Quelle(s) définition(s) de l`économie de la fonctionnalité ?

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 club économie de la fonctionnalité
& développement durable
Quelle(s) définition(s)
de l'économie
de la fonctionnalité ?
 Patrice Vuidel, Christian Du Tertre, Atemis
 Séance du 12 avril 2016
Club économie de la fonctionnalité
& développement durable
 Séance du 12 avril 2016
LES TROIS DYNAMIQUES ORIENTÉES
« ÉCONOMIE DE LA FONCTIONNALITÉ » p.3
LA SOLUTION CENTRÉE SUR LE MAINTIEN D'USAGE p.3
LA SOLUTION ORIENTÉE PERFORMANCE D'USAGE p.4
LA SOLUTION ORIENTÉE DYNAMIQUE TERRITORIALE p.5
échanges avec les participants p.7
•LE SENS ET LE PÉRIMÈTRE DE L’ÉCONOMIE DE LA FONCTIONNALITÉ p.7
•ECONOMIE DE LA FONCTIONNALITÉ ET ÉCONOMIE CIRCULAIRE p.7
•LA DIMENSION SERVICIELLE AU SEIN DU MODÈLE ÉCONOMIQUE p.8
•LE DÉVELOPPEMENT DURABLE À L’ÉCHELLE D’UN TERRITOIRE p.8
 Participants à la séance
Benqué Nadia (ATEMIS- IEEFC)•Bobroff Jacotte (Laboratoire LATTS)•Campagnac Elisabeth (Laboratoire
LATTS)•Cantau Danielle (BPI)•Champagne Michele (Veolia)•Cristofini Olivier (Paris 1, Sorbonne)•
Delorme Erwan• Demissy Romain (ATEMIS)• Du Tertre Christian(ATEMIS)• Diane Duong (CDC)•
Emzivat Hansa (Cuisinier domicile)•Lamerand Morgane (PAJ)•Lapierre Catherine (4D)•Laudier Isabelle
(CDC)•Le Dilosquer Pierre Yves (PAJ)•Ollivier Catherine (CDC)•Osmani Fatiha,•Pasquelin Brigitte
(ATEMIS)•Perrier Claire (ATEMIS)•Pouteau Nicolas (Région Ile de France)•Rivière Elodie (RATP),•
Roussel-Dessartre Hervé (Collectif transition citoyenne)•Saint-Alary Eric (9 Business)•Skriget-Hahn Catherine (CNAM)•Toulorge Guillaume•Vermeylen Paul (City consult)•Vuidel Patrice(ATEMIS)•
sommaire
 séance
du 12 avril 2016
Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
L’objectif de cette séance est de discuter de la définition ou des définitions de l’économie de
la fonctionnalité. Derrière une même expression, a-t-on des réalités différentes ? D’où l’intérêt
à identifier les différentes acceptions, à repérer les points communs comme les spécificités, de
façon à construire un point de vue partagé entre les différents acteurs qui agissent au titre de
l’économie de la fonctionnalité.
Deux points de vigilance : tout d’abord, la réalité est toujours plus riche que les représentations
que l’on peut en avoir ; Il faut donc être attentif au risque de vouloir « ranger » les expériences
connues dans une catégorie qui rendrait compte à elle seule de la démarche menée. Par
ailleurs, il ne s’agit pas ici de poser une échelle de valeur entre les différentes dynamiques,
mais de rendre compte de leurs points de départ, de leurs intentions.
Quelle(s) définition(s) de l'économie
de la fonctionnalité ?
Les trois dynamiques orientées « économie
de la fonctionnalité »
Trois dynamiques orientées économie de la fonctionnalité ont pu être observées :
• Développement de solutions centrées sur le maintien de l’usage
• Développement de solutions orientées performance d’usage ou effets utiles du service
• Développement de solutions orientées dynamique territoriale
Les points de départ de la réflexion sont différents selon la dynamique, de même pour les
acteurs qui s’en saisissent ; Néanmoins, les dynamiques se ressemblent sur trois points :
• il s'agit à chaque fois de se dégager du modèle industriel linéaire1 dominant ;
• les acteurs sont à la recherche d’un modèle économique qui permette de préserver les ressources non renouvelables et de limiter la production de déchets ;
• lorsque l’offre s’appuie sur des biens durables, ces biens ne sont plus vendus mais mis à disposition dans une dynamique de service.
Ces points communs renvoient à des questions communes : • Qu’est-ce qu’un modèle de développement durable ?
