RELAXE
Un procès assez retentissant vient de se terminer à Paris pour juger l’affaire dite de l’hormone de
croissance. Les juges ont prononcé la relaxe ; les prévenus ont été relaxés. Cette dernière phrase
semble relativement courante, des prévenus relaxés nous sont familiers. En revanche, le nom abstrait
« relaxe » a un aspect plus rare, plus technique, moins immédiatement compréhensible.
Comme la décision était très attendue, c’est sur ce mot que plusieurs quotidiens ont fait leur une :
« Six relaxes », titre Libération. Ceci signifie simplement que les poursuites ont été abandonnées
contre six personnes qui étaient mises en examen dans cette affaire. Les charges retenues contre
elles n’ont pas semblé suffisantes pour qu’on considère qu’elles étaient coupables.
Est-ce que cela veut dire qu’on les déclare innocentes ? Disons, en tout cas, qu’on ne les déclare pas
coupables. Les preuves ne sont pas là. Il faut bien noter que les personnes mises en examen, celles
qu’on appelait auparavant des inculpés, ont été déférées devant le Tribunal correctionnel. Les
prévenus sont soupçonnés d’avoir commis des délits. Si c’était des crimes, l’affaire serait différente :
on serait à la Cour d’assises, et on ne parlerait pas de relaxe, mais d’acquittement. Les mots de la
justice sont différents selon les degrés de la hiérarchie judiciaire où l'on se place.
L’origine du mot se devine aisément. « Relaxer » est un verbe de la même famille que « relâcher ».
Est-ce que cela signifie qu’on relâche les prévenus ? Techniquement, c’est vrai dans le cas où il a pu y
avoir détention provisoire, où les prévenus n’ont pas comparu libres.
Mais le sens n’est pas exactement le même. Il ne s’agit pas de les libérer, mais d’abandonner les
poursuites judiciaires. Toutefois, le verbe « relaxer » a pour premiers sens détendre, desserrer.
L’étreinte de la justice se desserre donc autour des accusés ; on les rend à leur liberté.
Le verbe « relaxer » a bien d’autres sens, et surtout sous sa forme pronominale « se relaxer ». Il a une
silhouette assez moderne, au contraire de son emploi juridique qui, lui, sonne justement comme
appartenant à une langue vieille de plusieurs siècles. « Se relaxer » signifie se détendre,
physiquement bien sûr, mais plus encore psychologiquement : se déprendre de ses préoccupations,
de ses soucis, retrouver une insouciance, une légèreté.
Et pour se relaxer, il existe même des techniques dites de relaxation. Le mot existe évidemment
depuis longtemps, mais on l’a surtout employé depuis les années 60, et il est typique d’une certaine
américanisation de l’Europe qui nous est arrivée durant cette période.
Cet engouement a même laissé une trace dans la langue : l’adjectif « relax », qui pour le coup est bien
un emprunt à l’anglais, et qu’on prononce souvent à l’américaine (« rilax »), même si ce n’est pas le
cas de façon systématique.
Mais pour revenir à un goût du jeu de mots bien français (même si nous le partageons très largement
avec les anglophones), on met souvent et familièrement le mot en rapport avec un prénom qui ne vient
là que pour la rime : « relax Max ! », comme on dit « cool Raoul ! ».
Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique.
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