après saturation pendant 1 h dans du PBST contenant 5 % de lait (PBST-5 % lait), les membranes sont incubées sur la nuit à 4°C avec les anticorps primaires dilués dans du PBST-5 % lait, puis 1 h avec les anticorps secondaires couplés HRP 49 dilués dans du PBST-5 % lait. La révélation des protéines se fait par chimiluminescence avec le SuperSignal West Pico Substrate (Thermo Scientific) puis exposition de la membrane sur film (Hyperfilm ECL, Amersham). 3. Résultats 3.1. Préparation des vecteurs pour l’expression de glycoprotéines Gn et Gc a) Clonage de GPC des virus Puumala et Tula Afin de cloner la séquence des gènes codant pour le précurseur des glycoprotéines d’enveloppe de PUUV et TULV, les plasmides d’origine contenant cet insert ont été amplifiés par clonage en bactéries. Après sélection, 6 clones donneurs d’insert pET-30a-GPC-PUUV ont été sélectionnés, dont 1 seul (le clone 5) présentait un profil de digestion enzymatique correct avec un insert de taille attendue de 3.5kb, les autres clones contenant un insert de taille supérieure. Il est intéressant de noter que sur les 6 clones, 4 possédaient un profil de restriction correct à l’issue de la sélection sur agar mais que seul le clone 5 maintenait l’insert à la bonne taille après culture en milieu liquide pour amplification du plasmide. Le séquençage a révélé que ce clone contenait une seule mutation C 959 A introduisant toutefois un codon STOP dans le cadre ouvert de lecture de GPC-PUUV, le rendant inutilisable pour une expression de protéines. L’observation du chromatogramme à cette position indique que cette mutation est présente dans 80 % des cas, comme indiqué par la présence d’un pic de C environ 5 fois moins élevé que le pic de A qui lui est superposé (Fig. 16A). Nous avons entrepris des sous-clonages par transformation de bactéries compétentes avec l’ADN plasmidique du clone 5. Vingt sous-clones ont été isolés et systématiquement séquencés en position 959. L’hypothèse d’un mélange au sein du clone 5 a pu être vérifiée puisque 4 clones sur 20 ne possédaient pas la mutation, or les clones sans mutation correspondent également à ceux dont le profil de digestion BamHI-NotI n’est pas celui attendu (Fig.16B). En effet, un phénomène de recombinaison affectant l’insert GPC produit une bande de 4kb environ qui se superpose à la bande du vecteur pET-30a. Le séquençage complet des différents clones a permis de confirmer la présence de recombinaisons au niveau de plusieurs 50 positions de GPC, révélant des séquences de plusieurs centaines de nucléotides qui n’hybridaient ni avec GPC-PUUV ni avec pET-30a. Leur analyse par Basic Local Alignment Search Tool (BLAST), a montré 100 % d’homologie avec des séquences spécifiques de génomes bactériens. Figure 16: Étude des inserts GPC-PUUV présents dans le plasmide pET-30a-GPC-PUUV après sous clonage A. Chromatogramme correspondant au séquençage du clone 5. Deux pics sont visibles en position 560 : un pic de C et un pic de A, correspondant à un mélange de clones dans le plasmide séquencé B. Migration sur gel des sous-clones issus du clone 5 après digestion enzymatique Bam-Not. Pour chaque clone, le premier puits correspond à la simple digestion Bam (B) permettant de linéariser le plasmide pET30a de 8847b alors que le second puits correspond à la digestion Bam-Not (B-N) permettant de libérer l’insert de taille attendue à 3,5kb du vecteur pET-30a de taille 5,4kb. Les clones 5.2, 5.4 et 5.5 présentent un profil de digestion enzymatique B-N correct, ce qui n’est pas le cas deux clones 5.1 et 5.3 (encadrés en bleu). Poids moléculaire utilisé : GeneRuler 1kb Plus DNA Ladder (ThermoScientifc) La difficulté à amplifier en particulier les glycoprotéines de PUUV étant connue (A. Plyusnin, communication personnelle) et s’étant produite malgré l’amplification à basse température, nous avons testé d’autres types de bactéries telles que les DH5α ou les bactéries Stbl2, spécialement conçues pour le clonage d’inserts instables. Très peu de colonies contenant GPC-PUUV ont été obtenues (9 au total), en comparaison de la bonne efficacité de transformation par le plasmide contrôle. Les plasmides extraits et purifiés de ces 9 clones 51 présentent tous des recombinaisons, confirmées par séquençage, ce qui appuie l’hypothèse de la présence de régions sujettes à recombinaisons à l’intérieur de la séquence GPC-PUUV. Les transformations de bactéries avec pCMV-Tulv M ont permis d’obtenir de bonnes quantités de plasmide, sans rencontrer les problèmes de recombinaisons décrits pour GPCPUUV. b) Ligations des inserts amplifiés par PCR Pour tenter de pallier les problèmes de recombinaisons et mutations, les séquences correspondant à GPC de PUUV et TULV ont alors été amplifiées par PCR High Fidelity à partir des plasmides d’origine, donneurs d’insert, préalablement contrôlés pour l’absence de mutations. Différents ratios insert/vecteur ont été utilisés pour la ligation dans pcDNA3 linéarisé. Très peu de clones ont, encore une fois, été obtenus suite à la transformation de bactéries DH5α. Seuls deux clones contenant GPC-PUUV sans aucune mutation ont été obtenus en utilisant le ratio insert/vecteur de 1 : 1. En ce qui concerne les ligations de GPC-TULV dans pcDNA3, plusieurs expériences ont été réalisées qui n’ont, à ce stade, toujours pas permis d’obtenir l’insert correct dans le vecteur quel que soit le rapport insert/vecteur utilisé. 3.2. Mise au point des outils de détection Afin de mettre en évidence l’expression de gènes d’hantavirus en cellules de mammifères, le choix des anticorps les plus appropriés à la détection a été réalisé sur des échantillons de cellules infectées préparées dans le laboratoire, dont j’ai disposé. a) Détection des protéines virales par WB Des lysats de cellules infectées par PUUV ou par TULV ont été utilisés pour tester la réactivité des différents anticorps spécifiques des protéines d’hantavirus. La glycoprotéine Gc de PUUV, de masse moléculaire apparente 60kDa, a été mise en évidence avec l’anticorps 1C9, seulement en condition non réductrice, non chauffée (Fig. 17A). Par contre, la glycoprotéine Gc de TULV n’est pas reconnue par cet anticorps. 