Bases anatomiques de l`anastomose hypoglosso

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UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MAITRISE EN SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
M.S.B.M
MEMOIRE POUR LE CERTIFICAT D’ANATOMIE, D’IMAGERIE ET DE MORPHOGENESE
2000-2001
UNIVERSITE DE NANTES
Bases anatomiques de l’anastomose hypoglosso-faciale
Par
GIQUELLO Jacques-Armel
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LEBORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Pr. O. ARMSTRONG
Pr. C. BEAUVILLAIN
Dr. F. CAILLON
Pr. P. COSTIOU
Pr. D. CROCHET
Pr. A. DE KERSAINT-GILLY
Pr. B. DUPAS
Pr. D. DUVEAU
Pr. Y. HELOURY
Pr. P.A. LEHUR
Pr. J.P. MOISAN
Pr. N. PASSUTI
Pr. R. ROBERT
Pr. O. RODAT
1
Remerciements sincères à
Messieurs les professeurs J. LEBORGNE, J.M ROGEZ, R.ROBERT, O.
ARMSTRONG pour m’avoir enseigné l’anatomie.
Monsieur le professeur R.ROBERT pour son soutien.
Monsieur
le
professeur
BORDURE
pour
sa
gentillesse
et
son
aide
bibliographique.
Monsieur S.LAGIER et Y.BLIN pour leur aide conséquente et leur présence
durant toute la réalisation de ce travail.
Monsieur GRESSUS Erwan pour ses connaissances en informatique et sa
sympathie.
Et Madame GARCON pour sa disponibilité et son accueil .
2
PLAN
BASES ANATOMIQUES DE L’ANASTOMOSE
HYPOGLOSSO-FACIALE.
INTRODUCTION
I-
ANATOMIE DU NERF FACIAL ET DU NERF HYPOGLOSSE
1°/ Nerf facial :
Embryologie
Origine
Trajet
2°/ Nerf hypoglosse :
Trajet
CAUSES ET CONSEQUENCES D’UNE LESION DU NERF FACIAL :
II-
1°/ Etiologies principales des paralysies faciales :
2°/ Types de lésions nerveuses :
3°/ Conséquences cliniques :
4°/ Conséquences fonctionnelles :
5°/ Retentissement psychosocial :
III-
MATERIEL ET TECHNIQUE DE L’ANASTOMOSE HYPOGLOSSO-FACIALE :
1°/ Matériels ::
2°/ Indications et contre indications 3
3°/ Techniques utilisées :
4°/ Résultats de mesures :
Sujets anatomiques
Mesures
IV-
RESULTATS DE L’ANASTOMOSE HYPOGLOSSO-FACIALE :
1°/ Avantages :
2°/ Inconvénients :
3°/Autres techniques :
3
CONCLUSION
INTRODUCTION :
La paralysie faciale est une affection psychologiquement très invalidante. Le
nerf facial n’est pas en effet qu’un simple nerf moteur, c’est un véritable effecteur de
la communication (4°). Donc le but idéal de la réanimation chirurgicale d’une
paralysie faciale est de rendre au malade la symétrie de son visage non seulement
au repos mais aussi au cours de la mimique intentionnelle et émotionnelle (6°).
L’anastomose hypoglosso-faciale représente l’une des alternatives déjà
ancienne décrite par Korte en 1903 dans le cadre du traitement chirurgical de la
paralysie faciale périphérique (due à une lésion irréversible du nerf facial dans son
trajet intracrânien ou intra pétreux.)
Cette technique semble offrir le double intérêt d’un résultat esthétique à la
fois favorable et constant.
Pour mieux comprendre cette technique, nous nous efforcerons de
distinguer ces deux nerfs et d’en étudier le trajet et l’anatomie.
L’objectif de ce certificat d’anatomie et de morphogenèse sera de
déterminer un site de section optimal pour ces deux nerfs, permettant une
anastomose ou une suture convenable sans tension.
4
I-
ANATOMIE DUR NERF FACIAL ET DU NERF HYPOGLOSSE :
1°/ Nerf facial :
Le nerf facial émerge du sillon ponto-bulbaire, à la face ventro-latérale du tronc
cérébral. Il traverse le conduit auditif, puis entre dans le canal facial de l’os temporal.
