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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT
Année 2015
PERSISTANCE ET TROPISME DES HANTAVIRUS :
CONTRIBUTION À L’ÉTUDE DES
GLYCOPROTÉINES D’ENVELOPPE
THÈSE
Pour le
DOCTORAT VÉTÉRINAIRE
Présentée et soutenue publiquement devant
LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL
le……………
par
Alexandra Caroline Elodie HARDY
Née le 8 juillet 1989 à Tassin-la-Demi-Lune (Rhône)
JURY
Président : Pr.
Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL
Membres
Directeur : Sophie Le Poder
Maitre de conférences en virologie à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort
Assesseur : Nadia Haddad
Professeur de maladies contagieuses à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort
Invité : Marc Eloit
Directeur de la société Pathoquest
LISTE DES MEMBRES DU CORPS ENSEIGNANT
Directeur : M. le Professeur GOGNY Marc
Directeurs honoraires : MM. les Professeurs : COTARD Jean-Pierre, MIALOT Jean-Paul, MORAILLON Robert, PARODI André-Laurent, PILET Charles, TOMA
Bernard.
Professeurs honoraires : Mme et MM. : BENET Jean-Jacques, BRUGERE Henri, BRUGERE-PICOUX Jeanne, BUSSIERAS Jean, CERF Olivier, CLERC Bernard,
CRESPEAU François, DEPUTTE Bertrand, MOUTHON Gilbert, MILHAUD Guy, POUCHELON Jean-Louis, ROZIER Jacques.
-
DEPARTEMENT D’ELEVAGE ET DE PATHOLOGIE DES EQUIDES ET DES CARNIVORES (DEPEC)
Chef du département par intérim : M. GRANDJEAN Dominique, Professeur - Adjoint : M. BLOT Stéphane, Professeur
UNITE DE CARDIOLOGIE
- Mme CHETBOUL Valérie, Professeur *
- Mme GKOUNI Vassiliki, Praticien hospitalier
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DISCIPLINE : NUTRITION-ALIMENTATION
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DISCIPLINE : OPHTALMOLOGIE
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UNITE DE CLINIQUE EQUINE
- M. AUDIGIE Fabrice, Professeur
- Mme BERTONI Lélia, Maître de conférences contractuel
- Mme BOURZAC Céline, Maître de conférences contractuel
- M. DENOIX Jean-Marie, Professeur
- Mme GIRAUDET Aude, Praticien hospitalier *
- Mme MESPOULHES-RIVIERE Céline, Praticien hospitalier
- Mme TRACHSEL Dagmar, Maître de conférences contractuel
UNITE DE PARASITOLOGIE ET MALADIES PARASITAIRES
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- Mme COCHET-FAIVRE Noëlle, Praticien hospitalier
- M. GUILLOT Jacques, Professeur *
- Mme MARIGNAC Geneviève, Maître de conférences
- M. POLACK Bruno, Maître de conférences
- Mme RISCO CASTILLO Véronica, Maître de conférences (rattachée au DSBP)
UNITE D’IMAGERIE MEDICALE
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UNITE DE PATHOLOGIE CHIRURGICALE
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- M. MANASSERO Mathieu, Maître de conférences
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DISCIPLINE : SCIENCES DE GESTION ET DE MANAGEMENT
- Mme FOURNEL Christelle, Maître de conférences contractuel
* responsable d’unité
REMERCIEMENTS
Au Professeur de la Faculté de Médecine de Créteil,
Qui me fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury,
Hommage respectueux.
A Madame le Docteur Sophie Le Poder,
Pour avoir accepté d’encadrer ce travail et pour ses précieux conseils,
Sincères remerciements.
A Madame le Docteur Nadia Haddad,
Pour avoir accepté d’être mon assesseur et pour sa relecture attentive,
Trouvez ici l’expression de ma reconnaissance.
A Monsieur le Docteur Marc Eloit,
Pour son aide dans l’encadrement de ce projet et pour sa grande disponibilité.
Sincères remerciements.
Au Docteur Noël Tordo,
Responsable d’Unité des Stratégies Antivirales à l’Institut Pasteur,
Merci de m’avoir accueillie dans votre laboratoire très agréable et sympathique au cours de mon
stage de M2.
Au Docteur Myriam Ermonval,
Chargée de recherche à l’Institut Pasteur,
Pour m’avoir encadrée tout au long du stage, et pour sa grande disponibilité. Un grand merci pour
tout ce que tu m’as transmis en termes de connaissances, de raisonnement et d’organisation. Je suis
extrêmement reconnaissante de tes propositions toujours constructives et de ton investissement,
notamment à la toute fin du projet.
Sincères remerciements.
A ma famille,
Ma chère maman pour ton soutien inconditionnel, et mon papa adoré pour ta grande patience, tes
encouragements et ta science infuse. C’est grâce à vous que j’en suis là aujourd’hui, merci pour tout
ce que vous avez fait et continuez de faire pour moi.
A mes petites sœurs, que j’adore pour leur folie et leur côté déjanté.
A mes grands parents, cousins, oncles et tantes, j’ai beaucoup de chance de vous avoir et d’être si
bien entourée.
A mes amis, le groupe 6, mes compas, les poulots, mes colloques et tous les autres que j’ai pu
côtoyer au cours de ces 5 années,
Pour tous ces bons moments passés ensemble et surtout pour tous les bons moments qu’il nous reste
à venir. Merci d’avoir rendu ces années d’études aussi incroyables et agréables.
A Kader,
Merci de me supporter depuis un petit bout de temps déjà et d’être toujours là pour moi. Tu es mon
équilibre, merci pour tout.
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION ............................................................................................................................... 7
I/ Partie bibliographique : les infections à Hantavirus ......................................................................... 9
1.
Historique et généralités........................................................................................................... 9
2.
Hôtes et pathologies associées ............................................................................................... 12
3.
4.
2.1.
Les hôtes réservoirs ......................................................................................................... 12
a)
Évolution des hantavirus avec leur hôte ...................................................................... 13
b)
Infection des rongeurs .................................................................................................. 15
2.2.
Infection humaine ............................................................................................................ 17
a)
Fièvre hémorragique avec syndrome rénal (FHSR) .................................................... 18
b)
Syndrome cardiopulmonaire à hantavirus (SCPH) ...................................................... 20
c)
Physiopathologie et réponse immunitaire .................................................................... 21
2.3.
Cycle infectieux et transmission ...................................................................................... 27
a)
Transmission de rongeur à rongeur .............................................................................. 27
b)
Transmission des rongeurs aux humains ..................................................................... 28
Agent étiologique ................................................................................................................... 31
a)
Entrée ........................................................................................................................... 32
b)
Transcription et réplication .......................................................................................... 33
c)
Synthèse des particules virales et bourgeonnement ..................................................... 37
Les glycoprotéines d’enveloppe............................................................................................. 39
4.1.
Maturation des glycoprotéines d’enveloppe .................................................................... 39
4.2.
Fonctions des glycoprotéines d’enveloppe ...................................................................... 41
a)
Entrée des particules virales ......................................................................................... 41
b)
Morphogénèse des particules virales ........................................................................... 41
c)
Interaction avec les facteurs cellulaires ....................................................................... 42
II / Partie expérimentale : étude des glycoprotéines d’enveloppe ..................................................... 43
1.
Objectifs du travail ................................................................................................................. 43
2.
Matériel et méthodes .............................................................................................................. 43
2.1.
Plasmides et gènes viraux ................................................................................................ 43
2.2.
Lignées cellulaires ........................................................................................................... 45
2.3.
Anticorps disponibles ...................................................................................................... 45
2.4.
Préparation des plasmides d’expression des glycoprotéines ........................................... 46
1
3.
4.
2.5.
Construction de plasmides d’expression des glycoprotéines ........................................... 47
2.6.
Transfections.................................................................................................................... 47
a)
Transfection transitoire ................................................................................................ 47
b)
Transfection stable ....................................................................................................... 48
2.7.
Détection des glycoprotéines ........................................................................................... 48
a)
Immunofluorescence intra-cytoplasmique ................................................................... 48
b)
Immuno-précipitation................................................................................................... 49
c)
Immunodétection sur membrane de nitrocellulose (Western Blot) ............................. 49
Résultats ................................................................................................................................. 50
3.1.
Préparation des vecteurs pour l’expression de glycoprotéines Gn et Gc......................... 50
a)
Clonage de GPC des virus Puumala et Tula ................................................................ 50
b)
Ligations des inserts amplifiés par PCR ...................................................................... 52
3.2.
Mise au point des outils de détection ............................................................................... 52
a)
Détection des protéines virales par WB ....................................................................... 52
b)
Détection des protéines virales par immunofluorescence intracytoplasmique ............ 54
3.3.
Expression des glycoprotéines d’enveloppe en cellules de Mammifères ........................ 57
a)
Mise au point des conditions de transfection ............................................................... 57
b)
Transfection transitoire ................................................................................................ 57
Discussion .............................................................................................................................. 64
CONCLUSION .................................................................................................................................. 69
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................. 71
ANNEXE ........................................................................................................................................... 77
2
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Liste des figures
Figure 1 : Répartition des cas confirmés en laboratoire de FHSR et de SCPH à travers le monde
(Watson et al., 2014) .......................................................................................................................... 11
Figure 2: Rongeurs associés aux trois espèces de Hantavirus présents en France ............................ 12
Figure 3: Arbre phylogénétique des hantavirus (Zhang, 2014) ......................................................... 14
Figure 4 : Représentation graphique de la réponse immunitaire lors de l’infection des rongeurs
(Schountz et Prescott, 2014) .............................................................................................................. 17
Figure 5: Présentation clinique typique de la NE (Vapalahti et al., 2003) ........................................ 19
Figure 6: Modèle proposé pour la pathogénie de l’infection à Hantavirus (Spiropoulou et
Srikiatkhachorn, 2013) ....................................................................................................................... 26
Figure 7: Cycle infectieux des hantavirus .......................................................................................... 30
Figure 8: Organisation de la particule virale (Vaheri et al., 2013) .................................................... 31
Figure 9: Mécanisme de capture de coiffe pour l’initiation de la transcription des ARNm (PicardJean et al., 2013) ................................................................................................................................ 34
Figure 10: Mécanisme d’amorçage et de réalignement (Garcin et al., 1995) .................................... 35
Figure 11: Stratégie de transcription et réplication des hantavirus .................................................... 36
Figure 12: Cycle viral des hantavirus (Jonsson et al., 2010) ............................................................. 38
Figure 13: Représentation schématique des glycoprotéines des hantavirus (Cifuentes-Muñoz et
al., 2014) ............................................................................................................................................ 40
Figure 14: Organisation des glycoprotéines à la surface des particules virales ................................. 41
Figure 15: Organisation des plasmides donneurs d’insert GPC ........................................................ 44
Figure 16: Étude des inserts GPC-PUUV présents dans le plasmide pET-30a-GPC-PUUV après
sous clonage ....................................................................................................................................... 51
Figure 17: Immunodétection des protéines virales dans des lysats de cellules infectées par
Western Blot. ..................................................................................................................................... 53
3
Figure 18: Détection des nucléoprotéines et des glycoprotéines virales par immunofluorescence
intracytoplasmique dans des cellules VeroE6 infectées. ................................................................... 55
Figure 19: Détection de Gc PUUV dans différentes lignées cellulaires transfectées avec
pcDNA3-GPC-PUUV par immunofluorescence intracytoplasmique................................................ 58
Figure 20: Révélation de Gc par immunoblot à partir de lysats de cellules HEK transfectées ou
infectées par PUUV puis immunoprécipités avec un anti-Gc............................................................ 59
Figure 21: Détection de la nucléoprotéine N de TULV et de l’eGFP par immunofluorescence
intracytoplasmique dans le contexte d’expression transitoire............................................................ 60
Figure 22: Détection de la glycoprotéine Gc de TULV avec le mAb 10B8 dans le contexte
d’expression transitoire ...................................................................................................................... 62
Liste des tableaux
Tableau 1 : Génome des hantavirus et protéines virales exprimées .................................................. 32
Tableau 2 : Anticorps disponibles contre les hantavirus ............................................................... 46
Tableau 3: Récapitulatif des réactivités des anticorps testés sur cellules VeroE6 infectées par les
virus PUUV et TULV ........................................................................................................................ 56
Tableau 4 : Tableau récapitulatif des épitopes reconnus par les anticorps 4G2, 10B8 et A1C5
avec les séquences protéiques associées de PUUV Sotkamo et TULV Moravia .............................. 63
Annexe
Annexe 1: Liste des hantavirus et leur hôtes associés ....................................................................... 77
4
ABREVIATIONS
Aa : Acide aminé
ANDV : Andes Virus
CT : Queue cytosolique (Cytosolic tail)
FA : Formaldéhyde
GFP : Protéine fluorescente verte (Green Fluorescent Protein)
GPC : Précurseur des glycoprotéines (Glycoprotein Precursor)
SCPH : Syndrome cardio-pulmonaire à hantavirus (Hantavirus Cardio-pulmonary Syndrome)
FHSR : Fièvre hémorragique à syndrome rénal (Heamorrhagic Fever with Renal Syndrome)
HTNV : Hantaan virus
IF : Immunofluorescence
LT: Lymphocyte T
LTC : Lymphocyte T cytotoxique
mAb : Anticorps monoclonal (monoclonal antibody)
N : Nucléoprotéine
NE : Nephropatica epidemica
ORF : Cadre ouvert de lecture (Open Reading Frame)
PCR : Réaction de polymérisation en chaîne (Polymerase Chain Reaction)
PBS : Phosphate Buffer Saline
PBST : PBS + 0,05 % Tween 20
PUUV : Puumala virus
RdRp : ARN dépendante ARN polymérase (RNA-dependant RNA polymerase)
RE : Rériculum endoplasmique
RNP : Ribonucléoprotéine
SEOV : Seoul virus
TULV : Tula virus
VEGF : Vascular Endothelial Growth Factor
5
6
INTRODUCTION
Les rongeurs sont capables de véhiculer de nombreux agent infectieux, pouvant être
pathogènes pour l’homme. Parmi eux, nous pouvons citer la leptospirose, la peste, les
arenaviroses et les hantaviroses.
Les hantaviroses sont des maladies zoonotiques émergentes, qui représentent
actuellement une menace en termes de santé publique. En effet, de nouveaux hantavirus ont
récemment été isolés, et le nombre de cas recensés est en constante augmentation (que ce soit dû
à des meilleurs outils diagnostiques ou à une véritable augmentation de la prévalence). Les
hantavirus ont pour hôtes naturels des petits rongeurs (mulots, souris, campagnols…), mais
également des insectivores (chauves-souris, taupes, musaraignes). Contrairement à l’infection
des hôtes réservoirs qui est considérée comme chronique et asymptomatique, les humains
peuvent se contaminer via les rongeurs et développer deux types de syndromes. Très peu de
données sont actuellement disponibles concernant les mécanismes de pathogénicité pour
l’homme de certains hantavirus, et l’établissement d’un état de persistance chez leurs hôtes
naturels.
Ce travail portera dans un premier temps sur une étude bibliographique des infections
à hantavirus chez leurs hôtes réservoirs et chez les humains. Une deuxième partie
s’intéressera plus particulièrement à l’étude expérimentale des glycoprotéines de deux
hantavirus qui diffèrent selon leur pathogénicité. En effet, les glycoprotéines d’enveloppe
jouent un rôle important lors du cycle viral, et interagissent avec de nombreux partenaires.
Comprendre leurs modalités d’interaction avec leurs hôtes humains et réservoirs représente
un enjeu de santé publique important.
Cette étude des glycoprotéines d’enveloppe des hantavirus a été réalisée lors du cadre
du stage de Master 2 de Virologie Fondamentale. Ce stage a été encadré par le Dr. Myriam
Ermonval et a été entrepris au sein de l’Unité Postulante des Stratégies Antivirales à l’Institut
Pasteur, dirigée par le Dr Noël Tordo.
7
8
I/ Partie bibliographique : les infections à
Hantavirus
1. Historique et généralités
Les hantavirus ont récemment été identifiés comme agents responsables de deux types
de syndromes : les fièvres hémorragiques avec syndrome rénal (FHSR) en Europe et en Asie,
et les syndromes cardio-pulmonaires à hantavirus (SCPH) en Amérique.
L’infection par des hantavirus est cependant connue depuis longtemps puisqu’une
première description de la maladie, datant du premier millénaire, a été découverte en Chine
(McCaughey et Hart, 2000). D’autres épidémies ont été rapportées (Casals et al., 1970),
notamment une « fièvre de Tula » qui aurait touché la Russie en 1930 (Heyman et al., 2009).
En Europe, une forme modérée de FHSR a été décrite dès 1934 par Myrhman et Zetterholm,
deux physiciens suédois, qui lui donnent le nom de « nephropathia epidemica » (NE) (Lee et
al., 2014). Une épidémie de néphrites aigües atteint au printemps et en été 1942, un millier de
soldats allemands et finlandais stationnés en Laponie. La maladie sévit également lors de la
Seconde Guerre Mondiale, avec plus de 12 000 soldats japonais souffrant d’une « fièvre de
Mandchourie » (Gajdusek, 1962). Les recherches s’amorcent alors et une origine virale est
suspectée par des chercheurs russes et japonais. Ces derniers réussissent à reproduire la
maladie chez des prisonniers en leur injectant du sérum et de l’urine filtrés issus de patients
(Le Guenno et al., 1994).
