Spécialité SES Evaluation n°1, introduction.
Exercice 1 : Un objet introuvable?
Quand le profane ou le débutant dans une discipline quelconque cherche à définir l'objet de cette dernière, son réflexe naturel consiste à dresser la liste des sujets dont elle
s'occupe. […]
Aujourd'hui cependant, tout le monde s'accorde, économistes et philosophes, pour admettre que l'on ne peut définir l'objet de l'analyse économique par un sujet ou une liste
de sujets concrets. En effet, les phénomènes strictement économiques n'existent pas. […]
Une définition simple.
[…] L'essentiel du contenu actuel de l'analyse économique correspond assez bien à la définition très simple qui ouvre les trois quarts des manuels d'économie : L'économie
étudie la façon dont les individus ou les sociétés utilisent les ressources rares en vue de satisfaire au mieux eux leurs besoins.
Cette définition met en avant deux aspects fondamentaux :
1) L'économie constitue une façon particulière de considérer les comportements humains : les individus ou les groupes d'individus agissent parce qu'ils ont des besoins à
satisfaire et que cela ne va pas de soi dans un univers où les moyens disponibles sont limités.
2) L'analyse est à la fois microéconomique (étude des comportements individuels) et macroéconomique (étude des phénomènes de société).
Ainsi définie, l'économie n'est pas enfermée dans un domaine réservé. De même que les autres disciplines (sociologie et sciences politiques notamment) sont également
concernées par les sujets qu'étudie l'économiste, l'économie peut aborder des phénomènes que le sens commun ne reconnaît pas comme économiques : la religion, la famille,
la délinquance, la politique, etc. En effet, tous les comportements humains peuvent être examinés d'un point de vue économique, c'est-à-dire comme la mise en œuvre
raisonnée de moyens par des individus qui cherchent à atteindre leurs objectifs. […] Jacques Généreux. Introduction à l’économie. Editions du seuil, 1992.
Q1 : Expliquez, à l’aide de vos connaissances, pourquoi l'auteur pense que « les phénomènes strictement économiques n'existent pas ».
Q2 : En quoi la définition de l'économie, dont s'inspire largement l'auteur est-elle libérale ?
Q3 : En quoi élargit-elle considérablement le champ de l'économie ?
Exercice 2 :
TEXTE 1 : Par conséquent, puisque chaque individu tâche, le plus qu'il peut :
1° d'employer son capital à faire valoir l'industrie nationale, et
2° de diriger cette industrie de manière à lui faire produire la plus grande valeur possible, chaque individu travaille nécessairement à rendre aussi grand que possible le revenu
annuel de la société.
A la vérité, son intention en général n'est pas en cela de servir l'intérêt public, et il ne sait même pas jusqu'à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de
l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière que son
produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui
n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant
que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. […]
Quant à la question de savoir quelle est l'espèce d'industrie nationale que son capital peut mettre en œuvre, et de laquelle le produit promet de valoir davantage, il est évident
que chaque individu, dans sa position particulière, est beaucoup mieux à même d'en juger qu'aucun homme d'État ou législateur ne pourra le faire pour lui. L'homme d'État
qui chercherait à diriger les particuliers dans la route qu'ils ont à tenir pour l'emploi de leurs capitaux, non seulement s'embarrasserait du soin le plus inutile, mais encore il
s'arrogerait une autorité qu'il ne serait pas sage de confier, je ne dis pas à un individu, mais à un conseil ou à un sénat, quel qu'il pût être; autorité qui ne pourrait jamais être
plus dangereusement placée que dans les mains de l'homme assez insensé et assez présomptueux pour se croire capable de l'exercer.
Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations : les grands thèmes.
TEXTE 2 : - Comment relancer les économies alors que la plupart des gouvernements ont accumulé d'énormes déficits budgétaires ?
- D'abord il faut rendre les systèmes fiscaux efficaces et progressifs. La progressivité est importante car, dans tous nos pays, les riches ont le choix de dépenser ou non,
d'investir ou de ne pas investir. Les pauvres n'ont pas ce choix. Un système fiscal progressif garantit donc un flux de demande globale. Il n'est pas seulement juste, mais aussi
fonctionnel et utile à l'économie.
