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CNRS THEMA, journal en ligne du CNRS, Département de l’Information Scientifique et
Technique, dont le siège social est établi 3, rue Michel-Ange 75794 Paris cedex 16, souhaite
permettre aux médias de se constituer des dossiers de fond, en montrant la réflexion du
CNRS sur des choix de société et son engagement dans les débats de son époque.
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ISSN 1773-0554
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Thema • Rédactrice en chef : Marie Pinhas-Diena • Rédactrice en chef adjointe : Mireille
Vuillaume • Rédacteurs : Delphine Kaczmarek, Daniel Le Méhauté • Collaboration avec la
rédaction : Julie Coquart, William Garnier, Camille Maignien, Gaëlle Multier, Guillaume Serina,
Nelly Schumacher, Philippe Testard-Vaillant, Émilie Tran Phong • Bureau de presse (+33 (0)1 44
96 51 51) : Martine Hasler (responsable), Marie-Noëlle Abat, Muriel Ilous, Claire Le
Poulennec, Gaëlle Multier • Secrétariat : Samira Techer • Webmaster : Daniel Le Méhauté •
Conception graphique et réalisation de la Une : Bruno Roulet, service de l'imprimé de la
délégation Paris Michel-Ange (avec l'aimable autorisation de l'IPGP pour l'image de l'enregistrement
sismique par GEOSCOPE du séisme de Sumatra du 26/12/2004) • Remerciements à Patrick Hesters
(France 3) et à Christine Girard (sagascience)
Contacts presse pour ce numéro :
Bureau de presse du CNRS - Muriel Ilous : +33 (0)1 44 96 43 09
Sciences de l'homme et de la société (SHS) - Laëtitia Louis : +33 (0)1 44 96 43 10
Sciences de l'Univers (SDU) - Christiane Grappin : +33 (0)1 44 96 43 36
CNRS > Presse > Thema >
Avant-propos
Les bleus de la Terre
Frisson, tremblement, tsunami
Le Déluge, les Dix plaies d'Égypte, les destructions de Jéricho, Sodome et Gomorrhe, l'éruption du Vésuve sur le
village de Pompéi… les récits de grandes catastrophes naturelles se font depuis la nuit des temps. Au-delà du
mythe présent dans presque toutes les cultures, les colères de la Terre ont toujours jalonné l'histoire de
l'humanité.
Novembre 1755 : le capitaine d'un navire britannique mouillant au large de la Barbade note dans son journal de
bord le déferlement d'une vague de plus de trois mètres de haut sur les plages de l'île. À des milliers de
kilomètres de là, un séisme d'une rare violence provoque un tsunami qui ravage la ville de Lisbonne et coûte la
vie à plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Décembre 2003 : tremblement de terre dans les environs de la citadelle historique de la ville de Bam (Iran).
20 000 victimes.
Décembre 2004 : tsunami dans l'océan Indien. Plus de 270 000 morts ou portés disparus…
Octobre 2005 : tremblement de terre au Pakistan. 50 000 victimes (chiffre encore provisoire).
À chaque fois, la nature semble se venger de la domination de l'homme et ce, de façon tristement spectaculaire.
Près de 75 % de la population mondiale vit dans des zones à risque (plaines inondables, berges de rivières,
polders, proximité d'un volcan) et s'expose à la menace d'une catastrophe naturelle.
Carte mondiale interactive des zones de subduction.
© CNRS-Sagascience-GéoManips.
Si la science peut le plus souvent fournir une explication rationnelle et de plus en plus pointue à ces événements
extrêmes en analysant leurs causes physiques, environnementales, géopolitiques, humaines, peut-elle aussi
aider la planète à se protéger des catastrophes naturelles, en particulier des tremblements de terre, des
conséquences du mouvement des plaques lithosphériques et des tsunamis ? Peut-elle lui permettre de les
anticiper, de les éviter ou d'y faire face et d'en atténuer les effets ?
Au chevet de la planète Terre, les scientifiques de toutes disciplines confondues tirent les leçons des
catastrophes d'aujourd'hui pour faire face aux menaces de demain. Et mettent en œuvre des stratégies de
prévention et d'information. De l'observation à la gestion du risque, notre planète est sous haute surveillance.
Avec toutefois une certitude pour le commun des mortels : la nature reprend souvent le dessus…
La rédaction de CNRS Thema (novembre 2005).
CNRS > Presse > Thema >
Une leçon humaine et scientifique
La tragédie de décembre 2004 dans l'océan Indien est venue rappeler que la Terre est vivante. La cicatrice
n'est toujours pas refermée mais les scientifiques sont au travail. Pour comprendre et progresser.
Un an après, les répercussions humaines, environnementales et économiques du séisme qui a secoué l'Asie du
Sud et du Sud-Est ne sont pas encore toutes mesurées. D'un point de vue scientifique, le travail se poursuit avec
précision et rigueur. Car le séisme, suivi du tsunami destructeur, a été une première dans l'histoire, dans une
zone non préparée à un tel événement. John Ludden, directeur scientifique adjoint de la Division « Sciences de la
Terre » du Département des sciences de l'Univers du CNRS et chercheur à l'Institut de physique du globe de
Paris, évoque les contours de l'action scientifique menée depuis la tragédie.
Première leçon, l'ampleur du séisme. « Il s'agit d'un événement plus grand que prévu, affirme-t-il. On savait qu'il y
aurait un événement d'une grande ampleur, autour de 8,5 sur l'échelle de Richter. Mais on ne pensait pas qu'il
atteindrait entre 9 et 9,3. D'ailleurs, les scientifiques sont toujours en train d'essayer de calibrer précisément ». Le
tremblement de terre suivi du raz-de-marée a eu lieu dans une partie du monde presque « inconnue » pour la
majorité des spécialistes : « Nous n'avons pas d'élément de comparaison pour cet événement dans cette zone »,
explique John Ludden. Les experts travaillent donc presque « à vue ».
Écouter la terre
Évaluer les dégâts reste un travail prioritaire, même un an après. « Nous ne disposions d'aucun enregistrement
antérieur, rappelle le géologue. Par conséquent, nous avons envoyé sur place une mission de l'INSU, de l'IPG de
Paris et de l'Ifremer qui était en cours en mer non loin de là ». Objectif : écouter la Terre au plus profond et tenter
de comprendre. « Nous avons largué dans l'océan une série de sismomètres. Actuellement encore, il y a des
'aftershocks' tous les jours d'une magnitude de 7 environ ». Selon John Ludden, aucune carte topographique de
la faille n'existait. Combler cette lacune est donc une urgence. « Nous avons dans la région une série de capteurs
GPS installés par Christophe Vigny dans le cadre d'un projet européen, et qui nous permet de voir le mouvement
des plaques et de mesurer la vitesse de ces mouvements ».
Le CNRS est présent dans de nombreuses missions dans l'océan Indien depuis le mois de décembre 2004.
Associé à des agences françaises et internationales, les actions sont multiples. « Un appel d'offre de l'Agence
nationale pour la recherche (ANR) sur les catastrophes telluriques a été lancé, précise John Ludden. On peut
essayer de mesurer les tremblements de terre précurseurs, quand la faille commence à bouger : mesurer les
mouvements, les échappements de gaz radon (qui vient des profondeurs de la croûte terrestre), les champs
magnétiques. Le CNES a d'ailleurs lancé un satellite appelé Demeter. Sa mission est de mesurer les champs
électromagnétiques dans les plus grandes failles ».
La Californie, le Japon et les Antilles en danger
Outre l'océan Indien, les actions se multiplient sur tous les théâtres de la planète sensibles sismiquement. « Tous
les laboratoires des sciences de la Terre du CNRS sont mobilisés. L'INSU a un rôle de coordination nationale et
européenne des grands projets ». Les Antilles françaises sont la zone d'activité particulièrement surveillée, car la
situation est presque comparable à celle de Sumatra, avec un mouvement de 4 cm par an. « La plaque
Atlantique-Ouest s'enfonce sous la plaque Caraïbe de 2 cm par an. Mais un tremblement de terre de la même
violence qu'à Sumatra demeure improbable. Nous savons qu'en 1883, il y a eu un tremblement de magnitude 8,3
au large de la Guadeloupe. Aujourd'hui, l'activité sismique dans cette zone se situe plutôt autour d'une magnitude
5 ou 6 mais il faut rester vigilant ».
Ailleurs dans le monde, de nombreuses actions scientifiques sont en cours. John Ludden explique qu'« en
Californie, forte zone sismique, les Américains essayent de mesurer les mouvements dans la faille de Parkville. Il
s'agit de l'endroit du monde où le réseau de GPS est le plus dense. On essaye donc de 'prédire'. À cet endroit de
la Californie, sur les cent cinquante années d'histoire répertoriées, ça bouge tous les vingt ans ». Au large du
Japon, il existe un projet de forage de 5 à 6 km de profondeur. L'idée est de placer des capteurs dans le
décollement même des plaques. « Y a-t-il des changements de température ? Quels types de fluides
s'échappent ? », s'interroge John Ludden. Si le séisme et le tsunami de l'an dernier ont apporté quelques vérités
scientifiques, ils ont surtout soulevé de nouvelles questions. Le défi des « docteurs de notre planète », prévenir
plutôt qu'avoir à guérir, s'avère une tâche immense.
John Ludden
INSU-Département sciences de l'Univers du CNRS
Institut physique du globe de Paris (IPGP)
Tél. : +33 (0)1 44 27 51 93 ou +33 (0)1 44 96 43 83
Mél : [email protected] ou [email protected]
Consulter les sites web : IPGP et INSU
CNRS > Presse > Thema >
Sommaire
Avant-propos
• Les bleus de la Terre. Frisson, tremblement, tsunami
Une leçon humaine et scientifique
Phénomènes et stigmates
• Déformation lithosphérique et phénomène de subduction
* Sur l'échelle de...
• Inquiétude chez les géophysiciens
• Du béton armé pour la défensive
• Urbanisme et risque sismique : comment réduire la vulnérabilité
• Risque sismique dans la Baie des anges
La Terre en observation
• Séismes : à la recherche de signaux d'alerte
• La prédiction, une science à trois temps
• Vol au-dessus d'un séisme
• La Terre, une planète turbulente auscultée par GEOSCOPE
• Une mesure pour les mouvements du sol : le réseau accélérométrique permanent
• Séismes en France : une surveillance en temps réel
• Sismomètres voyageurs
• Le GPS : pour ne pas mesurer à côté de la plaque… tectonique
• En Équateur ou en mer Ligure, les OBS veillent…
Atlas des risques sismiques
• Le BCSF surveille les séismes de France
• Les Antilles au cœur d'un vaste chantier géologique
• Pyrénées : zone sous surveillance
* Le Plan de prévention des risques sismiques pour la ville de Lourdes
• La Côte d'Azur, une terre de contrastes
* Instabilités gravitaires terrestres et sous-marines
* Une prise de conscience politique
• L'Europe sismique et ses grandes failles
• Lisbonne, 1755
* Le tremblement de terre de Lisbonne
• Le Golfe de Corinthe, laboratoire naturel de sismologie
* Un nœud dans le forage
• 15 000 ans de séismes
* Voyage au centre de la terre
• Bam 2003 : un tremblement de terre dévastateur
• Le chasse-neige indien
• Le Chili : une forte activité sismique
* Chili : une coopération internationale
L'Indonésie, un an après...
• Une frontière de plaques complexe
• Frontière à haut risque
• Le séisme de Sumatra : un nouvel éclairage de la Terre
• Sumatra ou le défi lancé aux scientifiques
• SAGER, voyage vers l'épicentre du séisme
• Le séisme de décembre 2004 passé au crible grâce au GPS
• Détection des tsunamis : une course contre la montre
• Les blessures de la grande bleue en 3D
• 2,5 à 5 km3 d'eau par kilomètre de plage !
* Jusqu'à 110 mètres d'altitude
* Des bouleversements écologiques hors normes
• « TSUNARISQUE » : de la prévention avant toute chose
* Priorité à Cilacap, principal port menacé
* Expert ès-« coulées de débris »
• Animaux et tsunamis : l'échappée belle
• Aceh ou la colère de Dieu ?
• Le tsunami : un tournant dans la vie des Sri-Lankais
• Reconstruire Vellaveediya
• La question de l'eau au Sri Lanka
• L'eau source de mort
Des récits, des pensées et des hommes
• Poséidon, dieu ébranleur et fondateur en terre d'Athènes
• Catastrophe et littérature de colportage
• Mémoires des catastrophes naturelles
* Politique et catastrophe
• La « mort collective » sous la loupe de la sociologie
* Catastrophe « asiatique » : à qui la faute ?
• Internet et SMS au secours des catastrophes
• De Lisbonne à Sumatra, qu'avons-nous appris ?
• La France et les risques naturels : peut mieux faire
• L'humanitaire expert : des victimes plus abstraites
Pédagogie et médias
• Sagascience : GéoManips
• De 7 à 87 ans, les sciences de la Terre à portée de main
• La sismologie, une histoire en marche…
À découvrir
• Institut national des sciences de l'Univers
• Photothèque du CNRS
• Vidéothèque du CNRS
• SATMOS
CNRS > Presse > Thema > Phénomènes et stigmates
Déformation lithosphérique et phénomène de subduction
Un « savoir sphère » séculaire
Le phénomène d'enfoncement d'une plaque sous une autre est appelé « subduction », littéralement «
conduire sous ». Serge Lallemand, directeur du Laboratoire « Dynamique de la lithosphère », nous en
explique la mécanique et précise la relation qui peut exister entre zone de subduction et séisme.
Pouvez-vous décrire le mécanisme de subduction ?
Serge Lallemand. On sait depuis les années 1960 que les fonds océaniques sont en expansion. La croûte
océanique qui constitue la partie la plus superficielle des plaques océaniques prend naissance le long des
dorsales par extraction de magma depuis le manteau. Une fois formées, les plaques dérivent puis disparaissent
sous les continents et archipels, retournant ainsi à leurs origines. Dans plus de 80 % des cas, la plaque qui passe
dessous est de type océanique (créée à partir d'une dorsale), on parle de subduction océanique. Il arrive
néanmoins (presque 20 % des cas) que des plaques continentales s'enfoncent sous d'autres plaques
continentales. On parle alors de subduction continentale. L'Inde passant sous le Tibet au front de l'Himalaya en
est un exemple.
Convergence « à problèmes » entre la plaque Philippine et la plaque
Eurasie dans la région de Taiwan. L'interaction complexe entre les
plaques est responsable de la déformation intense et de l'activité
sismique au voisinage de l'île de Taiwan.
© Jacques Malavieille et Serge Lallemand.
Quel est le rapport entre subduction et séisme ?
S. L. Les séismes naissent du frottement entre les plaques. Dans le cas des zones de subduction, les plaques
sont animées d'un mouvement de convergence de quelques centimètres par an en moyenne que l'on peut
considérer comme constant et inexorable à l'échelle du million d'années. Le glissement à l'interface entre les
deux plaques qui convergent en revanche n'est pas constant. Pour simplifier, on peut dire que de longues phases
de collage entre les plaques (de l'ordre de la centaine d'années) alternent avec des phases brèves de glissement
(de l'ordre de la minute) générateur de séisme durant lesquelles la quantité de convergence accumulée (de
l'ordre du mètre) en déformant le bord des plaques (à la manière d'un caoutchouc) est restituée sous forme d'un
glissement (le caoutchouc comprimé se relâche).
Les séismes sont-ils plus importants dans les zones de subduction ?
S. L. Contrairement aux zones d'expansion océanique le long desquelles les séismes ne dépassent pas en
général des magnitudes de 5, les zones de subduction concentrent l'essentiel de l'activité sismique de la planète
(90 % dont 80 % autour du Pacifique). On connaît historiquement des séismes qui ont atteint des magnitudes
supérieures à 9 (deux au siècle dernier au large du Chili et de l'Alaska ; et déjà un en ce début de siècle au large
de Sumatra). Il faut savoir qu'un séisme de magnitude 9 libère 30 fois plus d'énergie qu'un séisme de magnitude
8, soit 900 fois plus qu'un séisme de magnitude 7 et ainsi de suite. Pour faire bonne mesure, l'activité volcanique
est omniprésente le long des zones de subduction et aérienne (contrairement aux dorsales), donc potentiellement
dangereuse pour l'homme. Enfin, les zones de subduction sont un lieu d'affrontement entre plaques souvent
générateur de chaînes de montagnes en croissance et donc de glissements de terrains.
Une zone de subduction située entre Taiwan et le Japon pourrait générer de gros séismes. Y a-t-il un
projet d'étude dans cette région ?
La faille responsable du
séisme de Chichi (21
septembre 2001, magnitude
7,6) traverse Feng-Yuan : un
village de Taiwan comme
l'indiquent les destructions
visibles sur cette photo. Le
flanc de colline situé à gauche
vient chevaucher la partie
droite de la photo. Ce séisme
a causé près de 2500 victimes
à Taiwan.
© Jacques Malavieille
S. L. Le Japon a fait l'objet d'études approfondies depuis au moins une vingtaine
d'années. Les équipes françaises étaient d'ailleurs très impliquées dans ces
projets. On attend en effet un séisme majeur près de l'extrémité nord de la zone de
subduction. Les Japonais s'y préparent et tentent d'en comprendre le mécanisme.
Cette zone de subduction qui permet à la plaque Philippine de s'enfoncer sous la
plaque Eurasiatique s'étend sur plus de 2 000 km et vient buter contre l'île de
Taiwan plus au sud. Là aussi, la sismicité est intense et l'on envisage actuellement
le risque qu'un séisme de magnitude 8 ou plus survienne. Les caractéristiques de
cette subduction rappellent en plusieurs points celles de Sumatra. Des équipes
françaises et américaines collaborent depuis des années avec leurs homologues
taiwanais pour monter des programmes d'exploration océanique en vue de préciser
les modalités d'une rupture éventuelle.
.
Sur l'échelle de...
• Convergence lithosphérique. S. Lallemand, P. Huchon, L. Jolivet, G. Prouteau. Éd. Vuibert, coll. Enseigner les
sciences de la Terre. 2005.
Serge Lallemand
Laboratoire « Dynamique de la lithosphère » (DL)
Institut des sciences de la terre, de l'environnement et de l'espace de Montpellier (ISTEEM)
CNRS-Université Montpellier 2
Tél. : +33 (0)4 67 14 33 01
Mél : [email protected]
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Laboratoire « Dynamique de la lithosphère » (DL)
Consulter le site web
Page personnelle de Serge Lallemand
CNRS > Presse > Thema > Phénomènes et stigmates > Déformation lithosphérique et phénomène de subduction
Sur l'échelle de...
Magnitude et intensité
Il n'existe pas de véritable relation entre magnitude et intensité. La magnitude est un chiffre unique qui définit
l'intensité d'un séisme à sa source. L'intensité dépend quant à elle de la distance au séisme et de la nature du sol
(ce que l'on appelle l'effet de site).
La magnitude d'un séisme est presque toujours fondée sur le logarithme de l'amplitude de l'onde sismique et la
distance au séisme. Dans le cas de l'échelle « dite de Richter », on prend l'amplitude maximale de
l'enregistrement établi sur un sismomètre utilisé au début du XXe siècle. Il faut donc appliquer des conversions
pour retrouver cette magnitude à partir des sismomètres actuels.
Cette échelle logarithmique d'amplitude ouverte est sans limite supérieure connue : les ondes sismiques d'un
séisme de magnitude 9 libère 30 fois plus d'énergie qu'un séisme de magnitude 8, soit 900 fois plus qu'un séisme
de magnitude 7 et ainsi de suite.
Dans la pratique, les séismes de magnitude 9 sont exceptionnels et les effets des magnitudes supérieures ne
sont plus décrits séparément. Le séisme le plus fort jamais mesuré atteignait la valeur de 9,5, le 22 mai 1960 au
Chili.
Magnitude sur
l'échelle de
Richter
Effets du tremblement de terre
moins de 2,0
Microtremblement de terre, non ressenti
2,0 à 2,9
Généralement non ressenti, mais détecté par les sismographes
3,0 à 3,9
Souvent ressenti, mais causant très peu de dommages
4,0 à 4,9
Objets secoués à l'intérieur des maisons, bruits de chocs, dommages importants
5,0 à 5,9
Dommages majeurs à des édifices mal conçus dans des zones meubles. Légers
dommages aux édifices bien construits
6,0 à 6,9
Destructeur dans des zones jusqu'à 180 kilomètres de l'épicentre
7,0 à 7,9
Dommages sévères dans des zones plus vastes
8,0 à 8,9
Dommages sérieux dans des zones à des centaines de kilomètres de l'épicentre
9,0 et plus
Dommages très sérieux dans des zones à des centaines de kilomètres de l'épicentre
L'échelle d'intensité est subjective et classe les séismes en fonction de l'étendue des dégâts observés. Les
degrés d'intensité vont de I à XII sur l'échelle dite de Mercalli.
Intensité de
l'échelle de
Mercalli
Effets ressentis
I
Aucun mouvement n'est perçu.
II
Quelques personnes peuvent sentir un mouvement si elles sont au repos et/ou dans les étages élevés de
grands immeubles.
III
A l'intérieur de bâtisses, beaucoup de gens sentent un léger mouvement. Les objets suspendus bougent.
En revanche, à l'extérieur, rien est ressenti.
IV
A l'intérieur, la plupart des gens ressentent un mouvement. Les objets suspendus bougent, mais aussi
les fenêtres, plats, assiettes, loquets de porte.
V
La plupart des gens ressentent le mouvement. Les personnes sommeillant sont réveillées. Les portes
claquent, la vaisselle se casse, les tableaux bougent, les petits objets se déplacent, les arbres oscillent,
les liquides peuvent déborder de récipients ouverts.
VI
Tout le monde sent le tremblement de terre. Les gens ont la marche troublée, les objets, tableaux,
tombent, le plâtre des murs peut se fendre, les arbres et les buissons sont secoués. Des dommages
légers peuvent se produire dans des bâtiments mal construits, mais aucun dommage structural.
VII
Les gens ont du mal à tenir debout. Les conducteurs sentent leur voiture secouée. Quelques meubles
peuvent se briser. Des briques peuvent tomber des immeubles. Les dommages sont modérés dans les
bâtiments bien construits, mais peuvent être considérable dans les autres.
VIII
Les chauffeurs ont du mal à conduire. Les maisons avec de faibles fondations bougent. De grandes
structures telles que des cheminées ou des immeubles, peuvent se tordent et se briser. Les bâtiments
bien construits subissent de légers dommages, contrairement aux autres qui en subissent de sévères.
Les branches des arbres se cassent. Les collines peuvent se fissurer si la terre est humide. Le niveau de
l'eau dans les puits peut changer.
IX
Tous les immeubles subissent de gros dommages. Les maisons sans fondations se déplacent. Quelques
conduits souterrains se brisent. La terre se fissure.
X
La plupart des bâtiments et leurs fondations sont détruits. Il en est de même pour quelques ponts. Des
barrages sont sérieusement endommagés. Des éboulements se produisent. L'eau est détournée de son
lit. De larges fissures apparaissent sur le sol. Les rails de chemin de fer se courbent.
XI
La plupart des constructions s'effondrent. Des pont sont détruits. Les conduits souterrains sont détruits.
XII
Presque tout est détruit. Le sol bouge en ondulant. De grands pans de roches peuvent se déplacer.
CNRS > Presse > Thema > Phénomènes et stigmates
Inquiétude chez les géophysiciens
Le 26 décembre 2004, un séisme de magnitude 9,3 soulevait de plusieurs mètres le fond marin au large
de Sumatra, surprenant tant les populations que les experts. Ces derniers n'écartent désormais plus
l'hypothèse de mouvements similaires dans les zones indienne, méditerranéenne ou atlantique. Le regard
de Pascal Bernard, du Laboratoire de sismologie de Jussieu.
