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Gestion mentale et lutte contre l'illettrisme
Récemment, lors d'une émission TV traitant de l'illettrisme, j'ai pu mesurer ce
qu'il restait à faire lorsqu'on désirait aider quelqu'un à apprendre. Au cours de ce reportage, nous
avons vu et entendu des adultes, hommes et femmes, voulant apprendre à lire. Tous désiraient
savoir lire, ne serait-ce que pour comprendre les papiers de l'administration. Ils souffraient aussi
de ne pas avoir un emploi très passionnant à cause de ce handicap. On lisait sur leur visage l'effort
qu'ils faisaient pour s'appliquer. Certains pleuraient... Nous avions devant nous des personnes
terriblement motivées.
Reconnaissons que nous avons souvent entendu dire qu'à l'école, ou elles
étaient allées, elles n'avaient pas cru devoir faire l'effort indispensable pour apprendre, malgré les
conseils reçus...
Je me souviens particulièrement d'une séquence où l'on voyait un homme de
trente cinq ans s'efforçant de lire un texte en présence d'une monitrice bénévole qui l'assistait avec
beaucoup d'application et une grande bonne volonté. (Il est vrai que cette activité est assurée par
des associations de soutien regroupant des personnes désireuses de secourir autrui et souvent très
dévouées). La lecture n'était évidemment pas très coulante. Dès que le lecteur écorchait un mot,
déformait une diphtongue, sa "secouriste" lui faisait aussitôt reprendre correctement le mot
déformé, sans le laisser souffler. Elle le faisait certes avec beaucoup de gentillesse, mais cela ne
suffit-il ?
Cela m'a rappelé une expérience que j'ai vécue il y a quatre ans. J'étais de
passage chez une voisine, institutrice en retraite, qui essayait d'améliorer l'orthographe d'un de ses
petits-fils, Benoît, un gamin d'une douzaine d'années. Ce jeune était déjà sur une "voie de garage",
classé parmi les élèves les plus faibles. Sa grand-mère s'était toujours occupée d'enfants de
milieux plutôt défavorisés. Elle avait exercé dans un quartier de forte immigration. Elle tenait à
faire profiter Benoît de son expérience : elle le jugeait naturellement bien meilleur que ce que son
"orientation" scolaire pouvait laissait penser.
L'exercice portait sur la conjugaison du verbe "faire", au présent de l'indicatif.
Benoît récitait: "Je fais, tu fais, il fait, nous faisons, vous faisez, ils...". Et sa grand-mère de le
couper : "Non ! Vous faites ! Allez recommence !". Et Benoît, obéissant, reprenait : "Je fais, tu
fais, il fait, nous faisons, vous faisez, ils font". Et sa grand-mère de recommencer...
Cette scène fut répétée quatre fois, sans succès. La dernière fois, notre
maîtresse déçue n'a pu s'empêcher de dire : "Mon Dieu, ce n'est pourtant pas difficile ! A quoi
penses-tu? Tu ne fais pas attention ! Comment n'arrives-tu pas à te mettre "vous faites" dans la
tête !?"
Je suis alors intervenu, disant à Benoît : "Penses que tu fais une faute à vous.
Mets-toi dans la tête qu'il faut dire vous faites. Quand tu l'auras fait et que tu te sentiras sûr de toi,
tu réciteras".
Après un court moment, l'enfant reprend la conjugaison, lentement, mais
sûrement. Certes, il a pris son temps, mais nous n'avons pas entendu : "Vous faisez" ! La grand-