Il sort enfin de la cavité crânienne dans la région postérieure de la face en avant et
en dessous de l’oreille. Il émet alors ses branches terminales qui rayonnent dans les
régions latérale et antérieure de la face pour innerver tous les muscles de la mimique
ainsi que le muscle buccinateur de la joue.
Embryologie : Le nerf facial se développe dès la fin de la 1ère semaine de
grossesse au sein du complexe acoustico-facial, à partir du deuxième arc branchial.
On peut reconnaître ses deux branches terminales supérieure et inférieure ou
temporo et cervicofaciale entre la 7ème et la 8ème semaine. A partir de ces deux
branches émergent une multitude de petits fascicules qui traversent les différentes
régions de la joue que sont les régions temporale, buccale, mandibulaire,
zygomatique et enfin cervicale(7°).
Origine : On peut différencier deux racines : une racine motrice et une
racine sensitive, ayant une origine différente :
•
Racine sensitivo-sensorielle : ce sont les fibres gustatives dites
branchiosensibles, véhiculées par le nerf intermédiaire et qui vont
former avec le noyau du IX le noyau gustatif de Nageotte. Les fibres
sensitives remontent le trajet du nerf intermédiaire, croisées par les
fibres parasympathiques effectrices. De plus, on note une zone de
sensibilité ou territoire électif pour la zone de Ramsay-Hunt, la
muqueuse de la caisse du tympan et la face postérieure de la
langue.
•
Racine motrice du nerf facial : Noyau moteur principal à la partie
basse du pont qui émet deux groupes de fibres. La partie ventrale
émet les fibres du facial supérieur, qui reçoit des afférences des
5
cortex homo et controlatéral et les fibres du facial inférieur sont
émises par la partie dorsale du noyau moteur, ne recevant des
afférences que du cortex controlatéral.
Trajet :
•
Portion intracrânienne :
(Cette portion a peu d’intérêt dans la réalisation de l’anastomose VII-XII puisque
cette jonction s’effectue à partir du tronc d’émergence du nerf facial au niveau du
foramen stylo-mastoïdien.)
Les deux racines motrices et sensitives vont sortir du tronc
cérébral à la partie postérolatérale du pont, au niveau d’un
récessus entre l’olive inférieure et le pédoncule cérébelleux
inférieur. De dedans en dehors on trouve la racine motrice, la
racine sensitive et plus latéralement le nerf hypoglosse.
Le
nerf
facial
arachnoïdienne
poursuit
son
accompagné
du
trajet
dans
paquet
la
citerne
acousticofacial,
rejoint le méat auditif interne dans sa partie la plus haute et
la plus latérale où il est séparé du nerf vestibulaire par le nerf
intermédiaire de Wrisberg. Enfin, après avoir parcouru
environ 12 mm, il pénètre le canal facial.
•
Portion intrapétreuse :
Au niveau du rocher, un canal osseux (28 à 30 mm) entourant le canal facial se
divise en plusieurs segments.
Le segment labyrinthique (≈ 83 % du canal) contient le VII
bis mais surtout le VII. Il se situe entre le 1er tour de cochlée
et le vestibule en arrière.
La loge du ganglion géniculé : est un renflement au sommet
de l’angulation du facial contenant les nerfs grand et petit
pétreux.
6
La portion tympanique où le nerf facial occupe 73% de la
place disponible. La paroi osseuse est ici très mince, siège de
déhiscences osseuses fréquentes.
Le coude du nerf facial : après être passé dans l’attique et
dans l’atrium au-dessus de la fenêtre ovale, le nerf VII réalise
un angle compris entre 90° et 125°.
La portion mastoïdienne (9 à 12 mm) où le nerf facial émet
deux branches collatérales importantes : le nerf stapédien et
la corde du tympan se situant à 2 mm environ du foramen
stylo-mastoïdien.
•
Portion extracrânienne : +++
(Cette portion fera l’objet de notre dissection.)
Le nerf facial sort du rocher par le foramen stylo-mastoïdien, situé sur la face
exocrânienne postérieure du rocher. A près sa sortie le VII se dirige en bas en avant
et passe entre le processus styloïde et le muscle stylohyoïdien situés médialement, le
ventre postérieur du muscle digastrique et l’artère occipitale latéralement. Avant de
pénétrer dans la loge parotidienne, il émet le rameau auriculaire postérieur et des
rameaux
destinés
au
muscle
stylohyoïdien
et
au
ventre
postérieur
du
digastrique(10°).