1 200 km de rupture, dix mètres de glissement, en quelques huit minutes… Si elle a bouleversé la planète, la
catastrophe de Sumatra a également surpris les géophysiciens. Le 26 décembre 2004, d'une région où la
sismicité est historiquement sans éclat, où la plaque indienne ne plonge qu'à trois centimètres par an sous une
écaille de la plaque eurasienne, a surgi un double monstre, séisme et tsunami.
La mobilisation ne s'est pas fait attendre. La zone de faille se trouvant pour l'essentiel sous l'eau, des navires
océanographiques britanniques, japonais et allemands ont établi des cartes bathymétriques et prévoient
l'implantation de sismomètres sous-marins. Une série de campagnes françaises, coordonnées par l'Institut de
physique du globe de Paris (IPGP) et soutenues par l'IFREMER, le CNRS et Schlumberger, a d'autre part pour
objectif de sonder les premières dizaines de kilomètres de croûte terrestre.
La levée de financements pour des programmes internationaux d'alerte s'est en outre avérée particulièrement
rapide, donnant priorité à l'océan Indien et mission à la France d'en surveiller sa partie occidentale. Les alertes
seront concentrées et diffusées par le Centre de Météo France de la Réunion et l'expertise sismologique réalisée
par l'Observatoire volcanologique de l'île-observatoire qui dépend de l'IPGP. La Méditerranée et l'Atlantique, eux,
ne sont pas moins sous tension. En Méditerranée orientale, la plongée, à 4 centimètres par an sur 600 km de
long, de la plaque africaine sous la plaque égéenne impose d'ausculter et de surveiller avec attention cette
subduction mal connue.
En Atlantique, Guadeloupe et Martinique se situent à moins de 100 km d'une zone de
contact entre deux plaques, et dans une configuration semblable à celle des côtes de
Sumatra. Jusqu'à présent, les sismologues envisageaient la magnitude 8 comme valeur
maximale pour la région. Désormais, ils ne repoussent plus l'éventualité d'un séisme de
magnitude supérieure, atteignant - voire dépassant - 8,5. Aux dévastations sismiques
d'une telle secousse, bien plus conséquentes que celles du séisme historique des Antilles
de 1843, s'ajouteraient alors celles d'un tsunami destructeur.
Schéma de projet de
réseau OBS et GPS.
© Pascal Bernard.
Face à de telles menaces aux Antilles, un programme de recherche, soutenu par l'Agence
nationale pour la recherche (ANR) et coordonné par l'IPGP, prend enfin forme, avec
l'établissement de mesures GPS de la déformation des îles, d'écoutes des microséismes,
d'auscultations sismiques de la zone de contact, et d'analyses des soulèvements et basculements tectoniques
liés aux grands séismes des derniers milliers d'années.
Voir dans ce numéro : «La prédiction, une science à trois temps».
• Qu'est-ce qui fait trembler la terre ? À l'origine des catastrophes sismiques. Pascal Bernard. EDP Sciences,
2003.
Pascal Bernard
Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 24 14
Mél : [email protected]
Consulter le site web
Département de sismologie
Amplitude des tsunamis
Extrait du reportage de Patrick Hesters pour l'émission « Planète déboussolée »
du 31 janvier 2005 sur France 3.
Durée : 2' 22''
CNRS > Presse > Thema > Phénomènes et stigmates
Du béton armé pour la défensive
Barrage, centrale nucléaire, pont, tunnel… ce sont autant d'ouvrages de génie civil vulnérables et soumis
à des conditions extrêmes de type mécanique ou environnemental. Il peut s'agir de catastrophes
naturelles (tremblement de terre, rafales de vent, tsunami, incendie) ou encore d'événements provoqués
par l'homme. Au Laboratoire de mécanique et technologie de Cachan (LMT), l'équipe d'Adnan
Ibrahimbegovic étudie et modélise une large gamme de matériaux de construction : pour une meilleure
compréhension des faiblesses d'une structure et une conception optimale.
Modélisation du comportement jusqu'à rupture des structures
La maîtrise du comportement des structures de génie civil est très complexe, étant donné la variété des
sollicitations et des agressions auxquelles elles sont soumises. Leur construction est maintenant réglementée au
niveau européen. Les normes appliquées sont de plus en plus strictes et prennent en compte, jusqu'à l'état limite
ultime, un grand nombre de paramétres : sollicitations sévères (impact, séisme), agression chimique et protection
de l'environnement.
Aujourd'hui, les modèles employés sont fondés sur une approche phénoménologique et sont capables de décrire
le comportement de la structure jusqu'au pic de chargement. La difficulté est d'être capable de représenter les
phénomènes tout en conservant une finesse de maillage compatible avec la taille de la structure.
Prédiction du comportement sismique des ouvrages
La prédiction du comportement d'ouvrages de génie civil soumis à des sollicitations
sévères de type sismique ne peut s'aborder que par le biais d'une modélisation physique
et pertinente des matériaux en conjonction avec une modélisation de la structure
adéquate au problème à traiter. L'objectif étant de parvenir à des analyses les plus
prédictives possibles, les mécanismes physiques doivent être introduits dans le modèle à
l'échelle la plus élémentaire, garantissant ainsi une identification de ces derniers sur la
base de l'élément de volume. Des lois de comportement du matériau béton,
principalement fondées sur la mécanique de l'endommagement, sont développées à cet
effet.
Adnan Ibrahimbegovic et ses collaborateurs participent à différents programmes de
recherche. Le projet CAMUS 2000 a permis de tester deux maquettes de bâtiments à
l'échelle 1/3 soumises à des séismes bidirectionnels, domaine peu étudié jusqu'à présent.
Les essais se sont déroulés en 2001 sur la table vibrante Azalée du CEA. La participation
du laboratoire s'est inscrite non seulement dans la phase préparatoire à l'expérimentation mais également dans la
phase post-essais où les outils numériques développés ont donné une interprétation plus fine d'expériences aussi
complexes. Ce travail déjà éprouvé lors de deux grandes campagnes françaises continue actuellement dans le
cadre du projet européen d'expérimentation de bâtiments sous sollicitations sismiques (CASSCADE).
Plate-forme d'essais
du LMT Cachan.
© LMT Cachan.
Adnan Ibrahimbegovic organise en mai 2006 un colloque, financé par l'OTAN dans le cadre du programme de
sécurité, intitulé « Extreme Man-Made and Natural Hazards in Dynamics of Structures ».
Adnan Ibrahimbegovic
Laboratoire de mécanique et technologie (LMT)
CNRS-ENS-Université Paris 6
Tél. : +33 (0)1 47 40 22 34
Mél : [email protected]
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LMT Cachan
CNRS > Presse > Thema > Phénomènes et stigmates
Urbanisme et risque sismique : comment réduire la vulnérabilité
Réduire le risque sismique exige l'analyse de mécanismes aléatoires, l'étude des techniques et
organisations adaptées aux conditions naturelles locales. Dans une démarche interdisciplinaire
(géophysique, sciences sociales), l'équipe « risque sismique » du Laboratoire de géophysique interne et
de tectonophysique (LGIT) fournit des connaissances utiles aux gestionnaires du territoire.
Architecture et urbanisme parasismiques
De long terme, un programme de réduction du risque sismique implique la définition de règles de construction
selon des critères techniques. Les habitants attendent des constructions fiables, contrôlées par des experts, et
l'apprentissage de réflexes de protection. La diffusion de cette organisation dépend des conditions sociales,
linguistiques et culturelles locales. La sécurité parasismique exige de renoncer à des investissements dangereux
ou de les moduler selon les spécificités des lieux : zones inconstructibles, limitation des étages, refus de certains
matériaux, exigence de fiabilité. Des restrictions souvent contraires aux nécessités d'urbanisation, liées à des
dynamiques démographiques, économiques, sociales. Rendre compatibles l'application de règles parasismiques
réalistes et les investissements urbains est un défi international.
L'exemple de l'Algérie
Dans un calendrier stressé par la démographie et la pression sociale sur le logement, il s'agit d'établir et de faire
respecter des règles malgré les difficultés techniques, les perturbations politiques et économiques, nationales ou
locales. Ces règles d'urbanisme supposent un accord sur les objectifs, les délais, les moyens nécessaires, les
modes de transmission et, surtout, le contrôle. Face aux tensions de cette équation techno-politique, l'expertise
représente un enjeu important pour justifier des règles appropriées, refuser la construction de sites dangereux ou
adapter l'urbanisme aux contraintes naturelles.
École touchée par le séisme du 21 mai 2003, région de Boumerdès,
Algérie.
© Stéphane Cartier.
En coopération, le LGIT et le Centre de Génie paraSismique algérien développent la technique du micro-zonage
sismique. Mesurer les effets de site détermine les spectres de dimensionnement des constructions et permet
d'ajuster les investissements nécessaires à la sécurité. Lourde d'enjeux sociaux (comme l'exclusion de parcelles),
cette technique doit aussi être opérationnelle (apprentissages, coûts, délais, contrôle) pour produire des
informations fiables, des références techniques et réglementaires et des normes juridiques opposables au tiers.
Stimulées par les besoins collectifs, les investigations scientifiques s'appliquent à améliorer la sécurité face aux
risques naturels, selon les conditions sociales locales et les règles publiques d'aménagement. Science planétaire,
la sismologie progresse en offrant une expertise aux politiques publiques soucieuses de règles d'urbanisme
claires.
Stéphane Cartier
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT)
Université Grenoble 1-Université de Chambéry-Laboratoire central des ponts et chaussées-Institut de
recherche pour le développement
Mél : [email protected]
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CNRS > Presse > Thema > Phénomènes et stigmates
Risque sismique dans la Baie des anges
Nous ne sommes ni au Japon, ni en Californie, ni en Turquie. Et pourtant, la menace sismique existe.
Nous sommes sur la Côte d'Azur. Le patrimoine immobilier, construit pour l'essentiel avant l'avènement
des premières règles parasismiques, est sous haute surveillance car souvent non conforme, et aussi
construit sur des formations géologiques aggravant le risque. Pierre-Yves Bard, chercheur au
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT), étudie les effets de site dans des
régions à risque. Exemple, la ville de Nice.
La prévention du risque sismique passe par la compréhension des phénomènes en jeu (émission et propagation
des ondes sismiques, réponse des constructions), l'utilisation d'outils de reconnaissance des sols et structures, et
l'établissement de règles parasismiques. Mais, pour que ces dernières soient réellement appliquées dans la
pratique, la prévention passe aussi par une appropriation du risque réel, sans minimisation ni dramatisation, par
l'ensemble de la population. Dans cet objectif, notamment dans les zones à fort enjeu, les « études de scénario »
constituent un outil efficace : elles consistent à estimer à l'avance, à l'échelle d'une agglomération, les dommages
que pourrait occasionner un séisme « plausible ». Une étude pilote de ce type vient d'être conduite à Nice (projet
GEMGEP1).
La première étape consiste à estimer les « agressions » sismiques que vont subir les bâtiments et l'ensemble de
l'environnement naturel. Ces mouvements dépendent non seulement de la taille des séismes (leur « magnitude »)
et de leur éloignement, mais aussi de la nature des terrains de couverture, qui peuvent, pour certaines
fréquences, entrer en résonance, amplifier considérablement les vibrations sismiques. Cet « effet de site » à
Nice, affecte principalement les vallées du Var et du Paillon, où les mouvements sont à la fois plus forts et plus
longs. Les fréquences amplifiées (de 1 à 10 Hz) correspondent malheureusement à la gamme des fréquences
2
propres de la majorité du parc immobilier existant : les effets de site contrôlent donc souvent, au moins
partiellement la distribution des dommages, comme ce fut le cas notamment à Mexico en 1985.
L'estimation quantitative de ces effets de site est donc un enjeu majeur, qui fait l'objet de très nombreux travaux
de recherche, de la modélisation numérique aux techniques de reconnaissance pour accéder aux paramètres
mécaniques des formations superficielles. Une part importante des recherches actuelles concerne l'utilisation des
vibrations ambiantes, ou « bruit de fond sismique », qui a récemment fait l'objet d'un projet européen (SESAME).
L'ensemble de ces travaux sera, en août 2006, au centre d'un symposium international à Grenoble (Symposium
ESG2006), autre ville sujette à de tels effets amplificateurs, les remplissages lacustres post-glaciaires des vallées
alpines faisant effet de caisse de résonance pour les ondes sismiques.
De plus, cette agression sismique peut aussi amener à la ruine le sol lui-même, ce qui entraîne alors des
dégâts dans les implantations humaines : c'est le cas par exemple à Nice dans la basse vallée du Paillon et aux
environs de l'aéroport, où certains horizons sableux sous la nappe pourraient subir des phénomènes de
liquéfaction (qui devraient semble-t-il rester limités pour les séismes choisis dans les études de scénario), ou bien
dans l'arrière-pays où les versants sont souvent instables et les chutes de blocs fréquentes.
Les étapes suivantes consistent à identifier les enjeux exposés (bâti, réseaux divers - transports, gaz, électricité,
eau -, itinéraires nécessaires aux secours), à évaluer leur vulnérabilité au séisme, et croiser cette information
avec les « agressions » pour mieux apprécier les dommages et leurs variations spatiales. Même si ces différentes
étapes sont entachées de fortes incertitudes, on peut ainsi recenser les sites et/ou les ouvrages les plus
sensibles (souvent conditionnés par des effets de site importants et/ou une forte vulnérabilité) et définir ainsi des
priorités pour une meilleure protection de la ville. Cette démarche marque une volonté d'intensifier les actions de
prévention en réduisant la vulnérabilité de l'existant de façon ciblée, et en repensant l'organisation des secours en
cas de crise.
Cette étude pilote devrait trouver des applications dans des études de Plan de prévention des risques
actuellement envisagées pour les principales villes sismiques de France (par exemple Annecy, Grenoble, Fortde-France, Lourdes, Nice, Pointe-à-Pitre). Les effets de site s'avèrent aussi très importants dans de nombreuses
mégapoles mondiales, et devraient être pris en compte par des « microzonages » adaptant la réglementation aux
conditions de site spécifiques locales. Le LGIT collabore actuellement à des études sur Téhéran, Caracas et
Alger.
1/ Initiative du Conseil général des ponts et chaussées et de son instance spécifique dédiée à la prévention du
risque sismique en France (GEMGEP) avec les concours financiers de l'administration centrale (équipement,
écologie) et de la municipalité niçoise.
2/ Chaque bâtiment peut être représenté comme un pendule inversé, ayant sa propre fréquence : de 0,5 Hz pour
les tours de plus de trente étages à 10 Hz pour les maisons individuelles. Lorsque l'excitation (le mouvement
sismique) comprend beaucoup d'énergie à ces fréquences, le bâtiment rentre en résonance avec le sol et subit
des déformations importantes pouvant l'amener à la ruine
Pierre-Yves Bard
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT)
CNRS-Universités de Savoie et Grenoble 1- LCPC-IRD
Tél. : +33 (0)4 76 82 80 61
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CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
Séismes : à la recherche de signaux d'alerte
Avant de trembler, la Terre émet-elle des signes précurseurs, qui permettraient d'alerter à temps les
populations ? Michel Campillo, géophysicien et médaillé d'argent 2003 du CNRS, se pose la question.
La plupart des régions à forte activité sismique sont connues. Elles font l'objet d'une surveillance permanente.
Mais impossible, aujourd'hui, de prévoir à court terme le moment où elles trembleront. Michel Campillo et ses
collègues du Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT) sont sur une piste : une phase
dite d'« initiation » précède toujours la rupture. En effet, lorsque deux plaques tectoniques glissent l'une contre
l'autre, la rugosité de leurs surfaces commence, d'abord, par empêcher le mouvement. Mais, comme les tensions
s'accumulent, les aspérités se rompent peu à peu, jusqu'à ce que le frein lâche et que les blocs se déplacent
brusquement. C'est là que survient le tremblement de terre.
Pendant tout le temps où la force de frottement s'exerce, il y a certainement des signes annonciateurs de séisme
– un mouvement presque imperceptible ou un petit craquement dans les profondeurs du sous-sol par exemple.
Pour le moment, la recherche de tels indices n'est guère fructueuse. Mais elle n'est pas encore centrale. Les
recherches portent surtout sur la durée de la phase d'initiation. « Si celle-ci ne dépasse pas quelques secondes,
la connaître ne servira pas à grand-chose », remarque, en effet, Michel Campillo.
Avec son équipe, le chercheur tente d'élaborer un modèle mathématique, capable de simuler le phénomène. Pas
facile : la loi qui régit l'interaction entre deux plaques tectoniques est très différente de celle qui gouverne deux
blocs de granit en laboratoire. Des projets, menés notamment sur la faille de San Andreas, en Californie du Sud,
devraient aider à comprendre le fonctionnement des failles en profondeur. Ils devraient aussi permettre de
modéliser les tremblements de terre dans cette région.
« On commence à pouvoir prédire les endroits où il risque d'y avoir plus de dégâts qu'ailleurs en cas de séisme.
Mais il reste encore pas mal d'efforts à faire », juge Michel Campillo. Les Californiens ont déjà accès à une carte
quotidienne de prévision des séismes dans les prochaines 24 heures. Mais cet outil repose uniquement sur des
lois statistiques. Assez bon pour annoncer les répliques qui suivent une première secousse, il ne permet pas
d'annoncer un tremblement de terre majeur.
Michel Campillo
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT)
Université Grenoble 1– Université de Chambéry-Laboratoire central des ponts et chaussées-Institut de
recherche pour le développement
Tél. : +33 (0)4 76 82 80 36
Mél : [email protected]
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CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
La prédiction, une science à trois temps
26 décembre 2004, Sumatra, le plus grand séisme depuis 1960: personne ne l'a vu venir… 28 septembre
2004 : à Parkfield, un séisme de magnitude 6 sur le segment de faille le plus surveillé au monde, en
Californie : personne ne l'a vu venir… Double échec de la prédiction ? Pascal Bernard, du Laboratoire de
sismologie de Jussieu, s'interroge.
Alors même que la rupture s'est produite à Sumatra, au niveau de deux plaques convergentes à 3 cm par an, les
experts attendaient quelques séismes par siècle le long des 1 000 km de subduction entre le nord de Sumatra et
les îles Andaman. Il s'agit de prédiction à long terme, donnant une évaluation statistique de l'occurrence de
grands séismes. La sismicité historique régionale, mal connue, semble en deçà. Une partie du glissement aurait
lieu sans séismes.
Tsunamis historiques en Méditerranée.
© Pascal Bernard.
Le cas de Parkfield est lui aussi intéressant, en ce qui concerne la prédiction à moyen terme. Cette fenêtre de
prédiction est fondée sur l'estimation du degré de chargement d'une faille par rapport à son seuil de rupture. Le
segment de Parkfield, de 25 km de long, avait cassé 5 fois entre 1857 et 1966 - en moyenne une fois tous les 23
ans - avec une magnitude 6. L'avant-dernière rupture, en 1966, a motivé, dans les années 1980, le
développement d'un réseau très dense d'instruments pour capter les éventuels précurseurs du prochain séisme,
prévu pour 1988… Lequel est donc survenu avec 16 ans de retard ! Cette méthode de prédiction était correcte,
en magnitude, mais pas en temps.
Ces grandes incertitudes sur l'instant ou la magnitude des séismes attendus sont liées au processus non-linéaire
de la propagation des ruptures sismiques sur les failles. Le front de rupture qui naît autour de la zone d'instabilité
initiale se propage à plusieurs kilomètres par seconde. Mais il peut se bloquer sur les multiples rugosités et
discontinuités géométriques de la faille, ou sur des zones déchargées par des glissements récents.
La prédiction à court terme - soit la détection des prémisses de la déstabilisation d'une faille - est plus incertaine :
la zone d'initiation de la rupture dans la faille est très petite (métrique à kilométrique), très profonde (10 à 20 km).
Les processus transitoires qui s'y développent sont aussi non-linéaires, associant glissements lents, microruptures en cascade, et fracturation hydraulique, dont nous ne percevons au mieux que quelques échos en
surface - les fameux précurseurs. Mais il faut rester optimiste, puisqu'il semble y avoir une certaine
proportionnalité entre la dimension de cette zone et la taille de la rupture finale.
Voir dans ce numéro : « Inquiétude chez les géophysiciens ».
• Qu'est-ce qui fait trembler la terre ? À l'origine des catastrophes sismiques. Pascal Bernard. EDP Sciences,
2003.
Pascal Bernard
Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 24 14
Mél : [email protected]
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Département de sismologie
CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
Vol au-dessus d'un séisme
La « déesse de l'agriculture » au chevet de la Terre
Les effets électromagnétiques lors des tremblements de terre ou des éruptions volcaniques étaient déjà
connus des Anciens qui avaient observé des étincelles, des lumières au firmament, la déviation des
aiguilles de compas, etc. Aujourd'hui, les scientifiques disposent de DEMETER, un micro-satellite qui
étudie les perturbations ionosphériques (électrique et magnétique) liées à ces phénomènes
géophysiques naturels. Présentation par Michel Parrot, chercheur au Laboratoire de physique et chimie
de l'environnement (LPCE).
Les mesures d'ondes effectuées au sol ou dans l'ionosphère, mettent en évidence une augmentation de
l'intensité des signaux dans l'étape finale de préparation d'un tremblement de terre. Plusieurs hypothèses sur les
processus physiques déclencheurs sont avancées :
- une production directe d'ondes par compression des roches près de l'épicentre ;
- une redistribution des charges électriques dans le sol (effets piézoélectrique ou électrocinétique) ;
- une émission importante de gaz radioactifs qui changeraient la conductivité électrique.
Ces perturbations, auparavant non étayées par des mesures physiques, intéressent les chercheurs car elles
peuvent se produire quelques heures avant le séisme et servir ainsi d'indicateur à court terme.
Vue d'artiste du satellite en orbite.
© CNES - Novembre 2003/Illustration D. Ducros.
Pour mieux comprendre ces phénomènes, le satellite DEMETER, lancé en 2004, a été placé sur une orbite
polaire, héliosynchrone et circulaire à 710 km d'altitude. La charge utile scientifique comporte des capteurs
destinés à la mesure des six composantes du champ électromagnétique dans une large gamme de fréquence et
des capteurs destinés à l'analyse du milieu ionisé (détecteurs de particules, analyseur de plasma et sonde de
Langmuir).
DEMETER a une mémoire de bord très importante afin d'enregistrer des données tout
autour de la Terre et de recueillir un maximum d'événements pour :
• effectuer une analyse statistique et déterminer ainsi les principales caractéristiques des
effets séismo-électromagnétiques ;
• étudier les effets pré- et post-séismiques dans l'ionosphère ;
• comprendre les mécanismes de génération de ces perturbations.
Les données ionosphériques acquises par DEMETER depuis le début de la mission
apportent de plus une aide à la surveillance de l'environnement électromagnétique de la
Terre, et renseignent aussi les scientifiques sur les émissions liées à l'activité humaine.
Résultats plus précis courant 2006.
Vue du satellite en
cours d'intégration au
CNES.
© D.R.
La plate-forme de DEMETER
La plate-forme de DEMETER est sous la responsabilité du CNES et le développement de la charge
utile scientifique est placé sous la responsabilité du LPCE à Orléans.
Les principaux laboratoires participant au projet sont :
• le Centre d'études des environnements terrestre et planétaires (CETP)
• le Centre d'étude spatiale des rayonnements (CESR)
• le Centre européen de recherche et de technologie spatiales (ESTEC)
• l'Institut de physique du globe de Paris (IPGP)
• l'US Nançay
• le Centre de recherche spatiale (CBK) de Varsovie.
Les expériences sol françaises associées au projet sont sous la responsabilité de l'Observatoire de
physique du globe de Clermont-Ferrand (OPGC). Un centre de mission situé au LPCE traite les
données et les met à la disposition des scientifiques par l'intermédiaire d'un serveur.