C’est lors de la guerre de Corée que la maladie attire l’intérêt des chercheurs
occidentaux. En effet, de 1950 à 1953, plus de 3200 soldats de l’ONU sont victimes d’une
« fièvre hémorragique de Corée » (Gajdusek, 1962 ; Smadel, 1953). Cette maladie d’apparition
aigue est caractérisée par de la fièvre, des maux de tête intenses, une insuffisance rénale, des
manifestations hémorragiques et induit une létalité d’environ 10 %. Les premiers essais
d’isolement du virus en culture cellulaire sont sans résultat et il faudra attendre 1976 pour
9
que Lee mette en évidence l’agent étiologique et confirme le rôle des rongeurs en tant qu’hôte
réservoir : il parvient à détecter l’antigène viral par immunofluorescence sur des coupes de
poumon du mulot rayé Apodemus agrarius en utilisant comme antisérum le sérum de patient
convalescent (Lee et al., 2004). Le virus est nommé virus Hantaan (HTNV) du nom de la
rivière séparant les deux Corées, et devient le prototype du genre hantavirus. Il est adapté à la
culture cellulaire en 1980 (French et al., 1981), ce qui permet aux scientifiques de le classer
dans un nouveau genre de la famille des Bunyaviridae.
En parallèle, le virus Puumala (PUUV), responsable de la nephropathia epidemica dans
les pays scandinaves est isolé chez le campagnol roussâtre Myodes glareolus. D’autres agents
pathogènes responsables de fièvres hémorragiques sont ensuite rapidement identifiés,
comme les virus Seoul (SEOV) et Dobrava (DOBV), trouvés respectivement chez le rat Rattus
norvegicus et le mulot à collier Apodemus flavicollis (Lee et al., 2014). L’ensemble des maladies
causées par ces virus retrouvés sur les continents européen et asiatique sont alors regroupées
sous le nom de fièvres hémorragiques avec syndrome rénal (FHSR).
L’intérêt pour les hantavirus est renouvelé en 1993 quand une épidémie de détresse
respiratoire éclate dans la région de Four Corners aux Etats-Unis, avec un taux de létalité
élevé (plus de plus de 40 %). Les premières recherches révèlent que les anticorps des patients
affectés réagissent avec des antigènes d’hantavirus, et un nouvel hantavirus est identifié chez
la souris Peromyscus maniculatus (Zaki et al., 1995). Ce virus est baptisé Sin Nombre virus
(SNV), et fait partie d’un nouveau groupe d’hantavirus responsables de syndromes cardiopulmonaires (SCPH).
Il est intéressant de noter que le virus Hantaan n’était pas le premier hantavirus à avoir
été découvert. En 1964, le virus Thottapalayam est isolé à partir d’une musaraigne capturée
en Inde. Ce virus n’est pas pathogène pour l’homme et c’est seulement en 1989 qu’il a été
classé dans le genre Hantavirus suite à l’étude de sa morphologie et de son organisation
génomique (Zhang, 2014). A l’heure actuelle, 24 hantavirus ont été reconnus par
l’International Committee on Taxonomy of Viruses (ICTV), avec pour hôtes réservoirs de
nombreuses espèces d’insectivores, en plus des rongeurs. Beaucoup de hantavirus ont été
isolés chez de nouvelles espèces animales comme des chauves-souris, des musaraignes et des
taupes depuis une dizaine d’années, et leur statut taxonomique est actuellement en attente.
10
Les hantavirus sont présents dans le monde entier du fait de la large répartition
géographique des hôtes qu’ils infectent. Seuls les hantavirus présents chez les rongeurs ont
été décrits comme pouvant être à l’origine de maladies chez l’homme. La répartition mondiale
des deux formes cliniques, FHSR et SCPH, causées respectivement par les hantavirus de
l’Ancien et du Nouveau Monde, est donnée dans la figure 1. La sévérité de la maladie dépend
beaucoup du virus concerné : en Europe et Asie, le virus Puumala est responsable d’une
néphropathie modérée (nephropathia epidemica), tandis que le virus Hantaan est à l’origine
d’une forme mortelle dans 5 % des cas. Entre 2005 et 2010, plus de 600 cas ont été rapportés
en France, 1 500 en Belgique, 3 500 en Suède, 4 000 en Allemagne et 11 000 en Finlande, la
majorité dus à PUUV (Ayral, 2013). En Amérique, dans le cas d’infections par des hantavirus
comme les virus Sin Nombre (SNV) et Andes (ANDV), la maladie peut être mortelle dans 25 à
45 % des cas (détresse respiratoire aigüe puis choc). On estime qu’il y a entre 150 000 et 200
000 cas annuels de FHSR dans le monde, la plupart recensés en Chine, contre environ 200 cas
annuels de SCPH. Toutefois, les études de prévalence suggèrent que les infections humaines
sont encore sous-diagnostiquées (Krüger et al., 2011).
Figure 1 : Répartition des cas confirmés en laboratoire de FHSR et de SCPH à travers le monde
(Watson et al., 2014)
11
La gravité des maladies associées aux hantavirus combinée à l’absence de vaccin ou de
traitement antiviral ainsi qu'à leur présence dans le monde entier en font un problème majeur
de santé publique. De plus, aucun modèle animal permettant de reproduire les maladies
humaines n’est actuellement disponible. Les hantavirus étant des virus avec un génome
segmenté, l’émergence d’éventuels réassortants consécutive à la co-circulation de différents
hantavirus dans une même zone géographique est également une préoccupation majeure.
2. Hôtes et pathologies associées
2.1. Les hôtes réservoirs
Contrairement aux autres genres de la famille des Bunyaviridae, les Hantavirus ne sont
pas transmis par des vecteurs arthropodes. Ils infectent de façon persistante et sans
symptôme apparent des rongeurs qui sont considérés comme leurs hôtes naturels (Fig. 2). À
ce jour, les rongeurs sont les seuls à être associés à des hantavirus pathogènes pour l’homme.
De ce fait, les rongeurs ont longtemps été la cible principale de la surveillance et des
recherches. L’identification de nouveaux génotypes d’hantavirus chez des insectivores a
rapidement augmenté depuis la découverte d’un deuxième hantavirus chez la musaraigne en
2007 (Tanganya virus). Depuis, les recherches se sont poursuivies et des hantavirus ont
également été isolés chez des chauves-souris capturées en Asie et en Afrique (Guo et al., 2013
; Weiss et al., 2012).
Figure 2: Rongeurs associés aux trois espèces de Hantavirus présents en France
12
L’ensemble de ces données récentes suggèrent qu’il y a une grande diversité
d’hantavirus qui circulent chez un large spectre d’hôtes réservoirs (Guo et al., 2013). La
caractérisation de ces hantavirus fournira non seulement des informations concernant la
phylogénie et les origines des hantavirus, mais permettra également de comprendre les
mécanismes de leur émergence chez les animaux et les humains (Zhang, 2014).
a) Évolution des hantavirus avec leur hôte
On peut noter une association assez étroite des différentes souches d’hantavirus avec
leurs espèces réservoirs. Le tableau en annexe 1 recense les différents hantavirus et leurs
hôtes correspondants. Ces associations spécifiques mettent en lumière une co-spéciation
ancienne. En effet, la comparaison de la phylogénie des hantavirus avec celle de leurs hôtes
réservoirs révèle une certaine congruence (Plyusnin et al., 1996), avec l’observation de trois
clades d’hantavirus qui correspondent à trois sous-familles de rongeurs : les Murinae, les
Arvicolinae et les Sigmodontinae/Neotminae. Il est actuellement admis que les hantavirus ont
co-évolué avec leur hôte depuis des milliers d’années (Plyusnin et Sironen, 2014). L’analyse
phylogénétique de l’ensemble des séquences disponibles du segment S permet de distinguer 4
phylogroupes qui sont représentés sur l’arbre phylogénétique ci-dessous (Fig. 3) :
-
Le premier comprend uniquement des virus retrouvés chez les Soricidae, tel que le
TPMV.
-
Le deuxième contient des hantavirus isolés chez des chauves-souris en Chine tels
que les virus Huangpi (HUPV) et Longquan (LQUV), ainsi que le virus Nova, plus
divergent, qui est présent chez la taupe européenne.
-
Le phylogroupe III est composé de tous les virus transmis par les Murinae, et
d’autres virus transmis par les Soricidae.
-
Enfin, le phylogroupe IV regroupe l’ensemble des virus échantillonnés chez les
sous-familles Arvicolinae, Neotominae et Sigmodontinae de rongeurs.
13
Figure 3: Arbre phylogénétique des hantavirus (Zhang, 2014)
La notion de quasi-exclusivité du virus pour son hôte doit cependant être nuancée car
de nombreux exemples de changement d’hôte (host-switching) ont été décrits. Le virus
semble capable de passer la barrière d’espèce et d’infecter un autre hôte réservoir. C’est le
cas, par exemple, du virus Saaremmaa (SAAV) trouvé chez le mulot rayé Apodemus agrarius,
qui est également l’hôte réservoir du virus Hantaan (HTNV). Cependant, même si HTNV et
SAAV sont transmis par le même rongeur, celui-ci est réparti dans deux zones géographiques
distinctes qui ne se recoupent pas : SAAV est présent en Europe de l’Est tandis qu’HTNV est
présent en Corée, en Chine, dans l’Est de la Russie et à Taiwan. Les alignements de séquences
révèlent que SAAV est plus proche génétiquement d’un autre hantavirus, le virus Dobrava
(DOBV) isolé chez Apodemus flavicollis, que d’HTNV. En Europe de l’Est, A. agrarius et A.
flavicollis partagent la même aire géographique et la transmission d’un virus ancestral DOBV
depuis A. flavicollis vers A. agrarius serait ainsi à l’origine de SAAV (Nemirov et al., 2002).
14
Les hantavirus possédant un génome tri-segmenté, des réassortiments sont également
possibles entre des virus très proches. Ce phénomène est notamment décrit pour différents
isolats du virus Sin Nombre (SNV). Les arbres phylogénétiques obtenus diffèrent les uns des
autres selon le segment étudié : certains isolats sont génétiquement proches pour deux
segments mais le sont beaucoup moins pour le troisième segment (Henderson et al., 1995).
La découverte récente des nouveaux hantavirus chez les chauves-souris, les taupes et
les musaraignes a permis d’en apprendre plus sur les origines et l’évolution des hantavirus
(Bennett et al., 2014). Les dernières données de la littérature indiquent une plus grande
diversité génétique parmi les hantavirus retrouvés chez les chauves-souris et les insectivores
que parmi ceux retrouvés chez les rongeurs (Plyusnin et Elliott 2011). De plus, les données
phylogénétiques révèlent que les hantavirus présents chez les Chiroptera et les Soricomorpha
sont toujours localisés en position basale sur les arbres phylogénétiques, ce qui pourrait
indiquer que les hantavirus auraient émergé chez ces espèces avant d’infecter des rongeurs
(Guo et al., 2013).
Les chauves-souris sont déjà des sources connues ou supposées de beaucoup d’agents
pathogènes émergents tels que certains Coronavirus, des Filoviridae, des Henipavirus. Leur
large répartition géographique, leur capacité à voler sur de longues distances et leurs
importantes densités de population sont autant de facteurs qui favorisent le maintien,
l’évolution et la transmission de nombreux virus. Néanmoins, davantage de données et de
séquences complètes sont nécessaires afin de pouvoir comprendre en détail l’histoire
évolutive complexe des hantavirus.
b) Infection des rongeurs
L’infection des hôtes réservoirs est considérée comme chronique et asymptomatique.
Cependant, des travaux décrivent un effet néfaste de l’infection avec une diminution de la
survie de certains hôtes réservoirs dans leur milieu naturel. C’est par exemple ce qui est
évoqué pour SNV (Luis et al., 2012), pour lequel les auteurs ont réalisé des captures de souris
sur 15 ans. Ils observent une diminution de 13.4 % de la survie des mâles possédant des
anticorps anti-SNV par rapport aux rongeurs sans trace d’infection, mais ces résultats ne
s’affranchissent pas de multiples biais tels que l’âge ou la co-exposition à plusieurs agents
15
pathogènes. De même, la survie hivernale des campagnols infectés par PUUV serait affectée
(Jonsson et al., 2010).
Des études d’infection expérimentale de rongeurs ont montré que les hantavirus
persistent chez leur hôte et sont excrétés dans les fèces, l’urine et la salive. Dans le cas de
l’infection du campagnol roussâtre par le virus Puumala, une virémie transitoire est observée
du 10ème au 14ème jour (Yanagihara et al., 1985). Le virus est ensuite disséminé dans différents
organes dont le poumon (notamment dans les macrophages alvéolaires et les cellules
épithéliales), le foie, la rate, les reins, le pancréas, les glandes salivaires et l’intestin grêle. Des
antigènes viraux ont été observés dans les poumons par immunofluorescence jusqu’au 270ème
jour post-infection, et aucune lésion anatomo-pathologique n’a pu être observée dans les
différents tissus. On distingue ainsi deux phases lors de l’infection : une phase aigüe
caractérisée par une virémie, une dissémination du virus et sa réplication dans les organes
cibles, suivie d’une phase de persistance pendant laquelle la réplication virale semble avoir
lieu à plus bas bruit (Easterbrook et Klein 2008a).
De manière générale, la réponse immunitaire des hôtes réservoirs ne permet pas une
clairance virale. Les anticorps neutralisants sont détectables lors de la phase aigüe dès deux
semaines post-infection. Leur titre augmente ensuite pendant quelques semaines avant de
diminuer et de se stabiliser. Ils sont détectables pendant la vie entière de l’animal, mais ne
permettent pas d’éliminer complètement le virus (Easterbrook et Klein 2008a). Des anticorps
maternels, quant à eux, peuvent protéger les jeunes rongeurs de l’infection jusqu’à deux mois.
Cette différence de protection entre l’adulte et les rongeurs nouveau-nés peut être due à la
différence dans la chronologie de l’infection : lorsque les rongeurs adultes sont infectés, le
virus peut se répliquer jusqu'à un titre élevé qui empêche la clairance virale une fois la
production d’anticorps amorcée. Les jeunes rongeurs, quant à eux, vont acquérir des
anticorps maternels qui peuvent neutraliser le virus avant qu’une infection persistante ne soit
établie.
La réponse immunitaire est également caractérisée par une activation des cellules T
régulatrices (T reg), ce qui contribuerait au maintien du virus chez les rongeurs. En effet, la
réponse T reg prédomine, en particulier au niveau de sites de réplication virale comme les
poumons (Easterbrook et Klein 2008b). Elle est associée à une inhibition de la synthèse de
16
cytokines pro-inflammatoires et limiterait donc la pathogénicité associée à une réponse
inflammatoire trop importante, comme c’est le cas lors d’infections humaines. Cette réponse
immunitaire a été beaucoup étudiée pour SEOV (Easterbrook et al., 2007) et SNV (Schountz et
al., 2007). L’inactivation fonctionnelle des cellules T reg est à l’origine d’une diminution de la
quantité de particules virales excrétés quantifiées en qRTPCR (Easterbrook et al., 2007). Le
modèle de la réponse immunitaire chez les rongeurs est résumé schématiquement dans la
figure 4 : au départ, une réponse inflammatoire modeste limite la réplication virale mais cette
dernière peut reprendre épisodiquement lorsque la réponse T régulatrice se met en place par
la suite, empêchant ainsi toute élimination complète du virus.
Figure 4 : Représentation graphique de la réponse immunitaire lors
de l’infection des rongeurs (Schountz et Prescott, 2014)
2.2. Infection humaine
A la différence des infections chez les rongeurs, les hantavirus peuvent être à l’origine
de deux types de syndromes chez les humains : FHSR et SCPH. Bien que les deux maladies
diffèrent selon l’organe cible affecté (reins versus poumons), elles présentent des similitudes
en terme de mécanismes de pathogénicité. Dans les deux cas, les affections humaines sont
caractérisées par une atteinte de l’endothélium vasculaire à l’origine de fuites plasmatiques et
d’hémorragies, et résulteraient toutes les deux d’une dérégulation de la réponse immunitaire
de l’hôte plutôt que d’effets cytopathiques liés au virus même.
17
a) Fièvre hémorragique avec syndrome rénal (FHSR)
Il existe plusieurs formes de FHSR et la sévérité des symptômes ainsi que le pronostic
varient considérablement selon le virus incriminé. En effet, nous avons vu précédemment que
PUUV était responsable d’une atteinte rénale modérée, nommée NE, alors que les maladies
causées par HTNV en Asie et DOBV en Europe de l’Est sont beaucoup plus sévères. De façon
générale, la période d’incubation est de trois semaines environ et la maladie évolue selon 5
phases distinctes : fébrile, hypotensive, oligurique, polyurique et convalescente (Jonsson et al.,
2010 ; Hussein et al., 2011).
-
La phase fébrile : elle dure entre 3 à 5 jours et est caractérisée par des maux de tête
intenses d’apparition aigue. De la fièvre, des frissons et des douleurs au dos sont
également présents. Des nausées et des vomissements associés à des douleurs
abdominales sont rapportés (Schmaljohn et Hjelle 1997). Les hémorragies, si elles
ont lieu, apparaissent à la fin de ce stade sous forme de rougeurs au visage ou sur
les muqueuses, ou de pétéchies au niveau du palais.
-
La phase hypotensive : elle dure de quelques heures jusqu’à 2 jours, et elle est
accompagnée de manifestations hémorragiques pouvant être des pétéchies, mais
aussi des injections conjonctivales et de l’épistaxis. Une thrombocytopénie et une
leucocytose sont caractéristiques de cette phase.
-
La phase oligurique : il s’agit de la phase d’insuffisance rénale aigue, pouvant durer
plusieurs jours à plusieurs semaines. Des épanchements dans l’espace rétropéritonéal ont également été rapportés (Vapalahti et al., 2003).
Les résultats de laboratoire les plus souvent associés à cette phase sont une
augmentation de l’urémie et de la créatinémie, une protéinurie, une hématurie
microscopique et un taux élevé de protéine C-réactive. C’est une phase souvent
déterminante dans l’évolution de la maladie, qui est fatale dans 50 % des cas. Le
pronostic vital peut être engagé à cause de complications liées à l’insuffisance
rénale, à une augmentation de la perméabilité vasculaire et à un syndrome de choc
(Hussein et al., 2011 ; Manigold et Vial, 2014).