• Les solutions proposées permettent-elles in fine une décroissance relative / absolue de l’usage de la matière / de l’énergie ? La solution centrée sur le maintien d'usage
Mots clés : usage, réduction des ressources matérielles et fossiles, éco-conception, gestion en
boucles des biens, environnement.
Les industriels, producteurs, distributeurs ou entreprises de service engagées dans la réparation
des biens constituent un ensemble d'acteurs qui mobilisent des biens durables dans leurs activités
et sont donc concernés par cette dynamique. La visée principale de cette dynamique consiste
à préserver les ressources naturelles non renouvelables grâce à une logique d'économie
circulaire : l'impact environnemental du cycle des produits va être analysé, la responsabilité
des producteurs est élargie et va conduire à une internalisation des coûts de fin de vie. Il s'en
dégage ainsi un nouveau modèle d'affaire, le bien est mis à disposition des clients dans le
cadre de nouveaux modes de contractualisation impliquant le développement de relations de
moyen / long terme.
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C’est à dire qui, une fois le bien utilisé, le considère comme un déchet.
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 séance
du 12 avril 2016
Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
L'exemple bien connu est celui de Xerox où la location est couplée à des services de
maintenance et à la récupération des copieurs en fin de vie : plus de 70% des composants
sont récupérés pour être intégrés dans de nouveaux copieurs.
Il est à noter que l’économie de la fonctionnalité ne peut être définie par le seul passage
de la vente à la location d'un bien : il faut que la recherche de gain environnemental
soit un élément fort du modèle. Il existe donc des contre exemples comme le lavomatic, la
bibliothèque, le covoiturage lorsqu'il n’est pas inscrit dans une solution de mobilité territoriale
(c’est à dire articulé à des enjeux de mobilité et inscrit dans une solution plus large de mobilité).
La solution orientée performance d'usage
Mots clés : performance d’usage, effets utiles des services, système-Produit-service orienté
résultat, solution intégrée de biens et services, co-production des solutions, responsabilité
élargie des entreprises sur la performance, coopération, ressources immatérielles, sphères
fonctionnelles.
Ici le périmètre d'acteurs associés à la dynamique est plus large que précédemment : il s'agit
de l’ensemble des acteurs, producteurs et distributeurs de biens durables, de consommables,
offreurs et bénéficiaires de services. Le modèle peut donc potentiellement s’appliquer à tout
acteur économique et à toute offre.
La visée de cette dynamique est caractérisée par la recherche d'un effet ciseau, à travers
la mise en œuvre d’une solution intégrée. La convergence d’intérêt entre les offreurs et
les bénéficiaires est tout d'abord recherchée afin de limiter les moyens matériels mobilisés
d’une part, d’engendrer une croissance des facteurs immatériels (augmentation de la valeur
servicielle, des effets utiles de l’offre) d’autre part.
La performance s'inscrit dans un effet direct vis à vis du bénéficiaire mais s'intéresse également
aux effets indirects : certains effets dépassent le bénéficiaire direct et atteignent d'autres champs
de valeur, notamment à travers la prise en charge d'externalités négatives ou le développement
d'externalités positives.
La performance de la solution passe par la capacité à intégrer un ensemble de biens et de
services. Le paiement est en partie adossé à cette performance. Le rôle du bénéficiaire est
important dans la tenue de la performance : il y a un enjeu de coopération avec lui.
En centrant sa réflexion sur l'usage et la performance attendue par le bénéficiaire, il est possible
de trouver des solutions alternatives à l’offre initiale. Par exemple un matériel audio-visuel peut
être mis à disposition d’un établissement scolaire (et non pas vendu) dans le cadre d’une
solution intégrée (biens + accompagnement des enseignants et des élèves à l’usage, prise en
compte des enjeux pédagogiques, maintenance préventive), en recherchant la convergence
d'intérêts. Dans ce cas, passée la durée de l’amortissement, il est possible de réduire le coût
mensuel pour le bénéficiaire. Un autre exemple plus « radical » : la tonte mécanique peut être
remplacée par de la tonte animale dans un but d'économie financière et de réduction des
consommations énergétiques.
Certaines activités de vente de consommables peuvent être concernées par cet effet ciseaux,
en accompagnant les clients à limiter leurs consommations (voir l’exemple de Lyreco, présenté
lors de la séance du Club du 24 octobre 2012, ou les énergéticiens qui proposent des contrats
de performance énergétique). Autre exemple de solution alternative : le passage du pesticides
chimiques aux régulations écologiques.