Michel Parrot
Laboratoire de physique et chimie de l'environnement (LPCE)
CNRS-Université d'Orléans
Tél. : +33 (0)2 38 25 52 91
Mél : [email protected]
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LPCE
Consulter le site web
DEMETER
Le satellite DEMETER
Extrait du reportage de Patrick Hesters pour l'émission « Planète déboussolée »
du 31 janvier 2005 sur France 3.
Durée : 1' 46"
CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
La Terre, une planète turbulente auscultée par GEOSCOPE
Grâce à ses 29 stations sismiques disséminées à travers le monde, le réseau GEOSCOPE permet, lors
d'un séisme important, d'observer en détail les oscillations libres de la Terre et ainsi d'en savoir un peu
plus sur notre planète et ses « accès de colère ». Geneviève Roult est responsable du programme
GEOSCOPE.
Lorsqu'un séisme a une magnitude suffisante, les ondes sismiques font plusieurs fois le tour de la Terre et
interfèrent entre elles pour produire des ondes stationnaires qui déforment le globe. Les fréquences propres de
ces oscillations libres sont directement liées aux paramètres physiques de notre planète et sont indépendantes
du séisme, contrairement à leurs amplitudes. Ce sont précisément ces oscillations libres de la Terre que
détectent les 29 stations sismologiques du réseau mondial GEOSCOPE. Les deux objectifs principaux étant
d'étudier la structure interne de notre planète et de tenter de comprendre les mécanismes à l'origine des
tremblements de terre.
Initié en 1982 par l'Institut national des sciences de l'Univers (INSU), à l'instigation de l'Institut de physique du
1
globe de Paris (IPGP), le programme est aujourd'hui soutenu par de nombreux organismes et institutions .
L'originalité de ce programme français ? « Il fut le premier à entreprendre l'établissement d'un réseau mondial de
stations sismiques dites à trois composantes avec enregistrement digital à large bande, explique Geneviève
Roult. Cela signifie que les sismomètres détectent les mouvements du sol selon trois directions (deux
horizontales et une verticale) et que les ondes sismiques sont enregistrées en continu dans une large bande de
fréquences. Un centre de données situé à l'IPGP se charge ensuite de la gestion des informations recueillies par
les stations et de leur mise à disposition de la communauté scientifique internationale. »
Depuis 1982, d'autres pays ont imité le programme GEOSCOPE, en particulier les États-Unis en 1985, avec le
programme global IRIS. La FDSN (Federation of Digital Seismograph Networks), au sein de laquelle le réseau
français joue un rôle moteur depuis sa création en 1986, compte également des programmes similaires nationaux
au Japon, en Allemagne, en Chine… Mais la plupart des réseaux existants présentent une concentration de
stations essentiellement sur les continents, créant un déséquilibre entre l'hémisphère Nord et l'hémisphère Sud.
« Cela se traduit par une répartition géographique inégale des trajets parcourus par les ondes sismiques
nécessaires à l'étude de la structure interne de la Terre », déplore la chercheuse.
L'installation de nouvelles stations sismologiques dans les terres australes et antarctiques ainsi que dans l'océan
Pacifique permettra l'enregistrement d'ondes ayant traversé presque tout le globe. Et pour pallier la mauvaise
couverture des zones océaniques, un ambitieux projet français d'observatoire Fond de mer permanent est à
l'étude.
Voir dans ce numéro : « Le séisme de Sumatra : un nouvel éclairage de la Terre ».
1/ Partenaires du programme : l'École et Observatoire des sciences de la Terre de Strasbourg (EOST), le
ministère de l'Enseignement et de la recherche, l'Institut de recherche pour le développement (IRD), l'Institut
Paul-Émile Victor (IPEV), le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), le Centre national des études spatiales
(CNES) ainsi que des organismes et universités étrangers.
Geneviève Roult
Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 38 99
Mél : [email protected]
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CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
Une mesure pour les mouvements du sol : le réseau accélérométrique
permanent
Le réseau accélérométrique permanent (RAP) est un instrument de mesure des mouvements du sol. Il
1
permet d'enregistrer l'accélération du sol dans une gamme allant de 1 micro-g à 1 g et dans une bande
passante allant de 0,05 Hz à 50 Hz. Présentation par Denis Hatzfeld, sismologue et chercheur au
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique de Grenoble.
Le ministère de l'Écologie et du développement durable a demandé à Denis Hatzfeld en 1994 de mettre sur pied
une expérience pilote du RAP2 (réseau accélérométrique permanent) dans les Alpes. Suite à cette phase pilote,
en décembre 2000, un Groupe d'intérêt scientifique (GIS) a été mis en place. Il a permis d'élargir ce partenariat à
l'ensemble des acteurs impliqués dans l'analyse de l'aléa sismique et a favorisé la pérennisation des budgets.
Carte des séismes ayant donné lieu à un enregistrement
accélérométrique dans une station du Rap.
© Rap.
Pourquoi un tel réseau en France où l'activité sismique est modérée ? Pour Denis Hatzfeld, il était primordial pour
l'avancée des recherches en sismologie de mettre en place ce réseau : « Pendant longtemps, l'effort des
recherches en sismologie était mis sur la prédiction des séismes et non sur les dégâts engendrés par un séisme.
Avec un tel réseau, on a la possibilité de quantifier le mouvement du sol en cas de tremblement de terre, et grâce
à ces recherches, on pourra éditer de nouvelles normes parasismiques plus adaptées à la construction des
habitations. Il s'agit d'un travail à long terme qui va permettre de mieux comprendre les mouvements ressentis
par la population, par les bâtiments ainsi que leur destruction lors d'un séisme », explique-t-il.
Une station accélérométrique moderne comprend un capteur capable de mesurer l'accélération du sol, un
numériseur-enregistreur et tous les logiciels qui permettent la gestion de la station, la collecte, l'archivage et la
distribution des données.
Station accélérométrique Rap de l'aéroport du Lamentin (Martinique).
© Rap.
Depuis une dizaine d'années, les données récupérées grâce à ce réseau ont permis une avancée significative
pour la compréhension des effets de site (stations RAP proches des villes) et la réglementation parasismique. Par
ces recherches, les architectes, les constructeurs pourront à l'avenir édifier des immeubles dans leur ensemble
plus résistants aux secousses sismiques. Grâce au RAP, la simulation ou modélisation par le calcul numérique
permet de construire des modèles prédictifs : en enregistrant les effets d'un séisme faible, si les paramètres sont
bien entrés dans l'ordinateur, on pourra se rapprocher des conditions voisines d'un séisme fort.
Aujourd'hui, il existe en France 130 stations RAP. Le matériel étant financé en quasi-totalité par le ministère de
l'Écologie et du développement durable pour un budget annuel qui est proche des 200 000 euros.
Voir dans ce numéro : « Bam 2003 : un tremblement de terre dévastateur »
1/ 1 g correspond à l'accélération de la pesanteur.
2/ Le travail de recherche de ce réseau accélérométrique permanent met en relation des universitaires, des
chercheurs d'organismes publics, privés, para-publics, comme le CNRS, organisme public qui joue un rôle
important dans le RAP.
Denis Hatzfeld
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT)
CNRS-Universités Grenoble 1 et de Chambéry-Laboratoire central des ponts et chaussées-IRD
Tél. : +33 (0)4 76 82 80 64
Mél : [email protected]
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CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
Séismes en France : une surveillance en temps réel
1
La France métropolitaine est un pays à sismicité modérée due à la convergence des plaques africaine et
eurasienne à une vitesse d'environ 2 cm/an. Le Réseau national de surveillance sismique (RéNaSS)
contribue à l'observation et à l'étude des séismes survenant dans l'hexagone et dans les départements
d'outre-mer. Les explications de Michel Granet, chercheur à l'Institut de physique du globe de
Strasbourg.
Le RéNaSS2 est né du besoin d'améliorer la couverture instrumentale de la France au début des années 1980.
Composé de réseaux régionaux et de stations isolées installés dans les régions où le risque sismique est identifié
(fossé rhénan, Alpes, Pyrénées, arrière-pays niçois, Provence, Auvergne), il offre une diffusion rapide
d'informations en cas de séisme majeur. Grâce aux nouvelles technologies de l'information et de la
communication, il est possible de localiser tout séisme important dans un délai inférieur à une heure.
Sismicité du territoire métropolitain français sur la période 1980-2005.
© Source RéNaSS - LDG.
Le dernier séisme important remonte au 11 juin 1909 (Lambesc, Provence) et sa magnitude3 a été estimée à 6,2.
Depuis 1980, dix séismes « métropolitains » de magnitude supérieure à 5 ont été identifiés, dont Hennebont (5,4
en 2002), Rambervillers (5,4 en 2003), Roulans (5,1 en 2004).
4
Ce travail de surveillance est essentiel à la caractérisation de l'aléa sismique pour l'élaboration d'un modèle de
sismicité nécessaire à la définition du zonage sismique du territoire et à l'identification des mouvements
tectoniques. Il y a 57 000 séismes archivés dans la banque de données et environ 60 séismes font chaque année
l'objet d'une diffusion d'information rapide.
Les connaissances actuelles dans le domaine de la prévision des séismes sont limitées. Aussi, les sismologues
préconisent-ils d'agir pour une meilleure prévention de leurs effets. Si nous localisons rapidement un séisme
important se produisant en France, sommes-nous préparés à l'éventualité d'un séisme majeur ? Quels sont les
moyens mis en œuvre par la société pour minimiser l'impact humain et économique de cette catastrophe
naturelle ? Autant d'interrogations demandant une réflexion et une action conjointe des chercheurs, de la société
civile et des décideurs politiques.
Samedi 8 octobre 2005 : la terre a tremblé au Pakistan
Le séisme dramatique du 8 octobre 2005 au Pakistan (M=7,6) montre l'importance et l'absolue priorité qu'il faut
apporter à la prévention des effets des séismes, notamment en ce qui concerne la qualité des constructions et
l'éducation des populations sur la conduite à tenir en cas de « catastrophe » naturelle. En effet, cette région
d'Asie, zone de collision entre deux plaques tectoniques, est active et des séismes importants à majeurs s'y
produisent régulièrement. Comme en décembre 2004 pour le séisme de Sumatra, une aide mondiale s'est
révélée indispensable pour apporter les premiers secours. Cependant, il y a un coût réel à la mise en œuvre
d'une politique de prévention efficace. Celle-ci imposera un effort de solidarité des pays les plus riches vers les
plus pauvres.
1/ La sismicité est la distribution géographique des séismes dans une région donnée et sur une période de
temps.
2/ Soutenu par l'Institut national des sciences de l'Univers (INSU) et le ministère de l'Enseignement supérieur et
de la recherche. Le site central est situé au sein de l'École et Observatoire des sciences de la Terre (Université
Louis Pasteur, Strasbourg). Le dispositif est labellisé Observatoire de recherche en environnement (ORE).
3/ La magnitude d'un événement sismique est reliée à la longueur de la partie de la faille activée au moment de la
rupture. Beaucoup de petits séismes relâchent les contraintes (forces) sur les failles et empêchent ainsi qu'une
trop grande longueur de la faille soit activée lors de la rupture. C'est une des raisons pour lesquelles les grands
séismes sont rares en France. Une autre raison est le faible taux de la déformation tectonique dont l'ordre de
grandeur est le millimètre par an.
4/ L'aléa sismique est la probabilité pour une région donnée qu'un événement sismique dépasse un certain
niveau sur une période de référence.
Michel Granet
Institut de physique du globe de Strasbourg
CNRS-Université Louis Pasteur (Strasbourg 1)
Tél. : +33 (0)3 90 24 00 54
Mél : [email protected]
Consulter le site web : Institut de physique du globe de Strasbourg
Consulter le site web : RéNaSS
CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
Sismomètres voyageurs
Ensemble de sismomètres gérés par le CNRS, le réseau Lithoscope sert à étudier la structure du sous-sol
et les risques sismiques, aussi bien dans des régions actives, comme l'Iran, que dans des zones moins
actives, comme les Alpes.
Le 8 septembre 2005, un séisme a secoué la vallée de Chamonix. De magnitude 4,6 sur l'échelle de Richter,
celui-ci n'a pas fait de dégâts. Mais il témoigne d'une activité sismique régulière dans les Alpes françaises. Celleci est modérée. Mais une vingtaine de tremblements de terre sont ressentis chaque année dans cette zone,
occasionnés par le lent déplacement vers le nord de la microplaque adriatique qui porte l'Italie. Poussée par le
continent africain, la péninsule entre comme un poinçon dans l'Europe. Et les secousses qui en résultent peuvent
dépasser la magnitude 5. Ce fut le cas au Grand-Bornand en décembre 1994 (5,1) ou à Annecy en juillet 1996
(5,3).
Étudiée depuis longtemps, la région est l'une des plus connue des géologues. Ils en ont maintenant cartographié
la plupart des failles. C'est d'ailleurs ce qui permet d'avancer qu'« une secousse de magnitude 6 n'y est pas
1
impossible. En revanche, comme les failles ne dépassent pas quelques dizaines de kilomètres de long , il y a peu
de chance d'atteindre des magnitudes plus élevées », prévoit Anne Paul, responsable scientifique du réseau
Lithoscope, l'un des quatre parcs d'instruments sismologiques que le CNRS met à la disposition de ses
chercheurs et collaborateurs.
Parmi la soixantaine d'appareils du réseau, certains servent à étudier l'activité sismique dans les Alpes. D'autres
à « scanner » le sous-sol tibétain, iranien, équatorien ou guatémaltèque. Il s'agit, alors, d'utiliser les ondes
libérées par les séismes pour connaître la structure de la lithosphère – couche de 150 à 200 km d'épaisseur,
comprenant la croûte terrestre et la partie la plus supérieure du manteau.
Objectif de la plupart de ces recherches : comprendre ce phénomène encore méconnu qu'est la formation des
chaînes de montagne. Les sismomètres du réseau Lithoscope sont aussi utilisés pour enregistrer et analyser les
répliques post-séismes. Ainsi, « lorsque la ville de Bam a été détruite par un tremblement de terre, le
26 décembre 2003, personne ne savait exactement où avait eu lieu la rupture. En localisant les centaines de
répliques qui ont suivi, les chercheurs ont pu situer la faille… juste sous la ville ». Cela explique, au moins en
partie, que le séisme – de magnitude 6,5 – ait fait plus de 20 000 victimes.
1/ À titre de comparaison, la faille responsable du séisme indonésien de décembre 2004 mesure 1 200 km.
Anne Paul
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT)
CNRS-Universités Grenoble 1 et de Chambéry-Laboratoire central des ponts et chaussées-IRD
Tél. : +33 (0)4 76 82 80 34
Mél : [email protected]
Consulter le site web :LGIT
Consulter le site web ;Lithoscope
CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
Le GPS : pour ne pas mesurer à côté de la plaque… tectonique
1
Aujourd'hui, le GPS , c'est-à-dire le positionnement par satellite, est un instrument largement utilisé pour
la mesure de la déformation de l'écorce terrestre. Sa grande précision, son coût réduit et sa facilité de
mise en œuvre en font un merveilleux outil ouvrant la voie à de nombreuses applications. Christophe
Vigny, chercheur au Laboratoire de géologie de l'ENS (Département Terre-Atmosphère-Océan), nous en
explique le principe.
L'écorce terrestre n'est pas homogène mais est constituée de plaques, ou blocs tectoniques, qui « flottent » à la
surface et qui dérivent en se « frottant » les unes contre les autres. Ces blocs ont un déplacement régulier
(jusqu'à 10 cm/an) et très stable sur des centaines de milliers d'années. Afin de déceler ces déplacements sans
avoir à attendre des siècles, il est nécessaire de mesurer des positions au centimètre, voire au millimètre.
Récepteur GPS dans le rift d'Asal (2001).
© D. R.
Aujourd'hui que l'on parvient à mieux maîtriser les différents facteurs qui limitent son efficacité - réfraction dans
l'ionosphère, dans la troposphère, phénomène de multi-trajets… -, le GPS offre une telle précision. Le principe
est simple. « Un point est matérialisé par un repère géodésique, en général une broche métallique enfoncée dans
un affleurement rocheux solidement lié au substratum, indique Christophe Vigny. L'antenne GPS est placée
exactement à la verticale du centre du repère, à une hauteur déterminée. La mesure GPS de la position de
l'antenne fournit alors la position du repère. Il suffit de mesurer à nouveau cette position quelque temps après
pour détecter un déplacement et en déduire une vitesse. »
La déformation dans une zone considérée est ainsi donnée par la mesure des déplacements d'un certain nombre
de points répartis sur cette zone. « Des mesures en continu servent à établir des séries temporelles qui nous ont
permis de mettre en évidence des phénomènes variables dans le temps à l'échelle de quelques années, voire
quelques jours, dans des contextes tectoniques où l'on parlait plutôt en termes de millions d'années
auparavant », résume le chercheur.
Récepteur GPS sur le point de Santigi sur la péninsule Minahassa, au
Nord des Célèbes (2001).
© D. R.
Depuis une dizaine d'années que la technique des mesures par GPS est pleinement opérationnelle, les
applications sont de plus en plus nombreuses et les résultats très prometteurs. Un grand nombre de structures
actives sont ainsi surveillées, comme les volcans en activité, dont on mesure les déformations du cône dues à la
montée de la lave, ou encore les failles actives, qui semblent être soumises à des déformations de manière
épisodique - peut-être en lien avec le déclenchement des séismes. « L'impact de ces mesures sur notre
connaissance précise de la déformation de l'écorce terrestre est énorme. Nous ne sommes qu'au début d'une
nouvelle ère de recherches qui pourrait déboucher sur une nouvelle compréhension de la genèse des séismes. »
Et pourquoi pas, à terme, sur leur prédiction.
Voir dans ce numéro : « Le séisme de décembre 2004 passé au crible grâce au GPS ».
1/ GPS : Global Positioning System.
Christophe Vigny
Laboratoire de géologie de l'ENS
CNRS-ENS Paris
Tél. : +33 (0)1 44 32 22 14
Mél : [email protected]
Consulter le site web ; Laboratoire de géologie de l'ENS
Consulter le site web : Page personnelle de Christophe Vigny
CNRS > Presse > Thema > La Terre en observation
En Équateur ou en mer Ligure, les OBS veillent…
Au fond des mers, d'étranges petites sphères guettent. Leur mission : enregistrer les séismes sousmarins. À la tête de l'Unité « Géosciences Azur » (GEOAZUR), Philippe Charvis recueille les données de
ces sismomètres de fond de mer ou OBS et les analyse.
OBS, Ocean Bottom Seismometer, sismomètre de fond de mer. C'est grâce à des réseaux d'OBS que l'équipe de
Philippe Charvis, directeur de GEOAZUR à Nice, observe, étudie, enregistre les mouvements du sol sous-marin.
Pourquoi ? Pour constituer une base de données sismologiques et initier une surveillance des séismes en mer.
« Les OBS sont similaires aux stations sismologiques à terre, si ce n'est qu'ils sont enfermés dans une sphère en
verre étanche et déployés au fond de la mer. » En mer Ligure, au large de Nice, le réseau ROSMARIN (Réseau
d'Observation Sismologique MARIN) permet de surveiller la sismicité diffuse de la région.
Les OBS Hippocampe pour l'observation temporaire.
© A. Anglade - Géosciences Azur.
En 2001, un séisme assez fort, ayant entraîné de nombreuses répliques, a été enregistré par les appareils. Le
réseau ainsi déployé a permis de mettre en évidence l'existence d'une faille active relativement profonde.
Jusqu'ici, les OBS pouvaient enregistrer de façon autonome les mouvements du sol pendant un mois. Désormais,
grâce aux nouveaux appareils développés au laboratoire, les chercheurs espèrent pouvoir larguer les sphères
enregistreuses et ne les récupérer qu'au bout de six mois.
Toujours en Méditerranée, l'équipe profite du capteur à neutrinos Antarès de l'Institut national de physique
nucléaire et de physique des particules (IN2P3). En effet, un câble sous-marin relie l'observatoire sous-marin
jusqu'à terre : grâce à lui, les données sont enregistrées et transmises en temps réel. À terme, l'équipe
souhaiterait déployer un réseau permanent en temps réel de plusieurs capteurs. Gros inconvénient : cela coûte
cher !
OBS posé sur le fond de l'océan.
© A. Anglade - Géosciences Azur.
Mais l'activité de l'équipe ne s'arrête pas à la mer Ligure. En collaboration avec l'IRD, les chercheurs s'occupent
aussi d'un chantier en Équateur. La zone frontalière avec la Colombie est une région à forte probabilité de
séismes. En 1906, elle a été le siège d'un séisme à peine moins fort que celui de Sumatra en décembre 2004.
« Nous avons déployé une trentaine d'OBS ainsi qu'une trentaine de stations sismologiques terrestres. » Grâce à
ce maillage, les chercheurs pourront positionner les microséismes enregistrés. « Le but est de définir dans quelle
étape du cycle sismique se trouve la zone. »
De fait, il existe une certaine régularité dans les événements sismiques. Ainsi, en 1946, 1958 et 1976, la région a
subi d'importants séismes. Et depuis, plus rien, du moins pas d'événement majeur. « Si l'on comprend dans quel
contexte les grands séismes se forment, on peut espérer détecter des mouvements précurseurs qui permettront
d'anticiper et de mettre en place des plans de prévention », souligne Philippe Charvis.
Philippe Charvis
Unité « Géosciences Azur » (GEOAZUR)
CNRS-Universités de Nice et Paris 6-IRD
Tél. : +33 (0)4 93 76 37 40
Mél : [email protected]
Consulter le site web : GEOAZUR
Consulter le site web : Réseau d'Observation Sismologique MARIN (ROSMARIN)
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
Le BCSF surveille les séismes de France
Ses habitants ne les ressentent pas pour la plupart, mais une dizaine de séismes sont toutefois bien
perçus par an en France métropolitaine. À charge pour le Bureau central sismologique français (BCSF)
de les enregistrer, de les répertorier et de les analyser, comme nous l'explique Michel Cara, de l'Institut
de physique du globe de Strasbourg.
Le Bureau central sismologique français (BCSF) collecte l'ensemble des données relatives aux tremblements de
terre survenus en France. Sur les plus notables d'entre eux, il diffuse ensuite des notes de synthèse et publie,
tous les trois ans, une compilation finale de ces informations. En cas de séisme particulièrement important, c'est
le BCSF que consulte l'État pour instruire les demandes - formulées par les communes - de reconnaissance de
l'état de catastrophe naturelle.
Carte de sismicité de la France 1980-2004.
© Source RéNaSS - LDG.
Deux types de données sont collectées par ce bureau. D'une part, les données macrosismiques : description des
effets ressentis à l'intérieur ou à l'extérieur des bâtiments et, pour les plus gros séismes, relevé des dégâts subis
par les constructions. D'autre part, les données instrumentales : données qui proviennent des stations
sismologiques distribuées sur le territoire métropolitain.
Les premières sont traduites sous forme de cartes montrant les valeurs de l'intensité macrosismique. L'intensité
décroît grossièrement lorsque l'on s'éloigne de l'épicentre des secousses. Des anomalies sont toutefois à relever,
eu égard, par exemple, à une amplification locale des vibrations. Les secondes données, instrumentales,
permettent quant à elles de localiser rapidement les épicentres des tremblements de terre avec une précision de
l'ordre de 10 km ainsi que de mesurer leur magnitude sur l'échelle de Richter.
Les données instrumentales relatives au territoire métropolitain proviennent du Réseau national de surveillance
sismique (RéNaSS) et du Laboratoire de détection géophysique du Commissariat à l'énergie atomique. Au total,
ce sont 152 stations qui scrutent en permanence notre territoire.
Dégâts dus au séisme des Saintes en Guadeloupe (21 novembre 2004).
Localité de Petites Anses sur l'archipel des Saintes où l'intensité a atteint
VIII et pour lequel le BCSF a déterminé les intensités macrosismiques.
© D. R.
