DP Internet Jean Dalibard

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Communiqué de presse
Le Collège de France crée la chaire Atomes et rayonnement
et nomme titulaire le Pr Jean Dalibard .
Leçon inaugurale, le 18 avril 2013
L’étude des interactions entre les atomes et la lumière est un domaine de la physique qui a
connu au cours du 20ème siècle, et continue à connaître, des développements spectaculaires dont
la portée et les applications sont considérables. Les découvertes faites ces trente dernières
années sur la physique des atomes froids, dont Jean Dalibard est un des plus éminents
spécialistes, ont ouvert de nouveaux champs de recherche et de compréhension du monde qui
nous entoure.
Découvertes sur les atomes froids : un coup de tonnerre chez les physiciens
Le refroidissement de la matière par la lumière est sans conteste une des applications les plus
paradoxales du laser. Alors que ce dernier est traditionnellement associé à l’idée de chaleur, il
permet également d’atteindre les plus basses températures jamais mesurées. Les gaz d’atomes
refroidis par laser forment une « matière quantique » aux propriétés radicalement différentes
des fluides ordinaires. Amélioration spectaculaire de la précision de la mesure du temps, études
fondamentales de l’infiniment grand et de l’infiniment petit, superfluidité et supraconductivité
de la matière : ces atomes froids sont à la base d’une nouvelle métrologie du temps et de
l’espace qui trouve des applications dans des domaines aussi divers que la navigation, les
télécommunications, ou encore la géophysique.
« Jean Dalibard, dont la thèse fut dirigée par Claude Cohen-Tanoudji, domine à la fois la
physique quantique dans ses aspects les plus fondamentaux, l’optique, la physique statistique
et celle de la matière condensée. Les phénomènes qu’il étudie se situent en effet à la frontière de
tous ces domaines, réalisant une conjonction et une synthèse remarquables d’idées et de
concepts qui se trouvent pour ainsi dire fertilisés les uns par les autres dans la physique des
atomes froids », estime Serge Haroche, Administrateur du Collège de France, prix Nobel de
Physique 2012.
La Physique expérimentale : une longue tradition renouvelée, au Collège de France
La création de cette chaire et l’installation de Jean Dalibard au sein du nouvel Institut de
physique du Collège de France1 est un élément essentiel du projet de l’institution visant à la
renaissance de la physique expérimentale sur son site historique. Le groupe de recherche de
Jean Dalibard rejoindra ceux de Serge Haroche (chaire de Physique quantique) et d’Antoine
Georges (chaire de Physique de la matière condensée) ainsi que des équipes de jeunes
chercheurs accueillis au sein d’un « hôtel à projet ».
La leçon inaugurale du Pr Jean Dalibard se tiendra le 18 avril 2013. Ses cours auront lieu les
vendredis à 9h30 à partir du 17 mai 2013, sur le thème : Des cages de lumière pour les atomes : la
physique des pièges et des réseaux optiques. L’ensemble de l’enseignement de Jean Dalibard sera
disponible en audio et vidéo sur le site de l’institution (www.college-de-France.fr).
1
Les locaux du nouvel Institut de Physique du Collège de France seront inaugurés à l’automne 2013.
Contact presse : Marie Chéron/Cécile Barnier : 01 44 27 12 72 - [email protected]
Avril
2013
Jean Dalibard vu par ses pairs
« Jean Dalibard est l’un des physiciens les plus renommés au monde. Son œuvre aussi bien théorique
qu’expérimentale, à l’avant-garde de la recherche en physique atomique et en optique quantique, fait de
lui une personnalité vraiment unique », William Phillips, physicien américain prix Nobel avec
Claude Cohen-Tannoudji en 1997.
« Jean Dalibard a apporté des contributions majeures au domaine des atomes ultra-froids. Ses exposés et
ses articles sont remarquables par leur impact et leur élégance. Il illustre au mieux la tradition de l’école
française de physique», Wolfgang Ketterle, physicien allemand prix Nobel de Physique 2001.
C’est un physicien exceptionnel à l’interface entre la physique atomique, l’optique quantique et la
physique de la matière condensée. J’ai du mal à trouver parmi mes collègues quelqu’un ayant dans sa
carrière académique couvert un spectre aussi étendu. Sa compréhension profonde des phénomènes se
reflète dans son enseignement remarquable, Peter Zoller, physicien autrichien éminent spécialiste
de l’optique et de l’information quantique.