Le nerf aborde alors la glande à la partie la plus médiale de sa face postérieure et se
divise en deux branches :
La branche supérieure : temporo-faciale : branche la plus volumineuse. Elle
se dirige en haut et en avant vers le col du condyle, puis se divise en plusieurs
rameaux anastomosés entre eux :
Deux rameaux temporaux : en avant du tragus, qui s’engagent sous
le muscle auriculaire antérieur qu’il innerve, se terminent à la face
profonde du muscle frontal
Deux rameaux frontaux au-dessus du rebord de l’orbite innervant
les muscles frontal et orbiculaire.
Rameaux palpébraux pour muscle sourcilier et orbiculaire des
paupières.
7
Rameaux sous orbitaires, plus volumineux au nombre de deux qui
suivent le bord du conduit parotidien(de STENON). Innervant les
muscles grand et petits zygomatiques. Ils s’engagent ensuite sous
les muscles releveurs de la lèvre supérieure et se terminent dans les
muscles transverses du nez. Ils s’anastomosent avec le nerf sousorbitaire du nerf trijumeau (V2.)
Rameaux buccaux supérieurs au nombre de deux suivant le bord
inférieur du conduit parotidien, innervant l’orbiculaire des lèvres et
les muscles buccinateurs(1°).
La branche inférieure, cervico-faciale : elle descend verticalement vers
l’angle mandibulaire, puis après s’être anastomosée avec la branche temporofaciale et le nerf auriculaire principal, elle longe l’angle inférieur de la
mandibule et se divise en différents rameaux :
Rameaux buccaux inférieurs innervant les muscles buccinateur et
orbiculaire des lèvres.
Rameaux mentonniers destinés à la houppe du menton, au muscle
carré et aux muscles triangulaires des lèvres.
Rameau cervical qui s’anastomose avec le plexus cervical superficiel
pour innerver les muscles peauciers du cou(1°).
•
Enveloppes du nerf facial :
Dans l’angle ponto-cérébelleux, le nerf est recouvert par un mince feuillet
arachnoïdien. Au niveau de la portion labyrinthique on voit apparaître une gaine
épineurale conjonctive très fine. Cette gaine s’épaissit progressivement jusqu’au
foramen stylo-mastoïdien, où elle occupe une place majeure du canal osseux ; elle
contient de très nombreux vaisseaux ; Après son émergence du trou stylomastoïdien, le nerf facial apparaît sous la forme de fascicules nerveux entourés de
périnèvre et cerclé par une gaine conjonctive épineurale(1°) .
8
Le nerf facial extra-pétreux et les muscles peauciers de la face.
(D’après G. COULY -11°-)
VUE LATERALE Dte
Avt
Glande
parotide
Bas
Artère temporale
superficielle
sectionnée
Branche
supérieure
temporo-faciale.
Branche
inférieure
cervico-faciale
Méat auditif externe
Branches terminales de la portion extra-crânienne.
9
Tronc du nerf
facial au niveau
du foramen
stylo-mastoïdien
VUE LATERALE Dte
Avt
Rameau
buccal
inférieur
Bas
Rameau
sousorbitaire
Rameau
mentonnier
Rameau
palpébral
Rameau
cervical
Rameau
frontal
Branche
inférieure
cervicofaciale
Rameau
temporal
Branche
supérieure
temporofaciale
Tronc du
nerf facial
Rameaux de division des branches terminales
VUE LATERALE Dte
Avt
Bas
Branche
inférieure
cervico-faciale
Branches de
division
Tronc du nerf
facial
Variante du nerf facial.
10
2°/ Le nerf hypoglosse :
Trajet : Une dizaine de filets émergent du sillon collatéral antérieur au
niveau du bulbe entre la pyramide et l’olive inférieure, puis rejoignent le foramen du
XII en passant entre le paquet acoustico-facial au-dessus et l’artère vertébrale audessous, pour ne former qu’un seul tronc nerveux.
Le tronc nerveux chemine dans l’espace rétrostylien, descend vers le bas et le
latéralement ; il contourne la carotide interne et après être passé entre la carotide et
la jugulaire interne (où il émet sa branche descendante), il croise l’artère carotide
externe en arrière du digastrique.
Au-dessus de l’os hyoïde, le nerf hypoglosse chemine médialement par
rapport au du tendon du m. digastrique, puis arrive dans la région sous
mandibulaire, entre le muscle hyoglosse médialement et le muscle digastrique
latéralement.