En cas de séisme ressenti, le BCSF dispose très rapidement d'informations, non seulement grâce aux réseaux
instrumentaux, mais également - et de plus en plus - grâce aux témoignages spontanés reçus sur le site Internet
du BCSF. Le nombre de tremblements de terre dont les épicentres sont localisés chaque année est considérable.
La plupart d'entre eux ne sont néanmoins pas ressentis et ce n'est qu'au-delà d'une magnitude de 3,5 qu'ils le
deviennent largement.
Michel Cara
Institut de physique du globe de Strasbourg
CNRS-Université Strasbourg 1
Tél. : +33 (0)3 90 24 00 54
Mél : [email protected]
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Institut de physique du globe de Strasbourg
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Bureau central sismologique français (BCSF
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
Les Antilles au cœur d'un vaste chantier géologique
Sur le territoire national, la région des Antilles est un des endroits où les aléas géologiques naturels sont
les plus importants. Aléas volcaniques, sismiques, gravitaires et risques de tsunamis y sont en effet
conséquents et liés à un contexte géodynamique particulier. C'est pourquoi l'INSU-CNRS a choisi de
porter un effort de recherches particulier sur cette région au travers du chantier Antilles. Jean-Marc
Lardeaux, professeur à l'Unité « Géosciences Azur » de l'Université de Nice Sophia-Antipolis et
responsable du chantier Antilles, apporte des précisions sur ce programme.
D'un côté, les plaques nord- et sud-américaines. De l'autre, la plaque Caraïbe. À l'aplomb de cette zone de
convergence de plaques, l'arc des petites Antilles. Une zone pour le moins active marquée par une subduction de
la plaque nord-américaine sous la plaque Caraïbe au niveau de l'arc et par des décrochements au nord et au
sud. « Ces phénomènes géodynamiques associés génèrent d'une part de la déformation et donc des séismes et
d'autre part du volcanisme dans la région », indique Jean-Marc Lardeaux.
Schéma structural de la zone de convergence des Petites Antilles qui
montre la partition de la déformation entre subduction et décrochements,
ici au sud.
© D. R.
Depuis 2003, Jean-Marc Lardeaux participe au chantier Antilles, vaste programme de recherche sur le processus
de subduction des Antilles et sur les risques naturels qui y sont associés. Seize projets scientifiques ont été
soutenus et financés dans le cadre de ce programme, permettant à une vingtaine d'équipes de mener des
recherches sur le fonctionnement de l'arc des Antilles à diverses échelles d'espace et de temps.
Dans le domaine du volcanisme, la Montagne Pelée en Martinique, la Soufrière en Guadeloupe ou encore la
Soufrière Hills à Montserrat sont l'objet de toutes les attentions. « Ce sont autant de volcans encore en activité et
donc dangereux pour l'environnement humain, commente le professeur. Nous cherchons donc à étudier et
comprendre les processus déclencheurs des grandes explosions caractéristiques de ces volcans, mais aussi à
mettre au point des modèles fiables de simulation des écoulements volcaniques, afin d'établir des cartes de
risques précises. »
En ce qui concerne l'aspect sismique, les travaux du chantier Antilles sont également ambitieux. Logique quand
on sait que les Antilles françaises forment la région la plus sismique de France, et qu'elles ont connu dans leur
histoire plusieurs séismes destructeurs comme celui de 1843 qui a détruit Pointe-à-Pitre.
« La topographie très accidentée du toit de la plaque plongeante semble contrôler une grande partie de la
sismicité à l'échelle régionale. Nous tentons donc de caractériser le fonctionnement de cette interface par
l'imagerie sismique de la zone de subduction et la compréhension de la sismicité superficielle ou profonde en
liaison avec l'évolution tectonique des petites Antilles. Cette étude en continu est un élément essentiel,
notamment dans les zones où les risques de tsunamis sont relativement importants. » En 2006, un colloque
organisé en Guadeloupe permettra de faire un premier bilan scientifique de cet effort national de recherche que
représente le chantier Antilles.
Jean-Marc Lardeaux
Unité «Géosciences Azur» (GEOAZUR)
CNRS-Universités de Nice et Paris 6-IRD
Tél. : +33 (0)4 92 07 68 09
Mél : [email protected]
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GEOAZUR
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INSU - chantier Antilles
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
Pyrénées : zone sous surveillance
Avec 600 séismes par an, les risques sismiques des Pyrénées ne peuvent être ignorés. Grâce à un réseau
de 40 stations sismologiques, Annie Souriau et son équipe « Sismologie » du Laboratoire « Dynamique
terrestre et planétaire » de Toulouse traquent, localisent et évaluent la force de ces secousses.
Les Pyrénées sont traquées... par des stations sismologiques : 20 du côté français, autant chez nos voisins
espagnols. À ce réseau s'ajoutent également des stations accélérométriques. Quelle différence entre les deux
appareils ? Les premiers sont dédiés à l'enregistrement des plus petits mouvements du sol tandis que les
seconds attendent les mouvements forts provoqués par les gros séismes, dont ils mesurent les accélérations –
celles-là mêmes qui produisent des destructions.
Côté français, c'est l'équipe « Sismologie » du Laboratoire « Dynamique terrestre et planétaire » qui assure la
collecte et le traitement des données enregistrées. « Ce réseau de surveillance permet de localiser environ 600
séismes par an. Mais parmi ceux-ci, seulement une vingtaine sont ressentis par la population », précise Annie
Souriau, responsable de l'équipe. Pour chaque séisme, on calcule le temps qui s'écoule entre l'arrivée des
premières ondes, dites P, et les suivantes appelées S. En combinant les données des différentes stations, on
parvient, par triangulation, à localiser précisément les failles à l'origine des séismes.
Mais à quoi cela sert-il de savoir quand et où a eu lieu un séisme ? D'abord à informer les pouvoirs publics en cas
de séisme ressenti. Ensuite, une fois les informations traitées, à dresser des cartes de sismicité. Celles-ci
serviront à établir le futur zonage sismique : une carte indiquant les probabilités plus ou moins fortes qu'un
séisme se produise, et donc les zones où les normes parasismiques de construction doivent être appliquées. Et
c'est là que les scientifiques s'interrogent. Car selon l'approche choisie, les cartes diffèrent. De fait, en se fondant
sur la sismicité récente, enregistrée par les instruments, l'ouest des Pyrénées semble plus fortement promis à des
séismes. « On enregistre beaucoup de petits séismes, cela signifie qu'il y a des failles actives et donc risque
qu'un gros séisme se produise. »
Dans cette approche, l'est des Pyrénées semble une zone à faible sismicité. Pourtant, au Moyen Âge, la
Catalogne a subi le plus fort séisme historique jamais répertorié dans les Pyrénées, d'une magnitude équivalente
à 6,1 et faisant 700 morts. Jusqu'à présent, c'est la sismicité historique qui a servi à établir le zonage sismique de
la France, mais les prochaines cartes prendront également en compte la sismicité instrumentale.
Le Plan de prévention des risques sismiques pour la ville de Lourdes
Annie Souriau
Laboratoire « Dynamique terrestre et planétaire »
CNRS-Université Toulouse 3
Tél. : +33 (0)5 61 33 29 64
Mél : [email protected]
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Laboratoire « Dynamique terrestre et planétaire »
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Le Plan de prévention des risques sismiques pour la ville de Lourdes
La ville de Lourdes a été partiellement détruite par des tremblements de terre à deux reprises, en 1660 (séisme
d'intensité IX à une vingtaine de kilomètres de Lourdes), et en 1750 (séisme d'intensité VIII à seulement 5
kilomètres de la cité). L'Observatoire Midi-Pyrénées (OMP) a donc conduit une étude pour évaluer la réponse des
sols, au cas où un séisme semblable à ces séismes historiques viendrait à se reproduire aux portes de cette ville.
Rappelons que Lourdes est la deuxième ville hôtelière de France. Au niveau géologique, le site de la ville de
Lourdes est très complexe : lieu de convergence de vallées, moraines déposées par des glaciers… En certains
endroits, la réponse du sol à une secousse peut varier d'un facteur 10 en des points distants de moins d'un
kilomètre. C'est ce que les enregistrements d'une dizaine de stations sismologiques, installées dans la ville
pendant 7 mois, ont montré. Ainsi, le sous-sol de la caserne de pompiers donne une réponse assez fortement
amplifiée : elle serait donc vulnérable en cas de séismes. Tout comme une école primaire située à seulement 500
mètres du château, où en revanche les ondes sont atténuées.
Évaluation de la réponse des sols (effets de site) dans la ville de Lourdes.
Noter la forte amplification des ondes à la caserne des pompiers (PMP), à
l'école d'Auzon (AUZ) et au Sanctuaire (SAN).
© D'après Dubos, Souriau, Ponsolles, Fels et Sénéchal, Bull. Soc. Géol.
Fr., 174, 33-44, 2003.
Une étude plus poussée et plus détaillée, menée conjointement par le Bureau de recherches géologiques et
minières (BRGM) et l'OMP, est en cours. Elle servira à l'établissement d'un Plan de prévention des risques
sismiques. Il reviendra alors aux pouvoirs publics de gérer ces résultats et de décider quels bâtiments devront
être consolidés ou déménagés, comment poursuivre l'aménagement de la ville, et comment anticiper
l'organisation éventuelle des secours.
Annie Souriau
Laboratoire « Dynamique terrestre et planétaire »
CNRS-Université Toulouse 3
Tél. : +33 (0)5 61 33 29 64
Mél : [email protected]
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Laboratoire « Dynamique terrestre et planétaire »
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
La Côte d'Azur, une terre de contrastes
Des fonds sous-marins à plus de 3 000 m de profondeur en mer Ligure et des sommets à plus de 3 000 m
d'altitude dans le Massif du Mercantour : la Côte d'Azur offre un relief impressionnant et une grande
diversité de paysages. Mais la région est confrontée à des risques naturels variés. Les chercheurs du
Laboratoire « Géosciences Azur » essaient de comprendre la mécanique de la croûte terrestre dans cette
région afin de mieux évaluer le risque encouru par les populations du littoral et de l'arrière-pays.
Une zone tectoniquement complexe
La plaque africaine remonte vers l'Europe à une vitesse d'environ 5 mm/an. La distribution des séismes au sein
de la frontière de plaque indique que cette convergence est accommodée de manière complexe autour du Bassin
méditerranéen. Même si la frontière majeure ne passe pas directement par la France, les mesures récentes
obtenues avec le positionnement millimétrique du GPS (Global Positioning System) montrent que l'Italie subit un
mouvement de rotation par rapport à l'Europe. Cette rotation, autour d'un axe situé vers Milan, provoque une
compression au niveau du sud des Alpes et de la Côte d'Azur. L'installation d'un réseau géodésique de grande
précision permet d'avoir une vision de plus en plus précise des mouvements entre plaques, surtout dans des
régions aux structures complexes.
Rotation de la microplaque Adriatique mise en évidence par les mesures
de déplacement GPS observées sur quelques années. Noter la proximité
du pôle de rotation par rapport à la côte d'Azur.
© Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR).
Une activité sismique de faible à modérée difficile à quantifier
La présence de structures héritées (failles anciennes et maintenant inactives liées à la formation des Alpes
depuis 50 millions d'années) et le climat méditerranéen avec sa forte érosion compliquent la compréhension des
déformations actuelles. Par exemple, les nappes de chevauchement de l'arc de Nice cachent les failles
sismiquement actives (faille de Blausasc). L'érosion emporte les signes ténus que ces failles faiblement actives
laissent dans la morphologie.
Faille cachée de Blausasc : l'activité sismique lors de la crise de
novembre-décembre 2000 montre un décalage entre les traces en surface
des séismes anciens et l'activité détectée grâce à un réseau temporaire
dense dans cette zone. À gauche, les observations et à droite
l'interprétation montrant un décalage en raison du mouvement lent de la
partie supérieure de la structure.
© Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR).
La connaissance du domaine marin (la mer Ligure) est insuffisante pour comprendre comment s'articule cet
ensemble complexe de failles et déterminer la continuité des structures entre la terre et la mer. Il n'y a pas de
sismomètres permanents en fond de mer pour détecter la microsismicité. Enfin, les contrastes des propriétés
physiques de la croûte dans cette région et la topographie complexe rendent la propagation des ondes sismiques
difficile à quantifier avec des effets locaux d'amplification ou d'atténuation.
Côte d'Azur et sa sismicité de faible à modérée montrant une activité
diffuse sur les Alpes et certains séismes importants dans la zone
maritime, voire côtière.
© Source RéNaSS - LDG.
L'estimation de l'aléa sismique est, par conséquent, difficile et l'évaluation de la vulnérabilité de cette région à
forte croissance urbaine doit être sans arrêt remise en chantier. Les rares séismes de magnitude 4-5, qui
surviennent environ tous les cinq ans, ne sont pas enregistrés en un nombre de points suffisant pour mieux
contraindre les modèles ou pour mieux extrapoler les mouvements des séismes de magnitude 6-6,5 attendus (cf.
Réseau TGRS/RéNaSS Alpes Sud-Est). En augmentant la densité des capteurs dans les zones littorales pour
cette région, le Réseau accélérométrique permanent montre la voie.
Les collaborations sont nombreuses entre le CNRS et l'Université de Nice (Sophia Antipolis), dans le cadre d'un
Contrat Plan État-Région PACA ou au cours d'INTERREG I et II, coopération transfrontalière, transnationale et
inter-régionale.
Instabilités gravitaires terrestres et sous-marines
Une prise de conscience politique
Jean Virieux
Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR)
CNRS-Universités de Nice, Paris 6-IRD
Tél. : +33 (0)4 92 94 26 51
Mél : [email protected]
Consulter le site web : GEOAZUR
Consulter le site web : Observatoire océanologique de Villefranche/Mer
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques > La Côte d'Azur, une terre de contrastes
Instabilités gravitaires terrestres et sous-marines
Le risque sismique modéré sur la Côte d'Azur s'accompagne de glissements gravitaires qui peut-être ont amplifié
dans le passé l'impact de certains séismes comme celui de 1564 avec la destruction du village de Rocquebillière.
Mais ces glissements peuvent avoir des origines diverses : les fortes pentes de montagne sont naturellement
instables et cette instabilité est amplifiée par les effets conjugués des ruissellements, des variations thermiques
importantes, des secousses sismiques, déclenchant d'importants déplacements locaux de matière. C'est le cas
du glissement de la Clapière à Saint-Étienne de Tinée qui dure depuis plus d'un demi-siècle.
Glissement de la Clapière dans la Haute Vallée de la Tinée, près du
Village de Saint-Étienne de Tinée. Noter les trois zones identifiables
comme la zone 1 de fort pendage en direction de la vallée de Rabuons, la
zone 2 où les instabilités sont fortement exprimées sans avoir encore été
déclenchées et enfin la zone 3 où ces instabilités ont provoqué le
glissement.
© Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR).
Les matériaux ainsi déplacés sont transportés par les rivières et les fleuves et viennent se déposer sur les fortes
pentes du littoral. On assiste ainsi au chargement continu et inexorable par des sédiments d'une zone instable où
des glissements sous-marins ont eu lieu dans le passé comme celui survenu en 1979 lors de l'extension portuaire
au-delà de l'aéroport de Nice qui avait déclenché un tsunami à Antibes. Un sondeur multi-faisceaux du CNRS
monté sur un engin téléguidé sous-marin de l'IFREMER devrait permettre une inspection régulière des zones de
glissement potentiel par des relevés périodiques d'une bathymétrie haute résolution.
Jean Virieux
Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR)
CNRS-Universités de Nice, Paris 6-IRD
Tél. : +33 (0)4 92 94 26 51
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Une prise de conscience politique
En plus des risques sismiques qui touchent les Alpes-Maritimes, d'autres risques comme le risque inondation ou
le risque tsunami existent. La prise de conscience politique est certaine dans le département des Alpes-Maritimes
sous la houlette de Christian Estrosi (le comité de liaison sismique se réunit tous les ans pour faire le bilan annuel
de l'activité sismique dans le département) comme dans le département de l'Isère. Les hommes politiques
confrontés à des interpellations quasi-quotidiennes prennent conscience de l'ampleur des problèmes liés à la
protection des biens et des personnes face aux risques naturels.
Des initiatives existent : l'association Pôle grenoblois des risques naturels soutient des actions dans la région
Rhône-Alpes. Le Groupement d'intérêt scientifique CURARE soutenu par le Conseil général des Alpes-Maritimes
a pour projet la création d'une Agence des risques environnementaux. Le but de cette agence serait une
meilleure connaissance et une organisation du patrimoine environnemental aux services des entreprises. Des
réponses sont donc possibles face aux défis de notre société.
Jean Virieux
Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR)
CNRS-Universités de Nice, Paris 6-IRD
Tél. : +33 (0)4 92 94 26 51
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L'Europe sismique et ses grandes failles
Les grands séismes ne se produisent que par la rupture de grandes failles. Le principal danger qui
inquiète l'Europe se situe sur les bords de la Méditerranée, en Grèce et en Turquie, parties communes de
la grande faille nord-anatolienne (FNA). Après les séismes meurtriers de 1999, la ville d'Istanbul vit sous
la menace, en mer de Marmara, d'une branche sous-marine de cette dernière. Les explications de
Rolando Armijo, de l'Unité « Tectonique, mécanique de la lithosphère » de l'Institut de physique du globe
de Paris.
Mille kilomètres de longueur, plusieurs centimètres de déplacement par an. La faille nord-anatolienne représente
un décrochement continental en tout point comparable à celle de San Andreas, en Californie. Elle se caractérise
e
en outre par d'étonnantes séquences de tremblements de terre. Il s'en recense deux : une au XVIII siècle et une
au XXe - dont les derniers séismes d'août et novembre 1999. Les ruptures sismiques se sont succédé d'est en
ouest, tels des à-coups le long d'un zipper que l'on ouvrirait. Leur progression pointe désormais vers Istanbul,
mégalopole de dix millions d'habitants, située à moins de 20 km au nord de la branche principale de la FNA, sous
la mer de Marmara.
Lancé en 1999, un ambitieux programme franco-turc a permis de décliner, entre 2000 et 2002, une série de
quatre campagnes d'étude, étude à la fois géologique et géophysique. Les techniques d'observation les plus
sophistiquées, comme un prototype placé sur le sous-marin ROV Victor 6000, fournissent une moisson de
résultats. Les experts disposent désormais d'une cartographie précise des différents segments de failles ainsi que
d'une imagerie sismique 3D.
L'histoire sismo-tectonique du bassin de Marmara, avec ses ruptures sous-marines très claires, se dévoile de la
sorte. Il s'agit d'un bassin de type « pull-apart », c'est-à-dire d'un bassin d'effondrement formé par des failles à
géométrie fortement coudée, qui combinent mouvements verticaux et latéraux. De plutôt bon augure quand on
sait que coudes et cinématique complexe limitent l'extension des ruptures sismiques, et par là même la
magnitude des séismes. L'accumulation des contraintes autour des failles et sa modélisation montrent qu'un,
voire plusieurs, séismes de magnitude inférieure ou égale, de ce fait, à 7,2/7,3 seraient à envisager dans les
décennies à venir. Des séismes de plus grande ampleur le seraient en revanche moins.
Voir dans ce numéro : « Sumatra ou le défi lancé aux scientifiques ».
La faille de la mer de Marmara
Extrait du reportage de Patrick Hesters pour l'émission « Planète déboussolée »
du 31 janvier 2005 sur France 3.
Durée : 2’ 40’’
• Submarine fault scarps in the Sea of Marmara pull-apart (North Anatolian Fault): Implications for seismic
hazard in Istanbul. Armijo, R., et al. (2005), Geochem. Geophys. Geosyst., 6.
Rolando Armijo
Unité « Tectonique, mécanique de la lithosphère »
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 24 97
Mél : [email protected]
Consulter le site web : IPGP
Consulter le site web : « Sismo-tectonique »
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
Lisbonne, 1755
er
Le 1 novembre 1755, Lisbonne est ravagée par un séisme d'une magnitude estimée entre 8,5 et 9 sur
l'échelle de Richter. Bilan : plusieurs dizaines de milliers de victimes. La source exacte du séisme
demeure incertaine à ce jour. Mais les récentes recherches menées par Marc-André Gutscher, géologue
au CNRS, laissent à penser que cette catastrophe serait due à un mécanisme de subduction océanique
dans le golfe de Gibraltar et non à une collision entre la plaque africaine et la plaque eurasiatique.
Ce tremblement de terre, le plus fort de l'histoire sismique européenne, a été ressenti jusqu'à Hambourg et
jusqu'au îles des Açores. Le tsunami qui a suivi a détruit les ports du Golfe de Cadix en Espagne, avec des
vagues d'environ 5 à 15 mètres de haut. La vaste majorité des séismes de magnitude égale ou supérieure à 8,5
degrés sur l'échelle de Richter intervenus au siècle dernier se sont produits dans des zones de subduction
océanique, régions où une plaque océanique glisse sous une plaque continentale qui vient en sens opposé. Les
séismes de Sumatra en 2004 (M=9,3) et 2005 (M=8,7) ou du Chili en 1960 (M=9,5) et de l'Alaska en 1964
(M=9,2) sont dus à des zones de subduction.
Différentes campagnes de géophysique marine ont été effectuées récemment dans le détroit de Gibraltar et ont
montré la présence d'une zone de subduction : la partie océanique de la plaque africaine s'enfonce vers l'est sous
le détroit de Gibraltar, jusqu'à 700 km de profondeur.
Localisation de la zone de subduction dans le détroit de Gibraltar (à
gauche) et représentation schématique du phénomène (à droite).
© Marc-André Gutscher, CNRS.
À mesure que la lithosphère océanique s'enfonce, elle attire vers l'ouest comme une ventouse le bloc tectonique
de Gibraltar qui comprend notamment les chaînes de montagnes des Betiques (sud de l'Espagne) et du Rif (nord
du Maroc).
Les données du système global GPS (Global Positioning System) confirment le déplacement de ces régions vers
l'ouest de l'ordre de 5 millimètres par an. De plus, les chercheurs ont confirmé l'existence d'une zone de
subduction encore en activité en étudiant le prisme d'accrétion, région de la zone de subduction constituée de
sédiments.
Depuis 1755, cette zone de subduction n'a provoqué aucune secousse semblable. Le plan de faille paraît
« verrouillé » : les contraintes s'accumulent sans que les deux plaques ne bougent l'une par rapport à l'autre. Ce
type de subduction océanique ne produit pas de séisme pendant plusieurs centaines d'années. Et lorsque le
système se relâche, il engendre de violents tremblements de terre. On retrouve ce système au niveau des plans
de failles de Nankai (sud-ouest du Japon), des Cascades (nord-ouest des États-Unis) ou comme nous avons vu
plus récemment au nord-ouest de Sumatra.
Les datations de dépôts sédimentaires produits lors de grands séismes dans le Golfe de Cadix (des tsunamites
dans la lagune de Cadix, et des turbidités dans la plaine abyssale de Horseshoe) indiquent, en effet, que des
séismes d'une magnitude supérieure à 8,5 sur l'échelle de Richter se répètent tous les 1 500 à 2 000 ans. Si le
risque de tremblement de terre de magnitude 6 à 7 est important et intervient toutes les décennies, le prochain
séisme d'une telle ampleur dans la région de Gibraltar serait attendu pour le quatrième millénaire.
De nombreuses campagnes océanographiques auront lieu dans ce secteur. Avec les éventuels forages
demandés auprès du Integrated Ocean Drilling Program (IODP), les nouvelles données permettront de tester ce
modèle.
Le tremblement de terre de Lisbonne
Marc-André Gutscher
Unité « Domaines océaniques »
CNRS-Université de Brest
Tél. : +33 (0)2 98 49 87 27
Mél. : [email protected]
Consulter le site web : Unité « Domaines océaniques »
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques > Lisbonne, 1755
Le tremblement de terre de Lisbonne
er
Le 1 novembre 1755, le tremblement de terre le plus violent jamais ressenti en
Europe détruit l'opulente Lisbonne. Le séisme suivi d'un raz-de-marée et d'un
incendie fait cinquante mille victimes. À l'occasion du 250e anniversaire du séisme,
ce livre décrit ce qui s'est passé d'après les témoins oculaires, les gazettes, les
dépêches des ambassadeurs et les mémoires des académies européennes, mais
aussi du point de vue de la sismologie moderne.