Contact presse : Marie Chéron/Cécile Barnier : 01 44 27 12 72 - [email protected]
Avril
2013
Chaire Atomes et rayonnement
Leçon Inaugurale du Pr Jean Dalibard (résumé)
Les deux mots Atomes et Rayonnement qui composent le titre de cette chaire
représentent l’essentiel du monde physique qui nous est familier. La lumière est à la fois un
canal d’information sur notre environnement et un moyen de le contrôler ; canal d’information
pour l’astronome par exemple, qui en observant la couleur d’une étoile, en déduira son âge ;
moyen d’action car la lumière peut apporter localement une quantité d’énergie déterminée, le
bistouri laser du chirurgien en étant une illustration frappante. La théorie qui permet de décrire
le rayonnement en interaction avec la matière, l’électrodynamique quantique, est
extraordinairement précise et n’a jamais été mise en défaut, malgré des tests de plus en plus
contraignants. Son succès même pose une question essentielle : sur le plan fondamental, reste-il
des problèmes ouverts dans la science des atomes et de la lumière ? Le but de cette leçon est de
prouver toute la vitalité de cette discipline à travers l’exemple d’un champ de recherche : le
refroidissement des gaz d’atomes.
Le refroidissement de la matière par la lumière est sans conteste une des applications
les plus paradoxales du laser. Alors que ce dernier est traditionnellement associé à l’idée de
chaleur, il permet également de diminuer considérablement le mouvement désordonné des
particules d’un gaz pour arriver à un ordre quasi parfait : les températures obtenues sont un
milliard de fois plus basses que la température usuelle ! Un des mécanismes les plus efficaces
pour obtenir ce refroidissement porte le nom d’effet Sisyphe ; l’atome est mis dans la situation
du héros de la mythologie grecque et doit monter sans cesse des collines de potentiel. Une fois
que son énergie n’est plus suffisante pour atteindre le sommet de la colline suivante, l’atome
s’arrête, piégé au fond d’une cuvette de lumière.
Les voies de recherche ouvertes par les atomes froids sont nombreuses. Un exemple
emblématique porte sur la mesure du temps qui, depuis 1967, est fondée sur une référence
atomique particulière, le césium. Construire une horloge revient à mesurer la fréquence de
l’onde électromagnétique susceptible d’interagir avec cette espèce atomique. Or, les mesures
sont d’autant plus précises que les atomes bougent peu. Le refroidissement de gaz par laser a
donc permis une amélioration spectaculaire de la précision de la mesure du temps : les horloges
à atomes froids, si elles fonctionnaient depuis le Big Bang, retarderaient ou avanceraient de
quelques secondes seulement. Une telle performance trouve des applications dans la navigation
et le positionnement par satellite, ou encore la géodésie.
Les horloges utilisent les atomes froids pour mesurer le temps. Ces mêmes atomes
peuvent également caractériser l’espace, plus précisément déterminer des champs
d’accélération ou de rotation. Pour cela, on met à profit leur nature ondulatoire en réalisant des
interféromètres à ondes de matière. Ces dispositifs permettent par exemple de mesurer le
champ de gravitation terrestre avec une précision qui approche le milliardième de l’accélération
de la pesanteur. Ils ouvrent des perspectives très intéressantes dans des domaines tels que la
géophysique et la détection minière.
L’extrême stabilité des horloges atomiques est une illustration spectaculaire du degré
de précision que les atomes froids permettent d’atteindre. Cette précision, unique dans
l’histoire de la physique, peut se révéler pertinente pour certaines études fondamentales de
l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Mentionnons par exemple la mesure d’une possible
variation temporelle des constantes fondamentales, qui est un enjeu essentiel pour la
cosmologie. On apprend dans les manuels de physique que le rapport entre la masse du proton
et la masse de l’électron vaut environ 1836. Mais le proton sera-t-il toujours 1836 fois plus lourd
que l’électron, ou ce rapport est-il en train d’évoluer ? On espère répondre à cette question en
Contact presse : Marie Chéron/Cécile Barnier : 01 44 27 12 72 - [email protected]
Avril
2013
comparant pendant une longue durée des horloges atomiques utilisant pour référence des
espèces atomiques différentes. Une autre illustration de l’impact des mesures de grande
précision en physique atomique porte sur la possible asymétrie entre matière et antimatière.
Cette asymétrie semble nécessaire pour expliquer pourquoi notre Univers est composé presque
uniquement de matière ; elle pourrait être mise en évidence par des mesures ultra-précises
menées sur des molécules ou des atomes refroidis par laser. Une de ses conséquences serait en
effet un électron « imparfaitement rond », phénomène détectable dans une expérience de
spectroscopie à très haute résolution.