Le nerf arrive ensuite dans la région sub-linguale où il est accompagné du
canal salivaire(de WHARTON). Il donne alors des branches destinées aux muscles
linguaux : génio-glosse, staphyloglosse, styloglosse …
La branche descendante du XII longe la jugulaire interne, puis
s’anastomose avec la branche descendante du plexus cervical. Cette anastomose
forme une anse émettant des rameaux nouveaux destinés aux muscles soushyoïdien, omo-hyoÏdien, sterno-cleïdo-hyoïdien, sterno-thyroïdien(1°).
11
Schéma de repérage du nerf hypoglosse
(D’après O. RUNNER - 1°-)
12
Nerf hypoglosse sous le ventre post du m digastrique
VUE LAT. D.
Ht
Artère faciale
Avt
M. mylohyoïdien
Tronc du
nerf facial
Ventre ANT.
du m.
digastrique
Tendon
terminal du
ventre POST
Ventre
POST du
m.
digastrique
Os hyoïde vu
par
transparence
Muscle
sternocleïdomastoïdien
Nerf
hypoglosse
Veine
jugulaire
interne
Artère
carotide EXT.
Artère
thyroïdienne
supérieur.
Artère laryngée
SUPERIEUR.
VUE LATERALE Dte
Ht
Avt
Artère faciale
Artère linguale
Nerf
hypoglosse
Artère
temporale
superficielle
Artère
occipitale
Ventre post du
m digastrique
réséqué
Artère
thyroïdienne
SUPERIEURE.
Muscle sternocleïdomastoidien
Artère carotide
externe
Emergence et trajet du nerf hypoglosse
13
Localisation de la branche descendante du nerf hypoglosse
VUE LAT. Dte
Ht
Muscle masseter
Avt
Zoom sur le
nerf XII et sa
branche
descendante
Glande submandibulaire
Nerf hypoglosse
Veine faciale
Branche
descendante du
nerf hypoglosse
Veine jugulaire
interne
Nerf vague droit
Nerf accessoire
Veine jugulaire
externe
14
VUE LATERALE Dte
Ht
Avt
Branche descendante du
nerf hypoglosse
Zoom sur le nerf XII et sa branche descendante
15
II-
CAUSES ET CONSEQUENCES D’UNE LESION DU NERF FACIAL :
Le nerf facial est le nerf de la mimique. C'est à dire qu’il est le nerf de l’expression
du visage : sourire, peur, étonnement, dégoût … Sa section relève de diverses
causes et est à l’origine de conséquences cliniques sévères mais surtout
psychologiques.
1°/ Etiologies principales des paralysies faciales :
La principale cause des paralysies faciales est liée aux séquelles de la chirurgie
du neurinome de l’acoustique rendant impossible la réparation du VII.
Les traumatismes ou les tumeurs du rocher représentent la 2nde cause
importante de paralysies faciales.
Les autres étiologies se dissocient en : tumeurs de l’angle ponto-cérébelleux,
traumatismes variés, tumeurs parotidiennes, séquelles d’anévrismes de l’artère
vertébrale, paralysies faciales congénitales(1°,2°)…
2°/ Types de lésions nerveuses :
Le degré de gravité de la lésion du nerf facial est fonction du degré de l’atteinte
des gaines conjonctives (épinèvre, périnèvre, endonèvre) variant au cours du trajet
du nerf facial.
On note 3 types de lésions nerveuses :
•
Neuropraxie : sidération du nerf par atteinte ponctuelle de la gaine
de myéline, sans section anatomique vraie.
•
Axonometsis : interruption des fibres nerveuses primitives ou
secondaires à la neuropraxie sans atteinte des enveloppes.
•
Neurometsis : lésion des fibres nerveuses et de leurs gaines(7°).
3°/ Conséquences cliniques d’une paralysie faciale périphérique totale(12°)
•
Plastique du visage :
Au repos, on constate :
L’effacement unilatéral des rides et des plis
16
L’aplatissement de l’aile du nez, avec rétrécissement de
l’orifice narinaire,
L’hypotonie de la joue
L’abaissement de la commissure labiale,
La perte du clignement palpébral, l’œil reste ouvert (siège
d’une conjonctivite ou kératoconjonctivite), la paupière
inférieure, hypotonique peut partiellement s’éverser.