Jean-Paul Poirier restitue aussi l'impact considérable que ce désastre a eu dans le
monde des idées, notamment à travers la célèbre querelle de l'optimisme entre
Voltaire et Rousseau. Jean-Paul Poirier est physicien émérite à l'Institut de physique
du globe de Paris et membre de l'Académie des sciences. Il a notamment publié,
avec Emanuela Guidoboni, Quand la terre tremblait.
Le tremblement de terre de Lisbonne. Éditions Odile Jacob, 2005.
© D. R.
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
Le Golfe de Corinthe, laboratoire naturel de sismologie
Comprendre les phénomènes physiques mis en jeu à l'occasion des ruptures sismiques : telle est la
mission du Laboratoire du rift de Corinthe. Présentation de François-Henri Cornet, du Laboratoire de
sismologie de Jussieu, et de Jean Virieux, du Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR).
Région parmi les plus sismiques d'Europe, le Golfe de Corinthe constitue un terrain d'étude naturel pour les
scientifiques. C'est plus particulièrement le comportement mécanique de sa croûte qui intéresse ceux du
Laboratoire européen du rift de Corinthe (auquel est associé le CNRS). Sans compter que la microsismicité
naturelle (magnitudes inférieures à 4) permet de suivre sans interruption les mouvements et déformations.
La compréhension de ces mouvements passe par une bonne connaissance de la structure tridimensionnelle de la
croûte. Une tomographie sismique a montré comment des structures (Grèce continentale au nord et Péloponnèse
au sud) s'écartent l'une de l'autre au rythme de 1,5 cm par an. La tomographie sismologique est un procédé
d'imagerie qui s'effectue à partir soit de sources actives (tirs à terre ou en mer), soit de séismes. Les séismes ont
l'avantage d'avoir lieu en profondeur et d'apporter une information plus simple à décoder - au détriment toutefois
d'un positionnement très précis.
Les campagnes tomographiques réalisées mettent en évidence la présence de fluides sous pression à l'intérieur
de la zone d'activité sismique observée. Elles indiquent en outre que le mouvement de ces blocs massifs
superficiels semble s'effectuer sans trop de difficultés, si ce n'est, parfois, en donnant lieu à des séismes de
magnitude supérieure à 6. Les processus mécaniques associés à ces déplacements impliqueraient une
lubrification par des fluides, dont l'analyse géochimique a montré l'origine « crustale » et qui favoriseraient une
croissance du bas vers le haut des failles majeures.
Par ailleurs, l'implantation de capteurs en forage plus ou moins profond a révélé le rôle des surpressions de fluide
quant au déclenchement d'instabilités locales induites, notamment par le passage des ondes générées par les
très gros séismes lointains (magnitude supérieure à 8 à plus de 8 000 km du site). À noter enfin, la mise en
évidence d'un mouvement lent précédant d'une demi-heure environ un séisme local.
Ces quelques résultats démontrent que seules des observations in situ permettent d'avancer dans la
compréhension des phénomènes associés aux ruptures sismiques, et particulièrement du rôle des fluides sur
l'amorce de ces instabilités.
Dans la rubrique « Pour en savoir plus : un nœud dans le forage », opération d'installation de capteurs pour
comprendre ce qui se passe au lieu même de la naissance d'un séisme.
Un nœud dans le forage
François-Henri Cornet
Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 38 97 - Mél : [email protected]
Jean Virieux
Laboratoire « Géosciences Azur » (GEOAZUR)
CNRS-Universités de Nice, Paris 6-IRD
Tél. : +33 (0)4 92 94 26 51 - Mél : [email protected]
Consulter le site web : Département de sismologie - Consulter le site web : GEOAZUR
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques > Le Golfe de Corinthe, laboratoire naturel de sismologie
Un nœud dans le forage
Extrait du film Un nœud dans le forage (2004)
Auteur - Réalisateur : Sevastos Gilles
Production : CNRS Image media
Film disponible à la vidéothèque du CNRS
Extrait du film "Un nœud dans le forage". Durée :
6'02".
Un forage profond recoupant la faille à 1 000 mètres sous terre a été réalisé. Il s'agit maintenant d'y placer des
instruments (capteurs de pression, de température, de résistivité électrique...) pour comprendre ce qui se passe
au lieu même de la naissance du séisme.
Où se procurer le film ?
Tél. : +33 (0)1 45 07 59 69
Mél : [email protected]
http://videotheque.cnrs.fr
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
15 000 ans de séismes
Quand et où aura lieu le prochain tremblement de terre au Proche-Orient ? Avant de pouvoir le prévoir,
Yann Klinger, tectonicien du CNRS à l'Institut de physique du globe de Paris (IPGP), essaie de
comprendre l'histoire des séismes dans la région à partir des traces que ces derniers ont laissées dans le
sol.
Parce qu'elles ne remontent pas avec la même vitesse vers le Nord, les plaques tectoniques arabe et africaine
coulissent l'une contre l'autre, provoquant des séismes important au niveau de la faille qui les sépare. Celle-ci,
appelée faille du Levant, est longue de 1 200 km. Elle traverse le Proche-Orient, de la Jordanie à la Turquie, en
passant par Israël, le Liban et la Syrie. Mais toutes ces régions ne tremblent pas en même temps à chaque fois
qu'un séisme se produit. « Une faille casse rarement tout du long, en une seule fois. Elle est divisée en différents
segments, qui rompent un par un, selon un enchaînement encore mal compris », explique Yann Klinger. C'est
cette logique qu'il essaie de comprendre, avec ses collègues Mathieu Daëron et Paul Tapponnier.
À la lecture des textes historiques évoquant des séismes au Proche-Orient, les chercheurs ont l'impression que la
rupture d'un segment entraîne, quelques décennies plus tard, celle de son voisin. Et ainsi de suite, pendant 200 à
300 ans, jusqu'à ce que la faille ait rompu dans son intégralité et que la région retrouve son calme.
Paléosismologie de la faille du Levant, au Liban. La photo montre
clairement les dépôts lacustres successifs (les plus bas étant les plus
vieux) perturbés par des séismes successifs.
© D. R.
Les géologues testent aujourd'hui cette hypothèse, en recherchant les traces de ces événements sur le terrain.
La méthode, appelée paléosismologie, consiste à creuser des tranchées au travers de la faille pour y observer les
perturbations géologiques. Au Liban, l'équipe travaille sur l'emplacement de l'ancien lac, maintenant asséché, de
Yammouneh. Les sédiments lacustres s'y sont déposés pendant des millénaires. Au cours de chaque
tremblement de terre, l'empilement de ces feuillets s'est cassé et les couches situées de part et d'autre de la faille
se sont retrouvées décalées. Il est possible, en datant la dernière strate brisée et celle, intacte, qui l'a recouverte,
de situer les séismes dans le temps et dans l'espace.
Dans la rubrique « Pour en savoir plus : Voyage au centre de la Terre », partez pour un voyage animé dans la
faille de Yammouneh à la recherche d'une archive paléosismologique.
Voyage au centre de la Terre
• Sources of the large A.D. 1202 and 1759 Near East earthquakes. Daëron et al., Geology, 33 (7), 529-532,
2005.
Yann Klinger
Unité « Tectonique, mécanique de la lithosphère »
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 24 37
Mél : [email protected]
Consulter le site web : « Tectonique continentale »
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques > 15 000 ans de séismes
Voyage au centre de la Terre
Extrait du film Voyage au centre de la Terre (2003)
Auteur - Réalisateur : Jean-Pierre Mirouze
Production : Flight Movie, CNRS Image media
Film disponible à la vidéothèque du CNRS
Extrait du film "Voyage au centre de la Terre".
Durée : 4'48".
Au Liban, en scrutant les failles du bassin de Yammouneh, une équipe de chercheurs espère déterminer la
fréquence des tremblements de terre les plus dévastateurs du Moyen-Orient.
Où se procurer le film ?
Tél. : +33 (0)1 45 07 59 69
Mél : [email protected]
http://videotheque.cnrs.fr
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques
Bam 2003 : un tremblement de terre dévastateur
Le 26 décembre 2003, la terre tremble dans la ville de Bam en Iran. Un séisme d'une magnitude 6,5 sur
l'échelle ouverte de Richter frappe cette cité. Il provoque la mort de 35 000 personnes et la destruction
quasi totale de la ville. À la suite de cette catastrophe, 25 stations sismologiques sont installées pour
étudier les répliques du séisme pendant plusieurs semaines. Denis Hatzfeld, sismologue et chercheur au
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique de Grenoble, revient sur les circonstances de
cette tragédie.
La citadelle de Bam après le tremblement de terre du 26 décembre 2003.
© J. Jackson.
Les études ont montré que la faille de Bam était cachée car il n'y a pas eu de rupture importante en surface mais
seulement des fissures sur 15-20 km en dessous. Denis Hatzfeld travaille en Iran depuis 1997, il dirige un groupe
de 25 chercheurs français sur place, qui étudient tout ce qui a trait aux fonctionnements des failles terrestres et
des tremblements de terre qui leur sont associés.
Ce n'est pas un hasard si les sismologues sont en Iran depuis longtemps. La plaque Arabie converge vers la
plaque Eurasie à la vitesse de 2,5 cm par an. L'Iran est pris en tenaille et encaisse l'intégralité de la déformation
produite. Cette déformation va engendrer des contraintes dans la croûte terrestre, et lorsque ces contraintes ont
un certain seuil, il y a rupture et séisme.
Le séisme de Bam a été d'une extrême violence car l'épicentre se trouvait à 3 km en dessous de la ville, ce qui
explique en partie la gravité des dégâts. Un des objectifs des études menées par le CNRS est donc de préciser
les intensités qui sont une échelle des effets du séisme. Ces intensités permettent d'établir les différents degrés
de destruction des habitations. En Iran, où l'habitat n'est pas adapté aux éventuels séismes, et où les
secousses sismiques causent la mort en moyenne de 5 000 personnes par an, de nouvelles études sur les
normes parasismiques seraient nécessaires.
Interférogramme SAR (Synthetic Aperture Radar) des mouvements cosismiques du séisme de Bam (Iran) du 26 décembre 2003.
© CNRS Photothèque - Peyret, Michel.
La magnitude du tremblement de terre de Bam n'est pas surprenante dans cette région. En revanche, plusieurs
facteurs aggravants se sont combinés pour en rendre les conséquences catastrophiques.
L'Iran est une zone géographique particulièrement intéressante pour les chercheurs : « Pour étudier la tectonique
continentale, l'Iran est une place idéale. Toutes les failles et les séismes sont en Iran, en plus les frontières
politiques de ce pays correspondent aux frontières physiques », souligne Denis Hatzfeld.
Fissures observées en surface et provoquées par le séisme de Bam. Le
glissement sur la faille en profondeur est d'environ 2 m mais n'a provoqué
que des fissures modestes en surface. Mais la localisation de l'épicentre,
juste en desous de Bam, a provoqué une accélération très importante,
responsable des dégâts.
© J. Jackson.
Voir dans ce numéro : « Une mesure pour les mouvements du sol : le réseau accélérométrique permanent ».
Denis Hatzfeld
Laboratoire de géophysique interne et de tectonophysique (LGIT)
CNRS-Universités Grenoble 1 et de Chambéry-Laboratoire central des ponts et chaussées-IRD
Tél. : +33 (0)4 76 82 80 64
Mél : [email protected]
Consulter le site web : LGIT
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Le chasse-neige indien
La collision entre l'Inde et l'Asie a créé l'Himalaya, mais aussi la péninsule indochinoise. Paul Tapponnier,
géophysicien et directeur de l'Unité « Tectonique et mécanique de la lithosphère » du CNRS à l'Institut de
physique du globe de Paris (IPGP), étudie la manière dont se sont faites ces déformations.
L'Himalaya rassemble les plus hauts sommets de la planète. Et le plateau tibétain, qui occupe près de 2 millions
de kilomètres carrés au nord de ces montagnes, est aussi haut, si ce n'est plus, que le Mont-Blanc (4 807 m). À
l'origine de cette démesure : le choc, il y a 55 millions d'années, de deux continents autrefois séparés, l'Inde et
l'Asie. La collision se poursuit aujourd'hui. En témoignent les 4 000 secousses, plus ou moins perceptibles, que
les sismomètres enregistrent chaque année au Népal.
Carte interactive de la tectonique de l'Himalaya.
© CNRS-Sagascience-GéoManips.
Si on connaît depuis longtemps la cause de l'activité sismique au Tibet, la manière dont les reliefs de cette région
se sont formés fait débat depuis une vingtaine d'années. En effet, l'Inde a pénétré sur près de 2 000 km en Asie.
Or seule la moitié de la matière qu'elle a déplacée aurait suffit à édifier l'Himalaya et le Tibet. Où est passée la
bande de 1 000 km qui manque à l'appel ? Pour Paul Tapponnier et son équipe, l'Inde se comporte comme un
chasse-neige. En s'enfonçant comme un poinçon dans le continent, elle a repoussé vers l'est l'Indochine et le sud
de la Chine. Pour preuve : des roches qui étaient face à face voilà 30 millions d'années ont été déplacées sur
près de 800 km le long de la faille du Fleuve Rouge, faille qui passe entre les deux péninsules.
Côté himalayen, l'élévation des reliefs s'explique par la plongée de la plaque indienne sous l'Asie. Le manteau
s'enfonce. Mais la croûte continentale, moins dense, résiste à ce mouvement comme un bouchon dans l'eau.
Rabotée par le continent, elle finit par se désolidariser de son socle. Des écailles s'en décollent. Elles seront
ensuite soulevées par d'autres. C'est le chevauchement de toutes ces écailles successives qui édifie l'Himalaya.
Le phénomène n'est pas terminé, même si, à cause de l'érosion, les reliefs ne gagnent que quelques millimètres
par an. Il est « boosté », tous les 500 ans environ, par un grand séisme qui fait brutalement glisser les deux
plaques de 10 m l'une sur l'autre. Le dernier tremblement de terre de magnitude supérieure à 8 sur l'échelle de
Richter, le 14 novembre 2001, sur la faille de Kun Lun, au nord-est du Tibet, est une manifestation de l'effet
chasse-neige.
Paul Tapponnier
Unité « Tectonique, mécanique de la lithosphère »
CNRS-Institut de physique du globe de Paris
Tél. : +33 (0)1 44 27 49 24
Mél : [email protected]
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Le Chili : une forte activité sismique
Le Chili est une région clé pour comprendre et prévenir les risques naturels associés aux zones de
subduction. Jean-Pierre Vilotte, directeur du Laboratoire de sismologie à l'Institut de physique du globe
de Paris nous explique l'importance des études des phénomènes sismiques au Chili.
Les zones de subduction sont-elles particulièrement exposées ?
Jean-Pierre Vilotte. Les zones de subduction sont les régions du globe les plus exposées aux risques sismiques
et aux tsunamis comme l'a rappelé le séisme de Sumatra du 26 décembre 2004. Le plus grand tremblement de
Terre jamais enregistré, le séisme de Valdivia du 22 mai 1960 de magnitude 9,5, a rompu plus de 1 000 km de
contact de la zone de subduction Sud Chili. Ce séisme provoqua un tsunami dont les effets destructeurs ont été
ressentis dans tout le Pacifique (côtes d'Hawaï et du Japon). Comprendre et prévenir le risque sismique des
grandes zones de subduction, Japon, Amérique du Sud, Amérique du Nord et Indonésie, est un enjeu majeur.
Figure gauche : Derniers grands tremblements de Terre historiques le long de la zone de
subduction chilienne. Les zones violettes matérialisent les zones de ruptures des grands séismes
de subduction. Les événements de 1934 et 1950 sont des événements intraplaques. Figure droite
: Sismicité des 40 dernières années et principales régions d'études.
© DGF/IPGP/ENS.
Pourquoi le Chili ?
J.-P. V. Situé au-dessus d'une des zones de subduction les plus sismiques du globe (en moyenne un séisme de
magnitude 8 tous les 10 ans), le Chili est un laboratoire naturel unique offrant un accès direct sur la zone
sismogène. Elle résulte de la convergence rapide, plus de 8 cm/an, de la plaque Nazca, et de sa subduction sous
la bordure ouest du continent sud-américain, provoquant une déformation rapide marquée par la formation des
Andes.
a) section verticale schématique de la zone de subduction avec les
différents types de séismes associés. b) sismicité de la partie Central
Chile entre 1996 et 2003, obtenue à partir du catalogue de données du
Service Sismologique (Université du Chili, Santiago). La ligne A-A'
matérialise la trace en surface de la section verticale présentée en c). c)
section verticale perpendiculaire à la fosse avec la distribution verticale
de la sismicité. Le front ouest subandin est matérialisé par la flèche «
Front ». Les types de séismes B et C réfèrent à la classification
présentée sur le schéma a).
© DGF/IPGP/ENS.
Quels types de séismes observe-t-on au Chili ?
J.-P. V. Le risque sismique au Chili est associé à trois types de séismes :
• les séismes de subduction, inter-plaques, au niveau de la zone couplée du
contact entre les plaques Nazca et Amérique du Sud, comme Valparaiso (1906,
Ms=8,6), Antofagasta (1995, Mw=8,1)) ou Arequipa (2001, Mw=8,4) ;
• les séismes intra-plaques au sein de la plaque Nazca, de profondeurs
intermédiaires (80-100 km), directement sous le continent, comme Chilán (1939,
Mw=8,3), Punitaqui (1997, Mw=7,3) ou Tarapacá (2005, Mw=7,8) ;
• les séismes de faible profondeur associés à la déformation des Andes, qui
menacent la région métropolitaine où vit plus de la moitié de la population du
Chili, comme Las Melosas (1958, Ms=6,9) ou Curicó (2004, Mw=6,6).
Presque toutes les villes de la côte ont été touchées par un grand séisme au
cours du siècle dernier.
Les tsunamis et le Chili ?
J.-P. V. Le Chili a une longue histoire de tsunamis associée à ces séismes,
attestée depuis le XVIe siècle et par d'anciennes légendes indiennes. La prise en
compte du risque associé aux tsunamis est critique pour des installations
portuaires comme Coquimbo, Valparaiso, Antofagasta, Iquique et Arica. En
dehors des tsunamis générés lors des séismes de subduction localisés entre la
fosse océanique et la côte, comme Valdivia (1960) ou Arequipa (2001), le risque
associé à des séismes superficiels anormalement lents et de moindre magnitude
est réel. Leur détection sismologique en temps réel doit être intégrée dans les
systèmes d'alerte.
Chili : une coopération internationale
Jean-Pierre Vilotte - Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 38 88 - Mél : [email protected]
Consulter le site web : Département de sismologie
Carte des isobathes du toit de
la plaque plongeante du
Pacifique pour la zone centrale
des Andes.
© CNRS-SagascienceGéoManips.
CNRS > Presse > Thema > Atlas des risques sismiques > Le Chili : une forte activité sismique
Chili : une coopération internationale
Les tremblements de terre de magnitude supérieure à 8 sur l'échelle de Richter sont fréquents le long des
côtes du Chili et du Pérou. Plusieurs actions de recherche en sismologie sont en cours. Présentation par
Jean-Pierre Vilotte, directeur du Laboratoire de sismologie à l'Institut de physique du globe de Paris.
Quelle est l'implication des équipes françaises ?
Jean-Pierre Vilotte. Sur les traces de Montessus de Ballore et avec le soutien du CNRS et du ministère des
Affaires étrangères (MAE), les équipes françaises ont bâti une longue histoire de collaboration avec les équipes
chiliennes, en particulier celles du département de géophysique (DGF) et du Service sismologique de l'Université
du Chili (Santiago). Deux stations très large bande GEOSCOPE et des réseaux GPS permanents d'une vingtaine
de stations ont été installés. Trois lacunes sismiques proches de la rupture ont été identifiées dont deux, cibles
des efforts franco-chiliens, n'ont enregistré aucun séisme majeur depuis 130 ans, les régions nord et central-sud
du Chili. La détection des déformations co- et post-sismiques du séisme d'Antofagasta (1995), la modélisation
sismologique du séisme de Punitaqui (1997), en sont les premiers fruits. Suite au séisme de Tarapacá (2005),
localisé sous notre réseau GPS permanent dans la lacune nord, un réseau large-bande enregistre en continu
l'activité post-sismique.
Contexte géodynamique de la zone de subduction chilienne et vitesse de
convergence entre la plaque de Nazca et le continent sud-américain.
© DGF/IPGP/ENS.
Quels sont les nouveaux enjeux de recherche ?
J.-P. V. Un programme de recherche d'une nouvelle ampleur, soutenu par l'Agence nationale pour la recherche
(ANR), et coordonné par l'École normale supérieure (ENS Paris) et l'Institut de physique du globe de Paris
(IPGP), se met en place. Dans le même temps, une collaboration ambitieuse entre le GeoForschungsZentrum
Potsdam (Allemagne) et l'Institut national des sciences de l'Univers (INSU) se met en place. L'enjeu est de
capturer, en temps quasi-réel, la genèse d'un grand séisme de subduction. On renforce les réseaux GPS
permanents au centre et au nord pour le suivi des déformations, la détection de transitoires de déformation et de
précurseurs ; les réseaux sismologiques continus pour la détection et l'analyse de la sismicité ainsi que la
surveillance sismologique des séismes tsunamigènes, avec l'installation prévue d'un réseau permanent
INSU/GFZ de 15 stations large-bande au Nord Chili dès 2006.
Le chantier Chili est donc important ?
J.-P. V. Au travers de ses liens avec le Chili, la France bénéficie d'un accès à l'une des zones de subduction les
plus actives du monde pour développer les outils adaptés à la compréhension et à la prévention de ces grandes
catastrophes naturelles. Ces outils trouveront leur application dans d'autres zones de subduction plus difficiles
d'accès ou de dimension et d'activité sismique plus réduites comme les Antilles. C'est aussi un enjeu stratégique
à l'heure où de grands programmes américains et japonais sur les zones de subduction rapide se mettent en
place.
Jean-Pierre Vilotte
Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 38 88
Mél : [email protected]
Consulter le site web : Département de sismologie
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Une frontière de plaques complexe
Étudier les failles pour comprendre les déformations des continents, c'est tout l'enjeu des recherches
d'Anne Replumaz. La géophysicienne du Laboratoire de sciences de la Terre de Lyon s'emploie
notamment à cartographier les failles actives de l'Indochine. Des failles qui sont autant de preuves de la
complexité de cette zone. Anne Replumaz nous livre quelques clés pour la comprendre.
26 décembre 2004, un tsunami aux conséquences catastrophiques est engendré par un tremblement de terre. Ce
dernier s'est produit sur une zone de subduction où la plaque indienne océanique plonge sous la plaque
asiatique. Schéma « classique » d'affrontement de plaques. Mais la situation est plus compliquée que pour une
zone de subduction normale, où la géométrie est relativement stable.
Ici la frontière entre les deux plaques est complexe car l'Inde, partie continentale de la
plaque, est plus légère et ne peut pas passer en subduction aussi facilement que la
partie océanique. Elle remonte alors vers le nord et entre en collision avec le continent
asiatique, pour former la plus haute chaîne de montagnes du monde, l'Himalaya, et le
plus grand plateau, le Tibet.
Partionnement entre la
plaque indienne et
asiatique.
© Anne Replumaz.
