CHAPITRE 4
ANALYSE OPERATIONNELLE DES
CIRCUITS LINEAIRES ET
INVARIANTS
Nous sommes à présent à mêmes d'écrire les équations d'un circuit opérationnel
(après simplifications éventuelles par passage à des circuits équivalents), de les
résoudre, et d'en déduire les grandeurs temporelles recherchées. Nous l'avons
d'ailleurs fait dans les exercices des chapitres précédents.
Nous commencerons ici par analyser des systèmes simples (ordres 1 et 2), sous
la forme d'exercices divers. Nous montrerons au chapitre suivant que les
résultats obtenus ici sont beaucoup plus simples et réguliers qu'il n'y paraît à
première vue, ce qui nous permettra de généraliser aux circuits d'ordre
quelconque.
Nous examinerons systématiquement le comportement de ces circuits dans les
modes de fonctionnement suivants :
Lorsque ces circuits sont soumis à leurs seules conditions initiales1; les
réponses du circuit sont alors appelées réponses libres.
A l'état quiescent, c'est-à-dire quand ces circuits sont soumis uniquement à
des sources indépendantes (conditions initiales nulles); les réponses du circuit
sont alors appelées réponses forcées.
Lorsque les deux types de sources sont présentes simultanément; les
réponses du circuit sont alors appelées réponses complètes.
4.1 Circuits d'ordre 1
Nous allons mettre ici en oeuvre les lois de Kirchhoff sur les tensions et sur les
courants de circuits qui ne comportent qu'un élément réactif2 (inductance ou
capacité) : les circuits du premier ordre. Nous allons voir en effet que leurs
1 Tensions initiales sur les capacités et courants initiaux dans les inductances.
2 Ou, plus exactement, des circuits qui peuvent, après passage par des circuits équivalents, être
mis sous une forme ne comportant plus qu'un élément réactif. Ainsi, par exemple, deux capacités
en parallèle ne constituent pas un circuit du second ordre.
2 ANALYSE OPERATIONNELLE DES CIRCUITS LINEAIRES ET INVARIANTS
équations font intervenir des équations différentielles du premier ordre (ou, en
transformée de Laplace, des polynômes du premier degré), ce qui justifie leur
appellation.
Exemple 4.1 : Réponse libre d'un circuit RC
Considérons le circuit de la figure 4.1. On suppose qu'en t=0 la capacité est complètement
chargée à la tension imposée par le générateur externe. En t=0, on met le générateur hors
circuit. On cherche l'évolution de la tension u(t).
Fig. 4.1 Circuit RC
Avant de se lancer dans les calculs, il est toujours bon de chercher à en prédire, dans une
certaine mesure, les résultats. Intuitivement, on sait d'une part que la tension aux bornes de
la capacité ne peut pas chuter brusquement : (0 ) (0 )uu
+
=
. On conçoit par ailleurs
aisément que l'énergie emmagasinée dans la capacité va se libérer dans la résistance, en y
forçant un courant. Après un temps suffisant, l'énergie sera totalement libérée, et le courant
sera nul, ce qui nous amène à penser que () 0u
=
Calculons maintenant précisément la tension. Le passage au circuit opérationnel est
immédiat, et fait apparaître une source de tension indicielle en série avec la capacité. On
trouve :
1
() (0) () 0
(0 )
() 1
pU p u U p
RC
u
Up p
R
C
−+ =
=
+
(4.1)
Avant même de rechercher l'original de cette transformée, on peut (et c'est même fortement
recommandé) vérifier sa plausibilité grâce aux théorèmes de la valeur initiale et finale :
00
lim ( ) lim ( ) lim ( ) lim ( )
pt p t
p
Fp ft pFp ft
→∞ → − →∞
== (4.2)
Ce qui donne :
0
(0 )
lim (0 )
1
(0 )
lim ( ) 0
1
p
p
u
pu
pRC
u
pu
p
R
C
→∞
=
+
=
∞=
+
(4.3)
Après passage à l'original, on trouve :
ANALYSE OPERATIONNELLE DES CIRCUITS LINEAIRES ET INVARIANTS 3
() (0)exp( ) ()
t
ut u t
RC
ε
=−
(4.4)
expression dans laquelle
ε
(t) représente la fonction échelon.
L'allure de u(t) est facilement obtenue à la Fig. 4.2. On constate en effet :
- que la tangente à l'origine d'une exponentielle de type exp(-t/
τ
) est une droite dont le
coefficient angulaire est donné par -1/
τ
(avec
τ
= RC)
- qu'en t =
τ
, l'exponentielle ne vaut plus que 1/e
0.368, et que sa pente tombe à 1/(
τ
e).
Le Tableau 4.1 donne une idée des valeurs prises par l'exponentielle décroissante pour
différentes valeurs de t. On retiendra qu'après t=5
τ
elle a presque complètement disparu.
T/τ exp(-t/τ)
1 0.368
3 0.050
5 0.007
Tableau 4.1 Valeurs prises par l'exponentielle décroissante
u(t)/u(0-)
0.5
01.5 2.0
1.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0
t/τ
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
Fig. 4.2 Exponentielle décroissante
On constate l'importance du paramètre
τ
, appelé constante de temps en raison de son
homogénéité à une grandeur temporelle.
