Comment les banques européennes commerciales appréhendent elles le MDP, dans un
contexte d’investissement ?
« Tous discutent mais aucune action concrète », voici comment beaucoup de développeurs de
projets perçoivent l’implication des banques européennes dans le MDP.
Pourtant, les banques européennes commerciales ont un intérêt à soutenir le Protocole de
Kyoto (Mécanisme de Développement Propre, Mise en Œuvre Conjointe, Permis d’Emissions
Négociables). Les changements climatiques ont des conséquences directes pour leurs clients
dans des secteurs clés (agriculture, forêt, industrie, énergie, assurance) et sur des
investissements financiers. Les impacts principaux du changement climatique sur le secteur
bancaire sont résumés dans le Tableau A.
Daniel Dijk, directeur des marchés de l’énergie durable et de l’environnement à la Rabobank
reconnaît ces impacts, « le changement climatique affecte les marges d’investissement de nos
clients et par conséquent, Rabobank travaille pour répondre aux nouveaux besoins de nos
clients qui doivent se conformer à de nouvelles réglementations sur le changement
climatique ».
Certaines banques, comme la Rabobank, offrent différents nouveaux services, dont l’achat de
Réductions d’Emissions Certifiées, notamment pour le gouvernement hollandais. De plus, une
étude entreprise par le Carbon Disclosure Project (février 2003) montre que de nombreuses
banques, comme la Rabobank, ont conscience de l’impact du changement climatique sur leurs
clients. Cependant, très peu développent de nouveaux services. Parmi elles, seule Rabobank et
ING sont actuellement entrain de développer des services de soutien à des investissements
dans des projets MDP. Si les banques européennes ont conscience de l’intérêt pour elles de
s’impliquer davantage, pourquoi sont elles aussi peu nombreuses à offrir des services dans le
cadre du MDP ?
M. Armin Sandhovel, de la banque Dresdner, explique « alors que la banque Dresdner
développe de nouveaux services pour ses clients participant au marché européen d’échange
d’émissions, les services d’appui au MDP relèvent de la catégorie ‘financement de projet’,
catégorie qui n’est pas considérée comme stratégique ». M. Sandhovel indique que la
principale raison pour laquelle les banques hésitent à soutenir des projets basés sur les
mécanismes de Kyoto, résulte de l’applicabilité du critère de l’additionalité financière,
imposée par la Convention Cadre sur les Changements Climatiques. En effet, cette condition
requiert que les banques investissent dans des projets qui ne sont pas rentables sans les crédits
carbone. De plus, l’absence d’un cadre glementaire défini pour les projets réalisés dans le
cadre de ces mécanismes crée un risque élevé, ce qui décourage les banques à développer de
nouveaux services de soutien aux projets MDP ou MOC.
Cette incertitude autour du cadre réglementaire du MDP et de la MOC, conduit certains
gouvernements européens à développer des initiatives d’achat de crédits carbone afin
d’encourager à investir dans ces mécanismes. Adrian Korthuis de Senter aux Pays Bas, a
expliqué que le gouvernement des Pays Bas émet des appels d’offre via SENTER, pour
investir dans des projets MDP et MOC. Il veut, par exemple, transférer aux investisseurs ses
compétences et son savoir-faire de ces mécanismes. Les gouvernements finlandais et suédois
ont même lancé des initiatives complémentaires pour améliorer la compréhension du MDP et
de la MOC.
Le Kommunalkredit autrichien et le KKW allemand sont entrain de créer des structures
d’achat selon le modèle du PCF de la Banque Mondiale. « Les banques commerciales ont des
horizons à court terme et peu de banques peuvent investir dans le développement de nouveaux
services pour un marché carbone dont la taille et les règles sont encore à définir » note
Bernhard Zander, Vice Président, en charge du Projet de Crédits Carbone de KFW. Par
conséquent, M. Zander s’attend à ce que les banques commerciales européennes deviennent
plus actives sur le marché carbone, quand des plans nationaux d’allocation seront dessinés,
vers la fin 2004 et quand les règles relatives au MDP et à la MOC seront clarifiées lors des
deux prochaines Conférences des Parties.
Pourtant, jusqu’à ce que le marché potentiel ou le cadre réglementaire soient clarifiés, les
principaux acheteurs des Réductions d’Emissions Certifiées, seront probablement, avec un
une aide gouvernementale, des fonds spécialisés dans l’achat des crédits carbone. Cependant,
il y a toujours un intérêt à être un nouvel entrant sur un marché, et certaines banques entreront
définitivement plus tôt que d’autres. Daniel Dijk de la Rabobank remarque que « depuis que
le changement climatique est un problème concret, il y a une demande de solutions concrètes.
Des solutions concrètes ont besoin d’argent palpable et comme banque, la Rabobank sera là
l’argent circule ». Rabobank et d’autres organismes pionniers sont déjà dans l’aventure
avec succès, d’autres banques seront rapides à suivre le marché et développeront leurs propres
services d’appui aux investissements dans des projets MDP.
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