52 Figure 17: Immunodétection des protéines virales dans des lysats de cellules infectées par Western Blot. Des protéines de lysats cellulaires infectés par PUUV (partie gauche des gels) ou TULV (partie droite des gels) en dilution de 2 en 2 comme indiqué sur le haut des gels sont séparées par électrophorèse en gel de polyacrylamide-SDS (SDS-PAGE) en condition non-réductrices-non chauffées (NR-NC) et en conditions réductrices-non chauffées (R-NC). Gc a été détectée soit avec le mAb 1C9 spécifique de Gc PUUV (A) ou avec le mAb 10B8 qui reconnaît Gc de PUUV et TULV (C). La nucléoprotéine N est révélée à l’aide du mAb A1C5 (B) Les marqueurs de masses moléculaires (Mw) sont indiqués sur le côté des gels. La présence de protéines virales dans les deux lysats de VeroE6 infectées par PUUV et TULV est toutefois démontrée par la détection de monomères de N de masse molaire apparente 50kDa en condition réductrice (Fig. 17B) et non réductrice (résultat non montré) et ce de manière comparable dans les deux lysats. L’anticorps 10B8 récemment décrit comme réagissant en immunoblot et en fluorescence avec différents hantavirus dont PUUV 53 (Zvirbliene et al., 2014) mais qui n’avait pas été testé sur TULV, s’est révélé capable de détecter la Gc de PUUV et celle de TULV aussi bien en conditions réductrice (résultat non montré) que non réductrice (Fig. 17C). La comparaison de l’intensité des bandes d’une même gamme de dilutions de lysats infectés et du temps d’exposition indique une meilleure sensibilité du mAb 10B8 par rapport au mAb 1C9. b) Détection des protéines virales par immunofluorescence intracytoplasmique La recherche des anticorps les plus performants a également été effectuée par immunofluorescence sur cellules VeroE6 infectées, cette technique étant plus efficace pour révéler un faible nombre de cellules infectées ou transfectées. L’anticorps anti-N, A1C5, donne une fluorescence ponctiforme localisée dans le cytoplasme des cellules infectées par PUUV (Fig. 18A) et TULV (Fig. 18G). Il est à noter qu’une quantité de N beaucoup plus importante est produite par les cellules infectées par le virus TULV que PUUV. Pour ce qui concerne les glycoprotéines, l’anticorps humain 1C9 anti-Gc a donné un marquage typique d’une localisation dans le Golgi, confirmée par co-localisation comme indiqué après superposition des images (Fig. 18F) des marquages du Golgi (Fig. 18D) et de la Gc (Fig. 18E) observé sur des cellules infectées par PUUV. Toutefois, cet anticorps ne reconnait pas les glycoprotéines de TULV, de même que l’anticorps 10B8. Il est à noter que ce dernier ne donne aucun marquage aussi bien sur nos cellules infectées par PUUV que par TULV, bien qu’il soit décrit comme réagissant avec la Gc de PUUV en IF (Zvirbliene et al., 2014). La glycoprotéine Gn de PUUV a pu être détectée avec l’anticorps 5A2, montrant une 20 µm localisation comparable à celle observée pour Gc (Fig. 18C). Pour ce qui est des glycoprotéines de TULV, seule l’ascite polyclonale de souris anti-Hantaan a donné un marquage intracytoplasmique (Fig. 18H) sur des cellules infectées par TULV, mais il est à noter que cet anticorps reconnaît l’ensemble des protéines virales (N>Gc>Gn en immunoblot). Des expériences de colocalisation seront donc nécessaires pour déterminer si l’on a un marquage associé au Golgi. 54 Figure 18: Détection des nucléoprotéines et des glycoprotéines virales par immunofluorescence intracytoplasmique dans des cellules VeroE6 infectées. Les protéines virales révélées par le mAb A1C5 anti N (A, D, G), le mAb 1C9 anti Gc (B, E), le mAb 5A2 anti Gn (C), l’ascite de souris anti-HTNV (E) sont visibles en fluorescence verte. Le noyau est coloré en bleu par le DAPI et le Golgi est marqué en rouge (D) 55 Tableau 3: Récapitulatif des réactivités des anticorps testés sur cellules VeroE6 infectées par les virus PUUV et TULV Immunoblot R NR IF A1C5 anti N PUUV + + + PUUV GC TULV + + + 10B8 anti Gc PUUV + + - PUUV Kazan TULV + + - 5A2 anti Gn PUUV NT - + PUUV Sotkamo TULV NT NT - mAb 4G2 anti Gc PUUV NT + NT campagnol PUUV Sotkamo TULV NT NT NT 5E1 anti N PUUV NT - NT PUUV Sotkamo TULV + + NT mAb 1C9 anti Gc PUUV - + + humain PUUV Sotkamo TULV - - - PUUV - - + TULV + N mono mAb souris pAb souris pAb hamster Ascite anti Hantaan Sérum de PUUV hamster anti PUUV CG TULV + N oligo (N mono en chauffant) + N mono + Gn, Gc, N mono + + N oligo NT + N mono, oligo NT Les conditions réductrices (R) et non réductrices (NR) sont testées pour les différents anticorps monoclonaux (mAb) et polyclonaux (pAb). Les signes positifs et négatifs renseignent sur l’observation ou non d’un signal en immunodétection sur membrane ou en immunfluorescence. NT correspond aux conditions non testées. Pour les anticorps polyclonaux, le détail des protéines observées sous forme de monomères (mono) ou d’oligomères (oligo) est donné. Les résultats avec les autres anticorps testés sont récapitulés dans le Tableau 3. Il faut noter qu’aucun anticorps monoclonal spécifique de la glycoprotéine Gn n’est disponible, l’anticorps 5A2 anti-Gn n’ayant pas donné de réaction avec nos cellules infectées par PUUV. De 56 plus, les résultats avec les anticorps polyclonaux de souris et de hamster ont été obtenus sur des lysats faiblement infectés et méritent d’être testés à nouveau sur de nouveaux stocks viraux avec de bons titres, récemment obtenus dans le laboratoire. En final, nous avons retenu la possibilité d’utiliser l’anticorps A1C5 pour la détection de la protéine N de PUUV et TULV en immunodétection sur membrane et en fluorescence. Concernant les glycoprotéines, le mAb 1C9 permet une détection spécifique de Gc de PUUV par ces deux approches. Pour détecter la Gc de TULV, seul le10B8 pourra être utilisé en Western Blot. 3.3. Expression des glycoprotéines d’enveloppe en cellules de Mammifères a) Mise au point des conditions de transfection Le choix des agents de transfection donnant la meilleure efficacité en fonction du type cellulaire a été réalisé à l’aide du plasmide p-eGFP, révélé par immunofluorescence intracytoplasmique. Les réactifs ont été retenus de la façon suivante: TurboFect pour VeroE6 (efficacité de 15 %), Lipofectamine pour A549 (efficacité de 12 %) et Mygla (efficacité de 10 %) et FuGene 6 (selon un rapport de 3L de FuGene pour 1g ADN) pour HEK (efficacité de 27 %). b) Transfection transitoire Expression de GPC-PUUV L’expression de la glycoprotéine Gc PUUV a été mise en évidence avec le mAb 1C9 par IF dans des cellules HEK, VeroE6 et A549 transfectées avec le plasmide pcDNA3-GPC-PUUV (Fig. 19A, B, C). Toutefois, très peu de cellules positives ont été recensées, indiquant une moins bonne efficacité de l’anticorps 1C9 ou une faible efficacité de transfection en comparaison de celle obtenue avec l’e-GFP, notamment pour les VeroE6 et les A549 où l’on dénombre moins d’1 % de cellules exprimant les glycoprotéines. 