18
-
La phase polyurique : cette phase correspond au début du rétablissement. La
fonction rénale s’améliore, et la production d’urine augmente progressivement.
-
La phase de convalescence : en général les patients se remettent sans séquelles
mais certaines complications peuvent survenir telles qu’une insuffisance rénale
chronique et de l’hypertension (Avšič-Županc et al., 2013).
La présentation clinique de la NE, qui est une maladie associée à une faible létalité
(inférieure à 0.1 %), est globalement similaire à celle décrite précédemment (Fig. 5). Les
symptômes sont plus modérés : il n’y a pas de manifestations hémorragiques sévères mais des
pétéchies peuvent-être observées. Les 5 phases ne sont pas distinguables les unes des autres,
et une simple hypotension est décrite plutôt qu’un syndrome de choc. Des symptômes
oculaires, notamment une myopie aigue, ont été décrit dans 30 % des cas. Cette myopie est
pathognomonique de la NE et serait causée par un épaississement du cristallin (Vapalahti et
al., 2003). Les signes cliniques de la maladie étant peu spécifiques et ressemblant à une
atteinte fébrile accompagnée de douleurs abdominales, la NE est très souvent sousdiagnostiquée (Avšič-Županc et al., 2013).
Figure 5: Présentation clinique typique de la NE (Vapalahti et al., 2003)
19
b) Syndrome cardiopulmonaire à hantavirus (SCPH)
Le syndrome cardio-pulmonaire à hantavirus est une affection sévère, causée par les
hantavirus du Nouveau Monde. Il existe de nombreuses ressemblances avec la FHSR, les
cellules cibles des hantavirus étant les cellules endothéliales vasculaires. À la différence de la
FHSR, les poumons sont préférentiellement atteints, même si des atteintes rénales ont été
rapportées (Jonsson et al., 2010).
La maladie est d’apparition aigüe, avec une phase fébrile ressemblant à celle de la
FHSR : on peut noter des signes non spécifiques comme de la fièvre, des douleurs musculaires
et abdominales, des frissons, des maux de tête, des vomissements et de la diarrhée (AvšičŽupanc et al., 2013). Les premiers symptômes apparaissent après une période d’incubation
variant de 9 à 33 jours.
Cette première phase peut durer jusqu’à 5 jours, mais les patients progressent
rapidement vers la phase cardio-pulmonaire, caractérisée par de la toux et une dyspnée. Une
tachycardie et une hypotension sont également associées à cette phase. L’atteinte respiratoire
est due à une augmentation de la perméabilité des capillaires au niveau des poumons, à
l’origine de fuite plasmatique et d’œdèmes pulmonaires. Dans les cas sévères, une ventilation
mécanique est nécessaire. Cette phase, souvent mortelle, peut être compliquée par un choc
cardiogénique, une acidose lactique et une hémoconcentration. Une thrombocytopénie et des
troubles de la coagulation sont à l’origine de manifestations hémorragiques telles que des
saignements intestinaux, une hématurie ou une métrorragie. Ces symptômes sont associés à
un pronostic plus réservé (Manigold et Vial 2014). Les patients qui survivent à l’insuffisance
respiratoire entrent alors dans la phase diurétique. La convalescence est longue, et est
marquée par la résolution des œdèmes pulmonaires.
La présentation clinique des cas de SCPH suit globalement la description générale cidessus pour les différents hantavirus d’Amérique, mais elle peut être légèrement différente
selon l’hantavirus concerné. Les hantavirus d’Amérique du Sud, comme ANDV, sont associés à
des manifestations hémorragiques et à certaines atteintes rénales, ce qui n’est pas une
caractéristique de SNV qui est retrouvé aux Etats-Unis (Pini 2004). De plus, certains
hantavirus sont plus pathogènes que d’autres : ANDV et SNV sont associés à une létalité de 35
20
à 40 % (Jonsson et al., 2010), tandis que d’autres sont considérés comme étant responsables
de maladies plus modérées, voire comme non pathogènes. C’est le cas par exemple du virus
Choclo au Panama, où 21 % des cas diagnostiqués ne présentent pas de formes pulmonaires
et où la séroprévalence de 60 % dans la population est associée à une très faible mortalité
(Armien et al., 2013).
Ainsi, la dichotomie entre les hantavirus du Nouveau et de l’Ancien Monde doit
aujourd’hui être nuancée. Des cas de SCPH associés à des atteintes rénales ont été décrits,
notamment lors d’infection en Amérique du Sud par les virus Bayou et Black Creek Canal
(Macneil et al., 2011). Inversement, des manifestations pulmonaires modérées ont été
rapportées chez des individus atteints de FHSR. En effet, l’étude de radiographies thoraciques
(Paakkala et Mustonen 2007) révèle que plus d’un tiers de patients infectés par PUUV
présenterait des affections pulmonaires modérées (atélectasie, légères effusions pleurales,
infiltrats interstitiels). Malgré les différentes formes cliniques, les deux syndromes seraient la
manifestation d’un même processus pathologique.
c) Physiopathologie et réponse immunitaire
Les cellules vasculaires préférentiellement atteintes diffèrent selon les deux
syndromes associés aux hantavirus: les capillaires pulmonaires lors de SCPH et les capillaires
médullaires rénaux lors de NE et de FHSR. Les cellules vasculaires endothéliales sont donc les
cibles primaires des hantavirus. Si l’on tient compte de la voie de contamination des humains,
c’est l’épithélium pulmonaire et les cellules endothéliales vasculaires sous-jacentes qui sont
infectés en premier par inhalation. Cependant, les modalités de propagation de virus au sein
de l’organisme et l’atteinte préférentielle du rein ou du poumon restent encore peu connues.
Les hantavirus sont également capables d’infecter des cellules du système immunitaire telles
que les macrophages, les cellules dendritiques, les lymphocytes et les neutrophiles. Une
implication de certaines cellules du système immunitaire, comme les cellules dendritiques
(CD) ou les macrophages alvéolaires, a été proposée (Schönrich et al., 2008 ; Rang, 2010). En
effet, des CD sont présentes dans les voies respiratoires et les alvéoles, et sont capables de
phagocyter les agents pathogènes. Ces CD pourraient servir à transporter les virions jusqu’aux
nœuds lymphatiques régionaux, où d’autres cellules immunitaires pourraient être infectées.
Après plusieurs cycles de réplication, les virions atteindraient les cellules endothéliales.
21
Quelle que soit la voie de transmission considérée, des CD immatures localisées au niveau de
la peau et des muqueuses sont probablement un des premiers types cellulaires à entrer en
contact avec le virus.
Nous avons vu que les deux maladies étaient caractérisées par une thrombocytopénie
et une augmentation de la perméabilité vasculaire à l’origine d’œdèmes pulmonaires et
d’épanchements. Les fuites au niveau des capillaires seraient ainsi à l'origine des troubles
systémiques, tels que l'hypotension et le choc, et de l'insuffisance rénale dans le cas de la
FHSR. Les hémorragies dans la FHSR seraient le résultat d'une consommation plaquettaire
accrue associée aux lésions vasculaires. Les mécanismes pathogéniques exacts restent encore
mal compris aujourd’hui, et on ne sait pas encore expliquer complètement la perte de fonction
de l’endothélium vasculaire. Les hantavirus n’ont pas d’effets cytopathiques directs sur les
cellules qu’ils infectent in vivo et in vitro. De plus, l’infection de monocouches de cellules
endothéliales in vitro avec des hantavirus pathogènes n’est pas suffisante en elle-même pour
modifier la perméabilité vasculaire (Gavrilovskaya et al., 2008). À la différence d’autres virus
responsables de fièvres hémorragiques, comme le virus Ebola, qui sont responsables de fuites
plasmatiques par atteinte directe des cellules endothéliales, d’autres mécanismes impliquant
principalement la réponse immunitaire de l’hôte ont été proposés pour les hantavirus. En
effet, une réponse antivirale disproportionnée serait liée à la physiopathologie de la maladie
(Manigold et Vial, 2014 ; Vaheri et al., 2013).
La réponse immunitaire innée est la première ligne de défense à entrer en jeu, et
permet de contrer rapidement la réplication de l’agent pathogène. Les cellules infectées
possèdent notamment des Pathogen Recognition Receptors (PRR), comme la molécule RIG-I,
qui sont impliqués dans l’activation de la réponse interféron (IFN) et dans la synthèse de
cytokines pro-inflammatoires. Les hantavirus ont développé de nombreux mécanismes afin
d’éviter la réponse IFN de type I de l’hôte. Un de ces mécanismes est l’échappement de la
reconnaissance des ARN viraux par RIG-I, ce dernier reconnaissant les ARN dont l’extrémité 5’
contient un nucléotide tri-phosphate. Grâce au clivage en 5’ du premier nucléotide par la
RdRp, les ARN viraux sont mono-phosphorylés en 5’ et peuvent passer inaperçus de RIG-I. Les
glycoprotéines Gn et Gc sont aussi capables de sous-réguler la réponse IFN, en inhibant
directement un facteur de transcription nécessaire pour l’expression d’IFN et de gènes
inductibles par IFN (Macneil et al., 2011).
22
Il existe une différence dans la capacité des hantavirus pathogènes et non pathogènes à
induire une réponse IFN, et ceci contribuerait, entre autres, à leur différence de pathogénicité.
Le virus Prospect Hill n’est pas associé à une maladie, et est capable d’induire une réponse IFN
très robuste, rapidement après l’infection, alors que les hantavirus pathogènes comme HTNV
le sont moins (Macneil et al., 2011).
Malgré l’existence de mécanismes pour limiter cette réponse innée, toutes les
infections à hantavirus aboutissent néanmoins à la mise en place d’une réponse immunitaire
humorale de longue durée. Des anticorps neutralisants apparaissent rapidement, et dans le
cas de SCPH, un taux élevé d’anticorps est corrélé à une évolution positive de la maladie
(Schönrich et al., 2008).
Les infections à hantavirus chez les humains induisent également une forte réponse
lymphocytaire. La présence de lymphocytes T CD8+ est corrélée à la sévérité de la maladie
(Spiropoulou et Srikiatkhachorn 2013). De nombreuses données suggèrent que la réponse des
lymphocytes T cytotoxiques (CTL) serait impliquée dans l’augmentation de la perméabilité
vasculaire, en causant des dommages aux cellules endothéliales infectées (Klingström et
Ahlm, 2011). Contrairement à la réponse immunitaire chez les rongeurs, il n’y a pas de
régulation par les T reg. Ainsi, une forte réponse immunitaire permettrait d’éliminer
rapidement et efficacement le virus chez les humains, au prix de « dommages collatéraux » sur
l’endothélium vasculaire.
Les cytokines pro-inflammatoires sont aussi impliquées dans la réponse immunitaire
et la pathogénicité qui en découle (Hart et Bennett, 1999). Des cytokines comme le TNF-α, qui
sont produites par les macrophages et les CD après leur activation, sont capables d’agir sur
l’intégrité de la barrière endothéliale, en augmentant l’adhésion des leucocytes, leur migration
trans-endothéliale et la fuite vasculaire (Macneil et al., 2011). Des taux élevés d’autres
cytokines vasoactives telles que l’IL-1, l’IL-6, l’IFN-γ sont également retrouvés lors de la phase
aigüe des deux maladies (Klingström et Ahlm, 2011). Les cytokines peuvent recruter des
cellules immunitaires capables de sécréter de nouvelles molécules pro-inflammatoires,
intensifiant ainsi la « tempête cytokinique » qui déstabilise l’endothélium.
23
Des études récentes ont également mis en lumière un effet direct des hantavirus sur
l’endothélium, en plus de l’effet délétère du système immunitaire (Dalrymple et Mackow
2014). Un lien important entre les hantavirus et les désordres liés à la perméabilité vasculaire
découle du rôle des 3 intégrines dans les atteintes hémorragiques et leur dérégulation lors
d’infection à hantavirus. Les intégrines sont des protéines transmembranaires qui
interviennent dans le maintien des jonctions cellulaires ainsi que dans l’adhérence des
cellules à la matrice extracellulaire. Elles sont également impliquées dans la migration de
cellules endothéliales, qui est une fonction essentielle pour l’angiogenèse, la réparation des
vaisseaux et le maintien de l’intégrité vasculaire. En effet, des mutations ou une dérégulation
des 3 intégrines sont à l’origine de manifestations hémorragiques et d’une augmentation de
la perméabilité vasculaire (Schönrich et al., 2008 ; Gavrilovskaya et al., 2008). Les 3
intégrines sont présentes sous deux conformations : une conformation dépliée qui est active,
et une forme repliée inactive.
Il est intéressant de noter que les hantavirus pathogènes interagissent avec les 3
intégrines lors de l’entrée virale. Les hantavirus non pathogènes, quant à eux, utilisent les
intégrines 1 (Dalrymple et Mackow 2014). Il a été montré que l’interaction des hantavirus
avec les intégrines αvβ3 présentes à la surface des cellules endothéliales empêche la
migration cellulaire médiée par les intégrines. La dérégulation des fonctions régies par les
intégrines αvβ3 s’explique par le fait que les hantavirus interagissent avec les formes repliées
et inactivées de ces molécules (Macneil et al., 2011 ; Gavrilovskaya et al., 2008).
Les 3 intégrines contrôlent la perméabilité vasculaire de concert avec le facteur de
croissance de l'endothélium vasculaire ou VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor). Ce
dernier est un puissant inducteur de la perméabilité vasculaire. Il est capable de dissocier les
jonctions d’adhérence formées de Vascular Endothelial cadherin (VE-cadhérines) impliquées
dans le maintien de la barrière endothéliale en se liant à son récepteur : le VEGF-Receptor 2
(VEGF-R2). Cette interaction induit une internalisation de la VE-cadhérine et une perte de
l’intégrité de la barrière endothéliale. Les 3 intégrines forment également des complexes
avec le VEGF-Receptor 2 et leur inactivation dans des cellules knock-out induit une
hyperperméabilité en réponse au VEGF, soulignant le rôle des intégrines dans la régulation du
VEGF et de la perméabilité vasculaire (Mackow et Gavrilovskaya, 2009).
24
Des expériences in vitro ont montré que la perméabilité de cellules endothéliales
n’était pas affectée suite à une simple infection de ces cellules par des hantavirus. Cependant,
les cellules infectées sont beaucoup plus sensibles à l’action du VEGF : une induction de la
perméabilité vasculaire suite à l’ajout de VEGF sur les cellules endothéliales a été observée 3
jours post infection pour ANDV, HTNV et le New York virus (Gavrilovskaya et al., 2008). C’est
donc l’inhibition des 3 intégrines suite à l’infection par les hantavirus qui est à l’origine d’une
dérégulation de leurs fonctions.
Le VEGF peut être synthétisé par des LT activés, des macrophages, et des plaquettes
(Spiropoulou et Srikiatkhachorn, 2013). Des conditions d’hypoxie peuvent aussi être
responsables de la libération de VEGF par les cellules endothéliales. De plus, une autre
caractéristique des infections à hantavirus est une thrombocytopénie marquée. Le mécanisme
exact de cette thrombocyopénie n’est pas encore bien compris aujourd’hui mais il a été
observé que les hantavirus interagissent également avec les 3 intégrines de plaquettes
quiescentes. Ainsi, les plaquettes pourraient adhérer aux cellules endothéliales infectées via
les hantavirus qui sont présents à la surface de ces dernières (Gavrilovskaya et al., 2010).
Cette interaction des plaquettes au niveau de l’endothélium modifie radicalement les
propriétés de celui-ci et peut également contribuer à créer des conditions d’hypoxie.
Le modèle suivant concernant la pathogénicité des hantavirus et leurs effets sur les
cellules endothéliales est actuellement accepté (Schönrich et al., 2008 ; Spiropoulou et
Srikiatkhachorn, 2013) : dans un premier temps, les hantavirus infectent l’endothélium
respiratoire et/ou les CD se trouvant dans l’appareil respiratoire. La dissémination du virus
dans l’organisme se fait par le biais des cellules immunitaires (Fig. 6B). Une réplication
efficace peut avoir lieu dans les cellules cibles, grâce à la capacité des hantavirus à retarder et
à inhiber la réponse IFN, mais ils ne sont pas cytopathogènes en soi. Les cellules infectées
produisent des cytokines pro-inflammatoires, attirant des monocytes, des macrophages et des
LT qui, à leur tour, produisent de nouvelles molécules pro-inflammatoires comme le TNF-α.
Due à l’absence d’une réponse T régulatrice, une réponse immunitaire intense et délétère
impliquant les LTC a lieu dans l’endothélium et une sécrétion précoce de VEGF perturbent
également l’organisation de l’endothélium via la sous-régulation des VE-cadhérines qui sont
internalisées. Au final, les jonctions d’adhérence ont désorganisées (Fig. 6D).
25
Figure 6: Modèle proposé pour la pathogénie de l’infection à Hantavirus (Spiropoulou et
Srikiatkhachorn, 2013)
La pathogénie est complexe et multifactorielle. Les données récentes de la littérature
tendent à montrer que l’hypoxie, l’induction de VEGF et l’augmentation de la sensibilité des
cellules endothéliales au VEGF suite à l’interaction des hantavirus avec les intégrines sont des
paramètres importants à prendre en compte pour expliquer le mécanisme de perméabilité
vasculaire.
26
2.3. Cycle infectieux et transmission
a) Transmission de rongeur à rongeur
La transmission entre les rongeurs est horizontale. Les rongeurs excrètent le virus
dans leur salive, leurs urines et leurs fèces. La durée de l’excrétion varie pour chaque
virus/rongeur. De manière générale, c’est lors du premier mois que la réplication du virus est
maximale et que le risque de transmission est le plus important. Le virus persiste néanmoins à
vie chez son hôte et peut donc être transmis pendant de longues périodes au sein du réservoir
animal (Meyer et Schmaljohn, 2000 ; Vaheri et al., 2013).