L’absence unilatérale des mouvements automatico-volontaires
•
L’asymétrie du visage s’accentue lors des mouvements volontaires :
Lorsque l’on demande au patient de découvrir les dents, la
bouche est attirée du côté sain.
Lorsque l’on demande au patient de fermer les yeux, on
observe
l’absence
de
contraction
de
l’orbiculaire
des
paupières et une déviation du globe vers le haut et le dehors
(signe de Charles Bell).
Le patient ne peut ni souffler, ni siffler, le visage est denué
d’expression.
4°/ Conséquences fonctionnelles :
L’œil ne pouvant que partiellement se fermer, on a une abolition des
réflexes tels que les réflexes cornéen, trigémino-facial, réflexe fronto-palpébral.
La paralysie des muscles buccinateurs et l’hypotonie de la joue rend difficile
l’alimentation, la mastication et la déglutition. Il existe une rétention entre la
mandibule et la joue hypotonique.
On constate une fuite salivaire.
On note également de graves troubles de la phonation, une agueusie des
2/3 antérieurs de la langue, une hyperacousie.
17
5°/ Retentissement psychosocial :
Le visage est le mode principal d’expression d’un individu. Cette expression
permet la communication et caractérise chaque individu sur le plan anatomique. De
plus, le comportement facial permet l’expression de diverses émotions. Enfin, la face
est l’expression centrale de la beauté et de l’attraction sexuelle. Une modification du
visage d’un individu sera alors à l’origine d’un isolement ou d’une dépression de
celui-ci(1°).
III-
MATERIEL ET TECHNIQUE DE L’ANASTOMOSE HYPOGLOSSO-FACIALE :
1°/ Matériel utilisé :
•
Manche de bistouri n°3 et lame n°15
•
Manche de bistouri n°4 et lame n°24
•
Scie GIGLI pour l’hémisection de la mandibule
•
Ciseaux de dissection MEDLANE
•
Ciseaux à disséquer droits à bout pointu
•
Pince à disséquer très fine sans griffes
•
Pinces à disséquer standard avec griffes
•
Rugine
•
Pinces à clamper
Le premier cas d’anastomose hypoglosso-faciale a été décrit par Korte en
1903. Cette technique n’est pas la seule utilisée pour faire face au problème de la
paralysie faciale. En effet, la suture ou la greffe nerveuse homolatérale doit être
tentée en première intention, donnant les meilleurs résultats. D’autres interventions
sont également réalisées.
2°/ Indications et contre indications :
•
L’anastomose
hypoglosso-faciale
est
réservée
aux
paralysies
faciales. La paralysie faciale périphérique doit être totale, de grade V
18
ou VI de la classification de HOUSE et BRACKMAN. On doit toujours
s’assurer du caractère définitif de la paralysie faciale. En effet, on
essaye souvent dans la majeure partie des cas de respecter un délai
variant de 12 à 15 mois avant d’entreprendre une opération
chirurgicale. On s’aide
de
biopsies
musculaires et d’études
électrophysiologiques afin de pouvoir affirmer la possibilité d’une
neurotisation. Lorsque le nerf facial a été sectionné de façon franche
et immédiate, on a tout d’abord recours à une suture directe avec
ou sans interposition de greffon.
•
Les contre indications sont à bien connaître compte tenu des
complications engendrées par l’intervention chirurgicale.
Une atteinte des nerfs glosso-pharyngien, pneumogastrique,
hypoglosse contre indique formellement l’opération.
L’anastomose hypoglosso-faciale est encore contre indiquée
dans certaines chimiothérapies ou lors d’altérations de l’état
général(1°).
3°/ Technique utilisée :
•
La technique est assez stéréotypée. On réalise une incision
préauriculaire de type cervico-parotidectomie (incision de Redon.) La
voie d’abord débute à mi-hauteur du pavillon, se prolonge de
quelques millimètres derrière le lobule en retroauriculaire, puis
descend en cervical jusqu’au relief antérieur du muscle sternocleïdo-mastoïdien, assez bas à peu près à deux travers de doigt du
plan passant par le bord inférieur horizontal de la mandibule(5°,1°).
19
Plan Cutané
VUE LAT. D
Avt
Bas
Voie d’abord par incision préauriculaire de type cervico-parotidectomie
(D’après JL. PELLAT… - 5°-)
•
Le nerf facial est repéré dans l’espace compris entre la mastoïde et
le processus styloïde, au niveau du foramen stylomastoïdien. On
dégage alors le nerf facial de la glande parotidienne (lobe
superficiel.)