57 En parallèle, des lysats cellulaires de VeroE6 à 48h et 72h post transfection n’ont pas permis de révéler la Gc en immunodétection sur membrane ni avec le 1C9 ni avec le 10B8 (résultat non montré). Compte tenu du faible pourcentage de cellules marquées en fluorescence, il est possible qu’il y ait eu trop peu de protéines virales exprimées dans nos lysats pour permettre la détection de Gc PUUV par Western Blot. Figure 19: Détection de Gc PUUV dans différentes lignées cellulaires transfectées avec pcDNA3-GPC-PUUV par immunofluorescence intracytoplasmique. Les protéines virales révélées avec le mAb 1C9 dans des cellules HEK (A), VeroE6 (B) et A549 (C) sont colorées en vert. Le noyau est coloré en bleu par le DAPI. Des immunoprécipitations de HEK transfectées avec pcDNA-GPC-PUUV ont alors été réalisées avec les anticorps anti-Gc 4G2 et anti Gn-5A2, décrits comme capables de coimmunoprécipiter Gn et Gc (Hepojoki et al., 2010b), dans le but d’augmenter la sensibilité de détection par concentration de protéines. L’efficacité de transfection supérieure avec les cellules HEK comparée aux VeroE6 a motivé le choix des lysats cellulaires à immunoprécipiter. Il a été possible de détecter spécifiquement Gc-PUUV par immunoblotting à partir d’extraits préalablement immunoprécipités avec un anti-Gc. La détection est possible avec des lysats de cellules infectées (Fig. 20A et B, piste 3) et en utilisant le lysat de cellules HEK transfectées (Fig. 20B, piste 1) à condition d’en utiliser une quantité suffisante. En effet, 58 aucune bande n’est visible en Fig. 20A piste 2, contenant moins de matériel (100μL de lysat immunoprécipité) par rapport à la piste 3 figure 20B (180μL de lysats immunoprécipité), ce qui confirme bien la faible quantité de glycoprotéines présentes après transfection et non détectable directement en Western Blot. Les conditions de transfection nécessitent donc encore d’être améliorées afin de pouvoir mettre plus facilement en évidence l’expression des glycoprotéines de PUUV. Figure 20: Révélation de Gc par immunoblot à partir de lysats de cellules HEK transfectées ou infectées par PUUV puis immunoprécipités avec un anti-Gc Détection de Gc par immunoblot à partir d’extraits préalablement immunoprécipités avec un anticorps antiGc. Les immuoprécipitations (Ip) sont réalisées avec les anticorps 4G2 ou 5A2. Les lysats de cellules non infectées (NI) sont utilisées en contrôle. 100µL (A) ou 180 µL (B) de lysat d’HEK transfectées avec GPCPUUV ont été testés. Les marqueurs de masses moléculaires (Mw) sont indiqués sur le côté des gels. Expression de GPC TULV Aucun clone n’ayant été obtenu après plusieurs tentatives de ligation de GPC-TULV dans pcDNA3, nous avons tenté de transfecter directement le plasmide pCMV-Tul M, bien que celui-ci soit optimisé pour la synthèse d’ARN, plutôt que de protéines. En effet, la transfection 59 des cellules avec ce plasmide seul, sans la RdRp qui est normalement responsable de l’initation de la traduction par vol de coiffe, ne nous garantissait pas d’observer la synthèse de protéines. Ce plasmide comportant un promoteur CMV, nous avons testé s’il était possible d’obtenir l’expression de protéines virales en cellules de mammifères. Ce test a tout d’abord été effectué sur cellules VeroE6 48h post transfection avec le plasmide pCMV-Tul S, car nous possédions à ce stade un anticorps reconnaissant aussi bien la protéine N de PUUV que de TULV. Figure 21: Détection de la nucléoprotéine N de TULV et de l’eGFP par immunofluorescence intracytoplasmique dans le contexte d’expression transitoire. Les nucléoprotéines sont marquées en vert avec l’anti-N A1C5 (A) et l’eGFP est marquée en rouge (B). Le noyau est coloré en bleu par le DAPI. Une détection de la nucléoprotéine de TULV codée par le segment S a en effet été observée en IF sur ces cellules (Fig. 21A) avec une bonne efficacité, suggérant que la construction pCMV permettait de générer des ARNm pouvant être traduits par la machinerie cellulaire. La distribution cytoplasmique du marquage de la N-TULV est comparable à celle observée sur des cellules infectées par TULV (Fig. 18G). Le marquage de l’ADN par le DAPI révèle des grains dans le cytoplasme, dus à la méthode de transfection avec l’agent Turbofect puisqu’on les retrouve lors de la transfection avec p-eGFP (Fig. 21B) et seulement avec cet agent (non montré). La superposition des images montre d’ailleurs qu’ils ne sont pas associés à N. Il pourrait s’agir de complexes d’ADN plasmidique dont des quantités importantes sont 60 utilisées pour les transfections avec Turbofect, en comparaison aux autres réactifs (Lipofectamine, FuGene6). Au vu de ces résultats, nous avons utilisé cette même approche pour essayer d’exprimer les glycoprotéines d’enveloppe de TULV à partir de pCMV-Tul M. L’anticorps 10B8, utilisé car étant le seul au moment de ce test à donner un signal en immunodétection sur membrane sur Gc-TULV, n’a pas permis de détecter Gc par immunofluorescence en accord avec les résultats obtenus sur cellules infectées (cf. Tableau 3). En parallèle, le contrôle de transfection avec p-eGFP a permis de s’assurer d’une efficacité de transfection correcte lors de cette expérience. Bien que la totalité des cellules ne soit pas transfectée, une détection des glycoprotéines de TULV a été tentée en immunodétection sur membrane à partir de lysats de VeroE6 transfectées avec pCMV-Tul M. Alors que des quantités équivalentes de protéines ont été déposées comme indiqué par la coloration des protéines totales au rouge Ponceau (Fig. 22A), une bande supplémentaire de masse moléculaire apparente 60kDa en conditions réductrices et d’environ 55kDa en conditions non réductrices a été mise en évidence de façon spécifique après incubation avec l’anticorps anti-Gc 10B8, et ce seulement dans les cellules transfectées avec pCMV-Tul M (Fig. 22A, pistes 2). La différence de migration de cette bande associée à Gc par rapport à celle observée dans les pistes correspondant aux lysats de cellules infectées par TULV (Fig.22A, pistes 6), pourrait s’expliquer par le fait qu’une même protéine ne subit pas des modifications post-traductionnelles identiques dans le cadre d’une infection et d’une transfection en l’absence de ses partenaires viraux. Une différence de migration de Gc apparait en présence de l’agent réducteur, mettant en évidence la présence de ponts disulfures internes dans Gc. Compte tenu de ce résultat positif, différents anticorps ont été testés en IF en jouant également sur les conditions de fixation des cellules. Ainsi, les mAb 5A2 et 10B8 ont été utilisés sur cellules fixées à l’acétone ou à l’éthanol absolu, sachant qu’ils se sont révélés négatifs vis à vis des glycoprotéines de TULV après fixation à la formaldéhyde, bien que décrits dans la littérature comme capables de détecter respectivement Gn et Gc de PUUV en immunofluorescnce (Lundkvist et Niklasson 1992). L’ascite anti-HTNV qui réagit positivement avec des protéines virales de cellules infectées par TULV a également été testée 61 sur cellules fixées par la formaldéhyde. Nous n’avons obtenu aucun marquage avec ces anticorps malgré les différentes conditions testées, mais nous ne pouvons à ce stade conclure quant à la possibilité de détection des glycoprotéines de TULV avec ces anticorps en IF. Figure 22: Détection de la glycoprotéine Gc de TULV avec le mAb 10B8 dans le contexte d’expression transitoire Les glycoprotéines extraites de VeroE6 à 48 h post transfection ont été séparées par électrophorèse en gel gradient 4-15% de polyacrylamide-SDS (SDS-PAGE) en conditions réductrices-non chauffées (R-NC) et en conditions non réductrices-non chauffées (NR-NC), et révélées à l’aide du mAb anti-Gc 10B8 (A) ou de l’anti N (B). Les résultats des colorations en rouge Ponceau permettant de détecter les quantités de protéines transférées sont présentés sous chacun des deux gels. NT correspond au contrôle négatif : lysat de veroE6 non transfectées et TULV à un lysat de VeroE6 infectées par du virus TULV. Les marqueurs de masses moléculaires (Mw) sont indiqués sur le côté