Des excrétas de campagnols roussâtres infectés par PUUV ont été testés par RT-PCR et
de l’ARN viral a été trouvé de 14 à 28 jours post-infection (p.i) dans la salive, de 14 à 21 jours
p.i dans les urines, et de 11 à 28 jours p.i dans les fèces (Hardestam et al., 2008). La présence
d’ARN viral évalué par RT-PCR témoigne de la présence de particules virales infectieuses et
des rongeurs séronégatifs inoculés par voie intranasale avec ces différents excrétas subissent
une séroconversion.. Dans la nature, la transmission par voie aérienne est considérée comme
la voie principale de contamination entre les rongeurs.
La transmission directe par morsure est un autre mode de contamination. Des
injections par voie intramusculaire sont efficaces pour infecter des rongeurs, et il existe une
association significative entre la présence de plaies chez des rongeurs capturés et leur statut
séropositif (Glass et al., 1988). La prévalence de l’infection est plus élevée chez les mâles
adultes, dont l’agressivité accrue par rapport aux femelles augmente leur chance d’entrer en
contact avec le virus (Jonsson et al., 2010).
Une transmission sans contacts rapprochés entre rongeurs a également été décrite
(Kallio et al., 2006). Des rongeurs ont été infectés indirectement par PUUV en laboratoire,
après exposition à de la litière contaminée, et ce jusqu’à 15 jours après retrait des animaux
contaminés. Cette étude suggère que la transmission indirecte jouerait un rôle important dans
le maintien du virus dans la population de rongeurs.
27
La transmission est donc horizontale, et se fait par contact et par voie aérienne. Aucun
cas de transmission verticale n’a été rapporté, et la transmission par ingestion nécessite
encore d’être explorée.
b) Transmission des rongeurs aux humains
Contrairement aux autres genres de la famille des Bunyaviridae (Phlebovirus,
Tospovirus, Orthobunyavirus, Nairovirus), les hantavirus ne sont pas transmis par des vecteurs
arthropodes. La transmission aux humains se fait par inhalation d’aérosols provenant
d’excrétas de rongeurs infectés (Watson et al., 2014). Ainsi la répartition des cas humains est
à mettre en relation étroite avec la répartition géographique et temporelle des rongeurs
auxquels sont associés les virus. Seulement deux cas de transmission transcutanée ont été
décrits alors que la transmission par morsure est très répandue au sein du réservoir animal.
Dans les deux cas, il s’agit de contamination de laboratoire : l’une causée par une morsure de
rongeur infecté et l’autre après exposition percutanée à du matériel biologique infecté
(Pedrosa et Cardoso, 2011).
Le virus Andes constitue quant à lui une exception puisque de rares cas de
transmission d’homme à homme, sans contact avec des rongeurs, ont été rapportés. Lors
d’une épidémie en Argentine en 1996, 20 cas de SCPH ont été étudiés et les enquêtes
épidémiologiques ont révélé que certaines infections seraient dues à des contacts rapprochés
avec les malades (Wells et al., 1997). D’autres cas de transmission interhumaine ont été
décrits pour ANDV, et l’exposition à des fluides contaminés (salive, urine, semence) pourrait
être une voie d’infection (Watson et al., 2014).
Le nombre de cas humains est directement lié à la population de rongeurs et à la
prévalence des hantavirus dans le réservoir animal. Les épidémies humaines sont
généralement associées à une forte augmentation de la densité des rongeurs, puisque le
risque d’entrer en contact avec des animaux infectés est alors accru. La densité des
populations des rongeurs subit elle-même des fluctuations dont les mécanismes sont
complexes. Parmi les facteurs écologiques, on peut notamment citer les conditions
climatiques, l’abondance de la nourriture, la présence de prédateurs et les modifications de
leur écosystème (déforestation, urbanisation). Par exemple, lors de l’hiver 2007,
28
particulièrement doux, la Suède a connu une importante épidémie d’hantavirose: la
couverture de neige peu épaisse aurait conduit un nombre anormalement élevé de rongeurs à
envahir les maisons et ainsi à entrer en contact avec les humains (Reusken et Heyman 2013).
Des contacts directs ou indirects avec les excrétas de rongeurs constituent donc la
modalité principale de contamination humaine. Les individus les plus à risque sont ceux qui
travaillent à proximité de ce réservoir comme les gardes forestiers, les agriculteurs, les
trappeurs ou les chasseurs (Avšič-Županc et al., 2013). L’exposition à des excrétas de
rongeurs infectés peut également se faire lors de contacts avec des nids de rongeurs, lors de
travaux de réparation ou de nettoyage d’habitats infestés. Les greniers, garages, granges,
cabanes de jardin, chalets d’été sont souvent des endroits mal ventilés, propices à
l’installation de rongeurs, et leur nettoyage peut créer des aérosols infectieux. Le camping en
forêt et l’entrainement militaire, s’il a lieu pendant de longues périodes à l’extérieur dans des
zones de forte prévalence de rongeurs infectés, sont aussi considérés comme des activités à
risque (Watson et al., 2014 ; Reusken et Heyman, 2013).
En ce qui concerne les animaux de compagnie, la possession d’un chat ou d’un chien a
été identifiée comme facteur de risque (Watson et al., 2014). Aucune donnée n’a démontré la
capacité des animaux domestiques à transmettre le virus, seules quelques études sérologiques
ont mis en évidence des anticorps dirigés contre des hantavirus chez ces espèces (Dobly et al.,
2012). Leur rôle potentiel en tant que facteur de risque pourrait être lié au fait que les chats
chassent les rongeurs à proximité des habitations, ce qui augmenterait la probabilité d’entrer
en contact avec des animaux morts.
Les rongeurs domestiques constituent un facteur de risque pour la santé publique, un
cas de transmission de SEOV par des rats domestiques ayant par exemple récemment été
reconnu au Royaume Uni. Les deux rats domestiques du patient (Rattus norvegicus) se sont
avérés positifs en RT-PCR pour une souche de SEOV, nommée « Cherwell », différente des
souches précédemment isolées chez les rats sauvages. Le dépistage des vingt-et-un rats de
l’élevage dont ils étaient issus a révélé qu’un tiers des animaux avait une RT-PCR positive
pour SEOV et HTNV. Une étude épidémiologique rétrospective a montré que le conjoint de
l’éleveur avait été hospitalisé onze mois plus tôt pour une infection virale non diagnostiquée à
l’origine d’une thrombocytopénie et d’une insuffisance rénale (Jameson et al., 2013). A l’heure
29
actuelle des études de prévalence de l’infection par le virus chez les rats domestiques et
sauvages doivent être mises en œuvre afin de déterminer le risque de transmission à
l’homme. Leur résultat permettrait d’évaluer la pertinence et la nature de contrôles sanitaires
réguliers dans les élevages et les lieux de vente.
Jusqu’à présent, les hantavirus présents chez les chauves-souris et les Soricomorphae
n’ont pas été détectés chez les humains. Il est nécessaire de mettre en place des tests
sérologiques afin de pouvoir tester des échantillons de sérums et d’évaluer le potentiel
zoonotique de ces hantavirus. Le schéma récapitulant le cycle infectieux des hantavirus
conduisant à la contamination humaine est donné dans la figure 7.
Figure 7: Cycle infectieux des hantavirus
Source : http://www/everything-taxidermy.com/hantavirus
30
3. Agent étiologique
3.1. Structure de la particule virale
Les hantavirus, tout comme les autres genres de la famille des Bunyaviridae, sont des
virus enveloppés dont le génome est constitué de trois segments d’ARN négatif
monocaténaire (Plyusnin et Elliott 2011). Ces trois segments appelés small (S), medium (M) et
large (L) selon leur taille relative, sont associés aux nucléoprotéines (N) et à l'ARNdépendante ARN polymérase (RdRp) sous forme de ribonucléoprotéines RNP (Fig. 8). Les
extrémités non codantes 5’ et 3’ de chaque segment sont conservées pour les différents virus
et pour les segments. Elles sont complémentaires l’une de l’autre et peuvent s’apparier de
façon stable pour former des structures circulaires de type « queue de poêle » qui
fonctionnent comme des promoteurs pour la transcription virale (Plyusnin et al., 1996).
Figure 8: Organisation de la particule virale (Vaheri et al., 2013)
Les trois segments S (1,6-2kb), M (3,6kb) et L (6kb) codent respectivement pour la
nucléoprotéine N, pour le précurseur GPC des glycoprotéines d’enveloppe Gn et Gc, et pour la
31
RdRp (tab. 1). Cette dernière assure la transcription ainsi que la réplication des ARN
messagers (ARNm), et est également dotée d’une activité de capture de coiffe, permettant
d’initier la transcription. En plus de coder pour N, le segment S des hantavirus portés par les
rongeurs de la famille des Cricetidae code pour une protéine non structurale NSs. Sa phase
ouverte de lecture se trouve sur une région chevauchante avec la phase ouverte de lecture de
la nucléoprotéine N (Vaheri et al., 2013).
Tableau 1 : Génome des hantavirus et protéines virales exprimées
Segment
Taille (kb)
Protéines exprimées
S (small)
1.6 - 2
Nucléoprotéine N
Protéine non structurale NSs
M (medium)
3.6
Glycoprotéines d’enveloppe Gn et Gc
L (large)
6
ARN dépendante ARN polymérase
Les particules virales sont pléomorphes, leur taille varie de 100 à 170 nm. Elles
possèdent à leur surface des glycoprotéines Gn et Gc enchâssées dans la membrane sous
forme d’oligomères. Ces glycoprotéines forment des projections (ou « spikes ») dépassant de
5 à 10 nm de la surface de la particule virale, qui sont révélées en microscopie électronique
(Plyusnin et Elliott 2011).
3.2. Cycle viral
a) Entrée
Les différences de tropisme cellulaire entre les hantavirus responsables de FHSR et de
SCPH sont mal documentées. L’utilisation de modèles cellulaires a conduit à proposer la
fonction de récepteur à différentes protéines cellulaires. L’entrée dans la cellule se fait via
l’attachement des glycoprotéines de surface Gn et Gc sur les récepteurs des cellules cibles.
Parmi les facteurs cellulaires interagissant avec les glycoprotéines lors de l’entrée, on peut
citer les intégrines αv3, le decay-accelerating factor (DAF/CD55) et le récepteur du
32
complément C1q (gC1qR/p32), mais leur rôle direct nécessite encore d’être confirmé par des
études in vivo (Cifuentes-Muñoz et al., 2014).
Une fois les particules virales fixées au niveau des cellules cibles, elles sont
internalisées par endocytose. Le mécanisme exact d’endocytose demeure largement méconnu.
Des études ont montré que le BCCV, HTNV, et SEOV utilisent la voie clathrine-dépendante,
tandis que ANDV emprunterait une voie n’impliquant pas la clathrine (Cifuentes-Muñoz et al.,
2014 ; Ramanathan et Jonsson, 2008).
Afin de libérer le matériel génétique dans le cytoplasme, une étape de fusion de
l’enveloppe virale avec la membrane de l’endosome doit avoir lieu. Cette étape est médiée par
une protéine de fusion. Pour les hantavirus, une séquence hautement conservée interagissant
avec des liposomes in vitro a été identifié comme peptide de fusion candidat. Des
modélisations du repliement et de la structure de Gc suggèrent qu’il s’agit d’une protéine de
fusion de classe II (Tischler et al., 2005). Pour les autres Bunyaviridae, Gc est également
associé à une activité fusogénique. Récemment, la structure cristallographique de la
glycoprotéine Gc du virus de la Fièvre de la Vallée du Rift a confirmé qu’elle possédait
beaucoup de similarités avec les protéines de fusion de classe II (Dessau et Modis, 2013). C’est
la baisse du pH dans l’endosome qui est à l’origine d’une modification de la conformation de la
Gc. Le peptide de fusion est alors exposé et va s’insérer dans la membrane cellulaire pour
permettre son rapprochement et sa fusion avec l’enveloppe virale (Plyusnin et Elliott, 2011).
b) Transcription et réplication
La synthèse d’ARN viral nécessite une étape de transcription, pour synthétiser des
ARNm codant pour les protéines virales, puis de réplication, pour produire de l’ARN
génomique.
Ces étapes de transcription et de réplication sont similaires à celles décrites pour les
autres virus à ARN de polarité négative. Ici, le génome n’est pas directement infectieux, la
première étape de transcription d’ARN – en ARN + est donc nécessaire. Chez les hantavirus, la
RdRp utilise un mécanisme particulier, décrit pour les virus appartenant à la famille des
33
Orthomyxoviridae tel que le virus influenza, pour initier la transcription : le mécanisme de
capture de coiffe (Fig. 9). La synthèse des ARNm viraux est initiée grâce à un
oligoribonucléotide coiffé d’origine cellulaire, de 10 à 18 nucléotides de long, obtenu par
clivage de son extrémité 5’ grâce à l’activité endonucléasique associée à la polymérase (Vaheri
et al., 2013).
Figure 9: Mécanisme de capture de coiffe pour l’initiation de la transcription des ARNm
(Picard-Jean et al., 2013)
La polymérase est un complexe constitué de plusieurs domaines dont un se lie à l’ARN viral, alors qu’un
autre fixe la coiffe d’ARNm cellulaires. La polymérase possède une activité endonucléasique qui clive
l’ARNm cellulaire, puis l’élongation et la synthèse d’un ARN de polarité positive peuvent commencer, en
utilisant l’ARN viral comme matrice.
Les hantavirus possèdent des répétitions de séquences AUG au niveau de leur
extrémités 3’ et un deuxième mécanisme original appelé « prime and realign » a été décrit
34
pour le début de la transcription (Garcin et al., 1995). Les amorces d’origine cellulaire
possèdent un résidu G au niveau de leur extrémité 3’ qui s’apparie avec le C du premier AUC
de l’ARN viral servant de matrice, c’est-à-dire qu’elle s’apparie en position +3. L’amorce est
ensuite allongée de quelques bases, avant de glisser en arrière de trois nucléotides et de se
réaligner avec les AUC répétés de l’ARN viral (Fig. 10). Le résidu G de l’amorce se retrouverait
ainsi en position -1 et permet une copie exacte de l’ARN viral. De plus, la répétition de ce
mécanisme est à l’origine de la répétition de la séquence terminale sur le brin d’ARN naissant.
Figure 10: Mécanisme d’amorçage et de réalignement (Garcin et al., 1995)
Après l’initiation et la transcription de la répétition de la séquence terminale, la polymérase « glisse »,
réaligne l’ARNm naissant, puis continue la transcription.
En ce qui concerne le segment S, la protéine NSs est traduite à partir d’un deuxième
codon AUG. Le ribosome effectue un balayage de l’ARNm et peut initier la traduction à partir
35
du premier AUG pour la nucléprotéine N ou à partir d’un deuxième AUG plus en aval pour la
NSs (Fig. 11).
Figure 11: Stratégie de transcription et réplication des hantavirus
La réplication peut ensuite avoir lieu quand des quantités suffisantes de N ont été
synthétisées. En effet, pour l’étape de réplication, il doit y avoir assez de nucléoprotéines pour
encapsider l’antigénome. Cet antigénome, de polarité positive, est une copie exacte de l’ARN
viral et sert alors de matrice pour la synthèse des molécules d’ARN viral. L’initiation de la
réplication suivrait le même mécanisme d’amorçage puis de réalignement décrit pour la
transcription, à la différence que l’initiation se fait avec un GTP plutôt qu’un oligonucléotide
coiffé. De plus, une étape supplémentaire de clivage du résidu G qui se retrouve en position -1
de l’ARN naissant a été proposée. Ce clivage de l’extrémité 5’ triphosphate est réalisé via
36
l’activité endonucléasique de la polymérase et permet de générer une extrémité 5’
monophosphate, qui ne pourra pas être reconnue par les systèmes de défense antiviraux de la
cellule hôte (Garcin et al., 1995). De manière générale, les avancées concernant la
compréhension approfondie des mécanismes moléculaires impliqués dans la transcription et
la réplication sont limitées, à l’heure actuelle, par l’absence d’un modèle de génétique inverse
pour les hantavirus.
La localisation cytoplasmique précise de ces différentes étapes n’est pas encore
clairement établie. D’autres membres de la famille des Bunyaviridae, comme le Bunyamwera
virus, exploitent les membranes de l’appareil de Golgi pour la réplication et constituent des
usines virales (Vaheri et al., 2013), mais cela n’a pas été décrit pour les hantavirus. Il a été
proposé que la transcription puisse avoir lieu au niveau de « Processing bodies » (P bodies),
qui représentent un pool d’ARNm cellulaires utilisables pour initier la transcription par vol de
coiffe.
c) Synthèse des particules virales et bourgeonnement
La traduction des protéines virales se fait dans le cytoplasme pour la N et la RdRP,
tandis que les glycoprotéines sont synthétisées et subissent leur maturation au niveau du
réticulum endoplasmique, puis de l’appareil de Golgi. Nous verrons plus tard le détail de la
biogénèse des glycoprotéines Gn et Gc.
Après les étapes de transcription, traduction et réplication, c’est au niveau de la
membrane de l’appareil de Golgi que va être initiée la morphogénèse des particules virales. Il
s’agit là d’une caractéristique des Bunyaviridae : le processus de morphogénèse s’effectue par
l’intermédiaire des glycoprotéines qui s’accumulent dans l’appareil de Golgi et vont assurer le
recrutement des RNP néoformées. Il semblerait que certains hantavirus, notamment ceux du
Nouveau Monde comme SNV, (Deyde et al., 2005) puissent également s’assembler au niveau
de la membrane plasmique, et bourgeonner directement à ce niveau, en sus de la voie de
sécrétion.
L’ensemble du cycle viral des hantavirus est représenté dans la figure 12 ci-dessous.