20
•
On peut également choisir une approche plus périphérique
rétrograde. On part du bord antérieur de la parotide. On est alors
capable de trouver facilement une des branches terminales du nerf
facial, en général le nerf zygomatique ou buccal que l’on suit par
voie rétrograde pour progressivement arriver au tronc du nerf facial.
•
La recherche du nerf hypoglosse est plus aisée. Le point de repère
est le muscle digastrique. En réclinant sous l’angle de la mandibule
le ventre postérieur de ce muscle, on a le nerf XII qui apparaît.
Celui-ci chemine dans l’espace compris entre la veine jugulaire
interne en arrière, le tronc thyrolingofacial en bas et le muscle
digastrique en haut et en avant. On sépare alors le nerf hypoglosse
du m.hyoglosse en dedans et du digastrique en dehors, on le
dissèque ensuite le plus loin possible dans la région sublinguale
entre le muscle hyoglosse et le muscle mylohyoïdien. On sectionne
d’abord la branche descendante du nerf XII puis le tronc du nerf le
plus loin possible. Le tronc facial est également sectionné le plus loin
possible au niveau de son émergence au niveau du foramen
stylomastoïdien.
•
Pour gagner de la longueur, on décroise cette branche horizontale
sectionnée au-dessus du chef digastrique. Ainsi, la longueur du nerf
hypoglosse à partir de l’anse et jusqu’à la langue doit être suffisante
pour rejoindre sans tension le tronc du nerf facial. Cette étape de la
technique permet également de mesurer un diamètre de section
optimale, c’est à dire un diamètre du nerf hypoglosse se
rapprochant le plus du diamètre du tronc facial. La dernière étape
consiste à anastomoser les deux extrémités nerveuses sans tension,
permettant ainsi une réinnervation progressive du tronc nerveux
facial. Cette anastomose consiste en une suture nerveuse sous
microscope binoculaire. (Cf. schéma p;19)
Cette suture est périneurale, elle est réalisée au fil 9.0 ou 10.0 après résection
d’environ 1 à 2 mm d’épinèvre, la coaptation est bonne, le calibre des deux nerfs
21
étant à peu près identique. L’épinèvre du nerf facial est plus épais et plus difficile à
réséquer.
Un suivi post-opératoire régulier par le chirurgien (tous les deux mois) permet
ensuite de suivre l’évolution de la repousse nerveuse et ainsi de prévoir le début de
la rééducation.
Vue générale des nerfs VII et XII
VUE LAT. D
M Masseter
Ht
Artère faciale
Avt
Chef ANT du
digastrique
M mylohyoïdien
M Stylohyoïdien
Chef POST
du m.
digastrique
Nerf
hypoglosse
Nerf facial
Ht
Avt
Veine jugulaire interne
Nerf vague
Ganglion cervical moyen de la chaîne
sympathique cervicale.
22
4°/ Résultats de mesures
Mesures sur 3 sujets anatomiques :
Pièces anatomiques
Age
Sexe
1er sujet
Tête et cou
87
Féminin
2nd sujet
Tête et cou
87
Féminin
3ème sujet
Tête et cou
90
Féminin
Nerf facial ∅ ≅ 1,8 mm
Nerf hypoglosse ∅ ≅ 2 mm
Tronc du
nerf facial
Nerf
hypoglosse
Branche
descendante
Nerf facial ∅ ≅ 1,6 mm
Nerf hypoglosse ∅ ≅ 2,1 mm
Nerf facial ∅ ≅ 1,6 mm
Nerf hypoglosse ∅ ≅ 1,9 mm
Le niveau optimal de section se situe donc à environ 3,4 cm de la branche descendante du nerf
hypoglosse dans la région sub-linguale.
23
Premier sujet
VUE LAT D
Ht
Nerf hypoglosse décroisé
en vue de l’anastomose
avec le VII (sectionné à 4,4
cm à partir de sa branche
descendante.)
Avt
Tronc du nerf facial
Artère temporale
superficielle
Glande parotide
VUE LATERALE Dte
Avt
Longueur optimale
du XII pour une
anastomose sans
tension (3,4 cm)
Ht
Glande parotide
Tronc du nerf facial
24
Deuxième sujet
VUE LAT. D
Avt
Anastomose hypoglossofaciale (section de
l’hypoglosse à 3,5 cm de sa
branche descendante)
Bas
25
Troisième sujet
VUE LATERALE Dte
Ht
Avt
Tronc du nerf
facial.