Dans la région de Sumatra et de la mer d'Andaman, deux mouvements coexistent donc :
la subduction de la plaque océanique et la translation de l'Inde vers le nord. La résultante
est un mouvement oblique qui se répartit sur deux types de structures : la zone de
subduction, où la plaque s'enfonce perpendiculairement, et les failles décrochantes où les plaques coulissent
l'une par rapport à l'autre. On observe souvent ce type de partitionnement lors d'un mouvement oblique, avec la
création de deux structures qui absorbent chacune une composante du mouvement.
Mais ici la situation est encore plus complexe car deux failles décrochantes
coexistent : la faille de Sagaing, qui découpe le Myanmar (Birmanie) en deux, et la
faille de Sumatra, qui découpe l'île en deux. Ces deux failles, de directions
différentes, sont reliées par une zone de relais, dit extensif. La présence de ce
relais a entraîné la création d'une mer : la mer d'Andaman.
Anne Replumaz s'emploie à étudier ces failles, à comprendre leur mouvement,
calculer leur vitesse. Pour cela, elle dispose, à terre, des images satellites de la
région où on peut voir les marques des mouvements tectoniques dans la
morphologie : formation de relief ou ouverture de bassin, décalages de ruisseaux,
de terrasses ou de moraines, sont autant d'indices. En suivant leurs cours,
décalés par le jeu des failles, elle peut ainsi en déduire le mouvement sur la faille,
et parfois calculer la vitesse de déplacement.
Cartographie montrant le
mouvement des failles de
Sagaing, de Sumatra et la zone
de relais extensif de la mer
En mer, la bathymétrie montre aussi ces mouvements tectoniques (par exemple,
d'Andaman.
on voit bien le bassin créé par le rift central de la mer d'Andaman). Sous les
© Anne Replumaz.
sédiments, les coupes sismiques permettent aussi de voir les failles (par exemple
pour le rift de Martaban). En compilant toutes ces données, il est possible de
retracer l'histoire de ces failles. Les séismes ne sont que la manifestation instantanée de ces grands mouvements
tectoniques. Peut-être un jour l'étude des failles qui les produisent permettra-t-elle de les prédire ?
Anne Replumaz
Laboratoire de sciences de la Terre de l'ENS Lyon
CNRS-École normale supérieure de Lyon-Université Lyon 1
Tél. : +33 (0)4 72 43 13 55
Mél : [email protected]
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Frontière à haut risque
Bien avant que le séisme de Sumatra ne se produise, les chercheurs du Laboratoire de géologie de
l'École normale supérieure s'étaient penchés sur la géodynamique de cette région. Nicolas ChamotRooke rappelle les techniques d'exploration et d'étude employées par son équipe et fait le point sur les
risques sismiques.
Le grand séisme de Sumatra est la conséquence de la subduction de la plaque indienne sous l'archipel
indonésien. La plaque converge vers l'Eurasie à grande vitesse « géologique » : dix centimètres par an avant la
collision qui a créé l'Himalaya (il y a environ 45 millions d'années), cinq centimètres par an depuis. Au fossé de
subduction, la friction sur la faille entre ces deux plaques s'oppose au libre coulissement : le mouvement se
produit par saccades. La faille reste bloquée pendant de grandes périodes dites inter-sismiques avant de glisser
brutalement. C'est ce glissement soudain - libérant instantanément la déformation accumulée pendant des
centaines d'années - qui est à l'origine du séisme. Dans le fossé de Sumatra, le mouvement total correspond à un
grand séisme de subduction tous les 250 à 300 ans.
Pour étudier les déformations de la région, les chercheurs du Laboratoire de géologie de
l'ENS ont recours à diverses méthodes : instrumentation GPS pour mesurer les
déformations de la croûte terrestre par géodésie spatiale ; synthèses cartographiques
retraçant l'évolution géologique récente de la région ; campagnes en mer pour
caractériser les failles actives accommodant la subduction de l'Inde sous la Sonde ;
modélisation numérique du plan de friction de la zone de subduction de Sumatra ;
modèles sismologiques de la rupture des mégaséismes de subduction.
Synthèse
cartographique de
l'évolution géologique
de la plaque indienne.
© N. Chamot-Rooke CNRS-ENS Paris.
Grâce à ces données, l'équipe a pu retracer le scénario du grand séisme de Sumatra.
Celui-ci s'est déclenché à l'aplomb de l'île indonésienne de Simeulue et la rupture s'est
propagée vers le nord. Les premiers modèles, fondés sur des modélisations
« classiques » des trains d'ondes télésismiques, suggéraient un plan de rupture d'environ
500 x 150 km2 pour un déplacement de 10 m, soit un séisme de magnitude 9.
Néanmoins, l'étude des mouvements co-sismiques enregistrés aux stations GPS
jusqu'au nord de la Thaïlande par Christophe Vigny est venue confirmer les premiers
résultats suggérés par les vibrations exceptionnelles de la Terre excitée par le séisme :
une dimension du plan de glissement de plus de 1 000 km et un moment
sismique beaucoup plus grand (magnitude 9,3).
Les implications sur les risques à venir sont importantes : au nord, la faille de Sagaing
(Myanmar centre) et le front de subduction Birman (côte ouest birmane) n'ont pas rompu et pourraient être
actuellement en phase de chargement. Au sud, un séisme de magnitude 8,7 s'est produit trois mois seulement
après le choc principal. Le risque est maintenant accru en mer sur la portion de subduction de Sumatra n'ayant
pas rompu depuis 1833, et probablement sur la grande faille de Sumatra qui parcourt l'île.
Nicolas Chamot-Rooke
Laboratoire de géologie de l'ENS
CNRS-ENS Paris
Tél. : +33 (0)1 44 32 22 57
Mél : [email protected]
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Le séisme de Sumatra : un nouvel éclairage de la Terre
Le séisme de Sumatra permettra-t-il de mieux connaître la structure interne de la Terre ? Grâce aux
enregistrements très précis des oscillations libres de notre planète réalisés par les stations
sismologiques du réseau mondial GEOSCOPE ainsi que par les autres stations de la FDSN (Federation of
Digital Seismographic Networks), la Terre se dévoile un peu plus aux yeux des physiciens. Geneviève
Roult, responsable du programme GEOSCOPE, apporte son éclairage.
En 1960, les premiers enregistrements des oscillations libres de la Terre sont obtenus suite au violent séisme du
22 mai de la même année au Chili. Mais la puissance du séisme est telle – 9,5 sur l'échelle de Richter, ce qui en
fait le plus important jamais enregistré - que la plupart des relevés sont complètement saturés, rendant les
données inutilisables.
1
Depuis, les sismomètres digitaux large-bande à trois composantes ont fait leur apparition, permettant des
enregistrements de grande qualité. À l'image de ceux recueillis par les stations sismologiques du réseau mondial
GEOSCOPE ainsi que par les autres stations de la FDSN (Federation of Digital Seismographic Networks) lors du
séisme de Sumatra-Andaman, le 26 décembre 2004.
« Nous avons obtenu de nombreux enregistrements des oscillations libres de la Terre à basse fréquence avec
une précision jusque-là inégalée, se réjouit Geneviève Roult, physicienne du globe et responsable du programme
GEOSCOPE. Ces données ont été collectées sur l'ensemble de la planète et sur un temps d'observation de
plusieurs mois. » L'importance du séisme a également permis l'observation des modes les plus « graves »
(fréquences propres entre 0,3 mHz et 3 mHz) avec une précision inégalée, ce qui s'avère d'une importance
cruciale pour l'étude de la structure interne de la planète. « Cela devrait nous permettre de mieux connaître les
paramètres physiques de la Terre profonde, confirme la chercheuse : les paramètres élastiques, la rigidité, la
compressibilité, mais surtout la densité de la planète, que nous ne connaissons pas précisément à l'heure
actuelle. »
Autre élément important, l'analyse de l'ensemble des données enregistrées a conduit à revoir à la hausse la
magnitude du séisme, estimée à 9 quelques heures après le tsunami. Elle est en fait de 9,3, ce qui correspond à
un séisme beaucoup plus important qu'un séisme de magnitude 9. Il s'agit donc du tremblement de Terre le plus
important depuis celui du Chili en 1960.
Voir dans ce numéro : « La Terre, une planète turbulente auscultée par GEOSCOPE ».
1/ Ces sismomètres détectent les mouvements du sol selon trois directions (deux horizontales et une verticale) et
les ondes sismiques sont enregistrées en continu dans une large bande de fréquences.
Geneviève Roult
Département de sismologie
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 38 99
Mél : [email protected]
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Consulter le site web : GEOSCOPE
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Sumatra ou le défi lancé aux scientifiques
Avec une magnitude de 9,3, le séisme tsunamigène qui a touché Sumatra le 26 décembre 2004 se classe
deuxième dans l'histoire sismologique instrumentale, après celui du Chili en 1960 (magnitude 9,5). C'est
en tant que tel que la communauté scientifique internationale compte l'étudier, avec toutes les techniques
de pointe disponibles à l'heure actuelle, comme le précise Rolando Armijo, de l'Unité « Tectonique,
mécanique de la lithosphère » de l'Institut de physique du globe de Paris.
Le séisme de Sumatra offre une opportunité exceptionnelle de mesurer les déformations et ruptures de
« surface ». Il n'existe en effet actuellement aucune étude de ruptures co-sismiques tsunamigènes sur un front de
subduction. Les séismes se produisant sur ce type de terrain représentent pourtant 90 % de l'énergie sismique
totale libérée sur notre planète.
Caractériser les ruptures probables de surface - avec les déformations et effets qu'elles induisent - et les étudier
dans leur rapport aux structures et escarpements cumulés sur le long terme permettra d'étalonner une
reconnaissance future sur les grands fronts de subduction sismogènes (et tsunamigènes) du pourtour Pacifique
(Tonga, Mariannes, Japon, Kouriles, Aléoutiennes, Cascades, Amérique centrale et Amérique du Sud) ou
d'autres régions sensibles (zone Caraïbe, zone hellénique).
Pour les sismologues, le défi réside essentiellement dans une utilisation intelligente, et immédiate, des moyens
techniques et scientifiques. L'approche scientifique pourrait prendre pour référence l'expérience turque. Après le
séisme destructeur de 1999, la communauté scientifique - dont une part significative de Français - s'était en effet
mobilisée pour l'étude du système sous-marin de failles au large d'Istanbul.
Dans le cadre d'une série de quatre campagnes à la mer pour l'étude de la morphologie et de la tectonique sousmarines, une bathymétrie haute résolution avait permis une sélection d'escarpements, imagés ensuite avec un
sonar latéral. En 2002 notamment, la campagne Marmarascarps en avait fourni, avec le sous-marin Atalante et le
submersible ROV Victor 6000, une description fine, par le biais, entre autres, d'une imagerie photo-vidéo de
qualité, d'un carottage et d'un échantillonnage in situ des sédiments. Des ruptures sismiques sous-marines
historiques ont pu ainsi être étudiées en détail, une première mondiale.
Voir dans ce numéro : « L'Europe sismique et ses grandes failles ».
• Armijo, R., et al. (2005), Submarine fault scarps in the Sea of Marmara pull-apart (North Anatolian Fault):
Implications for seismic hazard in Istanbul. Geochem. Geophys. Geosyst., 6.
Rolando Armijo
Unité « Tectonique, mécanique de la lithosphère »
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 24 97
Mél : [email protected]
Consulter le site web : IPGP
Consulter le site web : « Sismo-tectonique »
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SAGER, voyage vers l'épicentre du séisme
Comprendre pourquoi et comment se produisent des tremblements de terre aussi importants que celui
1
qui frappa l'Asie du Sud le 26 décembre 2004. Tel est l'objectif du projet SAGER , programme
international de recherches sur le risque sismique le long de la zone de subduction de SumatraAndaman. Satish Singh, responsable du Laboratoire de géosciences marines à l'IPGP et coordinateur du
projet SAGER, détaille les grands axes du programme.
Beaucoup de découvertes se produisent malheureusement suite à des événements dramatiques. Le séisme de
Sumatra, deuxième plus important de l'histoire sismologique instrumentale après celui du Chili en 1960, offre une
occasion exceptionnelle d'en savoir plus sur les mécanismes en cause dans le déclenchement de séismes
géants de subduction « tsunamigènes ».
C'est avec ce leitmotiv qu'une cinquantaine de scientifiques internationaux ont réuni leurs compétences au sein
du projet SAGER (Sumatra–Andaman Great earthquake research), un ambitieux programme de recherches sur
le risque sismique le long de la zone de subduction de Sumatra-Andaman et sur le fonctionnement séculaire de
cette frontière de plaques. L'étude est focalisée sur une zone de 600 km le long de la faille, depuis Sumatra
jusqu'à Nicobar, où le maximum de déplacement s'est produit pendant le séisme. Pour cela, les grands moyens
ont été déployés.
« L'étude de la zone représente un défi technique important car le tremblement de terre s'est produit dans l'océan
indien et l'épicentre est situé entre 20 et 50 km en-dessous de la surface (i.e. le fond de mer), confirme Satish
Singh, coordinateur du projet SAGER. Nous avons donc utilisé des robots ROV ('Remotely Operated vehicle')
capables de plonger à 4 ou 5 km de profondeur afin de cartographier les fonds marins et, lors d'une prochaine
campagne, nous allons pouvoir dresser des profils sismiques autour de la région de l'épicentre du séisme grâce
au 'Q-marine system de WesternGeco'. Cet instrument nous permettra d'obtenir des images de haute précision
de la sous-surface jusqu'à 50 km de profondeur et devrait ainsi nous fournir une vision à grande échelle du
fonctionnement de l'arc de subduction dans la région de Sumatra et de Nicobar. »
Depuis le début du programme, des sismomètres sous-marins et terrestres ont également été déployés afin
d'enregistrer et de localiser les microséismes et ainsi d'identifier en détail la partie de la croûte qui se fracture
encore. Et pour étudier la répétitivité du séisme, les chercheurs ont recueilli des échantillons de sédiments,
précieux pour retracer l'histoire des séismes et tsunamis dans la région. Toutes ces données devraient permettre,
à moyen terme, de connaître plus en détail cette zone à risque afin d'éviter, ou du moins atténuer, les dommages
que pourrait causer un autre séisme le long de cette faille, plus au nord dans la chaîne himalayenne, ou au sud
en Indonésie.
1/ Programme international (Japon, Allemagne, Royaume-Uni, Inde et Indonésie) soutenu par le Centre francoindien pour la recherche avancée (CEFIPRA – ministère indien de la Recherche et ministère français des Affaires
étrangères).
Satish Singh
Laboratoire de géosciences marines (LGM)
CNRS-IPG Paris-Universités Paris 6, 7 et de La Réunion
Tél. : +33 (0)1 44 27 99 67
Mél : [email protected]
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Le séisme de décembre 2004 passé au crible grâce au GPS
26 décembre 2004 : Le déplacement des plaques indienne et australienne sous l'Asie du Sud-Est
provoque un séisme aux effets dévastateurs dans la région. Grâce aux récepteurs GPS placés alentour,
une équipe de scientifiques internationaux menée par Christophe Vigny, chercheur au Laboratoire de
géologie de l'ENS (Département Terre-Atmosphère-Océan), a pu réaliser une modélisation de ce qui s'est
réellement passé. Détails…
Les chiffres témoignent en eux-mêmes de la violence du séisme qui a frappé l'Asie du Sud le 26 décembre 2004 :
la ville de Pukhet, en Thaïlande, a connu un déplacement vers l'ouest de 27 cm ; l'île de Langkawi, en Malaisie,
de 17 cm et Sampali, à Sumatra, de 15 cm. Quant à la rupture du plancher océanique provoquée par le
tremblement de terre, elle dépasse les 1 000 km de long. Ces résultats sont le fruit de travaux réalisés par une
équipe de chercheurs européens, asiatiques et européens, dirigée par Christophe Vigny, sur la base de relevés
GPS.
Modélisation du champ de déformation observé lors du séisme du 26
décembre 2004.
© D. R.
L'analyse de ces mesures sur une soixantaine de stations de recueil, situées en Malaisie, en Thaïlande et à
Sumatra – soit à des distances comprises entre 400 et 3 000 km de l'épicentre -, a permis aux scientifiques
d'établir une carte précise des déplacements de terrain consécutifs au séisme du 26 décembre. Mais aussi de
mettre en évidence la vitesse de propagation de la déchirure de la faille en direction du nord à partir de son point
d'origine. « La rupture s'est propagée beaucoup plus vite que ce que l'on a pensé au début, confirme Christophe
Vigny. Les stations du nord de la Thaïlande, situées à 1 500 km de l'épicentre, ont ainsi mesuré le déplacement
de la plaque tectonique seulement dix minutes après le début de la secousse, ce qui exclut l'hypothèse d'un
séisme dit lent qui aurait succédé au séisme 'classique'. »
L'installation de nouveaux récepteurs GPS dans la région est primordiale pour surveiller l'évolution des
déformations de l'écorce terrestre consécutives à ce séisme mais aussi pour mieux anticiper les futurs scénarios
1
possibles . Car les scientifiques sont formels : « la région continue de se déformer intensément et d'autres failles
(comme la grande faille de Sumatra, à terre) pourraient être activées. Le séisme du 28 mars 2005 à proximité de
l'île de Nias est un premier exemple de propagation vers le sud mais celle-ci pourrait continuer jusqu'à la pointe
sud de Sumatra. Il pourrait également y avoir une propagation similaire vers le nord et le golfe du Bengale. » La
probabilité qu'il y ait d'autres séismes sur ces failles dans un avenir proche est donc très élevée.
Voir dans ce numéro : « Le GPS : pour ne pas mesurer à côté de la plaque… tectonique ».
1/ De nouveaux récepteurs ont été installés : l'un à Andaman par les Indiens, d'autres à Sumatra, au sud de la
rupture, par les Américains.
• Insight into the 2004 Sumatra-Andaman earthquake from GPS measurements on southeast Asia. C. Vigny et
al. Nature, vol. 436/14, July 2005, pp. 201-206.
Christophe Vigny
Laboratoire de géologie de l'ENS
CNRS-ENS Paris
Tél. : +33 (0)1 44 32 22 14
Mél : [email protected]
Consulter le site web : Laboratoire de géologie de l'ENS
Consulter le site web : Page personnelle de Christophe Vigny
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Détection des tsunamis : une course contre la montre
Halte aux tourbillons dévastateurs
Mieux connaître et comprendre les mécanismes des séismes et des tsunamis grâce à la simulation
numérique. Hélène Hébert, chercheur au Département Analyse, surveillance environnement (DASE) du
CEA, revient sur la catastrophe de décembre 2004 et sur les risques potentiels dans d'autres coins de la
planète.
Quelle est votre démarche scientifique ?
Hélène Hébert. Nous avons développé au DASE des modèles numériques permettant de calculer l'initiation, la
propagation et l'impact des vagues créées par un tsunami, à la suite d'un séisme ou d'un glissement de terrain.
Ces modèles sont calés sur des données réelles, quand elles existent : des observations de tsunamis historiques,
des marégrammes, et, exceptionnellement comme dans l'océan Indien en 2004, des données satellitaires. Nous
appliquons ces modélisations pour améliorer la prévention des tsunamis, en particulier en Polynésie française.
Que s'est-il passé le 26 décembre 2004 ?
H. H. La terre a bougé au large de Sumatra le long d'une faille sismique de plus de 1 000
km de long. Le mouvement vertical (parfois de quelques mètres) d'importantes masses
d'eau, au-dessus de la faille, a engendré une onde de tsunami se propageant à 800 km/h
(au large) avec une énergie considérable. En haute mer, la surface de l'eau ne se soulève
que de quelques centimètres. Mais, à l'approche des plages, les vagues se resserrent et
la mer envahit les terres émergées. L'eau est montée jusqu'à 30 ou 35 mètres sur une
bande côtière de plus de 50 kilomètres.
Quelles sont les zones à risque ? La France est-elle menacée ?
H. H. L'événement de 2004 n'était pas attendu immédiatement dans l'océan Indien, même
s'il s'était déjà produit des tsunamis importants dans la région. La plupart des tsunamis
Simulation numérique
bien connus se sont en effet produits dans le Pacifique (Chili, Pérou, Kamchatka,
du tsunami de
Aléoutiennes, Alaska). Dans cet océan, la Polynésie française est ainsi probablement
Sumatra du 26
menacée par un tsunami en provenance d'Amérique du Sud. Les îles Marquises (non
décembre 2004.
protégées par des barrières de corail) ne sont pas menacées par une activité sismique
© CEA.
proche, mais peuvent être affectées par des tsunamis importants en provenance de
l'Amérique du Sud ou des Aléoutiennes, comme cela s'est produit entre 1946 et 1960.
Comment sont mis en place les systèmes d'alerte ?
H. H. La première tâche d'un système d'alerte aux tsunamis est de déterminer en
quelques minutes la position et la magnitude d'un séisme se produisant en mer : c'est un
défi pour les sismologues. Si la localisation est confirmée en mer, avec une magnitude
supérieure à 7,5–8, une alerte peut être déclenchée. Selon que les réseaux de
surveillance du niveau de la mer (marégraphes, capteurs de pression au large)
confirment ou non la formation de vagues typiques de tsunamis, l'alerte est confirmée,
infirmée, ou renforcée. Les systèmes d'alerte sont donc établis à partir de réseaux de
stations sismiques, complétés par des stations marégraphiques.
Modèle d'inondation
À l'heure actuelle, les modélisations de tsunamis ne sont pas réalisées au cours d'une
alerte, mais dans le cadre de la prévention : elles servent notamment, en amont des
alertes, à définir les zones potentiellement exposées (suivant les configurations côtières,
les pentes sous-marines..), à établir des plans de prévention des risques, voire des plans
d'évacuation. Les autorités responsables disposent alors des données nécessaires pour
améliorer la gestion du littoral.
attendue d'une baie
des Marquises lors
d'une simulation de
rupture de la grande
lagune sismique du
Nord Chili (magnitude
9). On y voit l'état de la
mer à des instants
successifs, avec une
inondation qui pénètre
dans une baie longue
de 1 km environ.
© CEA.
Modélisation des tsunamis
Extrait du reportage de Patrick Hesters pour l'émission « Planète déboussolée »
du 31 janvier 2005 sur France 3.
Durée : 1’ 29’’
Hélène Hébert
Département Analyse, surveillance environnement (DASE)
CEA
Tél. : +33 (0)1 69 26 53 80
Mél : [email protected]
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Les blessures de la grande bleue en 3D
Les canaux à houle numériques (numerical wave tank ou NWT) ont connu un essor considérable ces dix
dernières années. Derrière ce concept, une méthode de modélisation de la propagation d'ondes
hydrodynamiques en dimension trois, avec comme cas particulier, celui des tsunamis. Les explications
de Frédéric Dias, chercheur au Centre de mathématiques et de leurs applications (CMLA).
Si le concept est simple, la mise en œuvre est beaucoup plus compliquée. Il s'agit en effet de reproduire par des
simulations numériques non seulement des expériences habituellement réalisées en laboratoire, mais aussi des
phénomènes naturels complexes tels que les tsunamis. Or, les conditions aux limites sur la surface libre sont
particulièrement délicates.
Surface de l'eau après le déclenchement d'un tsunami par glissement de
terrain (simulation).
© D'après, Grilli S.T., Vogelmann S. & Watts P. (2002) Development of a
3D numerical wave tank for modeling tsunami generation by underwater
landslides, Engineering. Analysis with Boundary Elements 26, 301-313.
Le NWT1 développé à l'ENS-Cachan en collaboration avec le département de génie océanique de l'Université de
Rhode Island utilise la méthode des éléments aux frontières. Les premières applications du NWT concernent la
formation du déferlement, le développement de vagues scélérates et le déclenchement de tsunami par
glissement de terrain. Dans chaque cas, les résultats numériques sont comparés à des résultats expérimentaux.
Il est prévu d'utiliser le NWT pour mieux comprendre les tsunamis déclenchés par un séisme.
Les sismologues fournissent aux hydrodynamiciens les informations relatives à la perturbation du fond de la mer.