des gels. Exposition du gel : 1min Par ailleurs, alors que N a bien été détectée par IF dans des cellules transfectées avec pCMV-Tul S (cf. Fig. 18A), de façon inattendue, les lysats cellulaires correspondants n’ont pas 62 permis de la révéler en Western Blot, ni à 48h (Fig. 22B, piste 1) ni à 72h (non montré) post transfection. Il n’a pas été possible non plus d’obtenir un signal correspondant à N en Western Blot en utilisant un détergent ionique (SDS), ou après concentration par immunoprécipitation (non montré). En effet, la possibilité que N puisse interagir avec de l’ARN cellulaire et former des complexes de haut poids moléculaire difficiles à solubiliser en Triton X-100 a été envisagée. Une lyse cellulaire en SDS, plus dénaturant que le Triton X-100, a été réalisée mais n’a pas donné de résultats. Par ailleurs, l’anticorps A1C5 n’étant pas immunoprécipitant, nous n’avons pas pu utiliser cette technique pour concentrer N dans les lysats de cellules infectées. Concernant les anticorps de détection de protéines du virus Puumala, la comparaison des épitopes qu’ils reconnaissent aide à comprendre leur possibilité ou non de réagir avec différents hantavirus, notamment différentes souches de PUUV et TULV (Tableau 4) par rapport à l’épitope de l’immunogène. C’est le cas du 10B8, dont l’épitope est conservé dans ces deux virus. Concernant le mAb A1C5, quelques substitutions d’acides aminés entre la séquence protéique de la nucléoprotéine de PUUV et TULV par rapport à la séquence reconnue par l’anticorps n’empêchent pas ce dernier de reconnaître la nucléoprotéine de nos deux souches virales. Tableau 4 : Tableau récapitulatif des épitopes reconnus par les anticorps 4G2, 10B8 et A1C5 avec les séquences protéiques associées de PUUV Sotkamo et TULV Moravia Anticorps Anti Gc 4G2 Séquence reconnue PUUV Sotkamo TULV Moravia 754 YPWQTAGCFVEK 765 + YPWQTAKCFLEK 772 GWGCNPPD 779 + + 910 TPVCQF 915 + 905 LPSCQY 910 PUUV Sotkamo 1052 1057 DTKCSSTGLVAA 1068 + DKKCSATGLVAA 1063 Anti Gc 10B8 PUUV Kazan 880 GDPGDIMS 887 Anti N A1C5 PUUV CG 1820 15 EQQLVVARQKLKDAERAVEVD 35 + + EQQLIVARQKLKDA EQQIVIARQKLKDA ERAVEVD EKTVEAD Les chiffres de part et d’autre de la séquence protéique indiquent la numérotation des acides aminés. Le signe positif signifie que la séquence est identique à celle reconnue par l’épitope, les différences sont indiquées en rouge. 63 L’épitope reconnu par le 4G2 (Hepojoki et al., 2010a) est par contre un épitope conformationnel constitué de séquences peptidiques non contiguës et il n’a pas pu être établi pour l’instant s’il reconnaît TULV en Western Blot et en IF. Les anticorps 5A2 et 4G2 ont été décrits comme capables d’immunoprécipiter respectivement Gn et Gc de PUUV (Hepojoki et al., 2010a). Cette capacité du 4G2 a été retrouvée sur nos lysats de cellules HEK aussi bien infectées par PUUV que transfectées avec pcDNA3-GPC-PUUV, ce qui n’a pas été le cas avec notre lot d’anticorps 5A2. A l’heure actuelle, alors que nous avons des anticorps pour suivre N et Gc, nous n’avons pas d’anticorps spécifique de Gn de TULV, ni d’anticorps capables d’immunoprécipiter les glycoprotéines de TULV. 4. Discussion Les hantavirus sont des virus émergents dont l’hôte naturel ne présente pas de pathologie mais qui peuvent provoquer, à des fréquences variables selon l’espèce de virus concerné, des fièvres hémorragiques pouvant être mortelles chez l’homme. Leur large répartition géographique, la possibilité de réassortiment des segments viraux et les effets environnementaux sur l’habitat des rongeurs laisse craindre des possibilités de passage de la barrière d’espèce avec un risque d’augmentation des cas humains. Peu de données sont disponibles sur le cycle viral et la physiopathologie de l’infection par ces virus découverts récemment. Dans ce contexte, il est important de comprendre comment les hantavirus interagissent avec leurs hôtes. Les glycoprotéines Gn et Gc sont importantes à différents niveaux de l’infection virale et l’objectif principal de ce travail a été d’obtenir des vecteurs pour l’expression du précurseur des glycoprotéines d’enveloppe de PUUV et TULV dans différentes lignées cellulaires afin d’étudier le différentiel des interactions des glycoprotéines de deux virus de pathogénicité différente présents en France avec des facteurs de l’hôte réservoir et de l’Homme. Ce projet nécessitait au préalable un grand nombre de mises au point compte tenu de la difficulté à multiplier le virus en culture (peu de modèles cellulaires, faible titre des stocks), du peu d’anticorps commerciaux disponibles et de la difficulté à exprimer les glycoprotéines d’hantavirus, en particulier celles de PUUV. Nous avons cependant pu mettre au point un certain nombre d’outils indispensables au développement de ce projet. 64 Tout d’abord, nous avons pu tester les anticorps à notre disposition afin de nous assurer que nous pouvions avoir une détection correcte des protéines virales. Il était important de combiner les deux méthodes d’IF et d’immunobloting sur membrane car l’antigène reconnu n’est pas accessible de la même manière selon le protocole utilisé. Ceci est notamment valable pour l’anticorps 10B8, décrit comme reconnaissant PUUV Gc en IF (Zvirbliene et al., 2014), sur des lames commerciales. Nous n’avons pas réussi à reproduire ce résultat, surement car notre protocole de fixation ou de perméabilisation de nos cellules était différent de celui utilisé par Zvirbliene et al. Concernant la construction des vecteurs d’expression, des difficultés de clonage des ORF d’intérêt, en système bactérien, sont rapidement apparues. En particulier, la société GeneCust, qui a effectué la synthèse du gène viral GPC-PUUV dans pET-30a, n’a pas réussi à insérer GPC-PUUV ni dans le vecteur PUC57 habituellement utilisé, ni dans le vecteur d’expression pcDNA3. De notre côté, des phénomènes de recombinaison et des mutations au sein de l’insert de GPC-PUUV ont systématiquement été observés malgré les précautions prises. On peut donc supposer que la synthèse des glycoprotéines de PUUV est toxique pour les bactéries ou que la structure secondaire inhérente à la séquence favorise l’apparition de mutations ou de recombinaisons lors de l’amplification en bactéries. Ces résultats impliquent la nécessité d’établir des stratégies pertinentes ainsi que des séquençages systématiques pour obtenir des clones contenant un insert correct GPC-PUUV et GPC-TULV. Il serait possible d’envisager de nouvelles constructions permettant d’éviter une expression basale des glycoprotéines dans les bactéries, en utilisant des systèmes dans lesquels la transcription est régulée par la présence de tétracycline (constructions du type Tet-On). A ce stade, nous avons pu obtenir GPC-PUUV dans le vecteur d’expression pcDNA3en cellules de mammifère (A549, HEK 293 et Vero) alors que nous n’avons pu cloner GPC-TULV dans ce vecteur. Malgré les nombreuses conditions testées, nous ne savons pas pourquoi il est si difficile de cloner GPC-TULV dans notre vecteur pcDNA3. De nouvelles conditions