Nerf hypoglosse
décroisé par rapport au
chef POST du m.
digastrique en vue
d’une anastomose
hypoglosso-faciale.
(sectionné à 3,9cm à
partir de la branche
descendante)
VUE LATERALE Dte
Ht
Avt
Anastomose VIIXII (longueur de
section du nerf
hypoglosse
optimale : 3,15 cm
à partir de sa
branche
descendante dans
la région sublinguale)
26
IV-
RESULTATS DE L’ANASTOMOSE HYPOGLOSSO-FACIALE :
1°/ Avantages
•
La tonicité : Le tonus musculaire du tiers moyen et du tiers inférieur
de la face commence à apparaître en général 3 à 4 mois après
l’intervention et s’étale sur plusieurs mois progressivement. Le tonus
réapparaît tout d’abord pour la face inférieure puis la joue et la
région périoculaire. Cette réamélioration du tonus permet d’accroître
la fonction orale et d’améliorer la mastication ou la déglutition.
Quelques cas conservent une hypotonie modérée de la partie
inférieure du visage.
•
Symétrie du visage : Cette réinnervation du VII permet de retrouver
une symétrie nette du visage chez la plupart des patients. Cette
symétrie est liée à une réapparition du tonus facial musculaire.
•
Motricité volontaire : La qualité des mouvements volontaires du
visage progresse pendant douze mois en moyenne, selon les
auteurs, le résultat n’est définitif qu’au bout de 18 à 24 mois
(thèse.) Le sourire volontaire redevient ainsi possible dans la
majorité
des
cas,
mais
reste
accompagné
d’une
fermeture
spontanée et involontaire des paupières du côté opéré.
•
Protection de la cornée : Dans presque 85% des patients opérés, on
obtient une bonne protection de la cornée. Cependant les
possibilités de contractions de l’orbiculaire de l’œil ne sont pas
maximales mais suffisent pour assurer une fermeture palpébrale
protectrice.
•
La motricité spontanée : Les patients ayant subi une anastomose
VII-XII peuvent au maximum obtenir un clignement palpébral ou
une mimique faciale symétriques et synchrones leur permettant une
expression émotionnelle adaptée.
L’avantage de la technique d’anastomose hypoglosso-faciale est aussi le fait
que les patients bénéficient d’une seule et unique intervention chirurgicale.
27
2°/ Inconvénients :
•
La section du nerf hypoglosse : Provoque naturellement une
paralysie de l’hémilangue se compliquant d’une hémiatrophie
linguale. Cette complication est constante chez les patients opérés
mais peut être plus ou moins marquée. On parle de degré
d’atrophie, minime, modéré ou sévère (CONLEY & ANONSEN.) Le
fait d’anastomoser la branche descendante n’apporte en général
aucune amélioration.
•
Le sourire : Aucune expression ne se reflète sur le visage si l’opéré
ne presse pas la langue sur sa denture. Ainsi, pour que le sourire et
les mouvements soient uniformes lors d’émotions, le patient doit se
rappeler qu’il faut exercer cette pression mais doit également doser
cette pression. Il doit apprendre à le faire. Donc cette technique
d’anastomose VII-XII permet de restaurer un tonus musculaire
correct mais ne peut traiter en elle-même la paralysie faciale.
•
Les syncinésies et l’hyperkinésie : Il s’agit d’une complication
majeure qui reste même après une rééducation prolongée. Ainsi, par
exemple lors de la mastication ou lors du sourire, les paupières du
côté opéré se ferment involontairement de façon non harmonieuse.
Ces mouvements ont un retentissement psychologique important
puisque certains patients peuvent s’alimenter en cachette ou parler
à voix basse pour éviter une fermeture spontanée du coté opéré.
Les
syncinésies
bouche-œil
sont
particulièrement
fréquentes.
L’hyperkinésie se présente sous la forme de mouvements en masse
de l’hémiface lors de la déglutition, de la mastication, de la
phonation, des mouvements spontanés.
•
Les troubles de la déglutition et de la mastication : Quelques jours
après l’intervention, le malade présente des troubles de la
déglutition mais le patient s’adapte et les troubles régressent
28
souvent progressivement. Les patients en effet se plaignent de stase
alimentaire, de fuite salivaire et alimentaire (incontinence buccale.)
