Pertinence du diagnostic virologique des infections

L’
infection respiratoire communautaire est la patho-
logie infectieuse la plus fréquemment rencontrée
en médecine de ville (1, 2). Les manifestations cli-
niques de ces infections sont très variées, allant du simple rhume
à la pneumopathie hypoxémiante, en passant par l’otite moyenne
aiguë. Les virus sont les principaux agents étiologiques de ces
infections respiratoires communautaires (3-6). Elles sont obser-
vées toute l’année avec un pic durant la période hivernale (3, 4, 7).
Les virus respiratoires sont les virus influenza, le virus respira-
toire syncytial, les Adénovirus, les Rhinovirus, les Coronavirus,
MISE AU POINT
Pertinence du diagnostic virologique des infections
respiratoires communautaires
Relevance of virological diagnosis in communautary-acquired
respiratory tract infections
A. Mosnier*, B. Lina**
57
La Lettre du Pneumologue - Volume VII - no2 - mars-avril 2004
* Coordination nationale des GROG, Open Rome, Paris.
** Centre national de référence pour les virus influenza, région Sud, hospices
civils de Lyon, UMR 5537, Domaine Rockefeller, Lyon.
Résumé : Les infections virales respiratoires communautaires font partie du quotidien de tous les praticiens de ville. Il s’agit
d’infections aiguës des voies aériennes supérieures ou inférieures, quelquefois compliquées par une surinfection bactérienne et
évoluant souvent sous forme d’épidémies. De nombreux virus peuvent être responsables de ces infections, et il est impossible
d’en faire le diagnostic étiologique exclusivement sur la clinique. Ce diagnostic nécessite la réalisation d’un prélèvement au niveau
de la muqueuse nasale ou pharyngée (écouvillon, lavage ou aspiration) qui sera analysé dans un laboratoire de virologie spécia-
lisé. Du fait de la lourdeur et de la lenteur des techniques virologiques, ce diagnostic est peu approprié à la pratique de ville, et
ces infections virales sont donc rarement documentées. Pourtant, le diagnostic étiologique des infections respiratoires commu-
nautaires est utile, nécessaire et pertinent, en particulier dans la perspective d’un bon usage des antibiotiques et du dévelop-
pement d’antiviraux spécifiques. Grâce aux réseaux de surveillance de la grippe, des données épidémiologiques de terrain, étayées
par des analyses virologiques, sont déjà disponibles. Elles fournissent des informations en temps réel sur la circulation des virus
et sur la situation épidémiologique de terrain. En complément, la commercialisation de tests virologiques rapides accessibles
aux praticiens pourrait leur permettre de réaliser un diagnostic étiologique précis chez certains des patients consultant pour
une infection respiratoire aiguë, et de connaître ainsi au mieux la situation épidémiologique locale.
Mots-clés : Culture cellulaire - Épidémiologie - PCR - Tests diagnostiques rapides - Traitement - Virus respiratoires.
Abstract: Respiratory tract infections are frequent diseases in outpatients. These are acute infections of the upper or lower
respiratory tract, rapidly evolving, responsible for large epidemic, with frequent bacterial super-infections. Numerous viruses are
responsible for these infections, and it remains impossible to identify the causative agents by simple analysis of the clinical
symptoms. This diagnosis has to be carried out by analysis in a virology lab of nasal/pharyngeal swabs or washes collected from
the patients. This diagnosis is rarely carried out in outpatients due to the lack of rapid and easy-to-handle techniques. In the
frame of the development of new antiviral agents, and the need for good practices in the management of antibiotics, the accu-
rate diagnosis of acute respiratory tract infections in outpatients is both useful and relevant. Surveillance networks already
implemented for influenza surveillance provide real-time epidemiological and virological data available for general practice. The
development and future commercialisation of near patient tests should be of help to allow the accurate diagnosis of acute respi-
ratory tract infection in outpatients.
Key-words: Cell culture - Epidemiology - Near patient tests - PCR - Respiratory viruses.
les virus para-influenza, et les métapneumovirus. Ils sont respon-
sables de pathologies respiratoires aiguës, souvent de durée courte
(4 à 7 jours), atteignant toutes les tranches d’âges et survenant
dans toutes les régions du globe (1). La circulation de ces virus,
et donc leur épidémiologie, dépendent de la saison et des lati-
tudes (1, 8).