37
Figure 12: Cycle viral des hantavirus (Jonsson et al., 2010)
Le cycle viral des hantavirus : 1. Le virion s’attache à la surface de la particule virale via des interactions entre
les glycoprotéines d’enveloppe et les récepteurs cellulaires. 2. L’entrée se fait par endocytose et le génome
viral est libéré dans le cytoplasme. 3. La transcription génère de l’ARN copie (ARNc) à partir de l’ARN viral
(ARNv). 4. La traduction des ARNm des segments S, M et L par la machinerie cellulaire donne les protéines
virales. 5. l’ARNv est répliqué, s’associe aux nucléoprotéines pour former les ribonucléoprotéines (RNP),
puis les RNP sont transportées jusqu’à l’appareil de Golgi. 6. L’assemblage des particules virales se déroule
au niveau du Golgi, ou au niveau de la membrane pour certains hantavirus du Nouveau Monde. 7. Le
bourgeonnement se fait via la fusion des vésicules contenant le virion mature avec la membrane plasmique.
Les glycoprotéines virales interviennent à plusieurs niveaux du cycle viral par
interaction avec les facteurs cellulaires lors de l’entrée et du trafic intracellulaire, mais aussi
avec des facteurs viraux lors de la morphogénèse des particules virales. Par ailleurs, elles sont
38
également importantes lors des phases d’infection puisqu’elles vont présenter différents
tropismes et induire différentes activations et interactions avec le système immunitaire et les
endothéliums vasculaires chez l’homme et le réservoir naturel, et en fonction de l’espèce de
virus et de la maladie associée (Vaheri et al., 2013).
4. Les glycoprotéines d’enveloppe
4.1. Maturation des glycoprotéines d’enveloppe
Les glycoprotéines d’enveloppe Gn et Gc sont codées par un précurseur glycoprotéique
(GPC) qui contient en région N-terminale une séquence signal permettant son entrée dans le
réticulum endoplasmique (RE) après clivage du peptide signal. Ce polypeptide subit par
ailleurs un clivage co-traductionnel dans la lumière du RE de la séquence signal conservée
chez les hantavirus, WASAA, pour générer Gn et Gc (Plyusnin et Elliott, 2011). Elles possèdent
chacune un ectodomaine orienté vers la lumière du RE, un domaine transmembranaire ainsi
qu’une queue cytosolique (CT). Ce domaine cytosolique est plus long, 150 acides aminés (aa)
pour Gn, comparé au court domaine cytoplasmique d’une dizaine d’aa de Gc (Fig. 13).
Peu de données sont disponibles concernant la maturation des glycoprotéines des
hantavirus, dont les mécanismes d’adressage entre le RE et le Golgi sont par ailleurs étudiés
chez d’autres Bunyaviridae. L’assemblage de Gn avec Gc se fait au niveau du RE à partir duquel
l’hétérodimère est transporté jusqu’au Golgi. Ainsi, bien que les séquences des domaines
cytosoliques de bunyavirus soient très variables selon l’espèce, un signal d’adressage au Golgi
a été identifié dans le domaine GnCT alors que la queue cytosolique de Gc possèderait un
signal de rétention dans le RE (Plyusnin et Elliott, 2011). L’interaction Gn-Gc permettrait le
transport et la localisation de l’hétérodimère dans le Golgi.
39
Figure 13: Représentation schématique des glycoprotéines des hantavirus (Cifuentes-Muñoz
et al., 2014)
Les ectodomaines, les régions transmembranaires et les queues cytosoliques sont représentées par rapport à
leur position relative à la membrane. Le peptide signal (SP) ainsi que la séquence WASAA indiquent les
deux sites de clivage de GPC à l’origine des deux glycoprotéines Gn et Gc. N représente la localisation des
résidus asparagine susceptibles de subir des glycosylations, et les numéros correspondent à la numérotation
des acides aminés de la GPC d’ANDV. ZF signale la localisation des domaines en doigts de zinc, FL
indique la localisation du domaine de fusion putatif d’ANDV et RNC-BS correspond aux sites suggérés de
liaison des glycoprotéines aux RNP.
Des structures originales d’hantavirus, mises en évidence à la surface des particules
virales notamment pour TULV, montrent que les hétérodimères sont capables de former des
complexes de symétrie d’ordre 4 (Huiskonen et al., 2010), à la différence des structures
décrites pour les autres virus de la famille des Bunyaviridae (pentamères et hexamères décrits
pour le virus de la fièvre de la vallée du Rift, par exemple). Les glycoprotéines sont organisées
en pics appelés « spike complexes » enchâssés dans l’enveloppe virale dans lesquels 4
molécules de Gn sont associées à 4 molécules de Gc (Fig. 14).
40
Figure 14: Organisation des glycoprotéines à la surface des particules virales
A. Modèle de l’organisation de la surface des particules virales de TULV (Huiskonen et al., 2010)
B. Détail de l’organisation des complexes oligomériques Gn-Gc (Jussi Hepojoki et al., 2010)
4.2. Fonctions des glycoprotéines d’enveloppe
a) Entrée des particules virales
Les glycoprotéines permettent l’attachement des particules virales aux cellules cibles
(à l’origine du tropisme cellulaire des virus) puis leur entrée par endocytose via la fusion des
membranes virales et cellulaires. L’activité fusogénique est attribuée à Gc et les dernières
données tendent à confirmer l’hypothèse qu’il s’agit d’une protéine de fusion de classe II
(Tischler et al., 2005). Une séquence hautement conservée de Gc interagissant in vitro avec
des liposomes a été identifiée comme peptide de fusion putatif chez ANDV (Fig. 13).
b) Morphogénèse des particules virales
Lors du cycle viral, le site d’accumulation des glycoprotéines détermine le lieu de
l’assemblage des particules virales. Les hantavirus ne possédant pas de protéines de matrice,
il semblerait que les queues cytosoliques des glycoprotéines puissent jouer un rôle de matrice
et interviendraient dans le recrutement des RNP (Hepojoki et al., 2012). Des expériences de
co-immunoprécipitation ont en effet montré une interaction entre la nucléoprotéine N et les
41
queues cytosoliques de Gn et Gc exposées dans le cytosol après formation des hétérotétramères (Hepojoki et al., 2010b). Le repliement des deux domaines en doigts de zinc ainsi
que le rôle de certains résidus à proximité de ces derniers sont nécessaires pour la liaison de
la N aux glycoprotéines (Cifuentes-Muñoz et al., 2014).
c) Interaction avec les facteurs cellulaires
Les glycoprotéines d’hantavirus, par leur possibilité à interagir avec différents
constituants cellulaires, ont été impliquées dans certains mécanismes physiopathologiques.
En particulier leur rôle au niveau de l’endothélium a été bien étudié pour des virus pouvant
être facilement cultivés in vitro tels que SNV et HTNV (Mackow et Gavrilovskaya 2009).
Comme nous l’avons décrit, l’inactivation des récepteurs 3-intégrines lors de l’attachement
des glycoprotéines d’enveloppe virale est notamment à l’origine d’une augmentation de
sécrétion du facteur de croissance cellulaire endothélial VEGF, lui-même responsable de
l’augmentation de la perméabilité vasculaire caractéristique des pathologies FHSR et SCPH.
Par ailleurs, les glycoprotéines ont été identifiées comme étant associées à la virulence,
puisqu’un changement d’acide aminé dans Gn serait responsable de la différence de
pathogénicité observée dans un modèle de souriceaux nouveau-nés infectés avec des souches
virulentes ou atténuées d’HTNV (Ebihara et al., 2000).
Les glycoprotéines interviennent également dans le cadre d’interactions avec le
système immunitaire de l’hôte. En effet, une diminution de l’induction de la voie de synthèse
de l’interféron dans des cellules infectées a été associée au domaine cytosolique de Gn
(Matthys et al., 2011), révélant ainsi l’importance des glycoprotéines dans l’échappement de
la réponse innée et l’établissement d’une infection virale productive. Il est à noter que de
nombreux interacteurs ont été mis en évidence mais sont souvent restreints à un type de
virus sur un type de cellule et peu de comparaisons sont disponibles.
42
II / Partie expérimentale : étude des glycoprotéines
d’enveloppe
1. Objectifs du travail
Dans le cadre des études menées par l’unité visant à mieux comprendre les
mécanismes de persistance chez les hôtes réservoirs et de pathogénicité chez les humains, le
but du projet est de comparer les modalités d’interaction des glycoprotéines virales dans
différentes situations avec des facteurs cellulaires de l’hôte animal ou humain.
La comparaison a été faite à partir des glycoprotéines d’enveloppe de deux Hantavirus
qui diffèrent par leur pathogénicité : le virus Puumala (PUUV) et Tula (TULV). Ces deux virus,
récemment isolés en France, sont respectivement hébergés par le campagnol roussâtre
(Myodes glareolus) et le campagnol commun (Microtus arvalis). PUUV est considéré comme
faiblement pathogène pour l’homme puisqu’il est lié à une faible létalité (0,1 à 0,4 %), tandis
que TULV est considéré comme non zoonotique (un seul cas de maladie rapporté chez
l’Homme).
L’objectif de ce travail est tout d’abord de construire des vecteurs d’expression des
glycoprotéines de PUUV et TULV. La deuxième étape vise à mettre en place et à optimiser les
conditions permettant d’exprimer les glycoprotéines dans différentes cellules de mammifères.
L’objectif sur le long terme est d’identifier par analyse protéomique des partenaires
cellulaires par co-immunoprécipitation de complexes avec les glycoprotéines.
2. Matériel et méthodes
2.1. Plasmides et gènes viraux
Le plasmide pcDNA3.1 (Invitrogen) utilisé pour l’expression en cellules de mammifères
possède un site multiple de clonage en aval d’un promoteur du cytomégalovirus (CMV) et
porte les gènes de résistance à l’ampicilline et à la néomycine. Le plasmide p-eGFP (Clontech)
43
codant pour la protéine fluorescente verte (GFP) a été utilisé pour contrôler l’efficacité de
transfection, et le plasmide p-puro fourni par T. Krey (Unité de Biologie Structurale, Institut
Pasteur, Paris) pour la sélection puromycine en cellules de mammifères.
Les plasmides utilisés comme donneurs d’insert sont pET-30a-GPC-PUUV et pCMVTulv M. Le premier provient de la synthèse chimique réalisée par GeneCust. La séquence
codante de GPC-PUUV (souche Puumala Sotkamo GenBank: HE801634.1) est insérée aux sites
NotI-BamHI du vecteur pET-30a(+), kanamycine résistant (Fig. 15A).
Figure 15: Organisation des plasmides donneurs d’insert GPC
A. Le plasmide pET-30a(+) dans lequel est inséré GPC PUUV entre les sites de restriction NotI et
BamHI. Le plasmide porte le gène de résistance à la kanamycine (KanR), l’opéron lactose (lacO) et le
répresseur lactose (lacI). Les origines de réplication F1 et ColE1 sont également représentées.
B. Le plasmide pCMV-Tul M contenant le segment M complet de TULV flanqué des séquences
hammerhead et de la séquence ribozyme hépatite delta sous contrôle du promoteur CMV porte un gène
de résistance à l’ampicilline (AmpR) et une origine de réplication ColE1.
Les cartes des plasmides sont réalisées grâce au logiciel Snapgene Viewer.
Les plasmides pCMV-Tul S et pCMV-Tul M (ampicilline résistants) codant
respectivement pour les segments S et M de la souche Tula Moravia (GenBank: Z69993.1)
nous ont été fournis par le Dr. A. Plyusnin (Haartman Institute, University of Helsinki,
44
Finlande). Ces segments viraux complets (cadre de lecture ouvert et séquences non codantes
en 3’ et 5’) sont présents dans l’orientation antigénomique sous contrôle du promoteur CMV
(Fig. 15B). Ils sont flanqués d’une séquence hammerhead et d’une séquence ribozyme dérivée
du virus de l’hépatite delta, qui permettent l’obtention d’ARNc après clivage précis de part et
d’autre des régions non codantes en 5’ et 3’.
2.2. Lignées cellulaires
Les cellules VeroE6 dérivées de cellules épithéliales de rein du singe vert africain sont
utilisées pour la production d’hantavirus. Elles nous ont été fournies par le Dr. A. Rang
(University Hospital Charité, Berlin, Allemagne), ainsi que la souche Puumala Sotkamo adaptée
à ces cellules. La lignée cellulaire HEK 293 est dérivée de cellules rénales embryonnaires
humaines. La lignée cellulaire humaine A549 est issue d’un adénocarcinome pulmonaire. Ces
trois lignées ont été cultivées en milieu DMEM (Dulbecco’s Modified Eagle Medium, Invitrogen)
complémenté avec 10 % de sérum de veau fœtal (SVF), de pénicilline (50UI/mL, Invitrogen)
et de streptomycine (50µg/mL, Invitrogen). Les cellules Mygla AEC6 (cellules épithéliales
alvéolaires de poumons de campagnol roussâtre, immortalisées par l’antigène T de SV40) ont
été fournies par le Dr. Marcel Müller (Institut de virologie, Bonn, Allemagne). Elles ont été
cultivées en DMEM-10 % SVF additionné de pyruvate de sodium 1mM (Invitrogen) et de 1 %
d’acides aminés non-essentiels (Invitrogen). Les cellules sont passées deux fois par semaine
selon leur courbe de croissance préalablement établie, et incubées à 37°C sous atmosphère à
5 % de CO2.
2.3. Anticorps disponibles
L’ensemble des anticorps utilisés pour détecter les protéines des hantavirus sont
présentés dans le tableau 2. L’anticorps monoclonal (mAb) A1C5 (Anticorps-enligne.fr) est
spécifique de la nucléoprotéine N de la souche Puumala CG18-20. Le mAb 10B8 de souris
généré contre la glycoprotéine Gc du virus Puumala Kazan nous a été fourni par A. Zvirbliene
(Vilnius University, Vilnius, Lithuanie) sous forme de surnageant d’hybridome et de suspension
d’anticorps précipités en sulfate d’ammonium (Zvirbliene et al., 2014). Les anticorps 5A2,
4G2, 5E1 (Lundkvist et Niklasson, 1992) sont des mAb dérivés d’immunoglobulines de
campagnols reconnaissant respectivement Gn, Gc et N de Puumala Sotkamo et nous ont été
transmis par A. Lundkvist (Swedish Institute of Infectious Disease Control, Stockholm, Suède),
45
ainsi qu’un mAb 1C9 spécifique de Gc et dérivé d’immunoglobulines humaines (Lundkvist et
al., 1993). L’ascite de souris anti-HNTV et le sérum de hamster anti Puumala CG nous ont été
fournis par le groupe de M. Bouloy, à l’Institut Pasteur. L’anticorps utilisé pour le marquage du
Golgi est un anti-giantin dérivé d’immunoglobulines de lapin (Abcam). Nous avons utilisé
comme conjugué de détection pour l’immunofluorescence les anticorps AlexaFluor
(Invitrogen) reconnaissant des immunoglobulines de souris, hamster et humaines, et couplés
à Alexa488. En ce qui concerne l’immunodétection sur membrane, des anticorps dirigés contre
ces mêmes espèces couplés à la peroxydase de raifort ou horse-radish peroxidase HRP
(SouthernBiotech) ont été utilisés.
Tableau 2 : Anticorps disponibles contre les hantavirus
Espèce d’origine
Type d’anticorps
Nom de l’anticorps
Protéine reconnue
monoclonal
A1C5
N de Puumala Sotkamo
monoclonal
10B8
Gc de Puumala Kazan
monoclonal
5A2
Gn de Puumala Sotkamo
monoclonal
4G2
Gc de Puumala Sotkamo
monoclonal
5E1
N de Puumala Sotkamo
humain
monoclonal
1C9
Gc de Puumala Sotkamo
souris
polyclonal
Ascite de souris
N,Gn, Gc d’HTNV
hamster
polyclonal
Sérum de hamster
N, Gn, Gc de Puumala GC
souris
campagnol
2.4. Préparation des plasmides d’expression des glycoprotéines
Les bactéries compétentes ont été transformées par la technique de choc thermique
puis étalées en milieu gélosé additionné de l’antibiotique de sélection (50µg/mL de
kanamycine ou de 100µg/mL d’ampicilline). Des bactéries One Shot TOP10 (Invitrogen),
Subcloning Efficiency DH5α (Invitrogen) et Max Efficiency Stbl2 (Invitrogen) ont été utilisées,
les deux dernières étant déficientes pour la recombinaison et permettent le clonage d’inserts
instables. Après clonage, les bactéries sont cultivées en milieu LB (Luria-Bertani) additionné
d’antibiotique pour amplification du plasmide. Les plasmides sont purifiés avec les kits
QIAprep Spin Miniprep (Qiagen) et QiaFilter Plasmid Midiprep (Qiagen), selon les indications
46
du fournisseur. Les étapes de culture bactérienne en milieu gélosé et en milieu liquide sont
par ailleurs effectuées à 30°C pour diminuer l’apparition de mutations.
2.5. Construction de plasmides d’expression des glycoprotéines
Les constructions ont été réalisées par ligation dans le vecteur pcDNA3 des séquences
codant GPC purifiées sur gel, soit après digestion des plasmides, soit après amplification du
fragment par polymérisation en chaîne (PCR) à partir de ces mêmes plasmides. La digestion
tspGW1-Nae1 de pCMV-Tul M a permis de récupérer l’insert codant GPC TULV avec des
extrémités franches, et la digestion BamHI-NotI (New England Biolabs) de pET-30a-GPCPUUV a permis de récupérer l’insert GPC-PUUV. L’amplification des inserts en utilisant l’ADN
polymérase Platinum High Fidelity (Invitrogen) a permis, via des amorces dotées d’extensions
(Hind
Tulv-Forward :
TAATAAGCTTAGTATGTTTTGTCTGTGTTTGAG,
NotTulv-Reverse:
GTCAGAATTATAAGAAAAATAAATAACGCCGGCGATTA), d’ajouter un site de restriction HindIII
à l’extrémité 5’ ainsi qu’un site NotI en 3’ de l’insert GPC de pCMV-Tul M. Les primers pETForward (CAGCCGGATCTCAGTGGTG) et pET-Reverse (CGAACGCCAGCACATGGAC) ont été
utilisés pour amplifier le segment GPC-PUUV en englobant les sites BamHI et NotI présents de
part et d’autres de ce dernier. Le vecteur pcDNA3 digéré BamHI-NotI, HindIII-NotI ou avec des
extrémités franches a été déphosphorylé au moyen de l’enzyme Antartic Phosphatase (New
England Biolabs) puis purifié sur gel avec l’ensemble des inserts digérés en utilisant le kit
QIAquick gel Extraction (Qiagen). Les ligations ont été réalisées avec la Ready-to-Go T4 DNA
Ligase (Amersham Biosciences) en testant différents rapports insert/vecteur, et les plasmides
contenant les inserts ont été amplifiés dans les bactéries DH5. Les clones ont ensuite été
sélectionnés en fonction de leur profil de digestion enzymatique après migration en gel
d’agarose 0,8 % et contrôlés par séquençage pour l’absence de mutations.
