« Toutes les études récentes en immunologie et en génétique sont
passionnantes, estime la Dre Maier. Elles nous aident à mieux
comprendre les mécanismes de la sensibilisation et de la bérylliose
chronique. Et elles nous font entrevoir de nouvelles perspectives de
traitement et de prévention. »
quatre ans. Admettons que le test est
anormal. Étant donné ses imperfec-
tions, un tel résultat doit être confirmé
par un second. Si le second test est
anormal, le travailleur est sensibilisé. Et
donc dans un état similaire à celui souf-
frant d’une allergie asymptomatique.
Certains resteront à ce stade de sensi-
bilisation. Mais d’autres, après une pé-
riode de latence de la maladie, de durée
variable, développeront la maladie pro-
gressivement. Les symptômes — fatigue,
toux, douleurs thoraciques ou articu-
laires, perte de poids, souffle court,
fièvre — commenceront à se manifester.
Malheureusement, ces premiers symp-
tômes ne sont pas spécifiques à la bé-
rylliose. Ils peuvent se manifester pour
d’autres raisons.
[PT]
Que doivent-ils faire dans
ce cas ?
[LM] Consulter un pneumologue,
qui procédera à des tests complémen-
taires, entre autres une radiographie
pulmonaire, et fort probablement une
bronchoscopie pour confirmer le diag-
nostic.
[PT]
Si vous êtes ce pneumo-
logue, que dites-vous au patient
qui vient vous consulter avec
deux résultats anormaux ?
[LM] Je lui confirme qu’il n’y a
pas de traitement connu permettant
une guérison totale, mais qu’il peut
rester dans un état stable sans plus
de symptômes significatifs. Mais s’ils
augmentent, il faudra probablement
commencer un traitement aux corti-
costéroïdes pour ralentir la progression
de la maladie. Et il doit impérativement
être réaffecté à un autre poste ou à un
autre emploi, en fait dans un lieu où il
ne sera plus exposé au béryllium.
[PT]
Et pour ceux qui pré-
sentent des résultats marginaux ?
[LM] Dès la réunion de groupe, j’ai
mentionné la possibilité que quelques
cas forment un troisième groupe avec
des résultats douteux ou impossibles à
obtenir pour des raisons techniques.
Les prélèvements doivent être repris,
mais il n’y a pas lieu de s’en inquiéter.
[PT]
L’entretien avec un travail-
leur bérylliosé dure-t-il longtemps ?
[LM] Chez nous, habituellement, la
première rencontre après l’annonce au
travailleur d’un résultat anormal dure
au moins une heure trente et peut aller
jusqu’à deux heures. Il faut prévoir
aussi d’autres rencontres, un suivi mé-
dical et, dans certains cas, un soutien
psychologique.
[PT]
Et si le travailleur décide
de continuer à travailler au même
poste ?
[LM] C’est son droit. Notre devoir
consiste à lui garantir la confidentialité
et à nous assurer qu’il a bien compris
les avantages et les désavantages de sa
décision.
[PT]
L’employeur sera-t-il mis
au courant ?
[LM] Il faut trouver un moyen qui
garantisse la confidentialité, tout en
respectant la décision du travailleur,
mais qui permette aussi à quelqu’un
d’être mis au courant de la situation. Il
faut se rappeler et rappeler au travail-
leur que le but principal du test, c’est
de déterminer les situations de travail
qui doivent être corrigées, pour éviter
que d’autres travailleurs éprouvent le
même problème. Comment y parvenir?
C’est chaque fois un défi que nous abor-
dons selon les principes et les outils du
« consentement éclairé ».
[PT]
Les recherches permettent-
elles d’entrevoir d’autres tests
plus performants que le test
sanguin ?
[LM] Oui, les efforts de recherche
progressent. Trois ou quatre tests en
sont soit à l’étape de la validation, soit
à celle de la vérification d’hypothèses.
Il ne faut toutefois pas s’illusionner.
À brève échéance, ces tests ne rempla-
ceront pas l’actuel, mais ils fourniront
des informations complémentaires
qui, globalement, avec tous les autres
renseignements versés au dossier d’un
patient, permettront un meilleur diag-
nostic et une meilleure différenciation
entre la sensibilisation et la bérylliose
chronique.
[PT]
Quelles possibilités des
recherches actuelles vous semblent
les plus prometteuses dans une
perspective de prévention ?
[LM] Toutes les récentes études en
immunologie et en génétique sont pas-
sionnantes. Elles nous aident à mieux
comprendre les mécanismes de la sen-
sibilisation et de la bérylliose chro-
nique. Elles nous font entrevoir de
nouvelles perspectives de traitement et
de prévention. Elles nous permettent
aussi de clarifier la question difficile
de la susceptibilité individuelle.
PT
Guy Perrault
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Hiver 2006 Prévention au travail
Photos : Denis Bernier