Elle avait changé de tenue, elle était comme les autres, devenue banale, commune,
malgré les bijoux étincelants qui ornaient ses bras, ses mains et son cou.
Certains criaient son nom, les flashs crépitaient de toutes parts, puis sans un mot elle
s’est engouffrée dans la Limousine, comme heureuse d’avoir pu échapper à la foule,
surtout à moi.
Je suis resté le bras tendu, bête, et pour la première fois depuis longtemps, je me
suis senti ridicule, humilié.
Son arrogance de star l’avait soudain rendue d’un coup beaucoup moins
sympathique. Elle m’avait zappé, volontairement, et je me suis juré à ce moment-là,
de faire la même chose la prochaine fois que je la verrai quelque part, que ce soit
dans la rue, au spectacle ou à la télévision, oui, je ferai comme elle, je zapperai.
J’étais sur le point de partir lorsque mon bras fut saisi par la main de son mari. J’étais
le fan qui étais là à leur arrivée et qui avait attendu trois heures, devant l’entrée du
Théâtre, afin d’obtenir une petite dédicace, sur un petit bout de papier, qui m’aurait
tant fait plaisir.
Il en était ému, et son embarras devant l’attitude de sa belle était grand, bien qu’il
n’en fût pas responsable. Il a pris l’affiche, y a griffonné quelques mots, puis m’a
offert deux places pour le spectacle.
Devant mon refus de prendre les billets il a ajouté « ne venez pas pour elle, mais
pour tous les autres, je vous assure que ça en vaut la peine ». Je l’ai remercié et je
suis rentré chez moi, à la fois amer, et satisfait.
Après mûres réflexions j’y suis allé, comme il me l’avait demandé.
J’étais installé à la première rangée du carré d’or, fauteuil face à la scène, entouré de
personnalités prestigieuses du monde des arts et du spectacle.
Il avait eu raison de m’inviter, la pièce était formidable.