Parmi les virus respiratoires, le virus influenza est responsable
de la plus grande morbi-mortalité ; c’est aussi celui pour lequel
nous avons le plus de données épidémiologiques. Ce virus fait
l’objet d’une surveillance étroite, tant au niveau national (réseau
de surveillance des GROG) qu’au niveau international (réseaux
EISS et OMS) (1, 7). Cette surveillance est nécessaire pour détec-
ter et caractériser les virus circulants, vérifier l’adéquation de la
composition vaccinale en cours et choisir les variants qui devront
être inclus dans les compositions vaccinales à venir. C’est aussi
grâce aux réseaux de surveillance internationaux qu’il a été pos-
sible de constater, durant l’hiver 2001-2002, l’apparition d’un
virus réassortant humain A (H1N2) (9).
En France, le réseau des médecins des Groupes régionaux d’obser-
vation de la grippe (GROG) assure depuis 1987 la surveillance
des infections grippales communautaires. Les généralistes et les
pédiatres des GROG réalisent des prélèvements chez des patients
présentant une infection respiratoire aiguë et adressent ces prélè-
vements, accompagnés d’une fiche de renseignements cliniques,
aux laboratoires de virologie. Ainsi, le réseau GROG assure la col-
lecte d’informations cliniques et virologiques qui permettent
d’annoncer et de caractériser avec précision l’arrivée des virus grip-
paux sur le territoire français, de décrire l’épidémie et de mesurer
l’impact médico-économique de la grippe chaque hiver (7, 10).
Depuis 1990, le diagnostic des infections respiratoires aiguës effec-
tué sur ces prélèvements de ville par le Centre national de réfé-
rence pour les virus influenza (région Sud) pour la région Rhône-
Alpes combine la détection des virus grippaux à celle d’autres virus
respiratoires (VRS, virus para-influenza, Adénovirus, Rhinovi-
rus et Entérovirus), de Chlamydia pneumoniae et de Mycoplasma
pneumoniae (7). L’élargissement de l’éventail du diagnostic au-
delà de la simple détection de la grippe a paru essentiel pour assu-
rer un diagnostic étiologique aussi complet que possible des infec-
tions aiguës des voies aériennes supérieures et ne pas sur- ou
sous-estimer l’impact de la grippe (11, 12). Ce diagnostic précis
peut aussi permettre de corriger les erreurs d’appréciation parfois
importantes faites par le public quant à l’efficacité du vaccin anti-
grippal. En effet, même en période épidémique, le diagnostic de
grippe peut être porté en excès chez un patient vacciné devant une
symptomatologie respiratoire aiguë qui peut être la conséquence
d’une infection par un autre pathogène respiratoire, voire de phé-
nomènes allergiques (12).
LES VIRUS RESPIRATOIRES ET LEUR POUVOIR PATHOGÈNE
Au cours des infections respiratoires communautaires, différents
virus peuvent être impliqués. Les trois les plus fréquemment ren-
contrés sont les Rhinovirus, les virus influenza (A et B) et le virus
respiratoire syncytial (sérotypes A et B).
La morbidité liée aux infections grippales ou à VRS est nette-
ment plus importante que celle associée aux infections à Rhino-
virus. Les virus influenza et le VRS sont responsables d’infec-
tions hautes et basses essentiellement rencontrées en fin
d’automne et durant l’hiver, parfois compliquées de surinfections
bactériennes (pneumopathies, otites, sinusites). Le VRS est par-
ticulièrement en cause dans les infections respiratoires basses des
petits enfants (bronchiolite), et peut aussi être responsable d’infec-
tions chez l’adulte et la personne âgée. D’autres virus respira-
toires sont également impliqués dans des pathologies respira-
toires (Adénovirus, virus para-influenza 1, 2 et 3, Coronavirus,
métapneumovirus et parfois Entérovirus). À la différence des
virus influenza, dont l’épidémiologie reste imprévisible, la chro-
nologie de la circulation des autres virus est connue. Ainsi, cer-
tains sont rencontrés plutôt durant l’automne et le printemps (Rhi-
novirus et Coronavirus), pendant l’été (virus para-influenza 3 et
Entérovirus), ou durant toute l’année, avec des petites bouffées
épidémiques localisées et transitoires (Adénovirus).
