SACHSENHAUSEN 1936-1945 Un camp de concentration nazi, un centre d’expérimentations et de formation des SS au service de Himmler. SACHSENHAUSEN, un camp nazi pour les opposants de BERLIN ~200 000 déportés à Sachsenhausen ~50 000 morts au camp Des milliers de déportés furent transférés vers d’autres camps sur ordre de HIMMLER et au service des industriels Des milliers de déportés, à bout de force, furent transférés vers les camps mouroirs ~33 000 déportés furent évacués du camp sur les routes de la mort le 21 avril 1945. 50% de survivants aux marches furent libérés entre le 2 et le 8 mai 1945. Près de 10 000 Français, dont un « millier » de femmes, sont passés par SACHSENHAUSEN 26 juillet 1941, premier convoi, les mineurs du Nord Pas-de-Calais. Au travers du livre « Sachso » les déportés témoignent 1er Septembre 1944, dernier convoi, le train de Loos. LA GARE D'ORANIENBURG “L'arrivée à la gare d'Oranienburg, c'est la descente aux enfers... les SS, tels des fauves, se ruent vers nous, la matraque à la main et frappent à tour de bras. Abrutis par les cris et les coups, on nous force à sauter une barrière pour nous mettre en rangs en contre-bas de la voie”. “La gare est éloignée du camp. Nous partons en colonne par cinq...La route est hérissée de gros pavés inégaux et glissants... LOS! LOS! Aufgehen! ne cessent de répéter ces brutes de SS en nous frappant à coup de bottes et de cravaches… Nous traversons un bois de pins, bordé de jolis villas SS... ” “ De grands oriflammes rouges à croix gammée claquent dans le vent matinal... Bientôt, un mur de ciment s'allonge sur notre côté, surmonté de fils séparés par des isolateurs de porcelaine. Un ronronnement très doux, presque imperceptible en émane.” “C'est la mort qui roucoule, une mort violente, propre, préférable à tant d'autres dans ce maudit camp de Sachsenhausen, dont l'entrée apparaît au bout de la longue avenue bétonnée que nous empruntons.…” Les hommes franchissent le portail monumental dominé par le mirador central et barré d'une inscription en fer forgé .... “ARBEIT MACHT FREI ; le travail rend libre“. La tour A symbolise le pouvoir absolu et la soumission à l’arbitraire de la SS Au premier étage, se situaient les bureaux des SS responsables de la gestion du camp et de la répartition des déportés dans les commandos de travail. Au dernier étage, l'avancée vitrée permettait à la mitrailleuse de tirer sur tout le périmètre du camp. Dans la tour A se trouvaient aussi le transformateur et les tableaux électriques du camp, servant à l' alimentation des barbelés électrifiés et des projecteurs. L’arrivée au camp Autour de la place, les pignons des baraquements sont ornées de lettres gothiques: “il y a un chemin vers la liberté, ses bornes kilométriques s'appellent: obéissance, assiduité, honnêteté, ordre, propreté, sobriété, franchise, sens du sacrifice et amour de la patrie.” De l'interminable attente sous le vent, toujours froid, naît une sourde angoisse... Les détenus sont comptés, recomptés indéfiniment, sans cesse harcelés par des individus, eux aussi, habillés de la tenue rayée de bagnard . “Des murs flanqués de miradors d'où les sentinelles nous surveillent le doigt sur la gachette, des barbelés électriques, des chevaux de frise, des panneaux agrémentés de tête de mort entourent le camp. ” Pourquoi quelques cent hommes décharnés, habillés aussi de rayé, un sac sur le dos, marchent-ils en chantant autour de la place d'appel? Squelettiques, ployant sous leur charge, brutalisés par des gardiens excités, ils portent aux pieds de magnifiques chaussures neuves. Qui, dans les rangs, pourrait