2.6. Transfections
a) Transfection transitoire
Les lignées cellulaires ensemencées en plaque 24 puits (24P) sont transfectées 24h
plus tard avec les plasmides d’expression repris dans de l’Opti-MEM (Invitrogen) en utilisant
différents agents de transfection, selon les protocoles préconisés par les fabricants. Les
47
cellules ont été transfectées à 80 % de confluence soit avec 1g d’ADN plasmidique et 2L
d’agent de transfection TurboFect (ThermoScientifique), soit 0.5g d’ADN plasmidique et 2L
de Lipofectamine 2000 (Invitrogen), et pour FuGene 6 (Promega) soit 200ng d’ADN
plasmidique et 0,6L de FuGene 6 soit 200ng d’ADN plasmidique et 1L de FuGene 6. Ces
conditions sont ensuite adaptées en fonction de la surface des puits des microplaques utilisées
(96P, 24P, 12P, 6P). Les cellules sont cultivées pendant 48 h à 37°C.
b) Transfection stable
Des cellules VeroE6 ensemencées en plaque 6P à 9x105 cellules par puits ont été cotransfectées 48 h après mise en culture avec pCMV-Tul S ou pCMV-Tul M en présence d’1g de
plasmide de sélection p-Puro selon un rapport de 10 moles de plasmide d’intérêt pour 1 mole
de plasmide de résistance. L’ADN plasmidique, précipité à l’éthanol, est repris dans de l’OptiMEM auquel est ajouté l’agent de transfection TurboFect choisi pour ces cellules. 24 h post
transfection, les cellules sont décrochées par traitement à l’Accutase (Invitrogen), qui est
ensuite inactivée par ajout de milieu DMEM 10 % SVF. Les cellules sont distribuées dans des
plaques 96P à raison de 104, 103, 102 et 10 cellules par puits (une microplaque par dilution).
Le milieu sélectif (100L de puromycine à 20g/mL par puits) est ajouté 48 h post
transfection et les cellules sont maintenues en culture pendant 2 semaines minimum en
changeant le milieu chaque semaine pour la sélection de clones individuels exprimant le gène
d’intérêt.
2.7. Détection des glycoprotéines
a) Immunofluorescence intra-cytoplasmique
Les cellules cultivées sur lamelles en plaques 24P ou 12P sont fixées 15 min en
formaldéhyde (FA) 3.7 % puis lavées 2 fois en PBS. Les sites réactifs sont bloqués par
incubation pendant 15min en glycine 20mM diluée dans du PBS, puis les cellules sont
perméabilisées par traitement 7 min avec 0.5 % de Triton X-100 en PBS. Les cellules sont
incubées 1 h avec l’anticorps primaire dilué dans du PBS contenant 0,05 % Tween-20 (PBST)
et 1 % d’albumine de sérum bovin (BSA). L’excès d’anticorps non lié est éliminé par
incubation 5 min en PBST. La réaction est révélée par incubation 1 h à l’abri de la lumière avec
48
l’anticorps secondaire couplé à un fluorochrome dilué en PBST-1 % BSA, avant montage sur
lame avec du Fluoromount-G (Southern Biotechnology) contenant du DAPI pour la contrecoloration du noyau. Des conditions de fixation en présence d’éthanol absolu 5 min à -20°C ou
de l’acétone 80 % glacial pendant 15min sur glace ont également été testées. L’observation se
fait en microscopie à épifluorescence avec les filtres appropriés. Les images sont obtenues
grâce à une caméra couplée à un système vidéo, et sont analysées avec le logiciel Leica
Application Suite.
b) Immuno-précipitation
Les différents anticorps en solution dans un tampon 40mM Hepes (Sigma-Aldrich)
additionné de 0,1 % d’ovalbumine et de 1 % de BSA ont été couplés à des billes de protéines
A-sépharose CL-4B (GE Healthcare) par incubation 1 h sous agitation à 4°C. L’excès d’anticorps
est éliminé par plusieurs lavages des billes en PBS. Les billes couplées aux anticorps sont
incubées avec les lysats cellulaires sur la nuit en rotation à 4°C. Après cette réaction, les
protéines adsorbées de manière non spécifique sont éliminées par lavages en tampon NET
haut sel (0,5M NaCl, 50mM Tris-HCl pH=7.4, 5mM EDTA, 1 % Triton X-100) puis les billes sont
traitées en tampon 40mM Hepes (Sigma Aldrich). Elles sont séchées et resuspendues dans
45L de tampon d’électrophorèse pour détacher les complexes immunoprécipités qui sont
ensuite déposés pour migration en gel polyacrylamide.
c) Immunodétection sur membrane de nitrocellulose (Western Blot)
Les cellules transfectées ou infectées sont lysées à l’aide d’une solution de tampon NET
(150mM naCl, 50mM Tris-HCl pH=7.4, 5mM EDTA) contenant 1 % de Triton X-100 ou 2% de
dodecylsulfate de sodium (SDS). Les protéines présentes dans les lysats cellulaires sont repris
en tampon Laemmli, séparées sur gel de polyacrylamide pré-coulé en gradient 4-15%
(BioRad) en conditions réductrices (5 % de –mercaptoéthanol) ou non réductrices, puis
transférées sur membrane de nitrocellulose. Les membranes sont colorées 15 min au rouge
Ponceau pour la détection globale des protéines transférées et des poids moléculaires
standards de migration (BioRad). Après saturation pendant 1 h dans du PBST contenant 5 %
de lait (PBST-5 % lait), les membranes sont incubées sur la nuit à 4°C avec les anticorps
primaires dilués dans du PBST-5 % lait, puis 1 h avec les anticorps secondaires couplés HRP
49
dilués dans du PBST-5 % lait. La révélation des protéines se fait par chimiluminescence avec
le SuperSignal West Pico Substrate (Thermo Scientific) puis exposition de la membrane sur
film (Hyperfilm ECL, Amersham).
3. Résultats
3.1. Préparation des vecteurs pour l’expression de glycoprotéines Gn et Gc
a) Clonage de GPC des virus Puumala et Tula
Afin de cloner la séquence des gènes codant pour le précurseur des glycoprotéines
d’enveloppe de PUUV et TULV, les plasmides d’origine contenant cet insert ont été amplifiés
par clonage en bactéries. Après sélection, 6 clones donneurs d’insert pET-30a-GPC-PUUV ont
été sélectionnés, dont 1 seul (le clone 5) présentait un profil de digestion enzymatique correct
avec un insert de taille attendue de 3.5kb, les autres clones contenant un insert de taille
supérieure. Il est intéressant de noter que sur les 6 clones, 4 possédaient un profil de
restriction correct à l’issue de la sélection sur agar mais que seul le clone 5 maintenait l’insert
à la bonne taille après culture en milieu liquide pour amplification du plasmide. Le
séquençage a révélé que ce clone contenait une seule mutation C 959 A introduisant toutefois
un codon STOP dans le cadre ouvert de lecture de GPC-PUUV, le rendant inutilisable pour une
expression de protéines. L’observation du chromatogramme à cette position indique que cette
mutation est présente dans 80 % des cas, comme indiqué par la présence d’un pic de C
environ 5 fois moins élevé que le pic de A qui lui est superposé (Fig. 16A).
Nous avons entrepris des sous-clonages par transformation de bactéries compétentes
avec l’ADN plasmidique du clone 5. Vingt sous-clones ont été isolés et systématiquement
séquencés en position 959. L’hypothèse d’un mélange au sein du clone 5 a pu être vérifiée
puisque 4 clones sur 20 ne possédaient pas la mutation, or les clones sans mutation
correspondent également à ceux dont le profil de digestion BamHI-NotI n’est pas celui attendu
(Fig.16B). En effet, un phénomène de recombinaison affectant l’insert GPC produit une bande
de 4kb environ qui se superpose à la bande du vecteur pET-30a. Le séquençage complet des
différents clones a permis de confirmer la présence de recombinaisons au niveau de plusieurs
50
positions de GPC, révélant des séquences de plusieurs centaines de nucléotides qui
n’hybridaient ni avec GPC-PUUV ni avec pET-30a. Leur analyse par Basic Local Alignment
Search Tool (BLAST), a montré 100 % d’homologie avec des séquences spécifiques de
génomes bactériens.
Figure 16: Étude des inserts GPC-PUUV présents dans le plasmide pET-30a-GPC-PUUV
après sous clonage
A. Chromatogramme correspondant au séquençage du clone 5. Deux pics sont visibles en position 560 : un
pic de C et un pic de A, correspondant à un mélange de clones dans le plasmide séquencé
B. Migration sur gel des sous-clones issus du clone 5 après digestion enzymatique Bam-Not. Pour chaque
clone, le premier puits correspond à la simple digestion Bam (B) permettant de linéariser le plasmide pET30a de 8847b alors que le second puits correspond à la digestion Bam-Not (B-N) permettant de libérer
l’insert de taille attendue à 3,5kb du vecteur pET-30a de taille 5,4kb. Les clones 5.2, 5.4 et 5.5 présentent
un profil de digestion enzymatique B-N correct, ce qui n’est pas le cas deux clones 5.1 et 5.3 (encadrés en
bleu).
Poids moléculaire utilisé : GeneRuler 1kb Plus DNA Ladder (ThermoScientifc)
La difficulté à amplifier en particulier les glycoprotéines de PUUV étant connue (A.
Plyusnin, communication personnelle) et s’étant produite malgré l’amplification à basse
température, nous avons testé d’autres types de bactéries telles que les DH5α ou les bactéries
Stbl2, spécialement conçues pour le clonage d’inserts instables. Très peu de colonies
contenant GPC-PUUV ont été obtenues (9 au total), en comparaison de la bonne efficacité de
transformation par le plasmide contrôle. Les plasmides extraits et purifiés de ces 9 clones
51
présentent tous des recombinaisons, confirmées par séquençage, ce qui appuie l’hypothèse de
la présence de régions sujettes à recombinaisons à l’intérieur de la séquence GPC-PUUV.
Les transformations de bactéries avec pCMV-Tulv M ont permis d’obtenir de bonnes
quantités de plasmide, sans rencontrer les problèmes de recombinaisons décrits pour GPCPUUV.
b) Ligations des inserts amplifiés par PCR
Pour tenter de pallier les problèmes de recombinaisons et mutations, les séquences
correspondant à GPC de PUUV et TULV ont alors été amplifiées par PCR High Fidelity à partir
des plasmides d’origine, donneurs d’insert, préalablement contrôlés pour l’absence de
mutations. Différents ratios insert/vecteur ont été utilisés pour la ligation dans pcDNA3
linéarisé. Très peu de clones ont, encore une fois, été obtenus suite à la transformation de
bactéries DH5α. Seuls deux clones contenant GPC-PUUV sans aucune mutation ont été obtenus
en utilisant le ratio insert/vecteur de 1 : 1. En ce qui concerne les ligations de GPC-TULV dans
pcDNA3, plusieurs expériences ont été réalisées qui n’ont, à ce stade, toujours pas permis
d’obtenir l’insert correct dans le vecteur quel que soit le rapport insert/vecteur utilisé.
3.2. Mise au point des outils de détection
Afin de mettre en évidence l’expression de gènes d’hantavirus en cellules de mammifères,
le choix des anticorps les plus appropriés à la détection a été réalisé sur des échantillons de
cellules infectées préparées dans le laboratoire, dont j’ai disposé.
a) Détection des protéines virales par WB
Des lysats de cellules infectées par PUUV ou par TULV ont été utilisés pour tester la
réactivité des différents anticorps spécifiques des protéines d’hantavirus. La glycoprotéine Gc
de PUUV, de masse moléculaire apparente 60kDa, a été mise en évidence avec l’anticorps 1C9,
seulement en condition non réductrice, non chauffée (Fig. 17A). Par contre, la glycoprotéine
Gc de TULV n’est pas reconnue par cet anticorps.
52
Figure 17: Immunodétection des protéines virales dans des lysats de cellules infectées par
Western Blot.
Des protéines de lysats cellulaires infectés par PUUV (partie gauche des gels) ou TULV (partie droite des
gels) en dilution de 2 en 2 comme indiqué sur le haut des gels sont séparées par électrophorèse en gel de
polyacrylamide-SDS (SDS-PAGE) en condition non-réductrices-non chauffées (NR-NC) et en conditions
réductrices-non chauffées (R-NC). Gc a été détectée soit avec le mAb 1C9 spécifique de Gc PUUV (A) ou
avec le mAb 10B8 qui reconnaît Gc de PUUV et TULV (C). La nucléoprotéine N est révélée à l’aide du
mAb A1C5 (B) Les marqueurs de masses moléculaires (Mw) sont indiqués sur le côté des gels.
La présence de protéines virales dans les deux lysats de VeroE6 infectées par PUUV et
TULV est toutefois démontrée par la détection de monomères de N de masse molaire
apparente 50kDa en condition réductrice (Fig. 17B) et non réductrice (résultat non montré) et
ce de manière comparable dans les deux lysats. L’anticorps 10B8 récemment décrit comme
réagissant en immunoblot et en fluorescence avec différents hantavirus dont PUUV
53
(Zvirbliene et al., 2014) mais qui n’avait pas été testé sur TULV, s’est révélé capable de
détecter la Gc de PUUV et celle de TULV aussi bien en conditions réductrice (résultat non
montré) que non réductrice (Fig. 17C).
La comparaison de l’intensité des bandes d’une même gamme de dilutions de lysats
infectés et du temps d’exposition indique une meilleure sensibilité du mAb 10B8 par rapport
au mAb 1C9.
b) Détection des protéines virales par immunofluorescence intracytoplasmique
La recherche des anticorps les plus performants a également été effectuée par
immunofluorescence sur cellules VeroE6 infectées, cette technique étant plus efficace pour
révéler un faible nombre de cellules infectées ou transfectées.
L’anticorps anti-N, A1C5, donne une fluorescence ponctiforme localisée dans le
cytoplasme des cellules infectées par PUUV (Fig. 18A) et TULV (Fig. 18G). Il est à noter qu’une
quantité de N beaucoup plus importante est produite par les cellules infectées par le virus
TULV que PUUV. Pour ce qui concerne les glycoprotéines, l’anticorps humain 1C9 anti-Gc a
donné un marquage typique d’une localisation dans le Golgi, confirmée par co-localisation
comme indiqué après superposition des images (Fig. 18F) des marquages du Golgi (Fig. 18D)
et de la Gc (Fig. 18E) observé sur des cellules infectées par PUUV. Toutefois, cet anticorps ne
reconnait pas les glycoprotéines de TULV, de même que l’anticorps 10B8. Il est à noter que ce
dernier ne donne aucun marquage aussi bien sur nos cellules infectées par PUUV que par
TULV, bien qu’il soit décrit comme réagissant avec la Gc de PUUV en IF (Zvirbliene et al.,
2014).
La glycoprotéine Gn de PUUV a pu être détectée avec l’anticorps 5A2, montrant une
20 µm
localisation comparable à celle observée pour Gc (Fig. 18C). Pour ce qui est des glycoprotéines
de TULV, seule l’ascite polyclonale de souris anti-Hantaan a donné un marquage
intracytoplasmique (Fig. 18H) sur des cellules infectées par TULV, mais il est à noter que cet
anticorps reconnaît l’ensemble des protéines virales (N>Gc>Gn en immunoblot). Des
expériences de colocalisation seront donc nécessaires pour déterminer si l’on a un marquage
associé au Golgi.
54
Figure 18: Détection des nucléoprotéines et des glycoprotéines virales par
immunofluorescence intracytoplasmique dans des cellules VeroE6 infectées.
Les protéines virales révélées par le mAb A1C5 anti N (A, D, G), le mAb 1C9 anti Gc (B, E), le
mAb 5A2 anti Gn (C), l’ascite de souris anti-HTNV (E) sont visibles en fluorescence verte. Le
noyau est coloré en bleu par le DAPI et le Golgi est marqué en rouge (D)
55
Tableau 3: Récapitulatif des réactivités des anticorps testés sur cellules VeroE6 infectées par
les virus PUUV et TULV
Immunoblot
R
NR
IF
A1C5 anti N
PUUV
+
+
+
PUUV GC
TULV
+
+
+
10B8 anti Gc
PUUV
+
+
-
PUUV Kazan
TULV
+
+
-
5A2 anti Gn
PUUV
NT
-
+
PUUV Sotkamo
TULV
NT
NT
-
mAb
4G2 anti Gc
PUUV
NT
+
NT
campagnol
PUUV Sotkamo
TULV
NT
NT
NT
5E1 anti N
PUUV
NT
-
NT
PUUV Sotkamo
TULV
+
+
NT
mAb
1C9 anti Gc
PUUV
-
+
+
humain
PUUV Sotkamo
TULV
-
-
-
PUUV
-
-
+
TULV
+ N mono
mAb souris
pAb souris
pAb
hamster
Ascite anti
Hantaan
Sérum de
PUUV
hamster anti
PUUV CG
TULV
+ N oligo (N mono
en chauffant)
+ N mono
+ Gn, Gc, N
mono
+
+ N oligo
NT
+ N mono, oligo
NT
Les conditions réductrices (R) et non réductrices (NR) sont testées pour les différents anticorps
monoclonaux (mAb) et polyclonaux (pAb). Les signes positifs et négatifs renseignent sur
l’observation ou non d’un signal en immunodétection sur membrane ou en immunfluorescence. NT
correspond aux conditions non testées. Pour les anticorps polyclonaux, le détail des protéines
observées sous forme de monomères (mono) ou d’oligomères (oligo) est donné.
