Selon la diététique hippocratique - Formations par correspondance

Diététique hippocratique
Sanguin, colérique, mélancolique ou atrabilaire, flegmatique ou lymphatique
1.Caractéristiques
Selon la diététique hippocratique, la digestion est la cuisson des aliments à l'intérieur du
corps.
L'Univers est constitué de 4 éléments :
l'Air
le Feu
la Terre
l'Eau
Il y a 4 qualités :
chaud
froid
sec
humide
La combinaison entre éléments et qualités donne les 4 humeurs et les 4 tempéraments :
élément
qualité
humeur
tempérament
Air
chaud et humide
sang
sanguin
Feu
chaud et sec
bile jaune
colérique ou bilieux
Terre
froide et sèche
bile noire
mélancolique ou atrabilaire
Eau
froide et humide
flegme
flegmatique ou lymphatique
Selon la diététique hippocratique
Pour rester en santé, au fil des saisons il faut avoir une nourriture équilibrée. Pour cela,
certains médecins recommandent de manger des aliments qui correspondent à son
tempérament. Et pour d'autres médecins, il faut manger des aliments qui sont contraires à
son tempérament.
Par exemple, pour le Tacuinum Sanitatis (texte arabe du 11e siècle, traduit en latin au 13e
siècle), le vin rouge corsé (chaud et sec au 2e degré), comme la viande de lièvre (chaude et
sèche au 2e degré) sont recommandés pour les personnes âgées, les flegmatiques et les
mélancoliques, de nature froide. Par contre, le poisson frais (froid et humide au 3e degré), les
prunes ou les poires (froides au 1e degré et humides au 2e degré) conviennent plutôt aux
colériques et aux sanguins, ainsi qu'aux jeunes, de tempérament chaud.
Le médecin hippocratique se méfie des fruits et des légumes crus : il recommande de cuire les
aliments.
Bonne hygiène de vie : manger, boire et vivre avec modération. Faire des exercices physiques
modérés, respirer du bon air, se reposer et dormir raisonnablement.
2.Comment cuisiner selon la diététique hippocratique
Je suis en bonne santé
Je commence mes repas par des fruits. Je mange de préférence des aliments cuits et
parfumés aux épices, pour faciliter la digestion.
Je mange des plats équilibrés, en tenant compte des saisons : l'hiver, période où le
flegmatique froid et humide domine, je mange des viandes en sauce, cuisinées avec des
épices qui réchauffent (boeuf et porc, gibier); au printemps, période où le sanguin chaud et
humide domine, je passe peu à peu du bouilli au rôti (volailles, agneau, chevreau), je
commence à manger davantage de légumes verts; l'été, période où le colérique chaud et
sèche domine, je mange des viandes (agneau et volailles) et poissons grillés ou cuits au
verjus, plus légers, je mange des aliments froids et humides comme les melons, les prunes ou
les cerises; l'automne, période où le mélancolique (ou atrabilaire) sec et froid domine, je
mange des aliments appétissants et acidulés pour chasser la mélancolie : chapons,
pigeonneaux, cochons de lait, je diminue le vin et les fruits.
Si je veux équilibrer ma nourriture en fonction de mon tempérament hippocratique, il n'existe
plus de spécialiste se référant à la médecine hippocratique en Occident. Seuls des praticiens
naturopathes se déclarent héritiers d'Hippocrate, mais peu d'entre eux connaissent la théorie
des humeurs. En revanche, en Inde, il existe toujours des médecins de la tradition
hippocratique, qui s'appelle en Inde médecine Unani Tibbi.
3.Livres
Lyon 1555, capitale de la culture gourmande au 16e siècle : Marie Josèphe Moncorgé,
concepteur rédacteur du site Compare diet, présente les livres de cuisine, confitures et
diététique publiés à Lyon à la Renaissance, avec des recettes. Quelques livres importants de
diététique hippocratique sont analysés : Le régime du corps (Aldebrandin de Sienne), le
Regimen sanitatis en françoys (Arnaud de Villeneuve), Le Platine en françoys, le De re cibaria
et le Thresor de santé.
4.Présentation
La vieille diététique hippocratique a duré plus de 2000 ans. Connaissance médicale empirique
(qui s'appuie avant tout sur l'expérience plus que sur le raisonnement), elle a été rejetée à
l'arrivée de la chimie médicale : la découverte des vitamines, des glucides ou des lipides, puis
maintenant du cholestérol, des Omega 3 ou des radicaux libres semblaient mettre un terme
définitif à ces croyances d'autrefois.