Enfin, cliniquement, certains, tels que les Rhinovirus ou les Coro-
navirus, ne donnent pratiquement que des infections bénignes des
voies aériennes supérieures, alors que le para-influenza 3 et les
Adénovirus peuvent être responsables d’infections des voies
aériennes inférieures accompagnées de signes généraux parfois
importants. Toutefois, en l’absence d’analyse virologique, il est
impossible pour le praticien de ville de faire un diagnostic étio-
logique précis des infections respiratoires, aucun de ces virus ne
donnant de tableau clinique pathognomonique (10, 13).
CONDUITE DU DIAGNOSTIC VIROLOGIQUE
DES INFECTIONS VIRALES RESPIRATOIRES
Techniques de prélèvement
Les infections virales respiratoires sont des infections aiguës
d’évolution courte et rapide. Le site primaire de réplication de la
plupart des virus respiratoires est l’épithélium cilié des voies
aériennes supérieures, quelles que soient les manifestations cli-
niques observées chez le patient infecté. L’excrétion virale se fait
essentiellement au niveau de la muqueuse nasale et ne dure que
4 à 7 jours, avec un pic au deuxième jour (figure 1). Dès lors,
pour être utile, un prélèvement à visée diagnostique doit être réa-
lisé, de préférence au niveau de la muqueuse nasale, dans les deux
MISE AU POINT
58
La Lettre du Pneumologue - Volume VII - no2 - mars-avril 2004
Figure 1. Cinétique d’excrétion du virus influenza chez l’adulte (d’après 21).
0
0 12 24 36 48 60 72 84 96 108 120 132 144
1
2
3
4
5
Nombre de virus (log)
par ml de sécrétion nasale
Durée (heures)
Date d'infection
ou trois premiers jours de la maladie. Plus le prélèvement sera
réalisé précocement, plus la chance d’obtenir un résultat positif
sera élevée. La technique la plus simple pour effectuer ce prélè-
vement consiste à réaliser un écouvillonnage nasal à l’aide d’un
écouvillon réservé aux analyses virologiques, c’est-à-dire associé
à un milieu de transport ou de survie. En pratique, l’écouvillon
est introduit dans la narine sur une longueur de 1,5 à 2 cm, hori-
zontalement, sur un plan parallèle au plan du palais. Une rota-
tion lente est alors appliquée sur l’écouvillon, puis il est retiré et
placé dans son milieu de survie ou de transport. Plutôt qu’un
écouvillonnage nasal, les Anglo-Saxons utilisent un système dit
d’aspiration nasale (14). Pour cela, un dispositif est placé dans
la narine du patient, permettant l’injection intranasale de 2 à 3 ml
de sérum physiologique. Ce liquide est ensuite aspiré et collecté
dans un tube du dispositif.
Pour certains virus respiratoires, il sera utile d’effectuer un écou-
villonnage de gorge. C’est le cas pour les virus dont la réplication
se situe essentiellement au niveau des amygdales et du pharynx
(Adénovirus, Entérovirus). Ainsi, devant un tableau respiratoire
sans écoulement nasal clair franc (trachéite ou bronchite isolée),
certains préconisent de combiner systématiquement le prélève-
ment nasal à un prélèvement pharyngé au niveau des piliers de
l’amygdale et du fond de la gorge. Les deux écouvillons seront
envoyés au laboratoire.
Les virus sont responsables de 90 % des épisodes de bronchite
aiguë. Chez les patients atteints de bronchite chronique, les infec-
tions aiguës se partagent entre infections d’origine virale et bac-
térienne (50 %) (5). Au cours d’une bronchite, le prélèvement le
plus souvent réalisé est un crachat, dont l’analyse n’a aucun inté-
rêt pour le diagnostic virologique (15). En effet, ces prélèvements
sont souvent purement salivaires, pauvres en cellules épithéliales,
et ne peuvent donc pas être informatifs (16). Au cours des épi-
sodes de bronchite aiguë d’origine virale, le patient présente une
toux sèche, irritative et non productive. Lorsque la bronchite est
accompagnée d’une toux grasse, cela peut être le signe d’une sur-
infection bactérienne. Chez les patients atteints de bronchite aiguë
non productive, le diagnostic virologique sera possible sur un
prélèvement de nez et de gorge.
L’objectif de l’ensemble de ces techniques est de prélever des
cellules épithéliales infectées en nombre suffisant pour permettre
la réalisation du diagnostic ; les prélèvements paucicellulaires
sont à l’origine de faux négatifs.