Nous verrons plus loin que l'apparition d'exponentielles (croissantes ou décroissantes) de
constante de temps
τ
= RC est une caractéristique naturelle de tout circuit RC. Elles se
retrouvent par ailleurs dans tous les courants et tensions du circuit. Ainsi, dans le cas du
circuit de la Fig. 4.1, les courants circulant respectivement dans la résistance et la capacité
sont donnés par :
() 1
() (0)exp( ) ()
() 1
() (0)exp( ) () ()
R
C R
ut t
it u t
RR RC
du t t
it C u t it
dt R RC
ε
ε
== −
== − =
(4.5)
Nous verrons de plus au chapitre 5 que ce type de fonction exponentielle se manifestera
d'ailleurs en général pour tout type d'excitation.
4 ANALYSE OPERATIONNELLE DES CIRCUITS LINEAIRES ET INVARIANTS
Exemple 4.2 : Réponse libre d'un circuit RL
On cherche à calculer le courant dans la résistance du circuit R-L de la Fig. 4.3.
Fig. 4.3 Circuit RL
Intuitivement, puisque le courant qui traverse une inductance ne peut pas varier
brusquement, il est clair que i(0+) = i(0-). L'énergie magnétique stockée dans L va donc se
libérer en poussant un courant à travers la résistance R. Après un temps suffisant, on aura :
i(t>>)
0.
Plutôt que de recalculer la solution analytique, on peut se servir du fait que ce circuit est le
dual du précédent, avec R0 (la constante intervenant dans les équations de dualité) égale à
1.
La solution est donc donnée par (4.4) dans laquelle on remplace R par 1/R, C par L, et u par
i:
() (0)exp( ) ()
t
it i t
L
R
=− (4.6)
On constate que cette fois, la constante de temps vaut :
L
R
τ
=
. Elle est à nouveau une
caractéristique intrinsèque du circuit R-L considéré.
Exemple 4.3 : Réponse libre d'un circuit RC avec plusieurs interrupteurs
Considérons le circuit de la Fig. 4.4, où l'on suppose que u(0-) n'est pas égal à zéro.
Si l'on suppose le circuit invariant, il est clair que sa réponse à un événement quelconque
(comme par exemple l'enclenchement d'un interrupteur) se manifestant à un instant t0
quelconque doit être identique, à un décalage dans le temps près, à leur réponse à ce même
événement s'il était apparu en t=0.
Fig. 4.4 Circuit RC avec plusieurs interrupteurs
Au vu des réponses obtenues dans les exemples précédents, on obtient, sans aucun calcul :
ANALYSE OPERATIONNELLE DES CIRCUITS LINEAIRES ET INVARIANTS 5
0
0
000
() (0)exp( ) () 0
()
() ( )exp( ) ( )
2
t
u t u t pour t t avec RC
tt
u t u t t t pour t t
ετ
τ
ε
τ
=− ≤
=−− ≥
=
(4.7)
Dans la seconde expression, u(t0-) peut être obtenu à partir de la première.
On conclut des exemples précédents que les réponses libres (que ce soient des
courants ou des tensions) d'un circuit linéaire du premier ordre sont des
fonctions du type :
() (0)exp( ) ()
t
yt y t
ε
τ
=−
(4.8)
où la constante de temps
τ
est égale à : RC pour les circuits R-C
L/R pour les circuits R-L
Les expressions ci-dessus n'ont finalement rien d'étonnant. Il est en effet logique
que
τ
soit proportionnel à L ou C, puisque l'énergie magnétique ou électrique
stockée dans ces éléments réactifs leur est elle même proportionnelle.
L'apparition de R au numérateur de τ dans le cas R-C est dû au fait que, puisque
la capacité cherche à imposer sa tension, la puissance dissipée dans la résistance
au moment de l'établissement du circuit est donnée par u(0-)²/R : plus R est
grand, plus la capacité va mettre de temps pour libérer son énergie. Dans le cas
R-L, c'est le courant qui est imposé dans les premiers instants, et la puissance
dissipée vaut Ri(0-)² : plus R est grand, plus l'inductance se libère rapidement de
son énergie.
Exemple 4.4 : Réponse forcée d'un circuit RC à une source indicielle
Considérons à présent le circuit de la Fig. 4.5, que nous supposerons cette fois à l'état
quiescent : (0 ) 0u
=
. En t=0, il est excité par une source de courant. La forme de l'onde de
courant délivrée peut être à priori quelconque; pour simplifier, nous la supposerons
constante (du moins dans un premier temps).
Fig. 4.5 Réponse du circuit RC à une source de courant constante
Intuitivement , il est clair que u(0+) = u(0-) = 0. Dans les premiers instants, la capacité va
se charger, en attirant à elle tout le courant délivré par la source. Elle se comportera donc
momentanément comme un court-circuit. Une fois chargée, elle ne consommera plus aucun
courant, et se comportera dès lors comme un circuit ouvert. On peut donc prévoir que u(t)
va tendre vers RI0.
Par Laplace, on trouve :
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