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Correspondances en Nerf & Muscle - Vol. III - n° 2 - octobre 2005
éditorial
annonçant, enfin, l’arrivée du “périphérologue”. En effet, les mitochondriopathies
ne semblaient intéresser le nerf périphérique que de façon contingente, histoire de dire
que les syndromes étaient multisystémiques. Avec le MNGIE déjà, la neuropathie
périphérique faisait partie intégrante du syndrome et parfois, certes très rarement,
au premier plan. C’est surtout avec le syndrome SANDO et le CMT2A que les choses vont
radicalement changer. Le syndrome SANDO associe une neuropathie ataxiante,
une dysarthrie et une ophtalmoplégie. La fréquence de tels cas est, apparemment,
actuellement rare, mais sans doute sous-estimée. L’ophtalmoplégie et la dysarthrie
peuvent manquer ou être au second plan. Il faut maintenant penser à ce diagnostic
devant une neuropathie ataxiante chronique. Pour le deuxième syndrome,
c’est en quelque sorte la démarche inverse qui s’est produite. Le CMT axonal de type 2
était connu et, à ce jour, seule une famille présentait une mutation génétique.
C’est en reprenant tous les autres cas de CMT2A, lié au chromosome 1, que l’on a pu
mettre en évidence une mutation de la mitofusine 2 (MFN2) de l’ADN nucléaire.
On se trouve donc en présence de deux syndromes périphériques opposés : l’un, sensitif,
qui correspond plutôt à une ganglionopathie et l’autre moteur, s’apparentant
à une neuropathie axonale. Dans le premier cas, le gène responsable le plus souvent
intéressé est la POLG (polymérase gamma). L’ophtalmoplégie externe progressive
à hérédité mendélienne, récessive ou dominante, est le plus souvent due à une mutation
POLG. La polymérase gamma est un enzyme dont l’action est assez complexe et,
chez la souris déficitaire en POLG, présente un tableau typique de souris âgée,
ce qui semble impliquer les mitochondries dans le vieillissement. Il est donc intéressant
de noter que l’altération d’un enzyme impliqué dans le vieillissement est susceptible
de provoquer une ganglionopathie. En fait, le mécanisme responsable est
vraisemblablement plus complexe, mais il faut retenir de cela qu’une ganglionopathie
presque pure, d’allure chronique, peut être provoquée par une altération mitochondriale.
Dans le deuxième syndrome CMT2A, c’est l’altération d’une protéine mitochondriale
de fusion, la MFN2 qui est impliquée dans la genèse de la neuropathie. Un modèle
animal, la souris knockout hétérozygote MFN2, présente un phénotype normal,
mais une altération mitochondriale. La mobilité et le transport des mitochondries sont
des éléments clés pour le fonctionnement axonal, notamment du nerf périphérique.
La mutation de la MFN2 est la cause principale du CMT2A et cette découverte ouvre
de très intéressantes perspectives dans la compréhension de la physiopathologie
des polyneuropathies axonales, acquises et héréditaires. De futures études viendront
sûrement éclairer et alimenter ce nouveau chapitre de la pathologie du nerf
périphérique.
De cet éditorial, qui est plutôt une revue historique mettant en perspective le rôle des
mitochondries dans la pathologie nerveuse périphérique, il ressort qu’après l’ère
immunologique, une nouvelle ère débute, celle de la mitochondrie. Il n’est pas impossible
que des altérations mitochondriales soient également responsables d’autres pathologies
comme les maladies du motoneurone... Affaire à suivre ! ■