LC0020X
Philologie latine
Syntaxe de la phrase complexe
Olga Spevak
Ce cours de philologie latine fait partie de l’UE LC0020X et renoue avec le cours LC0016X.
Rappel : la philologie latine comporte deux parties : morphologie et syntaxe.
LES COMPLÉTIVES
1. INTRODUCTION
1.1. La typologie des subordonnées
On appelle complétives les propositions subordonnées qui fonctionnent comme un sujet ou un
objet du verbe régisseur. Elles présentent une grande variété formelle elles peuvent être réalisées
par une subordonnée conjonctive, par un infinitif ou par un participe. Les complétives sont
commutables avec id.
Comparons :
(1) Pultando confregi fores.
« À force de frapper, j’ai défoncé la porte. »
(2) Cethegus recitatis litteris repente conticuit.
« Cetego, une fois la lettre lue, s’est tu. »
(3) Exsilium ibi esse putat, ubi uirtuti non sit locus.
« Il pense que l’exile est là, où il n’y a pas de place pour la vertu. »
(4) Videtur tempus esse ut eamus ad forum.
« Il semble qu’il est temps d’aller au forum. »
La première phrase comporte un circonstant pultando exprimant l’instrument (« comment ? »). La
deuxième contient l’ablatif absolu recitatis litteris qui exprime une circonstance temporelle
quand ? »), postérieure au procès principal. En (3), une complétive infinitive (exilium esse)
dépend du verbe puto ; la subordonnée en ubi en (3) a une valeur relative où ? »). Enfin, en (4),
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tempus esse est une complétive sujet de uidetur et ut eamus une complétive de tempus est ; tempus
est (4).
Si l’on analyse les positions des verbes, confringo est un verbe bivalent, dont l’objet est
normalement exprimé par un substantif ici, nous avons fores. Le verbe conticeo est monovalent et
ne cessite pas d’objet direct. Le verbe puto est bivalent et la position du deuxième actant est
occupée par un accusatif + infinitif. Le verbe au passif uidetur nécessite l’actant 1 sujet, cette
position est comblée par la proposition infinitive tempus esse ; tempus est requiert également
l’actant 1 – cette position est occupée par ut eamus, une complétive conjonctive en ut.
Dans les deux premiers cas, pultando et recitatis litteris sont des circonstants omissibles ; les
complétives, en revanche, représentent des éléments obligatoires qui ne peuvent pas être supprimés
les phrases seraient incomplètes :
(1) Confregi fores.
(2) Cethegus conticuit.
(3) *Putat. mais id putat
(4) *Videtur. mais id uidetur
1.2. Les complétives vs. les finales
Il est important de faire la distinction entre les complétives (dites parfois « finales »),
fonctionnant comme des actant, et les subordonnées finales, qui fonctionnent comme des
circonstants.
Subordonnée complétive
(a) Quod me ut scribam aliquid hortaris.
« Le fait que tu m’exhortes d’écrire quelque chose. »
Moneo ne faciatis « je vous engage de ne pas le faire. »
Subordonnée finale
(b) Maiores nostri ab aratro adduxerunt Cincinnatum illum ut dictator esset.
« Nos ancêtres enlevèrent à sa charrue le fameux Cincinnatus pour en faire un dictateur. »
Afin de bien distinguer ces types différents, nous pouvons nous servir de critères suivants :
- L’omissibili
Les subordonnées complétives ne peuvent pas être supprimées, alors que les finales ne sont pas
indispensables à la construction syntaxique de la phrase.
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- L’interrogation en cur
Les finales admettent une interrogation à l’aide de cur ?
Tene me, obsecro. Cur ? Ne cadam. (Plaut., Mil. 1260)
En revanche à une complétive, on peut s’interroger à l’aide de quid ?
- Les corrélatifs
Les circonstancielles admettent des corrélatifs (idcirco…), les actants non.
- L’identité référentielle :
Patri persuasi, ut aes alienum filii dissolueret.
« J’ai persuadé au père de payer les dettes du fils. »
Le bénéficiaire (patri) a le me référent que l’agent de dissolueret. Les verbes trivalents
nécessitent cette identité, mais elle n’est pas requise dans le cas des finales.
2. LE CLASSEMENT DES COMPLÉTIVES
Du point de vue formel, les complétives se répartissent en trois grandes catégories :
1° Propositions conjonctives :
Orgetorix ciuitati persuasit ut de finibus suis exirent.
« Orgetorix persuada sa cité de quitter son pays. »
2° Propositions infinitives :
Sentimus calere ignem. « Nous percevons que le feu est chaud. »
3° Interrogations indirectes :
Scribe aliquando ad nos quid agas.