Les trois ingrédients principaux sont l'échelle de longueur caractéristique, le déplacement vertical et l'échelle de
temps caractéristique du séisme. Ces informations donnent une estimation de la déformation initiale de l'océan.
Les scientifiques ont l'intention d'utiliser le NWT pour mieux comprendre le transfert de l'énergie libérée à travers
la colonne d'eau. Y a-t-il un couplage entre le fond et l'eau ? L'effet de glissement lent par rapport à celui de
glissement rapide peut également être exploré en utilisant le NWT.
Formation de vagues scélérates (simulations).
© F. Dias.
Pour modéliser ensuite la propagation transocéanique des vagues, il devient trop coûteux d'utiliser le NWT. Les
modèles existants reposent sur les équations non linéaires en eau peu profonde ou sur les équations de
Boussinesq2. La dernière phase d'un tsunami est celle de l'approche des côtes et de l'inondation. Cette phase
comporte la modélisation numérique des vagues déferlantes en eau peu profonde ainsi que celle des effets liés à
la bathymétrie locale et à la présence de structures diverses et variées. Avec le tsunami de décembre 2004, les
vagues gigantesques tant redoutées par les navigateurs hantent désormais l'inconscient de tous.
1/ Presque tous les NWT développés dans le monde reposent sur les mêmes approximations et sur une
approche de type eulérienne. Seules les méthodes diffèrent : éléments aux frontières, VOF, méthodes spectrales,
SPH (smoothed particle hydrodynamics). Récemment, l'incorporation de l'algorithme des multipôles rapides
développé par Greengard au début des années 1980 a permis une accélération considérable du code.
Concrètement, la complexité varie presque linéairement avec le nombre de points utilisés pour la discrétisation.
2/ Joseph Boussinesq (1842-1929), hydraulicien mathématicien français.
• Dias F. & Bridges T. (2005) The numerical computation of freely propagating time-dependent irrotational water
waves, Fluid Dyn. Research, à paraître.
• Fochesato C. & Dias F. (2005) A fast method for nonlinear three-dimensional free-surface waves, Proc. R.
Soc. Lond. A, en révision.
Frédéric Dias
Centre de mathématiques et de leurs applications (CMLA)
CNRS-ENS Cachan
Tél. : +33 (0)1 47 40 59 24
Mél : [email protected]
Consulter le site web : CMLA
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2,5 à 5 km3 d'eau par kilomètre de plage !
Le tsunami qui a ravagé la côte ouest de Sumatra, le 26 décembre 2004, est l'une des catastrophes
naturelles les plus meurtrières de tous les temps. Comment, en quelques minutes, naît, grandit et « opère
» un tel monstre ? Les explications d'Hervé Regnauld, professeur de géographie physique à l'Université
de Rennes 2 et chercheur au Laboratoire COSTEL (Climat et Occupation du Sol par TELédétection).
Quel mécanisme géophysique a déclenché, au large de Sumatra, le tsunami de décembre 2004 ?
Hervé Regnauld. Le vaste système de failles que l'on trouve dans l'océan Indien, à une centaine de kilomètres
au large de Sumatra, correspond à la plongée de la croûte océanique indienne sous la plaque asiatique, qui porte
l'île. Or, l'océan, à cet endroit, ne se contente pas de s'enfoncer. Il se décale aussi latéralement. Il y a donc tout à
la fois une poussée descendante vers le Nord-Est et une friction coulissante vers le Nord-Ouest. Le 26 décembre,
il s'est produit un jeu vertical proche du mètre et un décrochement latéral supérieur à 40 mètres, ce qui a
déclenché un séisme sous-marin. Le plan d'eau s'est alors mis à osciller brutalement, presque à l'aplomb des
failles.
Que s'est-il passé sur la côte ?
H. R. La mer, comme aspirée, a reculé de 100 à 200 mètres. Puis, elle est revenue, sous la forme d'une nappe
d'eau plus haute que d'habitude (1,5 à 2 m) et précédée d'un train de houles parallèles (15 mètres de hauteur est
une valeur plausible) repoussant tout sur son passage et progressant à plusieurs milliers de km/h (cette vitesse
n'est valable qu'au large, à proximité de la côte, elle est tombée à quelques dizaines de km/h). L'effet de ce
bulldozer liquide sur la côte basse a été catastrophique parce que les volumes concernés sont gigantesques :
3
une vague de 15 m d'amplitude peut représenter autour de 2,5 à 5 km d'eau par kilomètre linéaire de plage. En
deux heures, une telle énergie a provoqué un déplacement du littoral comme l'auraient fait 2 000 ans de
remontée marine à la vitesse de 1 mm par an ! Le tsunami, pour ainsi dire, a contracté le temps et réduit l'espace.
Et il a fonctionné comme un balai qui ramasse sur le fond le sédiment coupant comme du papier de verre, le met
en suspension dans l'eau et dépose tout ou partie de sa charge sur la côte. Il faut imaginer une espèce de
monstrueuse machine à laver, de tourbillon rempli d'obstacles. Nombre des 175 000 victimes de la vague, à
Sumatra, n'ont pas péri par noyade, mais à la suite d'un choc.
Ce jeu d'une faille à la fois coulissante et chevauchante est-il unique à l'échelle de la planète ?
H. R. Hélas non. Ce type de structure, considéré comme un des modes tectoniques les plus générateurs
d'énergie, se retrouve peu ou prou en Californie, dans le nord du Japon et sur une partie du pourtour de la
Méditerranée. Il y a aussi une faille que l'on soupçonne d'être de ce type dans l'Atlantique, au large de Gibraltar.
C'est pourquoi nous nous intéressons de très près au tsunami qui s'est produit au sud du Portugal le 1er
novembre 1755, à 9 h 50, qui a atteint Lisbonne et dont on a retrouvé des traces jusque dans la Manche, aux
îles Scilly. Mais il va de soi que la superficie de l'espace impacté dépend de la configuration du littoral. Le pire cas
de figure ? Une baie qui se referme, pourvue d'un fond plat et vaseux et frappée à marée haute.
Jusqu'à 110 mètres d'altitude
Des bouleversements écologiques hors normes
2000 ans en 2 heures : comment un tsunami contracte le temps et réduit l'espace. Hervé Regnauld, in Revue
EspacesTemps.net, Mensuelles, 27.04.2005.
Hervé Regnauld
Laboratoire COSTEL (Climat et Occupation du Sol par TELédétection)
Unité « Littoral, environnement, télédétection et géomatique » (LETG)
CNRS-Universités de Nantes, Brest, Rennes 2 et Caen
Mél : [email protected]
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CNRS > Presse > Thema > L'Indonésie, un an après... > 2,5 à 5 km3 d'eau par kilomètre de plage !
Jusqu'à 110 mètres d'altitude
À quelle hauteur maximale une lame de tsunami peut-elle semer la désolation sur les reliefs ? 30, 40, 50 mètres,
voire plus ? La question, capitale au regard de la densité de population vivant entre 0 et 30 m dans les régions à
risques, reste largement ouverte et fait l'objet d'un « intense débat », assure Hervé Regnauld. Certes, « des
dépôts d'un tsunami survenu plusieurs milliers d'années avant notre ère ont été repérés aux Canaries à quelque
110 mètres d'altitude sur les flancs du volcan mais ce dernier n'a pas une altitude constante dans le temps.
D'autres restes, postérieurs à un tsunami issu d'effondrements sous-marins ou de séismes dans la région de la
fosse des Kermadec (et daté d'entre 1180-930 av. J.-C. au minimum et 5590-5310 av. J.-C. au maximum), ont
été mis au jour à plus de 30 m sur la côte nord-est de l'île nord de la Nouvelle Zélande, ouverte sur le Pacifique,
là où sont implantées les populations maories ».
Tout semble en fait dépendre, primo, de la topographie. Qu'une lame s'engouffre dans une vallée, comme aux
Canaries, et que celle-ci ait une pente raide, et « l'envahisseur » a toutes les chances de terminer son « run up »
meurtrier haut perché. À l'inverse, qu'une invasion soudaine d'eau marine se produise dans une baie très large
avec une plaine littorale basse et il peut y avoir beaucoup d'énergie, mais la vague a peu de chance d'atteindre
une altitude élevée. Second facteur-clé : la quantité d'énergie libérée par le tsunami. « Une vague capable
d'ascensionner à 32 m d'altitude y parvient probablement après avoir perdu une grande partie de son énergie.
Elle doit alors se contenter de déposer deux trois cailloux sans provoquer d'immenses dégâts humains et
matériels. Malheureusement, nous avons beaucoup de mal, sur ce point, à interpréter les informations que nous
collectons in situ et à construire des algorithmes 'robustes' qui simulent — numériquement — la réalité du terrain
et son impact sur la lame d'eau ».
D'où l'importance de poursuivre les prospections via des carottages, la datation au carbone 14, la
thermoluminescence…, afin de dépasser la seule reconstitution de la chronologie, mieux caractériser la physique
du phénomène et identifier préventivement les points élevés susceptibles d'être touchés par une vague. En
Indonésie, un pays régulièrement touché par les tsunamis dans le passé et le plus affecté par celui de décembre
2004 (dégâts chiffrés : 2 milliards de dollars), près de 75 % des littoraux sont potentiellement menacés, soit
12000 km de côte…
Hervé Regnauld
Laboratoire COSTEL (Climat et Occupation du Sol par TELédétection)
Unité « Littoral, environnement, télédétection et géomatique » (LETG)
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Des bouleversements écologiques hors normes
La mer revenue à son emplacement originel, après le reflux du tsunami, les modifications environnementales
occasionnées sur terre par la brusque remontée du niveau des eaux « varient selon la nature même du littoral »,
explique Hervé Regnauld. Sur une côte élevée cernée de falaises, des rafales d'effondrements peuvent se
produire. Sur une côte basse, rectiligne et riche en sédiment, « les accumulations salinisent la nappe phréatique
et les sols, perturbent de fond en comble la circulation hydraulique et migrent vers l'intérieur des terres en
proportion de l'élévation du plan d'eau, selon la règle dite 'de Bruun'. Le taux de migration est variable mais, sur
ce type de côte, il est de l'ordre de 100 pour 1, soit 100 mètres de déplacement pour un mètre d'élévation
marine ».
Exactement ce qui s'est passé sur l'île volcanique de Sumatra, dont « la côte est rectiligne parce qu'elle est
alignée sur des failles et régularisée par des houles habituellement faibles ». Circonstance aggravante : la quasiabsence de coraux et d'obstacles sous-marins (des bancs, des écueils…) capables de ralentir le déferlement en
l'obligeant à perdre - un peu - de son incroyable énergie. « Toutes les conditions étaient donc 'idéalement' réunies
pour que la règle de Bruun s'applique… ». La présence de vastes systèmes de dunes s'étirant sans discontinuer
sur plusieurs kilomètres, le long d'une côte sableuse, minimise quant à elle l'impact écologique d'un tsunami, en
faisant tout à la fois office d'éponge et de butoir. « La vague a de fortes chances de faire exploser le front dunaire,
mais ce dernier possède quand même une capacité d'amortissement suffisante pour réduire fortement l'impact ».
1
Autre ralentisseur bienvenu, les mangroves , ravagées par le passage de la lame mais dotées d'un assez bon
pouvoir de dissipation. À l'inverse, les vasières, gorgées d'eau donc imperméables, n'offrent que très peu de
résistance. Lancées à pleine vitesse, les houles « surfent » littéralement sur ces écosystèmes (un phénomène
rappelant l'aquaplaning) et gagnent encore de la vitesse.
« À Sumatra, située à deux degrés d'équateur, au Nord, la vitesse de reconquête végétale de la forêt littorale est
phénoménale. En six-sept ans, une mangrove détruite est reconstituée. Le drame, hormis naturellement des
pertes humaines, c'est la désorganisation des parcelles agricoles. Tout le système de drainage, de contrôle de
l'eau, fondamental dans l'agriculture, a été réduit à néant », conclut Hervé Regnauld, reparti sur les lieux du
drame le 23 septembre 2005. Objectif de la mission : cartographier, au nord de Djakarta, les impacts d'anciens
tsunamis déclenchés par les éruptions du volcan Krakatoa (dont la dernière grosse colère remonte à 1883), et
« tenter de repérer si d'autres tsunamis peuvent avoir été provoqués par d'autres failles ».
1/ Formations végétales caractéristiques des littoraux marins tropicaux.
Hervé Regnauld
Laboratoire COSTEL (Climat et Occupation du Sol par TELédétection)
Unité « Littoral, environnement, télédétection et géomatique » (LETG)
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« TSUNARISQUE » : de la prévention avant toute chose
Proposer une approche scientifique, pédagogique et opérationnelle en matière de prévention des risques
de tsunami en Indonésie : telle est l'ambition affichée par le projet TSUNARISQUE, doté d'un budget de
360 000 euros et co-piloté par Franck Lavigne, maître de conférences à l'Université Paris 1 et membre du
Laboratoire de géographie physique.
Quelle volonté a présidé à la création du projet TSUNARISQUE que vous co-dirigez ?
Franck Lavigne. Ce projet, l'œuvre d'un consortium franco-indonésien1, est né quelques mois avant la
catastrophe du 26 décembre 2004 de la volonté d'allier les activités de recherche, de formation et de prévention
des tsunamis en Indonésie. Une équipe se trouvait donc déjà sur place au moment des faits et a reçu le renfort
de deux autres collègues pour effectuer une reconnaissance à Aceh en janvier 2005, dans le cadre d'une mission
internationale comprenant des chercheurs japonais, américains et indonésiens (International Tsunami Survey
Team/ITST). Cette première mission a permis, notamment, de démarrer une campagne de mesures et
d'entretiens avec les survivants visant à reconstituer le déroulement de la catastrophe qui a touché une dizaine
de pays, dont certains situés à plusieurs milliers de kilomètres de l'épicentre du séisme, et causé la mort
d'environ 300 000 personnes.
Quels sont les grands axes qui structurent le projet ?
F. L. La reconstitution du tsunami de Banda Aceh (mesures de hauteur et d'orientation des vagues, étude des
dépôts et des signes précurseurs du phénomène), ainsi que celle de son impact sur les milieux côtiers de
Sumatra, a démarré en janvier 2005 et s'est poursuivi pendant l'été. Elle doit déboucher sur la mise en place
d'une méthode de cartographie des risques appliquée à la côte sud de Java, et se prolongera en 2006 par des
actions de sensibilisation auprès des populations. Détail important, chacun de ces axes comporte un volet
consacré à la formation des scientifiques et jeunes chercheurs indonésiens sur le plan technique (utilisation des
appareils de terrain qui seront laissés à leur disposition, apprentissage de la prise de vue vidéo), méthodologique
(intégration des données dans un SIG - Système d'information géographique) et pédagogique (conception et don
de matériel et de documents dédiés à la mise en garde des populations).
Quel enseignement majeur tirez-vous de la catastrophe de décembre 2004 ?
F. L. Au-delà de son extraordinaire retentissement médiatique, cet événement a fait éclater au grand jour un
paradoxe cruel : les contributions scientifiques sont de plus en plus nombreuses et la connaissance physique du
phénomène ne cesse de progresser, alors que les politiques de prévention sont, la plupart du temps, dérisoires et
très inégales suivant les États. Autant le Japon fait figure de leader en matière de modélisation, de cartographie
des risques, d'aménagement des littoraux et de protection des zones exposées, autant l'Indonésie accuse un
grave retard dans ce domaine. Ceci explique que 50 % des tsunamis qui ont frappé ce pays, dans un récent
passé, y ont causé des pertes humaines, contre 15 % « seulement » dans l'Archipel nippon.
1/ Ce consortium associe quatre universités françaises (Paris 1, Clermont 2, Paris 7, Grenoble 1), cinq UMR du
CNRS (LGP, Géolab, Prodig, SEDET, Territoires), un organisme public français de recherche et de prévention
des risques (CEA), une ONG française (Planet Risk), deux universités indonésiennes associées à un centre de
recherche (UGM, UPN) et un organisme public indonésien de recherche et de prévention des risques (BMG).
Priorité à Cilacap, principal port menacé
Expert ès-« coulées de débris »
Franck Lavigne
Laboratoire de géographie physique (LGP)
CNRS-Université Paris 1
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Priorité à Cilacap, principal port menacé
Télécommunications défaillantes, voies de communication en piteux état, distribution des vivres inégalement
répartie, manque de matériel destiné aux réfugiés et d'expérience des autorités… : l'absence de politique de
prévention auprès des populations et d'aménagements des littoraux justifie pour partie l'ampleur de la
catastrophe survenue fin 2004 en Indonésie. « Ce pays, comme la quasi-totalité des autres États du monde, ne
dispose toujours pas, à l'heure actuelle, d'une cartographie à grande échelle des zones menacées par les
tsunamis, et encore moins d'une cartographie de la vulnérabilité et des risques dans ces régions », ne peut que
constater Franck Lavigne. Aider les responsables à intégrer ce facteur-clé dans la planification régionale ou
locale constitue donc une des pierres d'angle logiques du projet TSUNARISQUE, la priorité étant accordée à la
ville de Cilacap, le principal port menacé de la côte sud de Java.
Lancée quelques mois avant la catastrophe de 2004, l'opération comporte trois étapes, à commencer par un
zonage délimitant précisément les parties potentiellement inondables. « Cette modélisation en trois dimensions
procède d'un modèle numérique de terrain à haute résolution issu du couplage entre une carte bathymétrique au
e
e
1/15 000 et deux cartes topographiques au 1/10 000 complétés par des relevés de terrain. Elle permettra de
faire tourner un modèle de propagation de tsunami soit en l'absence de toute infrastructure humaine, soit en
prenant en compte les bâtiments de la ville ».
Deuxième phase : une étude aussi fine que possible de terrain afin de localiser les axes de communication,
recenser les raffineries de pétrole, les usines à risque dans la proche périphérie de Cilacap, identifier les
immeubles d'habitation et les autres bâtiments (tels que des mosquées) susceptibles de servir de refuge, et
collecter des statistiques sur la population, le nombre de médecins, d'hôpitaux, et les capacités de transport en
cas d'évacuation (inventaire des véhicules disponibles).
Troisième et dernier volet : proposer aux autorités indonésiennes, dans un but préventif, différents scenarii
correspondant à des séismes de magnitudes variables (de 6 à 9). « Si le résultat s'avère concluant, indique le
chercheur, la même démarche sera adoptée dans plusieurs villes littorales en proie aux tsunamis. La formation
des Indonésiens leur permettra alors d'élaborer d'autres cartes pour 'traiter' d'autres secteurs
sensibles ». Parallèlement, « des campagnes d'information aux populations seront développées dans les zones à
risque par l'association 'Planet Risk' et nos partenaires indonésiens ».
Franck Lavigne
Laboratoire de géographie physique (LGP)
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Expert ès-« coulées de débris »
Fort, depuis 1992, de 14 missions d'une durée totale de 50 mois en Indonésie, Franck Lavigne scrute à la loupe
toute la palette des risques naturels frappant à intervalles réguliers ce quartier de la planète. Parmi eux, les
« lahars », de terribles coulées de pierres et d'eau dévalant à la vitesse grand V les flancs de volcans comme le
Merapi ou le Semeru (tous deux situés sur l'île de Java) soit pendant, soit après une éruption, et dramatiquement
« médiatisées » en 1985 lors de l'explosion du Nevado del Ruiz en Colombie (lequel porta le nombre des victimes
e
de ces coulées de débris, au XX siècle, à 31 500 victimes, soit 40 % des victimes d'éruptions volcaniques).
« Des blocs de plusieurs dizaines de tonnes, dévastant tout sur leur passage dès que le lahar déborde, se
répandent dans des villages, voire des villes, explique le chercheur. L'élément le plus original de ce type
d'écoulement est donc la présence d'un front pierreux, très pauvre en eau, qui se déplace en raclant le fond du
chenal à la manière d'un bulldozer ». Et de poursuivre, mû par la même « logique fondamentale et appliquée »
que face aux tsunamis : « Au Semeru, notre objectif est de comprendre dans le détail les mécanismes de
déclenchement d'un lahar ; de mettre en évidence des signes précurseurs (à partir de quel seuil pluviométrique,
par exemple, l'événement risque-t-il de se produire?) ; et d'élucider sa dynamique (par où peut-il passer, à quelle
vitesse, à quelle hauteur… ?) à l'aide d'un préleveur de sédiments et d'un détecteur enregistrant les secousses
du sol et expédiant un signal acoustique qui déclenche automatiquement une caméra vidéo fixe ». Savoir que sur
les flancs du volcan, on recense chaque année une trentaine de lahars (plus ou moins violents) par vallée donne
une idée de l'ampleur - et de l'urgence - de la tâche.
Autre domaine où s'implique Franck Lavigne : les glissements de terrain (surtout à Java) déclenchés par des
pluies torrentielles ou, comme en février 2005 à Batujajar, près de Bandung, par la déflagration d'une…
gigantesque décharge publique. « L'eau, en s'infiltrant dans cette montagne d'ordures de plus de 20 mètres de
haut, et en entrant en contact avec le méthane contenu dans la décharge, a provoqué une sorte d'explosion
phréatique et déstabilisé l'ensemble ». Bilan du désastre : un village entier enseveli et plus de 120 morts.
Franck Lavigne
Laboratoire de géographie physique (LGP)
CNRS-Université Paris 1
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Animaux et tsunamis : l'échappée belle
Le comportement des animaux lors des tsunamis
Lors du tsunami du 26 décembre 2004, une partie des animaux des parcs naturels situés près des côtes
indiennes a échappé au désastre comme si ces animaux avaient la capacité de détecter l'arrivée du razde-marée. L'absence de cadavres de grands animaux dans les zones sinistrées suggère qu'ils se sont
enfuis à temps. Cette hypothèse a passionné tant le public que les médias. D'où l'idée d'un mystérieux
« sixième sens ». Xavier Bonnet, chercheur au Centre d'études biologiques de Chizé (CEBC), répond à
nos questions.
Quels sont les faits scientifiques disponibles sur ce thème ?
Xavier Bonnet. Au risque de vous décevoir, les chercheurs n'ont pas beaucoup d'éléments. Des recensements
précis sur les cadavres de la faune sauvage seraient nécessaires pour les comparer à des comptages avant le
tsunami. Malheureusement, de telles références n'existent pas. Restent les observations anecdotiques parfois
très anciennes, mais probablement réalistes.
Au cours du tsunami du 26 décembre 2004, les grands herbivores se seraient dirigés vers les hauteurs, certains
animaux domestiques cassant leurs entraves. Cette observation indique que les animaux auraient perçu le
danger avant qu'il n'arrive.
À une échelle plus modeste, plusieurs personnes, dont moi-même, ont pu observer une telle capacité
d'anticipation. Le cas le plus classique est celui des oueds au Maghreb où, lors de débordements très brutaux,
quelques minutes (un chronométrage précis n'a jamais été rapporté) avant l'arrivée des murs d'eaux boueuses,
des nuées d'animaux, grenouilles, lézards… quittent le lit des oueds et gagnent les hauteurs. Le phénomène est
spectaculaire, d'autant que l'homme semble insensible à l'arrivée du péril. Peut-être des comportements
analogues se produisent-ils au cours des tsunamis, mais rien ne permet de le démontrer de façon rigoureuse.
Est-il possible d'étudier rationnellement ces comportements ?
X. B. Il est difficile de mettre en œuvre des études sur les comportements des animaux (notamment dans leur
milieu naturel) face à des événements imprédictibles comme les tsunamis. Ce qui limite notre compréhension de
ces comportements. Il existe simplement quelques indices directs et surtout indirects qui laissent à penser que
certains animaux peuvent sentir le danger et s'enfuir.
Peut-on parler d'un « sixième sens » ?