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 séance
du 12 avril 2016
Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
Dans d’autres cas, la dynamique va se concentrer sur la recherche de l’augmentation de la
valeur servicielle de l’offre, afin de sortir d’une logique de volume (exemple : l’imprimerie du
Détroit, présentée lors de la séance du Club du 27 mai 2015 –voir compte-rendu).
Lorsque l’offre initiale est une offre de services mobilisant peu de biens, il est recherché la
valorisation, le développement des effets utiles directs et indirects, pour contractualiser sur une
dépense acceptable et non plus du temps (exemple de l’entretien du domicile : passer à une
solution de bien être / bien vivre dans son domicile).
ATEMIS et les membres de l’Institut Européen de l’économie de la fonctionnalité et de la
coopération sont engagés dans la promotion de cette recherche de performance d’usage.
Dans ce cadre les acteurs cherchent à prendre en charge, dans une logique intégrée :
• la préservation des ressources naturelles non renouvelables, la limitation de la
production de déchets ;
• le développement de l’utilité sociale, de la valeur servicielle de l’offre des entreprises
quel que soit leur statut ;
• l’attention portée au travail, au sens du travail, à la santé au travail dans une perspective
d’émancipation et de créativité ;
• une gouvernance associant la diversité des parties prenantes
Cette approche spécifique met en avant la question de la coopération. Celle-ci se joue
à différents niveaux et permet de passer d’une organisation centrée sur la chaine de valeur
à la prise en compte d’un écosystème composé d’acteurs diversifiés et coopérants. En effet,
comme déjà exposé, une performance s’appuie sur l’engagement des deux parties, les
salariés/intervenants et les bénéficiaires. A l’interne de l’entreprise, il s’agit donc de mettre en
place un management renouvelé qui dépasse la logique de contrôle, un accompagnement
des salariés impliquant des moyens permettant de connaitre les contraintes du travail des
personnes en situation d’exécution ainsi que les ressources qu’elles mobilisent. La coopération
est une ressource stratégique, source de productivité.
La solution orientée dynamique territoriale
Mots clés : coopération, performance d’usage, effets utiles, performance territoriale, solutions
intégrées produits-services, coopération, ressources immatérielles, sphères fonctionnelles,
patrimoine immatériel territorial, développement territorial durable
Le périmètre d’acteurs s’élargi encore davantage au sein de cette dynamique. Il recouvre tous
les acteurs du territoire qui sont pertinents au regard de la sphère fonctionnelle concernée,
qu’ils proviennent du secteur privé, public ou associatif, de même que les bénéficiaires de la
solution.
La sphère fonctionnelle renvoie à la prise en charge d’un enjeu à l’échelle du territoire
et dont la réponse s’écarte d’une logique de secteur ou de filière. En effet, répondre à un
enjeu du territoire dans une perspective de développement durable implique la conception de
solutions sur la base d’un nouveau périmètre d’action, dans une logique de prise en charge
des externalités, et de recherche à la fois de réductions des moyens matériels mobilisés et de
développement des effets utiles. La réflexion en termes de sphère est systémique et appréhende
également les effets directs et indirects de la solution à l’échelle du territoire. Des exemples
de sphères fonctionnelle : habiter, cultiver sa santé/son bien-être, s’alimenter, s’informer et
connaître, assurer la mobilité des biens et des personne.
Ainsi, certaines entreprises s’inscrivent dans une sphère fonctionnelle et recomposent leur offre
en fonction de ce nouveau périmètre. Par exemple, il ne s’agit plus de faire de la construction
de logements mais de répondre aux enjeux de la sphère de l’habiter, permettant de mieux
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 séance
du 12 avril 2016
Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
vivre et mieux habiter sur son territoire. Ce, en réfléchissant en coopération avec d’autres
acteurs publics ou privés intéressés par cet enjeu.
L’impulsion peut également venir des habitants qui veulent répondre à un besoin / enjeu du
territoire. Exemple : les enjeux énergétiques portés par l’association Le Varne dans la Nièvre
(cf compte-rendu de la journée annuelle du 15 décembre 2014).
Une collectivité locale peut également être initiatrice afin de trouver une réponse à un enjeu
territorial. Pour exemple, un dispositif porté par le CERDD (CEntre Ressource du Développement
Durable), mis en œuvre ATEMIS et E2I, vise l’accompagnement de trois territoires dans de
nouvelles forme de coopération entre élus, techniciens, acteurs privés, associatif et les habitants,
à partir à chaque fois d’un enjeu. Ce, dans la perspective de construire une solution intégrée
en mobilisant les ressources du territoire.