Pendant les repas, les aliments s’entassent entre les gencives et la
joue ; le patient a des difficultés à les évacuer.
•
Les difficultés de langage : Les patients présentent très souvent des
troubles
de
la
phonation
nécessitant
une
rééducation
orthophonique. Progressivement, ils retrouvent une articulation
normale du langage. Seuls quelques patients se plaignent encore
d’une gène phonatoire.
•
Les complications ophtalmiques : Elles sont multiples. On peut citer
une baisse de l’acuité visuelle, des algies oculaires, une irritation,
une xérose ophtalmique. Les plus fréquentes sont l’ulcère de cornée
et la kératite.
3°/Autres techniques :
*procédés ″ physiologiques ″ :
Suture termino-terminale du nerf facial directe ou après déroutation :
elle est réalisée en première intention, lors de la section du nerf facial, avec la
même voie d’abord que celle utilisée pour l’exérèse d’un neurinome. Les résultats
sont plus souvent aléatoires .De plus, lorsque la perte de substance est
importante, il est parfois indispensable d’interposer un greffon intermédiaire.
Les anastomoses croisées transfaciales :
Cette technique est décrite par ANDERL,MILLESI,et SAMII.Son but est la
réinnervation de l’hémiface à partir du coté sain. Chaque branche est reliée à son
homologue controlatérale. Le greffon saphène utilisé pour relier les branches d’un
coté à l’autre, passe en sous-cutané au dessus de la lèvre supérieure. Elle
s’effectue en deux temps. Le premier temps consiste à positionner le ou les
greffons, puis à l’anastomoser du coté sain aux branches du nerf facial,
sélectionnées par un stimulateur électrique. Le deuxième temps est effectué
après un délai variable selon la taille du greffon. Lorsque la réponse a atteint
29
l’autre coté, l’extrémité distale du greffon est anastomosée aux principales
branches du nerf facial du coté paralysé. Le taux de bons résultas des différentes
études est d’environ 30 % en moyenne pour une technique qui est donc plus
complexe.
*procédés dynamiques :
Anastomose spino-faciale :
En 1879,DROBNICK réalise la première anstomose spino-faciale. Le résultat est
nettement inférieur à l’anastomose VII-XII.On constate en effet des mouvements
grossiers à type de rictus et une quasi-disparition de toute expression faciale. De
plus, le sacrifice du nerf spinal entraîne une chute de l’ épaule, des douleurs ou
encore des paralysies.
Anastomose phréno-faciale :
Décrite pour la première fois en 1957 par HARDY, PERRET et MAYERS. Selon
CONLEY, cette technique ″serait une bonne alternative de réhabilitation lors des
paralysies faciales avec atteinte du nerf glosso-pharyngien ou du nerf vague, en l’
absence de pathologie pulmonaire.″
Anastomose glosso-pharyngo-faciale:
Testée par BALLANCE en 1930,cette technique a été abandonnée en raison de la
médiocrité du résultat et des troubles de la déglutition ou de la phonation par
section du nerf glosso-pharyngien(1°).
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CONCLUSION :
L’anastomose hypoglosso-faciale est une excellente intervention pour réanimer
une hémiface paralysée (avec redistribution du tonus musculaire), quand le nerf
facial est inapte à une réparation par suture simple termino-terminale ou par une
greffe nerveuse.
Les éléments primordiaux de cette technique sont : la précocité du geste par
rapport au diagnostique de paralysie faciale, la qualité de la rééducation et surtout
une bonne technique. Il en résulte de ce travail que le nerf hypoglosse doit être
sectionné à environ 3,4 cm de sa branche descendante, dans la région sublinguale.
C’est à ce niveau que les deux nerfs ont un diamètre de section optimale et peuvent
être suturés sans tension.
Cette technique utilisée lors des paralysies faciales totales semble être la plus
efficace et prime sur diverses techniques telles que les anastomoses spinofaciales,
phrénofaciale, glossopharyngofaciale, ou encore l’anastomose latéroteminale avec
déroutement du nerf facial intratemporal ( technique de MAY modifiée)… Cependant
les principaux défauts de cette technique sont une absence de réinnervation dans le
territoire frontal, l’hémiatrophie linguale, une réapparition de la paralysie à l’émotion
et la présence de syncinésies.
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