46 Manuel de Physique
Séparément, les physiciens Huygens5et Fresnel6développent une autre théorie optique, basée sur la propagation rectiligne
des rayonslumineux dansle vide, et dans les milieuxassimilés, et qui fait l’objet del’essentiel de l’étudemenée cette année.
Dualité onde-corpuscule
Appuyé sur l’immense prestige de Newton, la description corpusculaire de la lumière décrit les rayons lumineux comme
des particules, qui se déplacent en ligne droite à très grande vitesse, sauf lors du passage d’un milieu à un autre.
Après avoir été infirmé par les expériences de Fizeau (cf. plus loin) et par sa faible capacité à décrire les phénomènes
d’interférence et de diffraction, le point de vue corpusculaire a retrouvé une actualité à partir de 1900, avec les découvertes
de Planck7et Einstein8.
Cependant, le moyen le plus simple de rendre compte de l’ensemble des propriétés présentées cette année est l’utilisation
du point de vue ondulatoire, du initialement à Huygens. Dans ce point de vue, la lumière est une onde qui se propage à une
certaine vitesse.
La nature de l’onde lumineuse et de son substrat (l’éther, le « sujet du verbe onduler») ont constituélongtemps un pointtrès
délicat de la théorie ondulatoire, jusqu’à l’identification définitive des ondes lumineuses et des ondes électromagnétiques
par Maxwell9et Hertz10.
6.1.2 Approximation scalaire
L’onde de l’approximation scalaire
Dans toute la suite, nous nous placerons dans le cadre réduit d’une approximation scalaire : l’onde lumineuse est une
certaine grandeur scalaire que nous noterons par exemple W(x,y,z,t). Dans le cas fréquent de l’étude d’une onde mono-
chromatique, nous choisirons la notation complexe :
W(x,y,z,t) = w(x,y,z)exp(iωt)(6.1)
sans nous préoccuper pour l’instant de la nature de l’amplitude complexe w(x,y,z)de l’onde lumineuse, de pulsation ω.
Une telle onde est en général, dans le vide, une solution de l’équation de d’Alembert pour la vitesse c0, équation que nous
écrirons ∆W(x,y,z,t) = 1
c2
0
∂2
∂t2W(x,y,z,t)soit encore, pour une onde de pulsation ω,∆w(x,y,z) = −ω2
c2
0w(x,y,z).
Ondes planes
Une onde plane étant fonction d’une seule variable cartésienne, w(x,y,z) = w(x), l’équation devient d2
dx2w(x) = −ω2
c2
0w(x)
d’où w(x) = w+exp(−ik0x) + w−exp(ik0x), où on a posé k0=ω
c0; elle s’interprète comme la somme de deux ondes
progressives en sens inverse, puisque W(x,t) = w+exp(i(ωt−k0x)) + w−exp(i(ωt+k0x)).
5Le physicien et mathématicien néerlandais CHRISTIAAN HUYGENS (1629-1695), à la suite notamment d’expériences de double réfraction (dans un
matériau cristallin, le spath d’Islande), conçoit à partir de 1677 une théorie ondulatoire de la lumière. Ses conceptions seront appuyées par la mesure par
le danois OLE RÖMER (1644-1710) de la vitesse de la lumière, par observation des variations de la période des occultations des satellites de Jupiter. Outre
son explication fondamentalement correcte des lois de la réflexion et de la réfraction, Huygens est aussi l’auteur de développements pratiques en Optique,
notamment en ce qui concerne les perfectionnements du microscope qui ouvriront de nouvelles voies aux naturalistes.
6Le physicien français AUGUSTIN FRESNEL (1788-1827) réintroduisit l’hypothèse ondulatoire notamment grâce à une interprétation complète de la
diffraction. On peut ainsi considérer Fresnel comme le fondateur de l’optique moderne, surtout si on prend en compte ses travaux portant sur l’optique des
corps en mouvement et l’optique cristalline. Il est aussi l’auteur d’applications pratiques spectaculaires de l’Optique, comme l’équipement des phares en
lentille à échelons (lentilles de Fresnel).
7En 1900, le physicien allemand MAX PLANCK (1858-1947) propose une explication de la loi d’émission de lumière par des sources thermiques à
partir de la quantification de l’échange d’énergie entre le rayonnement et la matière.
8Le physicien américain d’origine allemande ALBERT EINSTEIN (1879-1955) proposa en 1905 une explication de l’effet photoélectrique en rendant
compte de tous les échanges énergétiques quantifiés d’un faisceau lumineux sous forme particulaire. L’identité particulaire des photons sera définitive-
ment établie par les expériences de ARTHUR COMPTON (1892-1962) en 1923, ouvrant la voie aux travaux de LOUIS DE BROGLIE (1892-1987) et aux
développements de la Physique quantique.
9Le physicien JAMES CLERK MAXWELL (1831-1879) est l’auteur de la théorie électromagnétique unifiée; il a prévu dès 1870 la possibilité d’ondes
électromagnétiques, et proposé leur identité avec les ondes lumineuses.
10Le physicien allemand HEINRICH HERTZ (1857-1894) démontra expérimentalement l’existence et les propriétés des ondes électromagnétiques, et
popularisa les idées de Maxwell.