d’amplification de GPC-TULV par PCR à l’aide d’amorces plus longues autour des sites HindIIINotI seront mises en œuvre pour favoriser ce clonage. Toutefois, nous disposons de GPCTULV au sein du segment M présent dans le vecteur d’expression pCMV. L’expression du précurseur des glycoprotéines en cellules de mammifères, est une 65 étape importante pour pouvoir d’une part suivre leur maturation (clivage en Gn et Gc, modifications post traductionnelles, trafic intracellulaire) et d’autre part développer les techniques de purification de complexes pour la recherche d’interacteurs. Les premiers essais d’expression en transfection transitoire ont été effectués à l’aide de pcDNA3-GPC-PUUV et pCMV-Tul M. Il est intéressant de noter que la transfection directe de cette construction pCMV était capable d’assurer la synthèse de protéines virales que nous avons observée aussi bien à partir du segment S complet pour l’expression de N et du segment M pour l’expression de Gc. En effet, ce vecteur est utilisé en génétique inverse pour générer des segments complets d’ARN viraux de polarité positive. On pouvait penser qu’en l’absence des autres protéines virales, notamment la RdRp nécessaire à la capture de coiffe, la transcription et la traduction ne pourraient pas avoir lieu. On peut supposer qu’il existe des polymérases et/ou des facteurs cellulaires capables d’assurer la traduction de cet ARN viral, ou qu’il existe des séquences permettant une initiation interne de la traduction. Bien que nous ayons obtenu une faible efficacité de transfections transitoires, l’expression des glycoprotéines spécifiques de PUUV et TULV a été détectée par immunofluorescence et en Western Blot à l’aide des anticorps disponibles (anti-Gc et anti-N), grâce à la mise au point préalable de ces outils sur cellules infectées. Ceci a permis de révéler les différences de sensibilité et de reconnaissance des anticorps en fonction de la technique utilisée. La suite de la démarche consistera donc à optimiser les conditions de transfection pour chaque type cellulaire, afin de pouvoir assurer une plus forte production des glycoprotéines d’enveloppe, et ainsi dépasser le seuil de sensibilité des immunodétections sur membrane, notamment pour GPC-PUUV, décelable seulement après concentration par immunoprécipitation. Les transfections stables qui sont envisagées pour assurer une production de protéines virales sur le long terme et en quantité suffisante pourront être utilisées dans le cadre de la recherche d’interacteurs des glycoprotéines d’enveloppe. Les deux tentatives que nous avons menées (co-transfection avec un plasmide de sélection et un plasmide d’intérêt, ou transfection avec le plasmide de sélection seulement) n’ont pas donné de clones. Il convient donc de tester un nouveau plasmide codant pour la résistance à la 66 puromycine, ou d’envisager d’autres techniques comme l’utilisation d’un vecteur lentiviral. Nous pouvons également tenter une transfection stable à partir du pcDNA3 contenant GPCPUUV linéarisé, ce dernier portant également la résistance à la néomycine. Toutefois, il sera possible d’aborder déjà certaines questions à l’aide de tests de transfection transitoire, notamment via le suivi de la maturation de Gn et Gc au cours du cycle viral, par colocalisation avec des marqueurs de compartiments. Il est par ailleurs décrit dans la littérature que les glycoprotéines Gn seraient dégradées par la voie de l’autophagie sans que le mécanisme précis ne soit connu, avec des quantités moins importantes de Gn que de Gc observées dans des cellules transfectées (Ganaie et Mir 2014). Compte tenu des obstacles rencontrés et décrits ci-dessus dans la mise au point des outils nécessaire à l’étude, les expériences de recherche de partenaires par préparation de complexes protéiques associés aux glycoprotéines et analysées en spectrométrie de masse n’ont pas encore été initiées. Les résultats d’expression des protéines en transfection transitoire nous permettront d’envisager de mettre au point cette analyse. La mise au point des immunoprécipitations est essentielle pour la suite, puisque Gc TULV a seulement été observée par immunodétection sur membrane, et d’autres techniques de détection (IF, immunoprécipitation) n’ont pas permis de confirmer ce résultat. De même, nous n’avons pas réussi à reproduire la détection de Gc par immunoprécipitation avec le 5A2, mais les conditions optimales de production et de préparation de stocks de virus sont encore en cours au sein de l’unité, et de nouveaux lysats de cellules infectées pourront être testés à nouveau. Par la suite, il sera également envisageable de tester des surnageants de cellules infectées en plus des lysats en immunoprécipitation. Enfin, afin d’observer les hétérodimères de glycoprotéines, il est envisagé de réaliser un pontage chimique de ces dernières. Un pontage chimique permettra également de retenir d’autres interacteurs des glycoprotéines, qui pourront être co-immunoprécipités puis analysés par spectrométrie de masse. D’autres cellules comme des cultures primaires de fibroblastes embryonnaires de campagnol, décrites comme permettant de multiplier le virus in vitro (Essbauer et al., 2011), peuvent aussi être testées. En effet, il s’agit d’une lignée cellulaire développée à partir de Myodes glareolus, le réservoir de PUUV, sur laquelle il serait intéressant de travailler. 67 Récemment, des transfections réalisées avec un vecteur lentiviral codant les glycoprotéines d’HTNV ont démontré que Gn et Gc exprimées seules sont capables de s’autoassembler en pseudo-particules (Acuña et al., 2014). Les transfections avec le segment codant GPC permettent donc bien d’obtenir des glycoprotéines dont la structure et les interactions entre elles sont comparables à celles observées dans le cadre d’une infection. De plus, la localisation de Gc au niveau l’appareil de Golgi, a été retrouvée dans les deux cas de transfection et d’infection. L’hypothèse de travail est qu’il convient de se rapprocher le plus possible des conditions physiologiques afin de pouvoir conclure quant à la pertinence des résultats que l’on pourra observer. Finalement, ces travaux ont permis de mettre en place de nombreux outils qui permettront par la suite l’étude des différences d’interaction des glycoprotéines des virus Puumala et Tula, à la fois en condition de persistance et de pathogénicité dans le but de comprendre les mécanismes des pathologies associées aux hantavirus. Les outils testés nécessitent encore d’être optimisés puisqu’on ne peut pas encore conclure si certains résultats négatifs observés sont dus à une quantité insuffisante d’expression des glycoprotéines, ou à un problème de détection. Ces difficultés sont en lien avec le peu de données relatives à l’expression et à la maturation des glycoprotéines de PUUV et TULV dans la littérature, les principales informations concernant les virus du Nouveau Monde et le virus HTNV (Antic et al., 1992 ; Deyde et al., 2005). 