Ensuite, lorsque le chômage devient massif, il est économiquement plus rationnel de créer de la richesse en donnant du travail aux gens, que d'en perdre en les laissant
chômer. Le déficit est devenu un argument conservateur pour refuser l'intervention de l'État. Aux États-Unis, la droite abhorre le déficit, car à chaque fois qu'on propose de
faire quelque chose pour améliorer la protection sociale, la santé, ou lutter contre le chômage, les conservateurs le refusent au nom du déficit.
- Vous soutenez en quelque sorte que la justice sociale n'est pas seulement juste mais aussi efficace ?
Elle n'est pas seulement juste, elle remplit une vraie fonction économique.
- Vaut-il mieux donner des emplois aux chômeurs ou leur garantir un certain niveau de protection sociale ?
- Je ne vois pas de conflit entre les deux. Dans les années 30, les États-Unis ont massivement amélioré la protection sociale ; en même temps, ils ont lutté contre le chômage,
avec un succès certes inégal, mais les deux vont de pair.
- En France, actuellement, on oppose l'emploi et le maintien d'un salaire minimum, notamment pour les jeunes...
- C'est la raison pour laquelle les étudiants sont dans la rue. Je ne crois pas du tout qu'en réduisant les salaires on luttera contre le chômage. Au contraire. Si vous baissez les
salaires, vous diminuez le pouvoir d'achat et donc in fine vous augmentez le chômage ! Les gens qui veulent baisser les salaires s'appuient sur une théorie économique qui
fleurissait avec Ricardo au XIXe siècle, et qui a été depuis longtemps abandonnée. Les tenants de cette idée veulent, en fait, économiser de l'argent ; leur argument est un
habillage superficiel de la traditionnelle exploitation des salariés, y compris des plus jeunes. Je soutiens fermement le salaire minimum. Sans aucun compromis possible.
J. K. Galbraith. Entretien avec G. Herzlich et V. Maurus. Le Monde, 24 mars 1994.
Après avoir lu ces deux textes, vous répondrez aux questions suivantes pour chacun d'eux.
Q1 : S'agit-il d'un texte normatif ou positif ? Justifiez.
Normatif : qui cherche à imposer des normes, selon un système de valeurs auquel il faut souscrire.
Positif : caractère de ce qui est établi dans les faits ou par l'expérience.
Q2 : Peut-on déceler dans ce texte des éléments d'un des grands paradigmes évoqués en cours ?
Q3 : Quel est l'objectif principal de l'auteur dans ce texte ?
Q4 : Peut-on rattacher le texte à un des grands courants étudiés ? Si oui lequel, sinon pourquoi ?
Exercice 3 :
Après Norbert Élias, on ne peut plus aborder [le] débat [qui oppose la liberté au déterminisme) en termes de « tout ou rien » : « il y a un tissu d'interdépendances à l'intérieur
duquel l'individu trouve une marge de choix individuel et qui en même temps impose des limites à sa liberté de choix. » [...] Mais les interdépendances dans lesquelles sont pris
les individus n'agissent pas, pour Norbert Élias, uniquement comme des contraintes extérieures. Elles participent aussi à la formation des structures intérieures de leur
personnalité. L'individu va ainsi devoir s'insérer tout au long de sa vie dans nombre de réseaux de relations qui lui préexistent (famille, groupe social, nation, etc.) qui sont
souvent le produit d'une longue histoire et qui vont contribuer à modeler ses formes de sensibilité et de pensée. C'est là qu'intervient la notion d'habitus, vieux terme d'origine
latine. L’habitus est pour Norbert Élias une « empreinte » sociale sur la personnalité, un produit des différentes configurations au sein desquelles un individu agit.
PHILIPPE CORCUFF, Les Nouvelles Sociologies, Nathan, 1995.
Q1 : A partir de vos connaissances, présentez l’opposition entre individualisme méthodologique et holisme.
Q2 : Expliquez, sans recopier le document, en quoi l’approche de Norbert Elias permet de dépasser cette opposition.