comprendre le sens de ce supplice ? C' est le bagne dans le bagne…Les déportés marchent sur une piste qui fait le tour de la place d'appel. Ses 680 m sont fractionnés en sections de divers revêtements: béton, terre labourée, mâchefer, terre battue, pavés, caillasse, sable, gravier. BUANDERIE ET BLOCK 56, la déshumanisation “nus comme des vers... ils affrontent le coiffeur amateur. Plus un cheveu, plus un poil ne subsiste... La transformation est telle que parfois les camarades ne se reconnaissent plus.” Cette fois, c'en est fait de l'homme; le « Häftlinge » est né. Voilà comment on fabrique un bagnard: on le déshabille, on le tond, on le douche , on le désinfecte, on l'affuble d'une tenue rayée, frappée d'un numéro matricule; c'est terminé. Survivre jour après jour à Sachsenhausen… Il y a 68 blocks où vivent les déportés... Le rythme journalier est marqué par le réveil, les appels, le travail, le retour au block, le tout sur une trame d'angoisse et de sourde terreur, sur fond de cris, d'ordres, de contre-ordres et d'aboiements dominant plaintes et gémissements et faisant chavirer la raison. Prévu pour 130 prisonniers, ils étaient près de 800 en octobre 1944 “Ce block est terrible et nous y vivons comme des bêtes... Le soir, au coucher, et surtout le matin au réveil, il faut, pour se dégager, marcher les uns sur les autres, au milieu des cris et des injures... ” Les blocks comprennent deux ailes symétriques avec chacune un dortoir, un réfectoire et au centre des toilettes et des lavabos communs. “Vite vite, debout, fais ton lit au carré, sans un pli. Vite, vite torse nu... précipite toi au lavabo...vite, vite essaie de faire une vague toilette la tête sous le robinet... à la sortie, on t'attend, courbe l'échine sous les coups qui pleuvent...vite, vite remets tes loques, enfile tes claquettes .” A droite de l'allée centrale, il y a la cuisine des détenus La ration de pain journalière oscillait autour de 325 g. En automne 44, le morceau de pain est ramené à 175 g. Le casse-croûte des kommandos de travail a disparu depuis longtemps... Les affres de la faim parfois abolissent toute conscience. “Devant la difficulté à cuire les farines et légumes secs, reçus dans les colis, nous les cuisons collectivement, à la cuisine, le dimanche...sous la tolérance du SS acheté par du chocolat ... ...Nous pouvons ainsi donner à chaque block un supplément de soupe bien épaisse qui prend aussitôt le nom de soupe des français.” Chaque matin à l'aube, chaque soir après 12 heures de travail, sur la place d'appel, les déportés sont comptés, recomptés .... Quand le matin, à l’aube, tu te tiens pour l’appel, Et que tu regardes, fasciné, encore et toujours dans sa direction, Tu vois des étincelles danser, incandescentes et lumineuses, Alors, de nouveau, des amis s’en sont allés. Combien d’étincelles ai-je ainsi déjà vues s’envoler, Et retomber en cendres dans la mousse brune, Combien de vies braves et courageuses ! Ne suis-je pas moi-même condamné au même sort ?“ Poème du lieutenant Alexander Stoljarow A gauche de l'allée centrale, il y a la lingerie et les douches des détenus En général, les séances de désinfection corporelle et vestimentaire se passent la nuit au baraquement qui abrite les douches et l'étuve. Elles sont attendues et redoutées à la fois. Production et extermination : des journées de travail épuisantes “C'est très dur et pénible surtout quand on est sous-alimenté et qu'on ne mange qu'un peu de rutabaga et deux toutes petites tranches de pain noir par jour.” SACHSENHAUSEN sous-traite ses déportés esclaves, hommes (H) ou femmes (F) dans des