« Écris-nous un jour ou l’autre pour nous dire comment tu vas. »
Chacune de ces catégories dispose de plusieurs moyens syntaxiques : les complétives
conjonctives peuvent être introduites par quod, ut/ne, quin, les propositions infinitives comprennent
la construction de l’accusatif + infinitif et celle du nominatif + infinitif. Les interrogations indirectes
ont des mots introducteurs variés.
La catégorie des complétives est donc assez hétérogène. En conséquence, plusieurs classement
sont possibles : généralement, on adopte un classement selon le groupe sémantique du verbe, ou un
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classement en fonction du type de la complétive. En outre, un autre classement est possible en
fonction de la valence du verbe.
2.1. Le classement en fonction des verbes régisseurs
Dans les grammaires, les complétives sont souvent classées selon un critère sémantique : en
fonction du sens des verbes régisseurs car des groupes relativement homogènes se constituent
autour des verbes de déclaration et de perception, verbes de volonté et d’effort, verbes de crainte,
verbes de sentiment, verbes d’empêchement, verbes d’évènement et verbes impersonnels.
2.1.1. Verbes de déclaration (dicendi) et de perception (sentiendi)
Les verbes de déclaration (dico, respondeo, loquor) et de perception (puto, cogito) peuvent se
construire avec l’accusatif + infinitif, avec une interrogation indirecte, avec une subordonnée en
ut/ne :
Illud etiam debes cogitare, non te tibi soli gloriam quaerere.
« Tu dois aussi te dire que tu ne recherches pas la gloire seulement pour toi. »
Cum iis sic loquitur se consulem esse.
« Il leur dit qu’il était consul. »
Deliberantibus Pythia respondit ut moenibus ligneis se munirent.
« A ceux qui la consultaient, la Pythie répondit de se protéger derrière des murs en bois. »
La complétive peut être annoncée par un illud ou sic cataphoriques.
Le verbe dubito lorsqu’il est nié ou employé dans une interrogation se construit avec quin :
Non dubitat quin breui sit Troia peritura.
« Il ne doute pas que Troie périsse bientôt. »
2.1.2. Les interrogations indirectes
L’interrogation indirecte prend la place de l’accusatif + infinitif dès qu’un terme interrogatif
apparaît. Elle fonctionne comme complément d’un verbe déclaratif ou perceptif et comporte un
subjonctif.
Nunc fac ut sciam quo die te uisuri simus.
« Maintenant fais-moi savoir quel jour nous te verrons.
L’interrogation indirecte a donc la même fonction syntaxique que l’accusatif + infinitif. Il est
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important de la distinguer de la proposition relative :
Vrbem Syracusas maximam esse saepe audistis.
« Vous avez souvent entendu dire que la ville de Syracuse est très grande. »
Quemadmodum captae sint Syracusae saepe audiuistis.
« Vous avez souvent entendu dire comment Syracuse avait été prise. »
Quaerit ex solo ea quae in conuentu dixerat.
« Seul à seul, il l’interroge sur ce qu’il avait dit au conseil. »
Dans le premier cas, audistis git une construction de l’accusatif + infinitif ; dans le deuxième, une
interrogation indirecte en quemadmodum. En revanche, l’objet du verbe quaerit est exprimé par le
pronom ea dont dépend une relative en quae.
De même,
Hoc ex te, quid sentias, quaerimus. « Nous te demandons ce que tu penses ».
Quibus in locis sit Caesar ex captiuis quaerunt.
« Ils demandent aux prisonniers à quel endroit se trouve César ».
Quibus positis intellegis quid sequatur « cela posé, vous devinez la conséquence »
mais : Nosti quae sequuntur « tu connais la suite » (ne suscite pas d’attente)
Outre les différences formelles (subjonctif, forme du pronom), les interrogatives diffèrent des
relatives en ce qu’elles sont liées à une idée d’attente : les relatives ne suscitent pas d’attente.
2.1.3. Les verbes de volonté et d’effort (uerba uoluntatis)
Les verbes de volonté et d’effort (uolo, hortor, imperor, iubeo, etc.) se construisent avec une
subordonnée en ut/ne :
Illud te et oro et hortor ut diligentissimus sis.
« Je te prie et je te supplie d’être très attentif. »
Legatis imperat uti naues aedificandas curarent.
« Il donne aux légats l’ordre de faire construire des bateaux. »
Or, le verbe iubeo se construit avec l’accusatif + infinitif :
Caesar ex castris exercitum educi iubet.
« César fait sortir la cavalerie du camp. »
Le verbe uolo se rencontre parfois avec une subordonnée subjonctive juxtaposée, sans mot
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