Les trois territoires actuellement accompagnés dans le Nord Pas-De-Calais sont :
• La communauté d’agglomération de La Porte de Hainaut sur l’enjeu de la réduction et la
valorisation déchets fermentescibles. • La communauté de commune du sud Artois sur la rénovation énergétique des logements. • La communauté urbaine de Dunkerque sur le système alimentaire territorial. Un référentiel est en construction, au service d’une méthodologie adaptée à l’entrée par le
territoire. Ce référentiel a été présenté lors de la séance du Club du 28 janvier 2015 (voir
compte-rendu en ligne). Il est composé de :
 Quatre objectifs à intégrer et à traduire de manière opérationnelle :
• Réduire l’usage des matières non renouvelables et se préoccuper d’améliorer leur
durabilité
• Développer les activités dans une démarche de service, permettant notamment la création
d’emplois pérennes sur le territoire
• Réduire les inégalités sociales d’accès aux services
• S’appuyer sur les acteurs concernés pour construire le territoire
 Six principes d'action orientés « économie de la fonctionnalité et de la coopération » dans
une perspective de développement durable.
• Un principe de résilience/d’ancrage : la prise en compte des spécificités, des ressources
issues de l’histoire du territoire
• Un principe d’innovation fondée sur l’expérience des acteurs
• Un principe d’intégration fondé sur l’attention aux usages
• Un principe de mutualisation des ressources et de leur financement
• Un principe d’articulation et de synchronisation temporelle
• Un principe de circuit court et de proximité
 Quatre exigences pour la gouvernance
• Favoriser la co-élaboration avec les habitants et les usagers du territoire
• Articuler pensée d’ensemble et structurée, d’un côté et dimensions opérationnelles, de
l’autre
• Articuler le temps court et le temps long
• S’accorder sur un système de valeurs et développer l’esprit de responsabilité
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https://1001pact.com/
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 séance
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Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
échanges avec les participants
Le sens et le périmètre de l’économie de la fonctionnalité
Paul Vermeylen : D’où vient le terme « économie de la fonctionnalité » ? Quels sont les
termes employés dans d'autres pays ?
Patrice Vuidel : Il y a différentes dynamiques dans différents pays et effectivement les termes
employés soit ne sont pas identiques, soit n’ont pas complètement les mêmes acceptions
(exemple : PSS orienté usage); il faut chercher des passerelles, des équivalences entre les
termes. Un travail a été réalisé visant à établir l'état de l'art de l’économie de la fonctionnalité
en France et à l’international, il sera publié prochainement (voir compte-rendu de la séance du
Club du 15 mars 2016 qui expose l’état de l’art). Un autre travail a consisté en la production
de documents pédagogiques via des projets européens et a permis de travailler sur l’économie
de la fonctionnalité selon différentes langues (anglais, italien, espagnol).
Christian Du Tertre : Le terme « économie de la fonctionnalité », correspond à une réflexion
sur les usages comme moyen de modifier le modèle économique, c'est un point important car
ce n'est pas ce qui se dit dans le débat actuel. Le changement de modèle économique n’est
pas un problème technologique ou de forme de contractualisation, c’est une problématique
liée aux usages, d’où l’intérêt de populariser le terme « fonctionnalité ». De notre côté, nous
avons choisi d’ajouter le terme « coopération », pour ne pas tomber dans le « fonctionnalisme »
et l'aspect matériel, technologique du changement. La coopération renvoie au vivre ensemble
au sein des territoires mais également à l’organisation du travail au sein des entreprises, c’est
un comportement et une posture dans le travail, la capacité des uns et des autres à prendre
en compte les contraintes des autres dans son propre travail. C’est une incitation à l’ouverture
aux autres métiers, à envisager le travail dans un rapport à l’autre. La question du travail est
une question politique centrale. S’ils ne changent pas le travail, les modèles n’ont pas d’intérêt.
économie de la fonctionnalité et économie circulaire
Catherine Lapierre : D’un point de vue sémantique, l'économie de la fonctionnalité fait-elle
partie de l'économie circulaire ?
Christian Du Tertre : En économie circulaire, les questions relatives à la technologie sont
dominantes. La réflexion sur les usages ou l’organisation du travail est pour le moment rarement
engagée au sein de ce modèle. Les modes de vie, les rapports sociaux et plus généralement
les conditions du vivre ensemble ne sont pas interrogés, la réflexion sur l’aspect technologique
prime et écarte par là même l’aspect social comme problématique du changement de modèle.