Le comportement collectif des gaz d’atomes froids donne naissance à une matière
quantique, aux propriétés radicalement différentes des fluides usuels. Le seuil de formation de
cette matière résulte de la comparaison de deux échelles de longueur : l’une est la distance
moyenne entre particules, l’autre est liée à l’onde de matière de chaque atome. Dans un gaz
froid et dense, la seconde échelle de longueur dépasse la première ; les ondes associées aux
différents atomes se recouvrent et le comportement macroscopique du gaz est dominé par les
règles quantiques. C’est en particulier le cas des condensats de Bose-Einstein, obtenus pour une
des deux classes de particules existant dans la Nature, les bosons. Une illustration de l’étrangeté
de cette matière quantique est la propriété de superfluidité, découverte d’abord pour l’hélium
liquide dans les années 1930 : ce liquide peut s’écouler sans la moindre viscosité en remontant
par capillarité le long des parois d’un récipient. Cette propriété de superfluidité existe
également pour les gaz d’atomes froids ; nous l’avons observée en mettant en rotation un
condensat de Bose-Einstein et en visualisant les tourbillons quantiques qui apparaissent alors
au sein du gaz. Très récemment, nous avons montré que cette propriété de superfluidité
s’étendait à des gaz à deux dimensions, c’est-à-dire à des feuillets d’atomes. Cet ordre
superfluide bidimensionnel est remarquable car il résulte d’une transition de phase très
particulière, prédite par Kosterlitz et Thouless et qualifiée de topologique.
Une autre grande classe d’applications des gaz d’atomes froids est la simulation
quantique. Le point de départ de cette recherche réside dans le fait que les systèmes à grand
nombre de particules sont souvent trop complexes que leurs propriétés soient calculables avec
des ordinateurs conventionnels. Suivant une proposition de Richard Feynman, on peut choisir
de simuler plutôt que calculer. Cette approche est fondée sur l’universalité de la physique
quantique : deux systèmes a priori différents sont décrits par un formalisme similaire si certains
paramètres leur sont communs. Les gaz d’atomes froids, du fait de la grande flexibilité dont on
dispose pour leur préparation, constituent des simulateurs idéals pour de nombreux autres
systèmes physiques. Après avoir préparé le gaz dans les conditions initiales adéquates, on le
laisse évoluer puis on mesure son état final. La Nature « fait le calcul » à notre place et
l’universalité quantique garantit que le résultat obtenu pour nos atomes est également valable
pour le système modélisé. Parmi les applications potentielles de cette simulation, figure le
phénomène de supraconductivité ; si on arrive à mieux l’appréhender, on peut espérer
concevoir des matériaux qui transporteront l’électricité sans perte pour les applications de la vie
courante.
La physique des atomes manipulés par la lumière est donc un domaine de recherche
extrêmement riche, tant sur le plan fondamental que sur celui des applications. Les liens avec
d’autres disciplines, mathématiques et chimie par exemple, sont également bien réels : Les
mathématiciens s’intéressent aux équations non linéaires qui régissent le comportement de ces
gaz, les chimistes y trouvent un nouvel éclairage sur la notion de dynamique réactionnelle. Le
but des cours des prochaines années est avant tout l’établissement d’un langage commun à
toutes ces communautés, et la mise en place d’une réflexion approfondie sur les nouveaux états
de la matière que les atomes froids permettront de réaliser.
Jean Dalibard
Contact presse : Marie Chéron/Cécile Barnier : 01 44 27 12 72 - [email protected]
Avril
2013
Chaire Atomes et rayonnement
Première année d’enseignement du Pr Jean Dalibard
Des cages de lumière pour les atomes : la physique des pièges et des réseaux optiques
Grâce à la lumière issue de faisceaux lasers, il est possible de créer des « paysages de potentiel » qui
permettent de contrôler le mouvement d’atomes préalablement refroidis. Les atomes peuvent rester
confinés dans ces cages de lumière pendant de longues durées et leur dynamique y prend des formes
très variées, en fonction de la nature du paysage réalisé.
Après avoir présenté les principes de base qui régissent le contrôle du mouvement atomique par la
lumière, nous nous intéresserons plus particulièrement aux réseaux optiques, c’est-à-dire aux potentiels
périodiques créés par une ou plusieurs ondes lumineuses stationnaires. Le mouvement d’atomes dans
un réseau optique présente une analogie profonde avec celui d’électrons dans un cristal ; nous
montrerons donc comment lui appliquer les concepts issus de la physique des solides, théorème de
Bloch, bandes d’énergies, modèles des liaisons faibles et fortes, etc.
Nous discuterons ensuite certaines applications remarquables des réseaux optiques, comme le
phénomène de localisation dynamique et les oscillations de Bloch. Nous terminerons le cours de cette
année avec quelques illustrations du lien entre phases quantiques, géométrie et topologie dans ces
réseaux.
Les cours de Jean Dalibard auront lieu les vendredis à 9h30 à partir du 17 mai 2013. Ils sont, comme tous les
cours du Collège de France, d’accès libre, gratuit et sans inscription et seront disponibles en audio et vidéo (à
verifier) sur le site de l’institution (www.college-de-France.fr).