68 CONCLUSION Les hantavirus représentent un enjeu de santé public important, de par leur répartition mondial et l’absence, à l’heure actuelle, de traitements antiviraux. En France, la plupart des cas sont dus au virus Puumala, responsable d’une atteinte rénale modérée, et transmis par le campagnol roussâtre Myodes glareolus. L’étude de l’interaction des hantavirus avec leur hôte réservoir permet de comprendre les mécanismes à l’origine de l’infection chronique sans symptômes apparents, décrite chez les rongeurs. De même, la compréhension des interactions des hantavirus avec des cellules humaines devrait aider à la compréhension des mécanismes à l’origine de maladies chez l’homme. Ce travail a permis de mettre en place des outils pour exprimer et détecter les glycoprotéines Gn et Gc de deux hantavirus, dans différentes lignées cellulaires (humaines versus rongeurs). Suite aux nombreuses mises au point qui ont été réalisées au cours de ce stage, la recherche de partenaires cellulaires devrait pouvoir être initiée par la suite. Grâce à l’avènement du séquençage haut-débit, de nombreux hantavirus ont très récemment été découverts dans des hôtes réservoirs autres que des rongeurs. D’autres études sont nécessaires afin de mieux comprendre le potentiel zoonotique de ces nouveaux hantavirus et l’implication des espèces animales dans l’émergence de nouvelles zoonoses. 69 70 BIBLIOGRAPHIE Acuña, R. et al. (2014). Hantavirus Gn and Gc glycoproteins self-assemble into virus-like particles. Journal of virology, 88, p.2344‑2348. Antic, D., Wright, K.E., Kang, C.Y. (1992) Maturation of Hantaan virus glycoproteins G1 and G2. Virology, 189, p.324‑328. Armien, B. et al. (2013). Hantavirus fever without pulmonary syndrome in Panama. The American Journal of Tropical Medicine and Hygiene, 89, p.489‑494. Ayral, F. (2013). Hantavirose à virus Séoul: émergence d'une zoonose chez les rats en Europe. Le point vétérinaire, n°336, p.14-18. Avšič-Županc, T., Saksida, A. et Korva, M. (2013). Hantavirus Infections. Clinical Microbiology and Infection: The Official Publication of the European Society of Clinical Microbiology and Infectious Diseases. Bennett, S.N. et al. (2014). Reconstructing the evolutionary origins and phylogeography of hantaviruses. Trends in Microbiology, 22, p.473‑482. Casals, J. et al. (1970). A review of Soviet viral hemorrhagic fevers, 1969. The Journal of Infectious Diseases, 122, p.437‑453. Cifuentes-Muñoz, N., Salazar-Quiroz, N. et Tischler, N.D. (2014). Hantavirus Gn and Gc envelope glycoproteins: key structural units for virus cell entry and virus assembly. Viruses, 6, p.1801‑1822. Dalrymple, N.A. et Mackow, E.R. (2014). Virus interactions with endothelial cell receptors: implications for viral pathogenesis. Current Opinion in Virology, 7C, p.134‑140. Dessau, M. et Modis, Y. (2013). Crystal structure of glycoprotein C from Rift Valley fever virus. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, 110, p.1696‑1701. Deyde, V.M. et al. (2005). Interactions and trafficking of Andes and Sin Nombre Hantavirus glycoproteins G1 and G2. Virology, 331, p.307‑315. Dobly, A. et al. (2012). Sero-epidemiological study of the presence of hantaviruses in domestic dogs and cats from Belgium. Research in Veterinary Science, 92, p.221‑224. Easterbrook, J.D. et Klein, S.L. (2008a). Immunological mechanisms mediating hantavirus persistence in rodent reservoirs. PLoS pathogens, 4, p.e1000172. Easterbrook, J.D. et Klein, S.L. (2008b). Seoul virus enhances regulatory and reduces proinflammatory responses in male Norway rats. Journal of Medical Virology, 80, p.1308‑1318. 71 Easterbrook, J.D., Zink, M.C. et Klein, S.L. (2007). Regulatory T cells enhance persistence of the zoonotic pathogen Seoul virus in its reservoir host. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, 104, p.15502‑15507. Ebihara, H. et al., (2000). Pathogenicity of Hantaan virus in newborn mice: genetic reassortant study demonstrating that a single amino acid change in glycoprotein G1 is related to virulence. Journal of virology, 74, p.9245‑9255. Essbauer, S.S. et al., (2011). A new permanent cell line derived from the bank vole (Myodes glareolus) as cell culture model for zoonotic viruses. Virology journal, 8, p.339. French, G.R. et al., (1981). Korean hemorrhagic fever: propagation of the etiologic agent in a cell line of human origin. Science (New York, N.Y.), 211, p.1046‑1048. Gajdusek, D.C., (1962). Virus hemorrhagic fevers. Special reference to hemorrhagic fever with renal syndrome (epidemic hemorrhagic fever). The Journal of Pediatrics, 60, p.841‑857. Ganaie, S.S. et Mir, M.A. (2014). The role of viral genomic RNA and nucleocapsid protein in the autophagic clearance of hantavirus glycoprotein Gn. Virus research. Garcin, D. et al. (1995). The 5’ ends of Hantaan virus (Bunyaviridae) RNAs suggest a prime-andrealign mechanism for the initiation of RNA synthesis. Journal of Virology, 69, p.5754‑5762. Gavrilovskaya, I.N. et al. (2008). Hantaviruses direct endothelial cell permeability by sensitizing cells to the vascular permeability factor VEGF, while angiopoietin 1 and sphingosine 1phosphate inhibit hantavirus-directed permeability. Journal of Virology, 82, p.5797‑5806. Gavrilovskaya, I.N., Gorbunova, E.E. et Mackow, E.R. (2010). Pathogenic hantaviruses direct the adherence of quiescent platelets to infected endothelial cells. Journal of Virology, 84, p.4832‑4839. Glass, G.E. et al. (1988). Association of intraspecific wounding with hantaviral infection in wild rats (Rattus norvegicus). Epidemiology and Infection, 101, p.459‑472. Le Guenno, B., et al. (1994). Les Hantavirus : aspects virologiques et diagnostiques. Données sur l’épidémiologie de la fièvre hémorragique avec syndrome rénal en France. Médecine et Maladies Infectieuses, 24, Supplement 2, p.512‑516. Guo, W.-P. et al. (2013). Phylogeny and origins of hantaviruses harbored by bats, insectivores, and rodents. PLoS pathogens, 9, p.e1003159. Hardestam, J. et al. (2008). Puumala hantavirus excretion kinetics in bank voles (Myodes glareolus). Emerging Infectious Diseases, 14, p.1209‑1215. Hart, C.A. et Bennett, M. (1999). Hantavirus infections: epidemiology and pathogenesis. Microbes and Infection / Institut Pasteur, 1, p.1229‑1237. Henderson, W.W. et al. (1995). Naturally occurring Sin Nombre virus genetic reassortants. Virology, 214, p.602‑610. 