Les inégalités, les conditions d’accès à l’énergie, à la mobilité sont des questions sociales
et politiques qu’il est nécessaire de se poser et l’économie circulaire passe à côté de cela.
L’économie circulaire est inscrite dans la première dynamique présentée, la mise en place de
solutions centrées sur le maintien d’usage.
L’économie circulaire s’adresse principalement aux grandes entreprises, car seules de grandes
structures peuvent faire le lien entre l’usage de l’objet et sa conception. Les méthodologies
d’analyse en termes d’économie circulaire donnent des arguments d’ordre technique aux
entreprises, mais peu de moyens de revisiter la question de l’usage des objets au plan social.
Concernant les deux dernières dynamiques, peu de grandes entreprises s’en saisissent, seules
des filiales ou unités de production s’engagent.
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 séance
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Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
La dimension servicielle au sein du modèle économique
Catherine Skriget-Hahn : De grandes entreprises ont commencé dès les années 80 à se
préoccuper de la dimension servicielle, avec l'idée que le client puisse produire son propre
service. Il peut y avoir ici une récupération au profit de ceux qui produisent le service.
Christian Du Tertre : Nous sommes dans une société de service et cela implique des
changements importants : tout service est coproduit avec le bénéficiaire, ce qui constitue une
grande différence avec le modèle industriel. Certaines entreprises sont donc dans une logique
d'externalisation vers le bénéficiaire d’une partie de l’activité qu’elles géraient précédemment,
elles réalisent donc des gains de productivité importants. L’externalisation peut empêcher
l’accès au service à certaines personnes, cela n'est pas lié à l'économie de la fonctionnalité.
Néanmoins il y a un compromis social sur ce point car l’externalisation peut être bénéfique
pour d’autres, générer un gain de temps, diminuer les déplacements lorsque le service est
accessible à domicile. En ce sens, l'accessibilité peut être amplifiée. Il est à noter tout de même
que l'économie de la fonctionnalité est capable du pire, peut être financiarisée, c'est ce qu'il
s'est passé avec l'économie collaborative. Il faut donc toujours réfléchir à la visée du modèle,
fixer un cadre sur les enjeux auxquels le modèle a pour objectif de répondre.
Le développement durable à l’échelle d’un territoire
Elisabeth Ascher : Chacune des dynamiques pose un grand nombre de questions. Selon
mon expérience, la dynamique orientée sur la performance d’usage pose des problèmes au
niveau de la gouvernance lorsqu’elle est mise en pratique dans le cadre de contrats associant
la durée du service, la réduction des ressources et du financement. L’entrée sur ce qui fonde la
performance territoriale et la recomposition du périmètre est très intéressante car cela conduit
à un renouvellement de la gouvernance territoriale.
Paul Vermeylen : La globalisation de l'immatériel ne pose pas de problème en termes de
développement durable. A contrario, on transporte sur des milliers de kilomètres la plupart de nos
objets et consommables du quotidien et cela pose un réel problème en termes de développement
durable. La question du territoire est ici importante. Cette thématique est-elle prise en compte ou
bien anecdotique ?
Patrice Vuidel : Dans l’économie de la fonctionnalité et de la coopération, la question du
rapport au territoire se pose pour les entreprises accompagnées. Il s’agit d’un accompagnement
pour inscrire l’activité dans les réalités du territoire et étendre le périmètre de l’offre à des
enjeux sociaux, environnementaux. Par exemple l’offre de l’entreprise Lyreco, distributeur/
livreur de matériel de bureau, n'est pas considérée comme durable au départ. La question
du transport est centrale dans l’activité, l’entreprise va donc vers une diminution du nombre
de livraisons en étant attentive aux usages des clients. La performance se porte alors sur la
capacité de l’entreprise à comprendre les usages et ajuster son offre en fonction. L’offre se
trouve ainsi articulée aux questions d'accessibilité et de transport des consommables.
Christian Du Tertre : L’économie de la fonctionnalité vise l'effet ciseaux : réduire l'usage de
la matière et donc de son transport pour remobiliser les ressources immatérielles et apporter une
valeur de service plus importante. Le modèle s’intéresse particulièrement au développement
des ressources immatérielles (cela exclu les ressources numériques qui ont une dimension
matérielle importante), il s'agit de la santé, de la confiance, de la compétence, de la pertinence
des réponses aux enjeux de mobilité, transition énergétique, habiter...).
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Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
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