Les résultats avec les autres anticorps testés sont récapitulés dans le Tableau 3. Il faut
noter qu’aucun anticorps monoclonal spécifique de la glycoprotéine Gn n’est disponible,
l’anticorps 5A2 anti-Gn n’ayant pas donné de réaction avec nos cellules infectées par PUUV. De
56
plus, les résultats avec les anticorps polyclonaux de souris et de hamster ont été obtenus sur
des lysats faiblement infectés et méritent d’être testés à nouveau sur de nouveaux stocks
viraux avec de bons titres, récemment obtenus dans le laboratoire.
En final, nous avons retenu la possibilité d’utiliser l’anticorps A1C5 pour la détection
de la protéine N de PUUV et TULV en immunodétection sur membrane et en fluorescence.
Concernant les glycoprotéines, le mAb 1C9 permet une détection spécifique de Gc de PUUV
par ces deux approches. Pour détecter la Gc de TULV, seul le10B8 pourra être utilisé en
Western Blot.
3.3. Expression des glycoprotéines d’enveloppe en cellules de Mammifères
a) Mise au point des conditions de transfection
Le choix des agents de transfection donnant la meilleure efficacité en fonction du type
cellulaire a été réalisé à l’aide du plasmide p-eGFP, révélé par immunofluorescence
intracytoplasmique. Les réactifs ont été retenus de la façon suivante: TurboFect pour VeroE6
(efficacité de 15 %), Lipofectamine pour A549 (efficacité de 12 %) et Mygla (efficacité de 10
%) et FuGene 6 (selon un rapport de 3L de FuGene pour 1g ADN) pour HEK (efficacité de 27
%).
b) Transfection transitoire

Expression de GPC-PUUV
L’expression de la glycoprotéine Gc PUUV a été mise en évidence avec le mAb 1C9 par
IF dans des cellules HEK, VeroE6 et A549 transfectées avec le plasmide pcDNA3-GPC-PUUV
(Fig. 19A, B, C). Toutefois, très peu de cellules positives ont été recensées, indiquant une
moins bonne efficacité de l’anticorps 1C9 ou une faible efficacité de transfection en
comparaison de celle obtenue avec l’e-GFP, notamment pour les VeroE6 et les A549 où l’on
dénombre moins d’1 % de cellules exprimant les glycoprotéines.
57
En parallèle, des lysats cellulaires de VeroE6 à 48h et 72h post transfection n’ont pas
permis de révéler la Gc en immunodétection sur membrane ni avec le 1C9 ni avec le 10B8
(résultat non montré). Compte tenu du faible pourcentage de cellules marquées en
fluorescence, il est possible qu’il y ait eu trop peu de protéines virales exprimées dans nos
lysats pour permettre la détection de Gc PUUV par Western Blot.
Figure 19: Détection de Gc PUUV dans différentes lignées cellulaires transfectées avec
pcDNA3-GPC-PUUV par immunofluorescence intracytoplasmique.
Les protéines virales révélées avec le mAb 1C9 dans des cellules HEK (A), VeroE6 (B) et A549
(C) sont colorées en vert. Le noyau est coloré en bleu par le DAPI.
Des immunoprécipitations de HEK transfectées avec pcDNA-GPC-PUUV ont alors été
réalisées avec les anticorps anti-Gc 4G2 et anti Gn-5A2, décrits comme capables de coimmunoprécipiter Gn et Gc (Hepojoki et al., 2010b), dans le but d’augmenter la sensibilité de
détection par concentration de protéines. L’efficacité de transfection supérieure avec les
cellules HEK comparée aux VeroE6 a motivé le choix des lysats cellulaires à
immunoprécipiter.
Il a été possible de détecter spécifiquement Gc-PUUV par immunoblotting à partir
d’extraits préalablement immunoprécipités avec un anti-Gc. La détection est possible avec des
lysats de cellules infectées (Fig. 20A et B, piste 3) et en utilisant le lysat de cellules HEK
transfectées (Fig. 20B, piste 1) à condition d’en utiliser une quantité suffisante. En effet,
58
aucune bande n’est visible en Fig. 20A piste 2, contenant moins de matériel (100μL de lysat
immunoprécipité) par rapport à la piste 3 figure 20B (180μL de lysats immunoprécipité), ce
qui confirme bien la faible quantité de glycoprotéines présentes après transfection et non
détectable directement en Western Blot. Les conditions de transfection nécessitent donc
encore d’être améliorées afin de pouvoir mettre plus facilement en évidence l’expression des
glycoprotéines de PUUV.
Figure 20: Révélation de Gc par immunoblot à partir de lysats de cellules HEK transfectées ou
infectées par PUUV puis immunoprécipités avec un anti-Gc
Détection de Gc par immunoblot à partir d’extraits préalablement immunoprécipités avec un anticorps antiGc. Les immuoprécipitations (Ip) sont réalisées avec les anticorps 4G2 ou 5A2. Les lysats de cellules non
infectées (NI) sont utilisées en contrôle. 100µL (A) ou 180 µL (B) de lysat d’HEK transfectées avec GPCPUUV ont été testés. Les marqueurs de masses moléculaires (Mw) sont indiqués sur le côté des gels.

Expression de GPC TULV
Aucun clone n’ayant été obtenu après plusieurs tentatives de ligation de GPC-TULV
dans pcDNA3, nous avons tenté de transfecter directement le plasmide pCMV-Tul M, bien que
celui-ci soit optimisé pour la synthèse d’ARN, plutôt que de protéines. En effet, la transfection
59
des cellules avec ce plasmide seul, sans la RdRp qui est normalement responsable de
l’initation de la traduction par vol de coiffe, ne nous garantissait pas d’observer la synthèse de
protéines. Ce plasmide comportant un promoteur CMV, nous avons testé s’il était possible
d’obtenir l’expression de protéines virales en cellules de mammifères. Ce test a tout d’abord
été effectué sur cellules VeroE6 48h post transfection avec le plasmide pCMV-Tul S, car nous
possédions à ce stade un anticorps reconnaissant aussi bien la protéine N de PUUV que de
TULV.
Figure 21: Détection de la nucléoprotéine N de TULV et de l’eGFP par immunofluorescence
intracytoplasmique dans le contexte d’expression transitoire.
Les nucléoprotéines sont marquées en vert avec l’anti-N A1C5 (A) et l’eGFP est marquée en rouge
(B). Le noyau est coloré en bleu par le DAPI.
Une détection de la nucléoprotéine de TULV codée par le segment S a en effet été
observée en IF sur ces cellules (Fig. 21A) avec une bonne efficacité, suggérant que la
construction pCMV permettait de générer des ARNm pouvant être traduits par la machinerie
cellulaire. La distribution cytoplasmique du marquage de la N-TULV est comparable à celle
observée sur des cellules infectées par TULV (Fig. 18G). Le marquage de l’ADN par le DAPI
révèle des grains dans le cytoplasme, dus à la méthode de transfection avec l’agent Turbofect
puisqu’on les retrouve lors de la transfection avec p-eGFP (Fig. 21B) et seulement avec cet
agent (non montré). La superposition des images montre d’ailleurs qu’ils ne sont pas associés
à N. Il pourrait s’agir de complexes d’ADN plasmidique dont des quantités importantes sont
60
utilisées pour les transfections avec Turbofect, en comparaison aux autres réactifs
(Lipofectamine, FuGene6).
Au vu de ces résultats, nous avons utilisé cette même approche pour essayer
d’exprimer les glycoprotéines d’enveloppe de TULV à partir de pCMV-Tul M. L’anticorps 10B8,
utilisé car étant le seul au moment de ce test à donner un signal en immunodétection sur
membrane sur Gc-TULV, n’a pas permis de détecter Gc par immunofluorescence en accord
avec les résultats obtenus sur cellules infectées (cf. Tableau 3). En parallèle, le contrôle de
transfection avec p-eGFP a permis de s’assurer d’une efficacité de transfection correcte lors de
cette expérience.
Bien que la totalité des cellules ne soit pas transfectée, une détection des
glycoprotéines de TULV a été tentée en immunodétection sur membrane à partir de lysats de
VeroE6 transfectées avec pCMV-Tul M. Alors que des quantités équivalentes de protéines ont
été déposées comme indiqué par la coloration des protéines totales au rouge Ponceau (Fig.
22A), une bande supplémentaire de masse moléculaire apparente 60kDa en conditions
réductrices et d’environ 55kDa en conditions non réductrices a été mise en évidence de façon
spécifique après incubation avec l’anticorps anti-Gc 10B8, et ce seulement dans les cellules
transfectées avec pCMV-Tul M (Fig. 22A, pistes 2). La différence de migration de cette bande
associée à Gc par rapport à celle observée dans les pistes correspondant aux lysats de cellules
infectées par TULV (Fig.22A, pistes 6), pourrait s’expliquer par le fait qu’une même protéine
ne subit pas des modifications post-traductionnelles identiques dans le cadre d’une infection
et d’une transfection en l’absence de ses partenaires viraux. Une différence de migration de Gc
apparait en présence de l’agent réducteur, mettant en évidence la présence de ponts
disulfures internes dans Gc.
Compte tenu de ce résultat positif, différents anticorps ont été testés en IF en jouant
également sur les conditions de fixation des cellules. Ainsi, les mAb 5A2 et 10B8 ont été
utilisés sur cellules fixées à l’acétone ou à l’éthanol absolu, sachant qu’ils se sont révélés
négatifs vis à vis des glycoprotéines de TULV après fixation à la formaldéhyde, bien que
décrits dans la littérature comme capables de détecter respectivement Gn et Gc de PUUV en
immunofluorescnce (Lundkvist et Niklasson 1992). L’ascite anti-HTNV qui réagit
positivement avec des protéines virales de cellules infectées par TULV a également été testée
61
sur cellules fixées par la formaldéhyde. Nous n’avons obtenu aucun marquage avec ces
anticorps malgré les différentes conditions testées, mais nous ne pouvons à ce stade conclure
quant à la possibilité de détection des glycoprotéines de TULV avec ces anticorps en IF.
Figure 22: Détection de la glycoprotéine Gc de TULV avec le mAb 10B8 dans le contexte
d’expression transitoire
Les glycoprotéines extraites de VeroE6 à 48 h post transfection ont été séparées par électrophorèse en gel
gradient 4-15% de polyacrylamide-SDS (SDS-PAGE) en conditions réductrices-non chauffées (R-NC) et en
conditions non réductrices-non chauffées (NR-NC), et révélées à l’aide du mAb anti-Gc 10B8 (A) ou de
l’anti N (B). Les résultats des colorations en rouge Ponceau permettant de détecter les quantités de protéines
transférées sont présentés sous chacun des deux gels. NT correspond au contrôle négatif : lysat de veroE6
non transfectées et TULV à un lysat de VeroE6 infectées par du virus TULV. Les marqueurs de masses
moléculaires (Mw) sont indiqués sur le côté des gels. Exposition du gel : 1min
Par ailleurs, alors que N a bien été détectée par IF dans des cellules transfectées avec
pCMV-Tul S (cf. Fig. 18A), de façon inattendue, les lysats cellulaires correspondants n’ont pas
62
permis de la révéler en Western Blot, ni à 48h (Fig. 22B, piste 1) ni à 72h (non montré) post
transfection. Il n’a pas été possible non plus d’obtenir un signal correspondant à N en Western
Blot en utilisant un détergent ionique (SDS), ou après concentration par immunoprécipitation
(non montré). En effet, la possibilité que N puisse interagir avec de l’ARN cellulaire et former
des complexes de haut poids moléculaire difficiles à solubiliser en Triton X-100 a été
envisagée. Une lyse cellulaire en SDS, plus dénaturant que le Triton X-100, a été réalisée mais
n’a pas donné de résultats. Par ailleurs, l’anticorps A1C5 n’étant pas immunoprécipitant, nous
n’avons pas pu utiliser cette technique pour concentrer N dans les lysats de cellules infectées.
Concernant les anticorps de détection de protéines du virus Puumala, la comparaison
des épitopes qu’ils reconnaissent aide à comprendre leur possibilité ou non de réagir avec
différents hantavirus, notamment différentes souches de PUUV et TULV (Tableau 4) par
rapport à l’épitope de l’immunogène. C’est le cas du 10B8, dont l’épitope est conservé dans ces
deux virus. Concernant le mAb A1C5, quelques substitutions d’acides aminés entre la
séquence protéique de la nucléoprotéine de PUUV et TULV par rapport à la séquence
reconnue par l’anticorps n’empêchent pas ce dernier de reconnaître la nucléoprotéine de nos
deux souches virales.
Tableau 4 : Tableau récapitulatif des épitopes reconnus par les anticorps 4G2, 10B8 et A1C5
avec les séquences protéiques associées de PUUV Sotkamo et TULV Moravia
Anticorps
Anti Gc 4G2
Séquence reconnue
PUUV Sotkamo
TULV Moravia
754 YPWQTAGCFVEK 765
+
YPWQTAKCFLEK
772 GWGCNPPD 779
+
+
910 TPVCQF 915
+
905 LPSCQY 910
PUUV Sotkamo
1052
1057 DTKCSSTGLVAA 1068
+
DKKCSATGLVAA
1063
Anti Gc 10B8
PUUV Kazan
880 GDPGDIMS 887
Anti N A1C5
PUUV CG 1820
15 EQQLVVARQKLKDAERAVEVD 35
+
+
EQQLIVARQKLKDA
EQQIVIARQKLKDA
ERAVEVD
EKTVEAD
Les chiffres de part et d’autre de la séquence protéique indiquent la numérotation des acides aminés. Le
signe positif signifie que la séquence est identique à celle reconnue par l’épitope, les différences sont
indiquées en rouge.
63
L’épitope reconnu par le 4G2 (Hepojoki et al., 2010a) est par contre un épitope
conformationnel constitué de séquences peptidiques non contiguës et il n’a pas pu être établi
pour l’instant s’il reconnaît TULV en Western Blot et en IF. Les anticorps 5A2 et 4G2 ont été
décrits comme capables d’immunoprécipiter respectivement Gn et Gc de PUUV (Hepojoki et
al., 2010a). Cette capacité du 4G2 a été retrouvée sur nos lysats de cellules HEK aussi bien
infectées par PUUV que transfectées avec pcDNA3-GPC-PUUV, ce qui n’a pas été le cas avec
notre lot d’anticorps 5A2. A l’heure actuelle, alors que nous avons des anticorps pour suivre N
et Gc, nous n’avons pas d’anticorps spécifique de Gn de TULV, ni d’anticorps capables
d’immunoprécipiter les glycoprotéines de TULV.
4. Discussion
Les hantavirus sont des virus émergents dont l’hôte naturel ne présente pas de
pathologie mais qui peuvent provoquer, à des fréquences variables selon l’espèce de virus
concerné, des fièvres hémorragiques pouvant être mortelles chez l’homme. Leur large
répartition géographique, la possibilité de réassortiment des segments viraux et les effets
environnementaux sur l’habitat des rongeurs laisse craindre des possibilités de passage de la
barrière d’espèce avec un risque d’augmentation des cas humains. Peu de données sont
disponibles sur le cycle viral et la physiopathologie de l’infection par ces virus découverts
récemment. Dans ce contexte, il est important de comprendre comment les hantavirus
interagissent avec leurs hôtes. Les glycoprotéines Gn et Gc sont importantes à différents
niveaux de l’infection virale et l’objectif principal de ce travail a été d’obtenir des vecteurs
pour l’expression du précurseur des glycoprotéines d’enveloppe de PUUV et TULV dans
différentes lignées cellulaires afin d’étudier le différentiel des interactions des glycoprotéines
de deux virus de pathogénicité différente présents en France avec des facteurs de l’hôte
réservoir et de l’Homme. Ce projet nécessitait au préalable un grand nombre de mises au
point compte tenu de la difficulté à multiplier le virus en culture (peu de modèles cellulaires,
faible titre des stocks), du peu d’anticorps commerciaux disponibles et de la difficulté à
exprimer les glycoprotéines d’hantavirus, en particulier celles de PUUV. Nous avons
cependant pu mettre au point un certain nombre d’outils indispensables au développement
de ce projet.
64
Tout d’abord, nous avons pu tester les anticorps à notre disposition afin de nous
assurer que nous pouvions avoir une détection correcte des protéines virales. Il était
important de combiner les deux méthodes d’IF et d’immunobloting sur membrane car
l’antigène reconnu n’est pas accessible de la même manière selon le protocole utilisé. Ceci est
notamment valable pour l’anticorps 10B8, décrit comme reconnaissant PUUV Gc en IF
(Zvirbliene et al., 2014), sur des lames commerciales. Nous n’avons pas réussi à reproduire ce
résultat, surement car notre protocole de fixation ou de perméabilisation de nos cellules était
différent de celui utilisé par Zvirbliene et al.