72 Hepojoki, J. et al., (2010a). Interactions and oligomerization of hantavirus glycoproteins. Journal of virology, 84, p.227‑242. Hepojoki, J. et al., (2010b). Cytoplasmic tails of hantavirus glycoproteins interact with the nucleocapsid protein. The Journal of general virology, 91, p.2341‑2350. Hepojoki, J. et al., (2012). Hantavirus structure--molecular interactions behind the scene. The Journal of general virology, 93, p.1631‑1644. Heyman, P. et al., (2009). Hantavirus infections in Europe: from virus carriers to a major publichealth problem. Expert Review of Anti-Infective Therapy, 7, p.205‑217. Huiskonen, J.T. et al., (2010). Electron cryotomography of Tula hantavirus suggests a unique assembly paradigm for enveloped viruses. Journal of virology, 84, p.4889‑4897. Hussein, I.T.M. et al., (2011. Recent advances in hantavirus molecular biology and disease. Advances in Applied Microbiology, 74, p.35‑75. Jameson, L.J. et al., (2013). Pet rats as a source of hantavirus in England and Wales, 2013. Euro Surveillance: Bulletin Européen Sur Les Maladies Transmissibles - European Communicable Disease Bulletin, 18. Jonsson, C.B., Figueiredo, L.T.M. et Vapalahti, O. (2010). A global perspective on hantavirus ecology, epidemiology, and disease. Clinical microbiology reviews, 23, p.412‑441. Kallio, E.R. et al., (2006). Prolonged survival of Puumala hantavirus outside the host: evidence for indirect transmission via the environment. The Journal of General Virology, 87, p.2127‑2134. Klingström, J. et Ahlm, C. (2011). Hantavirus protein interactions regulate cellular functions and signaling responses. Expert review of anti-infective therapy, 9, p.33‑47. Krüger, D.H., Schönrich, G. et Klempa, B. (2011). Human pathogenic hantaviruses and prevention of infection. Human vaccines, 7, p.685‑693. Lee, H.W., Lee, P.W. et Johnson, K.M. (2004). Isolation of the etiologic agent of Korean hemorrhagic fever. 1978. The Journal of Infectious Diseases, 190, p.1711‑1721. Lee, H.W., Vaheri, A. et Schmaljohn, C.S. (2014). Discovery of hantaviruses and of the Hantavirus genus: personal and historical perspectives of the Presidents of the International Society of Hantaviruses. Virus Research, 187, p.2‑5. Luis, A.D. et al., (2012). Sin Nombre hantavirus decreases survival of male deer mice. Oecologia, 169, p.431‑439. Lundkvist, A. et al., (1993). Neutralizing human monoclonal antibodies against Puumala virus, causative agent of nephropathia epidemica: a novel method using antigen-coated magnetic beads for specific B cell isolation. The Journal of general virology, 74, p.1303‑1310. 73 Lundkvist, A. et Niklasson, B. (1992). Bank vole monoclonal antibodies against Puumala virus envelope glycoproteins: identification of epitopes involved in neutralization. Archives of virology, 126, p.93‑105. Mackow, E.R. et Gavrilovskaya, I.N. (2009). Hantavirus regulation of endothelial cell functions. Thrombosis and haemostasis, 102, p.1030‑1041. Macneil, A., Nichol, S.T. et Spiropoulou, C.F. (2011). Hantavirus pulmonary syndrome. Virus Research, 162, p.138‑147. Manigold, T. et Vial, P. (2014). Human hantavirus infections: epidemiology, clinical features, pathogenesis and immunology. Swiss Medical Weekly, 144, p.w13937. Matthys, V. et al., (2011). The C-terminal 42 residues of the Tula virus Gn protein regulate interferon induction. Journal of virology, 85, p.4752‑4760. McCaughey, C. et Hart, C.A. (2000). Hantaviruses. Journal of Medical Microbiology, 49, p.587. Meyer, B.J. et Schmaljohn, C.S. (2000). Persistent hantavirus infections: characteristics and mechanisms. Trends in Microbiology, 8, p.61‑67. Nemirov, K. et al., (2002). Phylogenetic evidence for host switching in the evolution of hantaviruses carried by Apodemus mice. Virus Research, 90, p.207‑215. Paakkala, A. et Mustonen, J. (2007). Radiological findings and their clinical correlations in nephropathia epidemica. Acta Radiologica (Stockholm, Sweden: 1987), 48, p.345‑350. Pedrosa, P.B.S. et Cardoso, T.A.O. (2011). Viral infections in workers in hospital and research laboratory settings: a comparative review of infection modes and respective biosafety aspects. International journal of infectious diseases: IJID: official publication of the International Society for Infectious Diseases, 15, p.366‑376. Picard-Jean, et al. (2013) Current Issues in Molecular Virology - Viral Genetics and Biotechnological Applications. Edité par Victor Romanowski, InTech, 294 p. Pini, N. (2004). Hantavirus pulmonary syndrome in Latin America. Current Opinion in Infectious Diseases, 17, p.427‑431. Plyusnin, A. et Elliott, R.M. (2011). Bunyaviridae: Molecular and Cellular Biology, Horizon Scientific Press. Plyusnin, A. et Sironen, T. (2014). Evolution of hantaviruses: co-speciation with reservoir hosts for more than 100 MYR. Virus Research, 187, p.22‑26. Plyusnin, A., Vapalahti, O. et Vaheri, A. (1996). Hantaviruses: genome structure, expression and evolution. The Journal of General Virology, 77, p.2677‑2687. Ramanathan, H.N. et Jonsson, C.B. (2008). New and Old World hantaviruses differentially utilize host cytoskeletal components during their life cycles. Virology, 374, p.138‑150. 74 Rang, A. (2010). Modulation of innate immune responses by hantaviruses. Critical reviews in immunology, 30, p.515‑527. Reusken, C. et Heyman, P. (2013). Factors driving hantavirus emergence in Europe. Current Opinion in Virology, 3, p.92‑99. Schmaljohn, C. et Hjelle, B. (1997). Hantaviruses: a global disease problem. Emerging Infectious Diseases, 3, p.95‑104. Schönrich, G. et al. (2008). Hantavirus-induced immunity in rodent reservoirs and humans. Immunological reviews, 225, p.163‑189. Schountz, T. et al. (2007). Regulatory T cell-like responses in deer mice persistently infected with Sin Nombre virus. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, 104, p.15496‑15501. Smadel, J.E. (1953). Epidemic Hemorrhagic Fever. American Journal of Public Health and the Nations Health, 43, p.1327‑1330. Spiropoulou, C.F. et Srikiatkhachorn, A. (2013). The role of endothelial activation in dengue hemorrhagic fever and hantavirus pulmonary syndrome. Virulence, 4, p.525‑536. Tischler, N.D. et al. (2005). Hantavirus Gc glycoprotein: evidence for a class II fusion protein. The Journal of general virology, 86, p.2937‑2947. Vaheri, A. et al. (2013). Uncovering the mysteries of hantavirus infections. Nature reviews. Microbiology, 11, p.539‑550. Vapalahti, O. et al. (2003). Hantavirus infections in Europe. The Lancet. Infectious Diseases, 3, p.653‑661. Watson, D.C. et al. (2014). Epidemiology of Hantavirus infections in humans: a comprehensive, global overview. Critical reviews in microbiology, 40, p.261‑272. Weiss, S. et al. (2012). Hantavirus in bat, Sierra Leone. Emerging Infectious Diseases, 18, p.159‑161. Wells, R.M. et al. (1997). An unusual hantavirus outbreak in southern Argentina: person-to-person transmission? Hantavirus Pulmonary Syndrome Study Group for Patagonia. Emerging Infectious Diseases, 3, p.171‑174. Yanagihara, R., Amyx, H.L. et Gajdusek, D.C. (1985). Experimental infection with Puumala virus, the etiologic agent of nephropathia epidemica, in bank voles (Clethrionomys glareolus). Journal of Virology, 55, p.34‑38. Zaki, S.R. et al. (1995). Hantavirus pulmonary syndrome. Pathogenesis of an emerging infectious disease. The American journal of pathology, 146, p.552‑579. Zhang, Y.-Z. (2014). Discovery of hantaviruses in bats and insectivores and the evolution of the genus Hantavirus. Virus Research, 187, p.15‑21. 75 Zvirbliene, A. et al. (2014). The use of chimeric virus-like particles harbouring a segment of hantavirus Gc glycoprotein to generate a broadly-reactive hantavirus-specific monoclonal antibody. Viruses, 6, p.640‑660. 