Contact presse : Marie Chéron/Cécile Barnier : 01 44 27 12 72 - [email protected]
Avril
2013
Chaire Atomes et rayonnement
Biographie
Né en 1958, Jean Dalibard est un ancien élève de l’Ecole normale supérieure (1977-1981). Il a
soutenu sa thèse de doctorat sous la direction de Claude Cohen-Tannoudji en 1986 et a été
chercheur au CNRS jusqu’en 2012, date de son élection au Collège de France. Il effectue ses
recherches au laboratoire Kastler Brossel. Il est également professeur à l’Ecole polytechnique et
il a dirigé l’école de physique des Houches de 2001 à 2006. Il a été chercheur invité au National
Institute for Standards and Technology (USA), au Laboratoire Cavendish de l’Université de
Cambridge (UK), et il a enseigné dans plusieurs universités étrangères.
Les principaux travaux de Jean Dalibard portent sur la physique atomique et l’optique, et plus
particulièrement sur la manipulation d’atomes par des champs électromagnétiques. Ce domaine
de recherche est fondé sur le fait que des faisceaux laser aux caractéristiques bien choisies
permettent de refroidir un gaz d’atomes ou de molécules. Les températures obtenues sont
extrêmement basses, de l’ordre du millionième de degré au dessus du zéro absolu. Elles
peuvent donner naissance à de nouveaux états de la matière dont le comportement, régi par la
mécanique quantique, diffère fortement de celui des fluides ordinaires.
Travaux actuels :
Les études actuellement en cours dans l’équipe de Jean Dalibard visent à approfondir notre
compréhension du comportement de la matière à très basse température. La ligne directrice est
le développement d’une « ingénierie quantique » cherchant à reproduire avec les gaz d’atomes
froids des situations que l’on rencontre dans d’autres domaines allant de la physique nucléaire à
l’astrophysique, en passant par la science des matériaux ; en d’autres termes, ces gaz ultra-froids
constituent des « simulateurs » avec lesquels on espère modéliser le comportement d’autres
systèmes quantiques plus difficilement contrôlables.
Principales distinctions
Membre de l’Académie des Sciences (2004)
Membre de European Academy of Sciences (2009)
Visiting Fellow de Trinity College, Cambridge (2010)
Membre de l’Academia Europaea (2011)
Fellow de Optical Society of America (2012)
Prix Gustave Ribaud de l'Académie des sciences (1987)
Prix Mergier Bourdeix de l'Académie des sciences (1992)
Prix Jean Ricard de la Société française de physique (2000)
Médaille Blaise Pascal de l’European Academy of Sciences (2009)
Prix des trois physiciens, Fondation de France (2010)
Prix Davisson-Germer de l’American Physical Society (2012)
Prix Max Born de l’American Optical Society (2012)
Principales publications
1982 - Experimental test of Bell's inequalities using time-varying analyzers,
A. Aspect, J. Dalibard and G. Roger, Phys. Rev. Lett. 49, 1804.
1989 - Laser cooling below the Doppler limit by polarization gradients : simple theoretical models, J.
Dalibard and C. Cohen-Tannoudji, J.O.S.A. B 6, 2023.
Contact presse : Marie Chéron/Cécile Barnier : 01 44 27 12 72 - [email protected]
Avril
2013
1992 - Wave-function approach to dissipative processes in quantum optics,
J. Dalibard, Y. Castin et K. Moelmer, Phys. Rev. Lett. 68, 580.
2000 - Vortex formation in a stirred Bose-Einstein condensate,
K.W. Madison, F. Chevy, W. Wohlleben and J. Dalibard, Phys. Rev. Lett. 84, 806.
2006 - Berezinskii-Kosterlitz-Thouless crossover in a trapped atomic gas,
Z. Hadzibabic, P. Krüger, M. Cheneau, B. Battelier and J. Dalibard, Nature 441, 1118.
2008 - Many-Body Physics with Ultracold Gases,
I. Bloch, J. Dalibard and W. Zwerger, Rev. Mod. Phys. 80, 885.
2012 - Superfluid behaviour of a two-dimensional Bose gas
R. Desbuquois, L. Chomaz, T. Yefsah, J. Léonard, J. Beugnon, C. Weitenberg, J. Dalibard,
Nature Physics 8, 645
Principaux ouvrages
Mécanique quantique et Problèmes quantiques, en collaboration avec Jean-Louis Basdevant et
Manuel Joffre (édition française : Editions de l’école polytechnique, édition anglaise : Springer)
Sites web
Page personnelle : http://www.phys.ens.fr/~dalibard/
Site de l’équipe de recherche : http://www.lkb.ens.fr/-Condensats-de-Bose-Einstein-?lang=fr
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Avril
2013

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