Franck NEVEU
Professeur de Linguistique française
à l'Université de Paris-Sorbonne (UFR Langue française)
Directeur de l'Institut de Linguistique Française
(CNRS, FR 2393)
(1) Gary-Prieur, M.-N., 1985 :
De la grammaire à la linguistique - L’étude de la phrase
,
Paris, Armand Colin, p. 99, chap. 6, “Les fonctions”, 2.6., “Les fonctions marginales” :
Certaines grammaires font état d’autres fonctions, en signalant généralement qu’elles ne
sont pas exactement sur le même plan que les précédentes : l’apposition, l’apostrophe.
Comme l’indique Wagner-Pinchon (p. 25), le mot apposition “ne dénote pas une fonction à
proprement parler, mais un cas particulier de la construction que nous appelons mise en position
détachée”. Par exemple, dans (a) : (a) Pierre, un copain de ma soeur, doit arriver ce soir, le groupe
en apposition (ici, le SN souligné, mais cela peut être un groupe adjectival ou une relative) a la
même fonction dans la phrase que le terme auquel il est apposé (ici Pierre, sujet).
L’apposition est donc un simple “ajout” à la structure de la phrase, isolé par l’intonation.
Il en est de même pour l’apostrophe, qui a une intonation particulière, et qui est séparée du
reste de la phrase. Un peu comme l’interjection (apostrophe et interjection sont d’ailleurs
rassemblées dans le même paragraphe de la grammaire Bonnard, p. 36), l’apostrophe renvoie
directement à l’acte d’énonciation : (b) Vous, là-bas, taisez-vous ! (c) Pierre, veux-tu rentrer ?
La tradition grammaticale n’est parfois tentée d’en faire une fonction que par référence au
vocatif de la grammaire latine.
Il ne faut donc pas prendre au pied de la lettre la grammaire Wagner-Pinchon quand on y
lit : “Une longue tradition impose d’utiliser certaines étiquettes pour dénommer les fonctions”
(p. 23). Cette tradition n’est vraiment longue que pour le sujet; toutes les autres fonctions sont
d’apparition récente, et le terme fonction lui-même ne s’introduit dans le discours grammatical
que dans le courant du XIXe siècle avec le sens que nous lui donnons aujourd’hui.
(2) Arrivé, M., Gadet, F., Galmiche, M., 1986 :
La Grammaire d’aujourd’hui - Guide
alphabétique de linguistique française
, Paris, Flammarion, article “Apposition” :
Le terme traditionnel d’apposition recouvre une série d’emplois du nom qui, variés au niveau de
la manifestation formelle, présentent cependant, du point de vue sémantico-syntaxique, deux
traits communs : a) Entre le nom en apposition et un autre syntagme nominal il existe une
relation identique à celle qui lie l’attribut et le terme auquel il renvoie; c’est l’existence de cette
relation qui distingue l’apposition des phénomènes de juxtaposition. b) Cette relation n’est pas
établie par un verbe. On observe ces deux traits dans les types de groupements suivants : 1. Le
roi Louis XIV, le poète Chatterton, mon ami le rémouleur. 2. Un discours fleuve, un employé modèle, une
femme médecin, un style nouille. 3. La ville de Paris et celle de Lyon, le mois de janvier. 4. Le terme d’analogie
et celui d’anomalie, la vertu de charité et celle de tolérance. 5. Cette canaille de Paul, cet imbécile de gendarme,
ton colonel de mari. 6. Le préfet, un colosse, sortit de la voiture. 7. Jean, ce crétin, aura encore manqué son
train. 8. Maire de mon village, j’y passe trois jours par semaine; enfant, il eut de graves difficultés familiales.
[...]
Par analogie avec les constructions des types 2 et 3, on dit parfois de l’adjectif qu’il est
apposé dans les constructions du type quelqu’un d’intelligent, personne de beau, etc.
Par analogie avec la construction 8, on parle également d’adjectif apposé dans les cas où
l’épithète est séparée du reste de la phrase par une double pause : cet élève, paresseux, a été renvoyé
du lycée.
(3) Chiss, J.-L., Filliolet, J., Maingueneau, D., 1992 :
Linguistique française -
Communication, syntaxe, poétique
, Paris, Hachette, deuxième partie “Eléments de
syntaxe”, 2 “Analyse des constituants majeurs de la phrase”, “Le syntagme nominal”, p. 92 :