dizaines d'entreprises, appelés “kommandos” ou camps annexes, lorsque les déportés dorment sur place. Les triangles rouges indiquent les kommandos et camps annexes autour de Berlin. Un esclavage moderne au profit des industries allemandes : ARADO (1200F), ARGUS, AUER (1800F), AEG, BELZIG, BORZIG, BRABAG (1100H), DAIMLER-BENZ (1100H), DAW (1660H), DEMAG (Falkensee 2500H), DYNAMIT (500F), HEINKEL (7000H), HENSCHEL, IG-FARBEN (800H), KAISER (300H), IKARIA, KALTERBORN & STENVERS, KRUPP, MESSMER (300H), PERTRIX,PHRIX (Kustrin), SIEMENS, SILVA, SPANDAU (1100F), STEINWERTZ & SEIFERT, et à BERLIN [Hackenfelde, Lichternrade, Lichterfelde, Marienfelde,] etc. Un esclavage au profit des SS: Bad Saarow, Brandenburg, Dammsmuhle, Doberitz, Drogen, Furstenwalde, Glau-Trebin, GrossRosen, Hohenlynchen, Lieberose, Niemesk, Prettin, Trebnitz , Wewelsburg etc. Un esclavage au profit de Albert Speer, architecte privé de Hitler: kommandos Speer (2000H), Klinker (2200H) puis ministre de la guerre pour fabriquer des avions de guerre, des tanks [Jamlitz, Kiev, Kolpin, Lubben, Neuengamme etc. ] et surtout les V1 et V2 [Penemund] Et tous les kommandos de travail autour du camp : Ballonbau (190h), Baukommando (400h), dressage des chiens (60h), élevage de lapins, jardins SS, KVA (1400h), Loritz (1000h) Shuhfabrik (800h), services centraux (500h), service de renseignements (360h), Wald-kommandos [atelier des armes (760h), dépôt de camions (700h), récupération des cables (500h) etc.] et divers autres kommandos regroupant 4700h (bekleidungswerk, tonrohrlager…) Sans oublier toutes les corvées dans le camp ..... Entre médecins et bourreaux vivre ou mourir aux reviers A gauche de la porte A, il y a 5 reviers faisant fonction d'infirmerie et d'hopital Promiscuité, manque d'hygiène, contagion mais aussi sous- alimentation, absence de soins ou thérapeutiques dérisoires concourrent à la tragique sélection du revier. On assassine à coup de benzine au revier V. “Durant mes trois semaines au revier, je vois le chef de block pratiquer des injections de produits toxiques à des camarades français.” Le Dr Maurice Gallouen assure les opérations de chirurgie en collaboration avec le Dr Emile-Louis Couderc... Les malades l'appellent Papa Maurice, tant sa bonté est proverbiale... Des recherches se déroulent aux reviers: - déterminer la plus petite dose de cyanure foudroyant un homme en 15 secondes maximum - expérimenter un gaz liquéfié qui, au contact de la peau, déclenche des infections microbiennes - trouver un médicament contre la jaunisse... Derrière les reviers, il y a la pathologie C'est à la pathologie que se succèdent des équipes de médecins SS qui ont chacune des buts de recherches spécifiques. C'est de là, que partent les squelettes, les crânes et autres pièces anatomiques, commandées par les universités d'Allemagne. «Vous entrez par la porte, vous sortirez par la cheminée… » 1938-1942: le petit crématoire 1941: extermination de plus de 10 000 prisonniers soviétiques Kaindl proposa à l'IKL (inspectiondes camps de concentrations), l'exécution des Soviétiques d'une balle dans la nuque. Le système fut installé dans un bâtiment de l'Industrie-hof. Quatre crématoires mobiles furent amenés pour brûler les cadavres. 1942: Station Z comme la dernière lettre de l’alphabet… Plus jamais ça La plupart des photos anciennes (pages 6, 8, 9, 12, 13, 14, 20, 27, 29, 32, 35, 41, 42) et les dessins (pages 15, 25, 28, 33, 34, 36, 39) sont issus des archives du Mémorial Musée de Sachsenhausen. Le dessin, page 1, a été réalisé par René Rhein, déporté au camp de Sachsenhausen le 28 avril 1943.