Le délai d’acheminement des échantillons au laboratoire condi-
tionne aussi le résultat. Afin d’avoir les meilleures chances de
diagnostic, les prélèvements doivent arriver le plus rapidement
possible. Qu’il s’agisse d’un prélèvement de nez ou de gorge, la
détection des virus est excellente lorsque les écouvillons sont placés
dans des milieux de transport adaptés. Ces prélèvements peuvent
attendre 48 à 72 heures à température ambiante avant d’être trai-
tés par le laboratoire de virologie, cela sans réduction des possibi-
lités de détection de la plupart des virus respiratoires. Ainsi, les
prélèvements effectués en ville par les médecins des GROG sont
adressés aux laboratoires de virologie par la poste, dans des conte-
neurs spécifiques. Pour les liquides de lavage nasal, il n’y a pas
de milieu de transport possible. Toutefois, il est possible de
mélanger le liquide collecté avec un milieu de survie simple, ce
qui permet de conserver l’échantillon à 4 °C pendant quelques
heures avant de l’envoyer au laboratoire dans un délai maximum
de 8 heures.
Techniques de détection des virus respiratoires
(tableau I)
Le diagnostic virologique au laboratoire est généralement réalisé
en combinant des techniques de détection antigénique rapide et
de mise en culture sur lignée cellulaire.
Les premières mettent en évidence des protéines virales directement
dans le prélèvement, généralement par ELISA ou par immuno-
fluorescence (IF). Ces techniques rapides (2 heures en moyenne)
ont souvent une sensibilité correcte, parfois bonne (17-19), et per-
mettent au laboratoire de donner une première réponse le jour même
du prélèvement. C’est sur la base de ces techniques que se déve-
loppent les doctor-tests, tests simplifiés et rapides (en général
moins de 15 minutes), réalisables par un médecin dans son cabinet
(voir plus loin).
Il existe aussi des tests unitaires rapides utilisables au laboratoire
(environ 10 à 20 minutes). Le principe de ces tests est habituelle-
ment un ELISA sur membrane. Ils n’existent que pour la détec-
tion des virus de la grippe [par exemple Flu A-B Directigen, Beck-
ton Dickinson (20), ou le VRS (Directigen)]. Ils permettent la
différenciation entre influenza A et influenza B, mais pas le sous-
typage des virus de type A (20). Leur évaluation par rapport aux
techniques classiques les place à équivalence avec certains tests
ELISA conventionnels.
Pour obtenir une bonne sensibilité, ces tests de diagnostic direct
sont en général couplés à la culture (7). La culture des virus demande
un environnement technique important dont ne disposent pas la
grande majorité des laboratoires privés. En effet, la culture virale
nécessite l’utilisation de hottes à flux laminaire de classe II (ou
postes de sécurité microbiologique), de microscopes inversés, de
centrifugeuses à plaques et d’étuves à CO2. Outre l’aspect pure-
ment technique, le second facteur qui limite l’utilisation de la cul-
ture est la nécessité d’avoir un personnel ayant la connaissance
et la maîtrise de ces techniques délicates. La culture des virus res-
piratoires nécessite l’entretien de différentes lignées, car il n’existe
59
La Lettre du Pneumologue - Volume VII - no2 - mars-avril 2004
Tableau I. Liste des techniques utilisables pour le diagnostic des infec-
tions à virus respiratoires.
Virus Diagnostic direct PCR Culture
IF ELISA TDR
Influenza A+++++
Influenza B+++++
VRS A + + + + +
VRS B + + + + +
Rhinovirus - - - + +
Adénovirus - - - + +
Para-influenza 1 + +* - + +
Para-influenza 2 + +* - + +
Para-influenza 3 + +* - + +
Para-influenza 4+ + + +
Coronavirus** - - - + -
Entérovirus + - - + +
Métapneumovirus - - - + ±
* Les différents types peuvent être détectés par une réaction unique couplant
les AC anti-1+2+3.
** Hors souches Urbani et TOR.
pas de lignée cellulaire permettant l’isolement de l’ensemble de
ces virus. Certaines cellules sont plus sensibles pour certains virus
respiratoires (par exemple : MDCK pour virus influenza ; HEp2
pour VRS ou Adénovirus). Ces cultures sont réalisées dans des
plaques et centrifugées, ou bien dans des tubes, ces derniers étant
mis sur des rollers afin d’améliorer la sensibilité de la culture
(17). Les prélèvements respiratoires sont habituellement incubés
à 34 °C.