Mais la diététique hippocratique, doctrine médicale savante, est ensuite tombée dans le
domaine populaire. Elle survit dans certaines pratiques culinaires (manger du melon avec du
jambon cru, en début de repas, des poires au vin en dessert, boire un digestif en fin de repas)
ou dans certains conseils diététiques de nos grands-mères (ne pas boire en mangeant). On
trouve également une présentation modernisée des croyances hippocratiques chez certains
théoriciens de l'alimentation saine et végétarienne.
Notre civilisation a été profondément marquée par la théorie hippocratique des humeurs. Il en
reste de nombreux témoins dans le langage courant. Lorsqu'on définit une personne comme
"sèche" ou "chaleureuse", lorsqu'on se sent "mélancolique", ou que l'on réagit avec "flegme"
on fait, sans le savoir, de la médecine hippocratique.
La mode actuelle des diététiques chinoise et ayurvédique, ses cousines, aussi anciennes
qu'elle, va-t-elle lui donner une nouvelle jeunesse ?
5.1. Un peu d'histoire : dans l'Antiquité
En Grèce
La diététique grecque est née de la rencontre entre les observations des médecins et les
philosophes présocratiques. Les premiers philosophes grecs, entre le 6e et le 4e siècle av. J.C.
s'interrogent sur l'origine des choses : De quoi toutes choses sont faites ? Certains répondent
d'eau, d'autres d'air, d'autres encore de feu ou de terre. Des médecins disciples de
Pythagore vont faire la synthèse et affirmer les 4 racines des choses : eau, air, terre et feu.
Ils vont développer l'idée d'un système d'oppositions dualistes de l'univers : chaud/froid,
sec/humide, amer/doux. C'est l'équilibre de ces principes qui produit et conserve la bonne
santé. Le déséquilibre ou la prédominance de l'un provoquent la maladie puis la mort. Ils
affirment, avant le médecin Hippocrate, l'importance du régime alimentaire, de l'hygiène de
vie, de l'environnement et du climat pour comprendre et prévenir les maladies.
A la même période, en Inde, se développe l'Ayurvéda (la science de la vie en sanskrit) :
un art de vivre, une philosophie et une médecine, qui développe une théorie voisine. Il n'y
aurait pas eu de contacts directs entre médecins indiens et médecins grecs, ni d'emprunts
directs de textes, mais des contacts indirects via les Perses (Darius, qui a conquis la vallée de
l'Indus, avait des médecins grecs). On constate en effet certaines ressemblances entre
médecine grecque et médecine indienne dans les théories des humeurs, on retrouve
particulièrement les théories indiennes dans le traité des Vents d'Hippocrate et dans le Timée
de Platon..
A partir du 4e siècle avant J.C., Hippocrate et ses disciples, donnent des conseils sur
l'alimentation, la vie sexuelle, le bain, les exercices physiques, selon l'âge, le lieu d'habitation
et la saison. Cela va faire référence dans tout le monde occidental jusqu'au 19e siècle.
Les médecins hippocratiques reconnaissent 4 fluides ou humeurs : le sang, de nature
chaude et humide, la bile jaune, de nature chaude et sèche, le phlegme (ou la pituite), de
nature froide et humide et la bile noire (ou mélancolie ou atrabile), de nature froide et sèche.
L'existence de cette dernière humeur est contestée par la médecine moderne. La santé est
présentée comme le juste équilibre des humeurs. Il est donc nécessaire d'avoir un mode de
vie et une alimentation qui permettent de conserver cet équilibre ou qui compensent les
déséquilibres liés aux saisons ou à l'âge des patients.
Les successeurs d'Hippocrate ont développé la théorie des tempéraments hippocratiques :
sanguin, colérique ou bilieux, mélancolique ou atrabilaire, flegmatique ou lymphatique.
Rencontre symbolique entre Galien et Hippocrate
Dans l'Antiquité à Rome
Claude Galien, un médecin grec de l'empereur romain Marc Aurèle (1e siècle après J.C.), a
voulu "finir" le travail d'Hippocrate. Il a repris et développé la théorie des humeurs en
apportant des graduations et combinaisons. Galien classe les aliments et médicaments sur
une échelle à 4 degrés. Par exemple, le poivre est chaud au 4e degré, l'amande amère est
chaude au 1e degré et sèche au 2e degré. Galien a créé un système cohérent et beau, il a
recherché le plaisir de la symétrie plus que l'observation scientifique des faits.