Concernant la construction des vecteurs d’expression, des difficultés de clonage des
ORF d’intérêt, en système bactérien, sont rapidement apparues. En particulier, la société
GeneCust, qui a effectué la synthèse du gène viral GPC-PUUV dans pET-30a, n’a pas réussi à
insérer GPC-PUUV ni dans le vecteur PUC57 habituellement utilisé, ni dans le vecteur
d’expression pcDNA3. De notre côté, des phénomènes de recombinaison et des mutations au
sein de l’insert de GPC-PUUV ont systématiquement été observés malgré les précautions
prises. On peut donc supposer que la synthèse des glycoprotéines de PUUV est toxique pour
les bactéries ou que la structure secondaire inhérente à la séquence favorise l’apparition de
mutations ou de recombinaisons lors de l’amplification en bactéries. Ces résultats impliquent
la nécessité d’établir des stratégies pertinentes ainsi que des séquençages systématiques pour
obtenir des clones contenant un insert correct GPC-PUUV et GPC-TULV. Il serait possible
d’envisager de nouvelles constructions permettant d’éviter une expression basale des
glycoprotéines dans les bactéries, en utilisant des systèmes dans lesquels la transcription est
régulée par la présence de tétracycline (constructions du type Tet-On).
A ce stade, nous avons pu obtenir GPC-PUUV dans le vecteur d’expression pcDNA3en
cellules de mammifère (A549, HEK 293 et Vero) alors que nous n’avons pu cloner GPC-TULV
dans ce vecteur. Malgré les nombreuses conditions testées, nous ne savons pas pourquoi il est
si difficile de cloner GPC-TULV dans notre vecteur pcDNA3. De nouvelles conditions
d’amplification de GPC-TULV par PCR à l’aide d’amorces plus longues autour des sites HindIIINotI seront mises en œuvre pour favoriser ce clonage. Toutefois, nous disposons de GPCTULV au sein du segment M présent dans le vecteur d’expression pCMV.
L’expression du précurseur des glycoprotéines en cellules de mammifères, est une
65
étape importante pour pouvoir d’une part suivre leur maturation (clivage en Gn et Gc,
modifications post traductionnelles, trafic intracellulaire) et d’autre part développer les
techniques de purification de complexes pour la recherche d’interacteurs. Les premiers essais
d’expression en transfection transitoire ont été effectués à l’aide de pcDNA3-GPC-PUUV et
pCMV-Tul M.
Il est intéressant de noter que la transfection directe de cette construction pCMV était
capable d’assurer la synthèse de protéines virales que nous avons observée aussi bien à partir
du segment S complet pour l’expression de N et du segment M pour l’expression de Gc. En
effet, ce vecteur est utilisé en génétique inverse pour générer des segments complets d’ARN
viraux de polarité positive. On pouvait penser qu’en l’absence des autres protéines virales,
notamment la RdRp nécessaire à la capture de coiffe, la transcription et la traduction ne
pourraient pas avoir lieu. On peut supposer qu’il existe des polymérases et/ou des facteurs
cellulaires capables d’assurer la traduction de cet ARN viral, ou qu’il existe des séquences
permettant une initiation interne de la traduction.
Bien que nous ayons obtenu une faible efficacité de transfections transitoires,
l’expression des glycoprotéines spécifiques de PUUV et TULV a été détectée par
immunofluorescence et en Western Blot à l’aide des anticorps disponibles (anti-Gc et anti-N),
grâce à la mise au point préalable de ces outils sur cellules infectées. Ceci a permis de révéler
les différences de sensibilité et de reconnaissance des anticorps en fonction de la technique
utilisée.
La suite de la démarche consistera donc à optimiser les conditions de transfection pour
chaque type cellulaire, afin de pouvoir assurer une plus forte production des glycoprotéines
d’enveloppe, et ainsi dépasser le seuil de sensibilité des immunodétections sur membrane,
notamment
pour
GPC-PUUV,
décelable
seulement
après
concentration
par
immunoprécipitation. Les transfections stables qui sont envisagées pour assurer une
production de protéines virales sur le long terme et en quantité suffisante pourront être
utilisées dans le cadre de la recherche d’interacteurs des glycoprotéines d’enveloppe. Les
deux tentatives que nous avons menées (co-transfection avec un plasmide de sélection et un
plasmide d’intérêt, ou transfection avec le plasmide de sélection seulement) n’ont pas donné
de clones. Il convient donc de tester un nouveau plasmide codant pour la résistance à la
66
puromycine, ou d’envisager d’autres techniques comme l’utilisation d’un vecteur lentiviral.
Nous pouvons également tenter une transfection stable à partir du pcDNA3 contenant GPCPUUV linéarisé, ce dernier portant également la résistance à la néomycine.
Toutefois, il sera possible d’aborder déjà certaines questions à l’aide de tests de
transfection transitoire, notamment via le suivi de la maturation de Gn et Gc au cours du cycle
viral, par colocalisation avec des marqueurs de compartiments. Il est par ailleurs décrit dans
la littérature que les glycoprotéines Gn seraient dégradées par la voie de l’autophagie sans
que le mécanisme précis ne soit connu, avec des quantités moins importantes de Gn que de Gc
observées dans des cellules transfectées (Ganaie et Mir 2014).
Compte tenu des obstacles rencontrés et décrits ci-dessus dans la mise au point des
outils nécessaire à l’étude, les expériences de recherche de partenaires par préparation de
complexes protéiques associés aux glycoprotéines et analysées en spectrométrie de masse
n’ont pas encore été initiées. Les résultats d’expression des protéines en transfection
transitoire nous permettront d’envisager de mettre au point cette analyse. La mise au point
des immunoprécipitations est essentielle pour la suite, puisque Gc TULV a seulement été
observée par immunodétection sur membrane, et d’autres techniques de détection (IF,
immunoprécipitation) n’ont pas permis de confirmer ce résultat. De même, nous n’avons pas
réussi à reproduire la détection de Gc par immunoprécipitation avec le 5A2, mais les
conditions optimales de production et de préparation de stocks de virus sont encore en cours
au sein de l’unité, et de nouveaux lysats de cellules infectées pourront être testés à nouveau.
Par la suite, il sera également envisageable de tester des surnageants de cellules infectées en
plus des lysats en immunoprécipitation. Enfin, afin d’observer les hétérodimères de
glycoprotéines, il est envisagé de réaliser un pontage chimique de ces dernières. Un pontage
chimique permettra également de retenir d’autres interacteurs des glycoprotéines, qui
pourront être co-immunoprécipités puis analysés par spectrométrie de masse.
D’autres cellules comme des cultures primaires de fibroblastes embryonnaires de
campagnol, décrites comme permettant de multiplier le virus in vitro (Essbauer et al., 2011),
peuvent aussi être testées. En effet, il s’agit d’une lignée cellulaire développée à partir de
Myodes glareolus, le réservoir de PUUV, sur laquelle il serait intéressant de travailler.
67
Récemment, des transfections réalisées avec un vecteur lentiviral codant les
glycoprotéines d’HTNV ont démontré que Gn et Gc exprimées seules sont capables de s’autoassembler en pseudo-particules (Acuña et al., 2014). Les transfections avec le segment codant
GPC permettent donc bien d’obtenir des glycoprotéines dont la structure et les interactions
entre elles sont comparables à celles observées dans le cadre d’une infection. De plus, la
localisation de Gc au niveau l’appareil de Golgi, a été retrouvée dans les deux cas de
transfection et d’infection. L’hypothèse de travail est qu’il convient de se rapprocher le plus
possible des conditions physiologiques afin de pouvoir conclure quant à la pertinence des
résultats que l’on pourra observer.
Finalement, ces travaux ont permis de mettre en place de nombreux outils qui
permettront par la suite l’étude des différences d’interaction des glycoprotéines des virus
Puumala et Tula, à la fois en condition de persistance et de pathogénicité dans le but de
comprendre les mécanismes des pathologies associées aux hantavirus. Les outils testés
nécessitent encore d’être optimisés puisqu’on ne peut pas encore conclure si certains
résultats négatifs observés sont dus à une quantité insuffisante d’expression des
glycoprotéines, ou à un problème de détection. Ces difficultés sont en lien avec le peu de
données relatives à l’expression et à la maturation des glycoprotéines de PUUV et TULV dans
la littérature, les principales informations concernant les virus du Nouveau Monde et le virus
HTNV (Antic et al., 1992 ; Deyde et al., 2005).
68
CONCLUSION
Les hantavirus représentent un enjeu de santé public important, de par leur répartition
mondial et l’absence, à l’heure actuelle, de traitements antiviraux. En France, la plupart des cas sont
dus au virus Puumala, responsable d’une atteinte rénale modérée, et transmis par le campagnol
roussâtre Myodes glareolus.
L’étude de l’interaction des hantavirus avec leur hôte réservoir permet de comprendre les
mécanismes à l’origine de l’infection chronique sans symptômes apparents, décrite chez les
rongeurs. De même, la compréhension des interactions des hantavirus avec des cellules humaines
devrait aider à la compréhension des mécanismes à l’origine de maladies chez l’homme. Ce travail
a permis de mettre en place des outils pour exprimer et détecter les glycoprotéines Gn et Gc de deux
hantavirus, dans différentes lignées cellulaires (humaines versus rongeurs). Suite aux nombreuses
mises au point qui ont été réalisées au cours de ce stage, la recherche de partenaires cellulaires
devrait pouvoir être initiée par la suite.
Grâce à l’avènement du séquençage haut-débit, de nombreux hantavirus ont très récemment
été découverts dans des hôtes réservoirs autres que des rongeurs. D’autres études sont nécessaires
afin de mieux comprendre le potentiel zoonotique de ces nouveaux hantavirus et l’implication des
espèces animales dans l’émergence de nouvelles zoonoses.
69
70
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76
ANNEXE
Annexe 1: Liste des hantavirus et hôtes associés
Virus
Abréviation Hôte
Famille Cricetidae, sous-famille Arvicolinae
Hokkaido
HOKV
Myodes rufocanus
Isla Vista *
ISLAV
Microtus californicus
Khabarovsk *
KHAV
Microtus maximowiczii
Muju
MUJV
Myodes regulus
Puumala *
PUUV
Myodes glareolus
Prospect Hill *
PHV
Microtus pennsylvanicus
Topografov *
TOPV
Lemmus sibiricus
Tula virus *
TULV
Microtus arvalis
Vladivostok
VLAV
Microtus fortis
Famille Cricetidae, sous-famille Neotominae
El Moro Canyon *
ELMCV
Reithrodontomys mexicanus
New York *
NYV
Peromyscus leucopus
Rio Segundo *
RIOSV
Reithrodontomys megalotis
Sin Nombre *
SNV
Peromyscus maniculatus
Famille Cricetidae, sous-famille Sigmodontinae
Andes *
ANDV
Oligoryzomys longicaudatus
Araquara
ARAV
Bolomys lasiurus
Bayou *
BAYV
Oryzomys palustris
Black Creek Canal *
BCCV
Sigmodon hispidus
Cano Delgadito *
CADV
Sigmodon alstoni
Choclo
CHOV
Oligoryzomys fulescens
Laguna Negra *
LANV
Calomys laucha, Calomys callosus
Muleshoe *
MULV
Sigmodon hispidus
Oran
ORNV
Ologoryzomys longicaudatus
Rio Mamore *
RIOMV
Oligoryzomys microtis
Famille Muridae, sous-famille Murinae
Amur
AMRV
Apodemus peninsulae
Da Bie Shan
DBSV
Niviventer confucianus
Dobrava-Belgrade *
DOBV
Apodemus flavicollis
Hantaan virus *
HTNV
Apodemus agrarius
Saaremaa *
SAAV
Apodemus agrarius
Sangassou *
SANGV
Hylomyscus simus
Seoul *
SEOV
Rattus norvegicus
Thailand *
THAI
Bandicota indica
Localisation géographique
Pathologie asociée
Asie
Amérique du Nord
Asie
Asie
Europe
Amérique du Nord
Asie
Europe
Asie
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
NE
non pathogène
inconnue
non pathogène
inconnue
Amérique du Nord
Amérique du Nord
Amérique du Sud
Amérique du Nord
inconnue
HCPS
inconnue
HCPS
Amérique du Sud
Amérique du Sud
Amérique du Nord
Amérique du Nord
Amérique du Sud
Amérique du Nord et du Sud
Amérique du Sud
Amérique du Nord
Amérique du Sud
Amérique du Sud
HCPS
HCPS
HCPS
HCPS
inconnue
HCPS
HCPS
inconnue
HCPS
HCPS
Asie
Asie
Europe
Asie
Europe
Afrique
Mondial
Asie
HFRS
inconnue
HFRS
HFRS
HFRS
inconnue
HFRS
inconnue
77
Virus
Famille Soricidae
Artybash
Ash river
Azagny
Camp Ripley
Cao Bang
Fox creek
Imijin
Jeju
Jemez Springs
Kenkeme
Seewis
Tanganya
Thottapalayam *
Tualatin river
Famille Talpidae
Asama
Nova
Oxbow
Rockport
Ordre des Chiroptères
Huangpi
Longquan
Magboi
Mouyassué
Abréviation Hôte
Localisation géographique
Pathologie asociée
ARTV
ARRV
AZGV
RPLV
CBNV
FXCV
MJNV
JJUV
JMSV
KKMV
SEEV
TGNV
TPMV
TLNV
Sorex caecuntiens
Sorex cinereus
Crocidura obscurior
Blarina brevicauda
Anourosorex squamipes
Sorex palustris
Crocidura lasiura
Crocidura shantungensis
Sorex monticolus
Sorex roboratus
Sorex araneus
Crocidura theresae
Suncus murinus
Sorex trowbridgii
Russie
Amérique du Nord
Côte d'Ivoire
USA
Vietnam
USA
Corée
Corée
Amérique du Nord
Russie
Europe
Afrique
Asie
USA
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
non pathogène
inconnue
ASAV
NVAV
OXBV
RKPV
Urotrichus talpoides
Talpa europae
Neurotruchus gibbsi
Scalopus aquaticus
Japon
Europe
USA
USA
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
HUPV
LPUV
MGBV
MOYV
Pipistrellus abramus
Rhinolophus
Nycteris hispida
Neoromicia nanus
Chine
Chine
Sierra Leone
Côte d'Ivoire
inconnue
inconnue
inconnue
inconnue
78
PERSISTANCE ET TROPISME DES HANTAVIRUS :
CONTRIBUTION À L’ÉTUDE DES
GLYCOPROTÉINES D’ENVELOPPE
NOM et Prénom : HARDY Alexandra
Résumé
Les Hantavirus sont des virus émergents de la famille des Bunyaviridae qui ont pour réservoir de
nombreuses espèces de rongeurs, d’insectivores et de chauves-souris chez lesquels ils établissent
des infections chroniques sans symptômes apparents. La transmission à l’homme est à l’origine de
fièvres hémorragiques avec syndrome rénal (FHSR) en Europe et en Asie, ou de syndromes
cardiopulmonaires (SCPH) en Amérique. Le sujet s’inscrit dans une étude qui a pour but de
comprendre les mécanismes de persistance et de pathogénicité par analyse différentielle
d’interaction des glycoprotéines de deux virus avec des facteurs cellulaires dans différents modèles.
En effet, les glycoprotéines d’enveloppe jouent un rôle important, que ce soit lors de l’entrée dans
les cellules cibles, lors de la morphogénèse des particules virales, ou dans le cadre de la régulation
de certaines fonctions cellulaires, en particulier via des interactions avec le système immunitaire de
l’hôte. En vue d’une approche comparative, nous nous sommes intéressés aux glycoprotéines de
deux hantavirus présents en France : le virus Puumala (PUUV), à l’origine de néphropathies
modérées, et le virus Tula (TULV), considéré comme non pathogène pour l’homme. Des vecteurs
d’expression des glycoprotéines ont été générés dans le but de pouvoir les exprimer dans des
lignées cellulaires humaines et de rongeurs. Les techniques et les outils les mieux adaptés afin de
pouvoir détecter les glycoprotéines virales ont ensuite été déterminés. Ces mises au point
constituent une étape nécessaire pour pouvoir par la suite identifier des interacteurs des
glycoprotéines en condition de persistance ou de pathogénicité.
Mots
clés :
ZOONOSE,
MALADIE
EMERGENTE,
MALADIE
VIRALE,
GLYCOPROTÉINES D’ENVELOPPE, HANTAVIRUS, BUNYAVIRIDAE, RONGEURS
Jury :
Président : Pr.
Directeur : Dr. Sophie Le Poder
Assesseur : Pr. Nadia Haddad
Invité : Pr. Marc Eloit
79
HANTAVIRUS PERSISTANCE AND TROPISM:
CONTRIBUTION TO THE STUDY OF THE
ENVELOPE GLYCOPROTEINS
SURNAME : HARDY
Given name : Alexandra
Summary
Hantaviruses are recognised as emerging pathogens belonging to the Bunyaviridae family. Small
rodents, insectivores and bats, which are chronically and asymptomatically infected, act as reservoir
hosts for hantaviruses. Transmission to humans results in Hemorrhagic Fever with Renal Syndrome
(HFRS) in Europe and Asia, or in Hantavirus Cardiopulmonary Syndrome (HCPS) in the Americas.
My work is part of a study aiming to better understand the mechanisms driving hantavirus
persistence versus pathogenesis by differential analysis of glycoproteins from two hantaviruses and
their interactions with cellular factors in different models. We focused on envelope glycoproteins as
they play an important role in viral entry, in assembly of progeny viruses and in the regulation of
cellular signaling responses and functions such as the host’s immune responses. For a comparative
approach, two hantaviruses that are present in France were used: Puumala virus (PUUV),
responsible for a mild form of HFRS, and the Tula virus (TULV), which is considered as nonpathogenic. Expression vectors for the envelope glycoproteins were generated in order to express
them in human and rodent cell lines. The techniques and the tools required to detect the
glycoproteins were then improved. These developments are a crucial step for the identification of
glycoprotein interactors, either in persistant or pathogenic conditions.
Keywords: ZOONOSIS, EMERGING DISEASE, VIRAL DISEASE,
GLYCOPROTEINS, HANTAVIRUS, BUNYAVIRIDAE, RODENTS
ENVELOPE
Jury :
President : Pr.
Director : Dr. Sophie Le Poder
Assessor : Pr. Nadia Haddad
Guest : Pr. Marc Eloit
80
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