Les méthodes diagnostiques utilisables pour la détection ou la
culture des virus dépendent du pathogène recherché. Ainsi, une
détection antigénique par ELISA et/ou IF est utilisable pour VRS,
influenza A et B et para-influenza 1, 2 et 3. Pour les Entérovirus,
les Rhinovirus, les Adénovirus respiratoires et les Coronavirus,
il n’existe pas d’anticorps adaptés à leur détection.
Hormis les Coronavirus, les virus respiratoires sont bien isolés
en culture cellulaire. Ainsi, dans un laboratoire expérimenté, la
culture reste la technique de référence pour la détection des virus
respiratoires. En utilisant un panel de lignées cellulaires, il est pos-
sible d’organiser la détection concomitante de plusieurs virus dans
un prélèvement. Ainsi, le CNR des virus influenza (région Sud)
assure un diagnostic assez élargi sur des prélèvements réalisés
en pratique communautaire (figure 2). Le défaut de cet algo-
rithme est le délai de réponse. Les infections virales respiratoires
sont des infections aiguës, d’apparition et d’évolution rapides,
pour lesquelles seul un diagnostic rapide permet un diagnostic
étiologique et un traitement spécifique en temps réel. Pour cette
gestion du patient consultant pour une infection respiratoire aiguë,
le besoin d’un diagnostic rapide a été renforcé par la commer-
cialisation de produits spécifiquement à activité antigrippale,
l’efficacité de ces produits étant directement liée à la précocité
de leur administration [effet maximal en cas d’administration
moins de 36 heures après le début des symptômes (21)]. Leur
spécificité antigrippale ainsi que leur prix font qu’ils ne doivent
être administrés qu’à bon escient, au mieux chez des patients pour
lesquels un diagnostic étiologique a pu être réalisé. Or, le délai
de réponse de la culture pour les virus respiratoires est d’environ
quatre jours.
Cette constatation simple, combinée au fait que certains virus ne
sont pas facilement isolables en lignée cellulaire, que la culture
des virus nécessite un investissement important en personnel et
que l’absence de diagnostic en temps réel entraîne un désintérêt
des cliniciens, a conduit au développement des tests moléculaires
de type PCR.
La PCR est une méthode de diagnostic rapide (de 4 à 24 heures)
et sensible. Comparée à la culture, elle est d’une sensibilité supé-
rieure, et permet la détection de pathogènes dont la culture est
longue et fastidieuse, voire impossible (exemple : certains Coro-
navirus). L’avantage de cette technique est que le résultat posi-
tif ou négatif est obtenu rapidement (22). Comme pour la culture
des virus, la réalisation de la PCR se fait avec un environnement
technique important et du personnel qualifié. En effet, le dia-
gnostic par PCR nécessite la maîtrise des processus d’extraction
des acides nucléiques (ARN ou ADN), ainsi que des techniques
d’amplification. Des procédures déjà publiées décrivent des PCR
permettant de détecter un pathogène précis (PCR simple) ou plu-
sieurs pathogènes [PCR multiplex] (18, 19, 22). Les avantages
et inconvénients de la PCR par rapport à la culture des virus sont
un sujet de discussions passionnées. Certains prêchent pour le
tout-moléculaire (22), d’autres pour le tout-culture (23), les plus
modérés préférant l’utilisation combinée des deux techniques.
En fait, ces deux techniques sont complémentaires. Cependant,
l’utilisation intensive de la PCR permet aux laboratoires bien
structurés et capables d’absorber la demande de donner des
réponses rapides (en 4 à 8 heures), utiles pour la prise en charge
MISE AU POINT
60
La Lettre du Pneumologue - Volume VII - no2 - mars-avril 2004
Prélèvement
Milieu de transport
3 aliquots
2 mn x 400 g
Cellules + PBS
IF
Centrifugation
+ antibiotiques
Incubation
Cultures sur cellules
30 mn
Cellules + milieu
ELFA
VIDAS IC ELISA
IC ELISA
(surnageant)
ECP
Identification
GR A
GR B
PARA
VRS
+ 1 congelé (- 80 °C)
+ 1 PCR
3 ml
(Nez-gorge)
Figure 2. Algorithme utilisé
pour la détection des virus
respiratoires (CNR région
Sud). Cet algorithme ne tient
pas compte des techniques
moléculaires qui peuvent être
utilisées occasionnellement
pour augmenter la sensibilité
des tests ou pour confirmer
un diagnostic direct positif/
culture négatif (7).