76 ANNEXE Annexe 1: Liste des hantavirus et hôtes associés Virus Abréviation Hôte Famille Cricetidae, sous-famille Arvicolinae Hokkaido HOKV Myodes rufocanus Isla Vista * ISLAV Microtus californicus Khabarovsk * KHAV Microtus maximowiczii Muju MUJV Myodes regulus Puumala * PUUV Myodes glareolus Prospect Hill * PHV Microtus pennsylvanicus Topografov * TOPV Lemmus sibiricus Tula virus * TULV Microtus arvalis Vladivostok VLAV Microtus fortis Famille Cricetidae, sous-famille Neotominae El Moro Canyon * ELMCV Reithrodontomys mexicanus New York * NYV Peromyscus leucopus Rio Segundo * RIOSV Reithrodontomys megalotis Sin Nombre * SNV Peromyscus maniculatus Famille Cricetidae, sous-famille Sigmodontinae Andes * ANDV Oligoryzomys longicaudatus Araquara ARAV Bolomys lasiurus Bayou * BAYV Oryzomys palustris Black Creek Canal * BCCV Sigmodon hispidus Cano Delgadito * CADV Sigmodon alstoni Choclo CHOV Oligoryzomys fulescens Laguna Negra * LANV Calomys laucha, Calomys callosus Muleshoe * MULV Sigmodon hispidus Oran ORNV Ologoryzomys longicaudatus Rio Mamore * RIOMV Oligoryzomys microtis Famille Muridae, sous-famille Murinae Amur AMRV Apodemus peninsulae Da Bie Shan DBSV Niviventer confucianus Dobrava-Belgrade * DOBV Apodemus flavicollis Hantaan virus * HTNV Apodemus agrarius Saaremaa * SAAV Apodemus agrarius Sangassou * SANGV Hylomyscus simus Seoul * SEOV Rattus norvegicus Thailand * THAI Bandicota indica Localisation géographique Pathologie asociée Asie Amérique du Nord Asie Asie Europe Amérique du Nord Asie Europe Asie inconnue inconnue inconnue inconnue NE non pathogène inconnue non pathogène inconnue Amérique du Nord Amérique du Nord Amérique du Sud Amérique du Nord inconnue HCPS inconnue HCPS Amérique du Sud Amérique du Sud Amérique du Nord Amérique du Nord Amérique du Sud Amérique du Nord et du Sud Amérique du Sud Amérique du Nord Amérique du Sud Amérique du Sud HCPS HCPS HCPS HCPS inconnue HCPS HCPS inconnue HCPS HCPS Asie Asie Europe Asie Europe Afrique Mondial Asie HFRS inconnue HFRS HFRS HFRS inconnue HFRS inconnue 77 Virus Famille Soricidae Artybash Ash river Azagny Camp Ripley Cao Bang Fox creek Imijin Jeju Jemez Springs Kenkeme Seewis Tanganya Thottapalayam * Tualatin river Famille Talpidae Asama Nova Oxbow Rockport Ordre des Chiroptères Huangpi Longquan Magboi Mouyassué Abréviation Hôte Localisation géographique Pathologie asociée ARTV ARRV AZGV RPLV CBNV FXCV MJNV JJUV JMSV KKMV SEEV TGNV TPMV TLNV Sorex caecuntiens Sorex cinereus Crocidura obscurior Blarina brevicauda Anourosorex squamipes Sorex palustris Crocidura lasiura Crocidura shantungensis Sorex monticolus Sorex roboratus Sorex araneus Crocidura theresae Suncus murinus Sorex trowbridgii Russie Amérique du Nord Côte d'Ivoire USA Vietnam USA Corée Corée Amérique du Nord Russie Europe Afrique Asie USA inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue inconnue non pathogène inconnue ASAV NVAV OXBV RKPV Urotrichus talpoides Talpa europae Neurotruchus gibbsi Scalopus aquaticus Japon Europe USA USA inconnue inconnue inconnue inconnue HUPV LPUV MGBV MOYV Pipistrellus abramus Rhinolophus Nycteris hispida Neoromicia nanus Chine Chine Sierra Leone Côte d'Ivoire inconnue inconnue inconnue inconnue 78 PERSISTANCE ET TROPISME DES HANTAVIRUS : CONTRIBUTION À L’ÉTUDE DES GLYCOPROTÉINES D’ENVELOPPE NOM et Prénom : HARDY Alexandra Résumé Les Hantavirus sont des virus émergents de la famille des Bunyaviridae qui ont pour réservoir de nombreuses espèces de rongeurs, d’insectivores et de chauves-souris chez lesquels ils établissent des infections chroniques sans symptômes apparents. La transmission à l’homme est à l’origine de fièvres hémorragiques avec syndrome rénal (FHSR) en Europe et en Asie, ou de syndromes cardiopulmonaires (SCPH) en Amérique. Le sujet s’inscrit dans une étude qui a pour but de comprendre les mécanismes de persistance et de pathogénicité par analyse différentielle d’interaction des glycoprotéines de deux virus avec des facteurs cellulaires dans différents modèles. En effet, les glycoprotéines d’enveloppe jouent un rôle important, que ce soit lors de l’entrée dans les cellules cibles, lors de la morphogénèse des particules virales, ou dans le cadre de la régulation de certaines fonctions cellulaires, en particulier via des interactions avec le système immunitaire de l’hôte. En vue d’une approche comparative, nous nous sommes intéressés aux glycoprotéines de deux hantavirus présents en France : le virus Puumala (PUUV), à l’origine de néphropathies modérées, et le virus Tula (TULV), considéré comme non pathogène pour l’homme. Des vecteurs d’expression des glycoprotéines ont été générés dans le but de pouvoir les exprimer dans des lignées cellulaires humaines et de rongeurs. Les techniques et les outils les mieux adaptés afin de pouvoir détecter les glycoprotéines virales ont ensuite été déterminés. Ces mises au point constituent une étape nécessaire pour pouvoir par la suite identifier des interacteurs des glycoprotéines en condition de persistance ou de pathogénicité. Mots clés : ZOONOSE, MALADIE EMERGENTE, MALADIE VIRALE, GLYCOPROTÉINES D’ENVELOPPE, HANTAVIRUS, BUNYAVIRIDAE, RONGEURS Jury : Président : Pr. Directeur : Dr. Sophie Le Poder Assesseur : Pr. Nadia Haddad Invité : Pr. Marc Eloit 79 HANTAVIRUS PERSISTANCE AND TROPISM: CONTRIBUTION TO THE STUDY OF THE ENVELOPE GLYCOPROTEINS SURNAME : HARDY Given name : Alexandra Summary Hantaviruses are recognised as emerging pathogens belonging to the Bunyaviridae family. Small rodents, insectivores and bats, which are chronically and asymptomatically infected, act as reservoir hosts for hantaviruses. Transmission to humans results in Hemorrhagic Fever with Renal Syndrome (HFRS) in Europe and Asia, or in Hantavirus Cardiopulmonary Syndrome (HCPS) in the Americas. My work is part of a study aiming to better understand the mechanisms driving hantavirus persistence versus pathogenesis by differential analysis of glycoproteins from two hantaviruses and their interactions with cellular factors in different models. We focused on envelope glycoproteins as they play an important role in viral entry, in assembly of progeny viruses and in the regulation of cellular signaling responses and functions such as the host’s immune responses. For a comparative approach, two hantaviruses that are present in France were used: Puumala virus (PUUV), responsible for a mild form of HFRS, and the Tula virus (TULV), which is considered as nonpathogenic. Expression vectors for the envelope glycoproteins were generated in order to express them in human and rodent cell lines. The techniques and the tools required to detect the glycoproteins were then improved. These developments are a crucial step for the identification of glycoprotein interactors, either in persistant or pathogenic conditions. Keywords: ZOONOSIS, EMERGING DISEASE, VIRAL DISEASE, GLYCOPROTEINS, HANTAVIRUS, BUNYAVIRIDAE, RODENTS ENVELOPE Jury : President : Pr. Director : Dr. Sophie Le Poder Assessor : Pr. Nadia Haddad Guest : Pr. Marc Eloit 80