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Avec l’auteur suivant, nous voyons que – dès le niveau le plus abstrait et fondamental des sciences, celui des
mathématiques – la notion de croyance au-delà du démontrable se montre plus que légitime, nécessaire :
- « Le théorème de Gödel dit qu’il y aura toujours une proposition vraie qui ne sera pas démontrable dans le
système ; il y aura toujours des propositions vraies mais indémontrables. »
- « Sa force incroyable n’a pas été encore comprise.
[
…
]
Il nous révèle que la réalité mathématique a
une richesse incroyable, qui est irréductible à des propositions logiques. »
- « C’est une erreur énorme de croire que l’on peut rendre compte de notre monde en termes matériels.
[
…
]
. Il
n’y a pas de limites à l’émerveillement que l’on aura, face aux surprises venant du monde extérieur. »
Alain CONNES
(Pr.
Math, Coll.
de Fr.,
Méd.
Fields)
(Conf. Sorbonne., 21.3.2001)
On pourrait résumer l’apport de Gödel et sa confirmation ultérieure, par ces lignes :
- « Ce qui restera l’acquis principal du travail de Gödel, c’est la distinction entre vérité et prouvabilité.
[
…
]
Le
théorème de Gödel est une réfutation d’un modèle mécanique de la science, de la pensée, du monde. »
(in : "Le théorème de Gödel", Seuil, 1989)
- « Ce n'est qu'avec le développement de l'informatique qu'ont pu se dégager de nouveaux axes de lecture,
[relatifs aux fondements des mathématiques]
en rupture de plus en plus nette avec le réductionnisme Hilbertien. »
(Conf. "Les fondements des mathématiques", UTLS, 2000)
Jean-Yves GIRARD
(Mathématicien, Dir. Rech. CNRS. Académicien)
Insistons enfin, avec Leonid LEVIN
(Pr. Math. Univ. Boston)
sur le fait que l’incomplétude en question,
démontrée par Gödel, ne concerne
pas les
mathématiques en
elles-mêmes, mais notre
capacité à
accéder à
leur totale
vérité, et il
dénonce justement, comme le rappelle un de ses commentateurs:
- «… les interprétations fausses des théorèmes d’incomplétude, par exemple celle affirmant que la vérité
mathématique est incomplète, alors que ce sont nos moyens formels d’y accéder qui sont inadaptés. »
(P.la Science, Dossier "Les grands problèmes mathématiques", p.71, janvier 2012)
Jean-Paul DELAHAYE
(Pr.
Math.
&
Informatique Fondamentale, Univ. Lille.)
Remarquons, pour terminer, – et en accord avec les dires précités de
David BERLINSKI et avec ceux de
Freeman DYSON
(Pr. à Princeton, ex collègue de Gödel, membre de nombreuses Académies)
qui affirme également :
« En raison du théorème de Gödel, la physique est, elle aussi, inépuisable.
»
(NY Review
of Books,
13.5.2004) –
que
suivant les démonstrations de
Léonid LEVIN
,
cette incomplétude essentielle peut
être légitimement étendue des
mathématiques à la physique, et par conséquence à toutes les sciences dépendant de la physique : chimie, biologie,
etc., dont nous ne pourrions, à jamais, connaître le "dernier mot".
II – LES MATHÉMATIQUES : SIMPLE OUTIL INVENTÉ PAR L’HOMME
AU CONTACT DE LA NATURE, OU VÉRITÉ ÉTERNELLE ?
- a) Les théories à l’épreuve des faits
Certains mathématiciens profondément matérialistes pensent que les mathématiques ne sont qu’un outil, qu’un
langage symbolique inventé, à partir de la préhistoire, par l’homme dans le cadre de sa confrontation quotidienne à
un environnement dont la compréhension favorise la survie. Cette fable est du style : "j’ai tué un bison, deux bisons,
trois bisons, etc. et ainsi, petit à petit, jusqu’au calcul différentiel et à la géométrie non commutative !
Malheureusement certains catholiques – phobiques de tout ce qui pourrait évoquer les idées dites
"platoniciennes", ou séduits par la popularité des thèses naturalistes, voire inquiets de la présence d’éventuels
"signes" évoquant trop "indécemment" une Création, – en viennent à soutenir des thèses similaires.
Ainsi Dominique LAMBERT
(Astrophysicien, Pr. Philo. des Sc., Univ. cathol. de Namur)
en vient à écrire :
- « L’efficacité des mathématiques [...] ne paraît pas plus mystérieuse que la réussite de la perception usuelle ou
du processus d’acquisition de connaissances en général. [...] L’origine des domaines les plus significatifs, les plus
profonds, des mathématiques pourraient bien être l’extension progressive – coadaptée
[processus darwinien]
, de
temps à autre
[par hasard]
, à des domaines empiriques – de capacités cognitives élémentaires permettant à
l’humain de reconnaître et de se représenter des éléments de réalité. »
(La Rech. Dossier n°37, p. 20, 11.2009)
Mais comment peut-on prétendre réduire, dans une optique naturaliste, les mathématiques à la banalité des
autres savoirs ?! De fait, ces derniers sont, par la logique s’appuyant sur la perception, empiriquement déduits du
réel, tandis que les mathématique on trop souvent l’incroyable pouvoir d’anticiper, hors de toute perception
empirique, des pans entiers du réel non encore découvert !
Pour leur part, les "Lumières", par la bouche de DIDEROT, prétendirent même faire, des mathématiques, un
jargon aristocratique élitiste : « Elles ne font qu’interposer un voile entre la Nature et le peuple ! »