des patients. Cette rapidité de réponse entraîne une modification
de la perception de l’utilité du diagnostic virologique par les cli-
niciens, les rendant plus enclins à demander des analyses virolo-
giques du fait de la valeur ajoutée à cette prise en charge (24). Les
techniques dites “multiplex”, permettant la détection simultanée
et rapide de deux à dix pathogènes respiratoires différents, seront
potentiellement très utiles (18). Ces techniques d’avenir néces-
sitent encore de la mise au point, afin d’avoir une sensibilité équi-
valente à celle obtenue globalement avec les PCR simples.
Actuellement, les techniques PCR ont une meilleure sensibilité
que la culture pour la détection des virus respiratoires. Toutefois,
le gain de sensibilité est différent selon les virus : il est indiscu-
table pour les Coronavirus et les Rhinovirus, moins évident pour
les virus influenza (19, 25). Par ailleurs, le retour en temps réel,
vers les praticiens, des résultats de prélèvements effectués à titre
diagnostique, pour des pathologies aussi courantes, nécessiterait
une adaptation du mode de transmission des résultats.
LES TESTS DE DIAGNOSTIC RAPIDE UNITAIRES (TDR)
Ces tests sont destinés aux médecins se trouvant au chevet du patient.
Ils sont appelés doctor tests ou near patient tests, et reposent géné-
ralement sur le principe d’une immuno-chromatographie sur ban-
delette après traitement des échantillons par un détergent libérant
les protéines virales contenues dans le prélèvement [exemple :
test QuickVue, QUIDEL (20)]. Ces TDR, dont le délai de réponse
est en moyenne de 10 à 20 minutes, s’appliquent indifféremment
sur des écouvillonnages, aspirations ou lavages de nez. Ils ne sont
commercialisés que pour les virus influenza. Le délai de réponse
de ces TDR en fait des outils intéressants pour la mise en route
du traitement antiviral antigrippal spécifique “en temps réel”.
Toutefois, comparés à la culture, ils manquent encore de sensi-
bilité, ne différencient pas les types de virus influenza et ne per-
mettent pas le diagnostic d’autres viroses (12, 20). Par ailleurs,
leur réalisation nécessite une formation préalable et un temps de
réalisation difficilement compatibles avec la pratique de la méde-
cine de ville.
FAUT-IL FAIRE LE DIAGNOSTIC VIROLOGIQUE
DES INFECTIONS RESPIRATOIRES COMMUNAUTAIRES ?
La réponse à cette question peut varier selon le contexte.
Pour le Centre national de référence (CNR) des virus
influenza et des virus respiratoires, il est indispensable de faire
un diagnostic précis des infections respiratoires communautaires,
afin de caractériser le plus précisément possible les virus en cir-
culation et leur impact médical réel (mortalité et morbidité), d’évi-
ter ainsi de faire des interprétations erronées concernant leur cir-
culation, et de participer aux choix vaccinaux (vaccin antigrippal).
Pour le CNR, le diagnostic virologique des infections respira-
toires communautaires est donc pertinent. Ce diagnostic permet
la surveillance de la circulation des virus influenza comme celle
des autres virus respiratoires qui circulent avant ou en même
temps, et qui peuvent compliquer la surveillance de la grippe en
l’absence de données virologiques précises (figure 3) (11, 12, 26).
Les outils de la surveillance virologique doivent être préféren-
tiellement la culture avec identification des souches virales isolées
(23). Seule la caractérisation des virus respiratoires permet le
suivi précis de la circulation des souches épidémiques, la détection
éventuelle de nouveaux variants, voire de souches potentiellement
pandémiques.
Du point de vue du médecin hospitalier qui voit arriver en
urgence un patient pour un tableau infectieux grave lié à une pos-
sible infection virale, le diagnostic virologique est indispensable
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20
10
0
Nombre de prélèvements
Nombre de prélèvements positifs
Grippe A
2001 Semaines 2002
Grippe B Virus respiratoire syncytial Adénovirus
Rhinovirus Entérovirus Nombre de prélèvements
Para-influenza
Figure 3. Circulation des prin-
cipaux virus respiratoires dans
la région Rhône-Alpes, hiver
2001-2002. (Données GROG).
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