5.2. Un peu d'histoire : Au Moyen Age
Après la chute de l'empire romain, la tradition médicale antique a surtout survécu dans
l'empire byzantin. Puis les querelles théologiques de l'église chrétienne des 4e et 5e siècles
ont favorisé l'exil de beaucoup de lettrés chassés de Constantinople. Ils se retrouvent en Syrie
et en Perse, emportant avec eux la culture antique et des manuscrits.
A Bagdad et en Andalousie arabe
Les califes de Bagdad (en particulier Al-Mansur, 754-775) de la dynastie des Abbassides,
séduits par la culture antique, attirent les intellectuels dans "la Maison de la Sagesse" (Bait al-
hikma) où ils créent une bibliothèque voisine de celle d'Alexandrie. Ils attirent ainsi à leur
cour des philosophes, des géographes, des traducteurs et des médecins, qui étudient puis
traduisent en arabe Aristote, Platon, Hippocrate et Galien. Les traducteurs d'Hippocrate et
Galien sont des chrétiens nestoriens. Certains nestoriens sont aussi médecins, comme Jibrail
ibn Bokhticho, le médecin personnel d'Haroun al-Rachid (le calife de Bagdad des Mille et une
nuits).
Entre le 9e et le 13e siècle, des médecins philosophes arabes, juifs et persans étudient les
textes anciens, les confrontent avec le savoir des indiens (le califat abbasside va de l'Indus à
l'Espagne, avant d'être détruit par les Mongols en 1258), développent leurs propres
recherches et les publient, en Perse, à Bagdad ou en Andalousie. Ils ont pour nom Rhazès
(~860-923, qu'on appellera aussi le Galien arabe), Abulcasis (936-1013), Avicenne (980-
1037), Averroès (1126-1198), Maïmonide (1135-1204) etc...
Le premier livre de diététique arabe est le Livre des propriétés des aliments (Kitâb Khawâss
al-aghdhiya), du nestorien Yûhannâ ibn Mâsawayh dit Mésué l'ancien, écrit à Bagdad au 9e
siècle et inspiré d'un livre de Galien : Des propriétés des aliments. Il sert ensuite de modèle à
de nombreux traités arabes de diététique.
Le régime de santé fait partie intégrante des outils thérapeutiques de la médecine arabe. Les
médecins du monde arabo-musulman reprennent à leur compte la théorie des humeurs
d'Hippocrate et la classification des aliments et des médicaments par degrés de Galien.
Secret des secrets, texte arabe de la fin du 10e siècle, faussement attribué à Aristote, donne
des conseils de diététique, dont un régime par saison. Traduit en latin vers 1230, il influença
la forme des premiers Regimen sanitatis européens, et en particulier le Régime du corps
d'Aldebrandin de Sienne (chapitre sur la physiognomonie).
Le secret des secrets
5.3.En Europe chrétienne médiévale
Le savoir des médecins orientaux a été traduit en latin par des traducteurs comme Constantin
l'Africain (1015-1087) ou Gérard de Crémone (1114-1187). L'un des livres de diététique les
plus célèbres qui a été transmis à l'Occident chrétien est le Taqwim as-sihha (table des
matières de la santé) d'Ibn Butlan (médecin chrétien formé à Bagdad et mort vers 1068). Ce
manuscrit a été traduit en latin sous le nom de Tacuinum sanitatis, à la cour de Sicile à
l'époque de Manfred, fils de l'empereur Frédéric II Hohenstaufen (qui a réorganisé
l'enseignement de la médecine à l'école de Salerne).
Les médecins chrétiens ont repris à leur tour et développé le savoir diététique d'Hippocrate,
Galien et de leurs héritiers arabes, juifs ou perses. L'école de Salerne s'est chargée de
vulgariser et diffuser ces connaissances dans tout l'Occident chrétien via son livre La
médecine selon le régime sanitaire de l'école de Salerne (1060 : Flos medicinæ vel regimen
sanitatis Salernitanum).
De nombreux livres de diététique appelés Régime de santé (Regimen sanitatis) s'appuient sur
les textes de l'école de Salerne, les commentent ou les développent.
Par exemple, le médecin catalan Arnaud de Villeneuve (ou Arno de Vilanova, 1235-1311)
parle latin, arabe et hébreux. Il a enseigné à l'université de Montpellier et a soigné des papes
et des rois. Il s'est réfugié à la fin de sa vie à la cour de Frédéric II en Sicile pour échapper
aux accusations d'hérésie de l'Eglise. Il a écrit, en latin, plusieurs Regimen sanitatis : des
régimes de santé qui commentent les prescriptions de l'école de Salerne. Son œuvre est
encore reprise et commentée au début du 17e siècle, dans des livres de diététique comme le
Thrésor de santé.
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