X. B. Le sixième sens, capacité supplémentaire par rapport à nos cinq sens classiques, n'existe pas en tant que
tel. En se gardant de toute extrapolation anthropomorphique, on observe dans le monde animal une grande
diversité de capacités sensorielles qui génère une non moins grande variété de sens, mesurables à l'aide
d'instruments et du talent d'observateur de spécialistes du comportement animal. Les données scientifiques ne
manquent pas sur ce sujet. Les capacités et équipements sensoriels des animaux sont aussi diversifiés que les
espèces elles-mêmes.
Pour citer quelques exemples, nous autres humains ne sommes pas sensibles aux ultrasons, les souris (chauves
ou pas), les chiens, les chats… le sont. De même, nous restons insensibles aux ultraviolets qui permettent aux
abeilles et à d'autres animaux de se diriger. Idem avec les champs magnétiques, les infrarouges, les infrasons,
les signaux électriques de très faible intensité… La liste est loin d'être exhaustive. En fait, il ne s'agit pas d'un
sixième sens, mais d'une grande diversité de « sens ».
Xavier Bonnet
Centre d'études biologiques de Chizé (CEBC)
CNRS
Tél. : +33 (0)5 49 09 61 11
Mél : [email protected]
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CEBC
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Aceh ou la colère de Dieu ?
En décembre 2004, l'archipel insulindien a connu une catastrophe naturelle sans précédent. Comment la
population à majorité musulmane a-t-elle réagi face à la vague dévastatrice ? Interview avec Andrée
Feillard, chercheur au CNRS, détachée auprès de l'École française d'Extrême-Orient à Jakarta.
Quelle a été la réaction des musulmans indonésiens face au tsunami ?
Andrée Feillard. La catastrophe a suscité de nombreuses questions d'ordre religieux et philosophique, et des
réponses fort diverses. Le tsunami était-il d'origine divine, et si tel était le cas, quel pouvait être le message de
Dieu ? L'Indonésie est profondément religieuse : l'athéisme est interdit et l'État exige de tous ses citoyens
l'appartenance à une des cinq religions reconnues : l'islam, le protestantisme, le catholicisme, l'hindouisme ou le
bouddhisme.
Quelle a été l'interprétation du tsunami dans les milieux musulmans ?
A. F. Il faut dire que la solidarité a été forte, de toutes parts, et que beaucoup ont agi, sur le terrain ou par des
donations, sans parler des très nombreuses prières pour les morts (tahlilan). Quant aux interprétations des uns et
des autres, notons ce qui s'est dit à la radio et écrit dans la presse : le tsunami serait une punition d'Allah pour les
Acihais dont le péché serait celui de l'irrédentisme (le mouvement de sécession d'Aceh, formé vers 1976, a été
très actif depuis une quinzaine d'années) ; pour d'autres, le tsunami serait l'expression d'une colère générale
d'Allah (les cinq prières quotidiennes seraient trop peu suivies, la corruption trop répandue).
Certains intellectuels musulmans sont allés jusqu'à affirmer qu'Allah aimait particulièrement les Acihais qu'il avait
ainsi appelés à lui. Pour les vieux oulémas traditionalistes, plus sages, le tsunami était certes un signe d'Allah
mais aucun d'eux n'a osé se prononcer sur les motivations de cet acte divin. Enfin, quelques rares libéraux ont
conclu que, puisqu'Aceh est la seule région où la charia est appliquée depuis peu, le tsunami était un signe qu'on
ne devait pas aller plus loin dans ce sens. L'application de la loi islamique est un grand débat ici depuis quelques
années.
Quelles sont les particularités de l'islam indonésien qui ont pu influer sur ces essais d'interprétation ?
A. F. Géographiquement éloignée de La Mecque, devant assumer en même temps son statut de « premier pays
musulman du monde » par sa population, l'Indonésie cherche son identité religieuse depuis longtemps. De plus,
la crise économique de 1997, dont les effets perdurent davantage ici qu'ailleurs en Asie, et les quatre
changements de gouvernement depuis la chute de Suharto en 1998, ont laissé un certain désarroi dans la
société indonésienne bercée par trente années de certitudes.
Les autres religions ?
A. F. La solidarité nationale a fonctionné : Aceh a reçu une aide considérable de la part des chrétiens
indonésiens, souvent par l'intermédiaire d'organisations musulmanes, afin de ne pas prêter le flanc aux
accusations de prosélytisme qui ont surgi dès janvier 2005 dans la presse islamiste. À Bali aussi, les hindouistes
ont montré leur solidarité.
A-t-on observé un quelconque fléchissement de la foi après l'événement ?
A. F. Au contraire, la pratique s'est visiblement accrue. À Jakarta, certains imams affirment que leur mosquée est
trois fois plus pleine pour la prière du lever du jour. Et on ajoute que la fréquence des prières a augmenté ainsi
que le débit des haut-parleurs. Un tel regain de pratique avait eu lieu également après la crise économique de
1997.
Andrée Feillard
Unité « Le monde insulindien »
CNRS-EHESS
Groupe d'études insulindiennes (ARCHIPEL)
Réseau Asie CNRS
Tél. : +33 (0)1 49 54 25 64 - Mél : [email protected]
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Le tsunami : un tournant dans la vie des Sri-Lankais
Le 26 décembre 2004, un tsunami terrible s'abat sur les côtes sri lankaises. C'est tout un pays qui est
sous le choc. Osmund Bopearachchi, directeur de la Mission française de coopération archéologique au
Sri Lanka et chercheur au Laboratoire « Archéologies d'Orient et d'Occident » (AOROC), tire un bilan de la
catastrophe.
Cette catastrophe prévisible globalement était imprévisible localement. Comme c'était le lendemain de Noël, les
catholiques se trouvaient chez eux. Les pêcheurs n'ont pas pris le large, car c'était un dimanche et un Poya, le
jour de pleine lune où les Bouddhistes célébraient l'arrivée du Bodhi sacré au Sri Lanka, il y a 2 250 ans. Ils ont
tous été surpris par les vagues dévastatrices qui arrachaient tout sur leur passage. La mer bénéfique qui a nourri
des milliers de gens les a anéantis en 30 minutes.
La ville de Hambantota. 5 000 morts. Photo prise le 29 décembre 2004.
© Osmund Bopearachchi.
Au Sri Lanka, on a dénombré 38 195 morts, 15 683 blessés. Pour le nord et l'est, on a annoncé 8 000 morts, mais
ce chiffre est en réalité beaucoup plus élevé1. 75 000 maisons sont entièrement détruites. Un million de
personnes sur une population de 19 millions restent sans abri. Ces gens sont provisoirement logés dans 800
camps de réfugiés. 150 établissements scolaires sont entièrement ou partiellement détruits par les vagues. Les
dégâts matériels, considérables, sont estimés à un milliard et demi de dollars.
Les conséquences à long terme de ce désastre seront encore plus terribles : les risques d'épidémies, les dégâts
écologiques, le manque d'eau à cause de la salinité de la terre et surtout l'effet psychologique. Que sera l'avenir
de dix mille orphelins, dans un pays où il n'y a pas d'infrastructure pour les accueillir ?
Le train maudit emporté par les vagues à Khawa. Les soldats à la
recherche des cadavres décomposés. Photo prise le 29 décembre 2004.
© Osmund Bopearachchi.
On a enterré dans les fosses communes plus de 25 000 cadavres. Personne sur le moment ne pouvait aller les
identifier à cause des routes détruites. Dans un pays où la mort est si bien respectée, beaucoup plus que la
naissance, on n'aurait jamais imaginé qu'on puisse arriver à une telle humiliation.
En juin 2005, six mois après ce désastre, la reconstruction des zones sinistrées demeurait encore au point mort.
Très peu de maisons ont été bâties en dur. Les sinistrés restent encore sous les tentes qui leurs ont été données
par les O.N.G. La peur règne dans cette population. En dépit des manifestations quotidiennes, ces abris
provisoires deviennent leurs résidences permanentes.
1/ Ce peuple souffrait jusqu'ici de la guerre sanglante entre les Tamouls indépendantistes et les forces
gouvernementales. Il se voit à présent presque anéanti par l'océan qui l'a nourri pendant des siècles. Les endroits
où personne ne pouvait aller à cause des mines sont désormais privés de signalétique, celle-ci ayant été
déplacée par les vagues.
Osmund Bopearachchi
Laboratoire « Archéologies d'Orient et d'Occident » (AOROC)
CNRS-ENS
Tél. : +33 (0)1 44 32 37 82
Mél : [email protected]
Consulter le site web : AOROC
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Reconstruire Vellaveediya
Osmund Bopearachchi, directeur de la Mission française de coopération archéologique au Sri Lanka et
chercheur au Laboratoire « Archéologies d'Orient et d'Occident » (AOROC) se trouvait sur place lors du
terrible drame du 26 décembre. Il témoigne.
Je n'ai jamais imaginé, lorsque je me trouvais à Negombo, à 500 mètres du bord de la mer à 9 h 30 du matin ce
26 décembre 2004, que j'allais assister à une grande tragédie de l'humanité. Je me souviendrai toujours de ce
matin là. Il faisait beau. Le ciel était bleu. J'avais prévu d'emprunter la route de la côte sud pour faire des
prospections archéologiques aux estuaires des côtes ouest et sud. Je connais bien cette région, car pendant près
de dix ans en ma capacité de directeur de la Mission archéologique française au Sri Lanka, j'ai fouillé un certain
nombre d'entrepôts anciens, à la recherche de témoignages archéologiques du commerce international entre
Rome et la Chine.
Le destin voulut que je prenne la route du nord. La magnitude de ce désastre et l'ampleur des souffrances ont été
telles que je me sentais humainement impuissant. C'est l'élan de générosité et de solidarité en Occident, la prise
de conscience universelle et le sentiment naissant d'un patriotisme planétaire qui m'ont donné envie d'accepter à
nouveau mon existence et de venir en aide au moins à un certain nombre de victimes.
L'atelier de fabrication des pirogues à Negombo réactivé grâce aux aides
du Laboratoire « Archéologies d'Orient et d'Occident » (AOROC). Photo
prise le 20 avril 2005.
© Osmund Bopearachchi.
Le Laboratoire « Archéologies d'Orient et d'Occident » a décidé de venir en aide aux pêcheurs de deux villages
sri-lankais : Kallar (côte est) et Beruwala (côte ouest), pour qu'ils reprennent une vie normale, en offrant une
pirogue et un filet par famille. Cette opération a été lancée en collaboration avec l'ONG sri-lankaise
« Janawaboda Kendraya ». Grâce à nos collègues français et étrangers, nous avons pu fabriquer sur place 15
pirogues.
Par ailleurs, le musée archéologique et la commune de Lattes (Hérault) ont décidé de mettre en place un
partenariat pluriannuel pour aider le village de pêcheur de Vellaveediya dont 700 habitations ont été dévastées.
L'objectif premier de l'Association « Reconstruire Vellaveediya », à laquelle je me suis joint dès le 11 janvier
2
2005, est de permettre aux Sri-Lankais de construire 50 habitations de 80 m à l'abri de tout risque.
Osmund Bopearachchi
Laboratoire « Archéologies d'Orient et d'Occident » (AOROC)
CNRS-ENS
Tél. : +33 (0)1 44 32 37 82
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La question de l'eau au Sri Lanka
Jean-Pierre Leclerc, directeur adjoint du Laboratoire des sciences du génie chimique, s'est rendu au Sri
Lanka dès le 13 janvier 2005 pour venir en aide aux sinistrés du tsunami. Ce spécialiste des problèmes
liés à l'eau et à l'environnement avait une mission de coordinateur technique pour l'association
Solidarités. Il répond à nos questions.
Pourquoi avez-vous décidé de vous rendre au Sri Lanka après le tsunami ?
Jean-Pierre Leclerc. J'ai effectué de nombreuses missions humanitaires dans le monde entier, en dehors de
mon travail d'ingénieur de recherche. Après le 26 décembre 2004, il m'a semblé naturel de faire quelque chose.
J'ai donc contacté l'association Solidarités avec laquelle j'avais déjà travaillé. On m'a alors proposé de me rendre
sur place dès le 13 janvier 2005, pendant un mois. La mission de l'association sur place concerne
essentiellement l'eau et l'assainissement. J'avais pour ma part un rôle de coordinateur technique.
Qu'avez-vous découvert en arrivant sur les lieux ?
J.-P. L. Les habitants de la zone sinistrée sont constitués d'une population assez pauvre, qui a pour habitude
d'utiliser l'eau des puits. Or les puits sont maintenant inutilisables à cause de la pollution à l'eau de mer causée
par la vague qui les a submergés et recouverts. À l'arrière, les puits ont été pollués par infiltration de l'eau de mer
dans les nappes phréatiques. Il en a donc résulté un manque d'eau global.
Mesure de la conductivité de l'eau des puits afin de vérifier la teneur en
sel après le passage de la vague.
© Solidarités, 2005 - William Daniels.
Quelles actions avez-vous alors mises en place ?
J.-P. L. Pour les puits, rien ne peut être fait, c'est une question de temps. Nous approvisionnons les populations
en eau potable grâce à des camions-citernes et des stations de « potabilisation », ou bien lorsque les sites de
fortune ou les villages sont proches des villes, nous mettons en place des connexions avec les réseaux de
distribution urbains. Mais notre principal travail consistait à construire des latrines dans les camps où la
population avait été placée. De plus, il a fallu réaliser un programme de vidange pour les fosses septiques afin
d'éviter les épidémies.
Que reste-t-il à faire ?
J.-P. L. La priorité est la reconstruction car les camps ne sont pas viables. Pour Solidarités, la première mission
consiste à étendre le réseau d'eau et à continuer à reconstruire des latrines. Par ailleurs, la majeure partie de la
population touchée est une population de pêcheurs. Un programme va donc être élaboré afin de leur redonner du
matériel. L'association organise de plus un travail de déblaiement effectué par la population touchée elle-même,
qui sera rémunérée.
Voir dans ce numéro : « L'eau source de mort »
Jean-Pierre Leclerc
Laboratoire des sciences du génie chimique (LSGC)
CNRS
Tél. : +33 (0)3 83 17 50 66
Mél : [email protected]
Consulter le site web : LSGC
Consulter le site web : Solidarités
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L'eau source de mort
La vague déferlante du tsunami en décembre 2004 a effacé des lieux et anéanti des milliers de vies (plus
de 230 000 morts ou disparus). L'eau source de vie est devenue en quelques minutes instrument de mort
et de destruction. Commentaires d'Agathe Euzen, chercheur au Pôle de recherche pour l'organisation et
la diffusion de l'information géographique (PRODIG), anthropologue, spécialiste des problématiques de
l'eau.
Absence d'eau potable et risques sanitaires
Après le tsunami, les survivants ont été confrontés au manque de nourriture et d'eau potable. Pour toutes les
instances internationales impliquées dans les secours à court et à plus long terme, l'accès à l'eau potable est une
priorité : les survivants sont exposés à des risques de maladie et d'épidémie en raison de la contamination des
eaux d'approvisionnement en eau potable, de celle des puits forés à ciel ouvert, des réservoirs, sans compter
l'absence d'assainissement et d'évacuation des eaux usées qui s'infiltrent dans les sols et dégradent la nappe
phréatique. Les déchets humains, animaux, chimiques…, enfouis et en décomposition, contribuent aussi à la
contamination de toute ressource en eau susceptible d'être consommée.
Ainsi, les différentes maladies encourues sont de nature infectieuse, parasitaire ou toxi-infectieuses : maladies
hydriques (choléra, typhoïde, polio, méningite, hépatites A et E, diarrhées, dermatoses…) qui, pour la plupart,
peuvent être évitées par un traitement de l'eau, parfois impossible vu l'étendue des zones touchées, l'importance
des volumes nécessaires et la disparition des techniciens qualifiés pour le faire. Afin de répondre aux besoins des
populations, l'aide apportée doit être raisonnée ; soutenir des alternatives locales employant, dans la mesure du
possible, des matériaux locaux, est par conséquent nécessaire pour faire face à la situation de crise tout en
envisageant des actions durables.
Cela est d'autant plus important que d'autres menaces ont atteint les survivants après le tsunami, le milieu putride
et humide étant très apprécié de nombreux parasites (Plathelminthes, Némathelminthes à l'origine de maladies
comme les schistosomiases) ou des moustiques transmetteurs du paludisme, de la malaria et de la dengue.
Assainir le milieu et limiter le développement de tous ces organismes vivants présents dans l'eau stagnante est
aussi indispensable pour éviter tout risque de multiplication des maladies.
La symbolique de l'eau
L'eau, symbole de pureté, de vie et de régénérescence, est devenue souillée, dévastatrice et mortifère. Comment
peut-elle retrouver son statut de ressource sacrée aux yeux des populations ? Comment les sinistrés peuvent-ils
consommer à nouveau des poissons pêchés dans des eaux ayant englouti des hommes ? L'économie locale
associée à la pêche, donc à l'eau, doit être reconstruite. L'importance vitale de l'eau, sa valeur… tout est à
reconquérir. Seul le temps permettra de trouver des réponses adaptées, d'où l'importance, après l'action
d'urgence, de prendre le temps de favoriser des actions, menées en permanente collaboration avec les
populations locales, pour qu'elles soient durables.
Face au tsunami : réactions de géographes
Le Pôle de recherche pour l'organisation et la diffusion de l'information géographique (PRODIG) a publié en
janvier 2005 un numéro spécial de sa lettre Intergéo, consacré à la catastrophe du tsunami du 26 décembre
2004. Plusieurs chercheurs du CNRS ont collaboré à ce numéro qui montre l'intérêt du questionnement
géographique dans sa diversité face à un phénomène d'une telle ampleur et d'une telle complexité et qui propose
une mise en perspective de ce phénomène déjà subi maintes fois dans l'histoire.
Parmi les thèmes abordés : la détection du tsunami, la mise en place d'un système d'alerte et de gestion des
risques, ses conséquences matérielles, etc. Les exemples choisis soulignent la diversité des conséquences
locales, les multiples modalités de gestion de la crise et la signification que peut avoir cet événement
exceptionnel dans les pays sinistrés.
Ce dossier peut être consulté en ligne sur le site du PRODIG
Contact : Jean-Louis Chaléard, directeur du PRODIG
Mél : [email protected]
Voir dans ce numéro : « La question de l'eau au Sri Lanka »
• « L'eau, une priorité suite au tsunami : Pourquoi ? Pour qui ? Comment ? ». Agathe Euzen. In Face au
Tsunami réactions de géographes. Lettre Intergéo, janvier 2005, numéro spécial (voir encadré).
Agathe Euzen
Pôle de recherche pour l'organisation et la diffusion de l'information géographique (PRODIG)
CNRS-Universités Paris 1, 4 et 7-EPHE
Tél. : +33 (0)1 44 07 75 76
Mél : [email protected]
Consulter le site web
PRODIG
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Poséidon, dieu ébranleur et fondateur en terre d'Athènes
Poséidon dont l'image est presque toujours celle du « dieu de la mer » est en fait un dieu très actif sur la
terre athénienne. C'est le thème central de la thèse que Sonia Darthou, membre du Centre Louis Gernet
de recherches comparées sur les sociétés anciennes, a consacrée aux mythes de fondation d'Athènes à
travers la figure de Poséidon, tout en abordant la facette très destructrice de ce dieu à travers son
pouvoir sur les séismes et les raz-de-marée.
Une image trop maritime
Poséidon a été souvent relégué du côté d'une nature imprévisible, cantonné dans la violence des tempêtes et
des tremblements de terre ou la fougue des chevaux. Cela a quelque peu enfermé ce dieu dans une image qui
interdisait de lui donner un quelconque rôle « politique ». À Athènes, il a été particulièrement marginalisé dans les
recherches face à la déesse Athéna, souffrant d'une image trop exclusivement maritime. Or, Poséidon s'avère un
dieu éminemment actif sur la terre athénienne, car les citoyens se revendiquent autochtones, c'est-à-dire nés de
la terre, et font de cette naissance leur axe de fondation.
L'Ébranleur de la terre
La Grèce est une région de forte sismicité où les tremblements de terre s'avèrent fréquents, violents et
destructeurs. La mythologie relaie cette sismicité du territoire en attribuant à un dieu, Poséidon, la responsabilité
de ces fléaux. On l'appelle d'ailleurs l'Ébranleur de la terre, et ses épithètes poétiques ou cultuelles montrent bien
la violence de son pouvoir. Elles sont en effet formées sur des verbes qui signifient pousser, remuer, vibrer ou
secouer : dans les mythes, Poséidon frappe le sol, fouette la terre, bouge les fondations, fait s'écrouler les
murailles, les palais ou les maisons, crée des failles et des raz-de-marée qui peuvent engloutir des villes entières
parfois. La terre qui doit pourtant être stable pour porter les cités des hommes devient alors un jouet entre les
mains de Poséidon : on dit d'ailleurs qu'elle danse sous les coups de son trident vengeur. Les hommes ont même
peur que la terre n'éclate dans les airs.
Le Teneur de fondations
Poséidon fait donc l'objet d'un culte pour apaiser sa colère et l'amener à révéler son versant plus positif : et c'est
alors également à lui que les citoyens s'adressent pour garantir les bonnes fondations de leurs cités. Dans ce
cas, ils préfèrent l'appeler le Stable ou le Teneur de fondations.
• Poséidon en terre d'Athènes : un dieu entre séisme et fondation. Sonia Darthou, École pratique des hautes
études, Ve section (sciences religieuses), juin 2000.
Sonia Darthou
Centre Louis Gernet de recherches comparées sur les sociétés anciennes
CNRS-EHESS
mél : [email protected]
Consulter le site web : Centre Louis Gernet
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Catastrophe et littérature de colportage
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Les almanachs, très présents aux XVIII et XIX siècles, paraissent une fois l'an ; les canards, brochures
de quelques pages, sortent à l'occasion d'un événement exceptionnel. Lise Andries, chercheur au Centre
d'étude de la langue et de la littérature françaises des XVIIe et XVIIIe siècles, s'est intéressée à la place de
la catastrophe naturelle dans cette littérature de grande diffusion, imprimée très rapidement, vendue à
bas prix et diffusée surtout par colportage.
Ouragans, orages, inondations et tremblements de terre sont les principales catastrophes naturelles traitées dans
les canards et les almanachs, une littérature très axée sur l'actualité. Évoquant une terrible tempête sur les côtes
de Grande-Bretagne en décembre 1757, les Étrennes mignonnes1, mêlant le monstrueux au prodige, écrivent
qu'« une baleine de soixante-dix à quatre-vingt pieds de longueur fut jetée à terre près d'Édimbourg ». Quant au
Messager boîteux1 de Bâle (près de 20 000 exemplaires diffusés en huit jours selon Voltaire), il publie des articles
sur les tremblements de terre survenus à Lima en octobre 1746 et à Constantinople en septembre 1754, et
consacre un cahier de dix pages avec une grande gravure dépliante au tremblement de terre de Lisbonne suivi
de celui de Madrid et du raz-de-marée de Cadix en 1755.
Nouvelles extraordinaires et précarité du monde
La dimension internationale des nouvelles transmises par les almanachs est liée à l'intérêt grandissant des
e
lecteurs du XVIII siècle pour la géographie, à leur curiosité du monde. Elle témoigne aussi d'autres intérêts, les
textes traitant presque toujours d'une partie du monde avec laquelle l'Europe a des relations commerciales et
coloniales. Almanachs et canards disent aussi la précarité du monde et rendent compte par exemple de la
rudesse des hivers dans l'Europe du XVIIIe siècle : car les nombreuses inondations que connaît cette période
sont dues non seulement à l'absence de digues mais aussi à la fonte brutale des neiges. Les textes insistent
enfin sur les conséquences sociales et économiques de ces catastrophes. Le peuple en est toujours la principale
victime : en ville, le petit peuple, qui habite traditionnellement la ville basse, est le premier touché par les
inondations ; dans les campagnes, inondations ou orages de grêle saccagent les récoltes et amènent le spectre
de la disette.
Tradition et trangression
Au même titre que les faits divers, les prodiges et les naissances monstrueuses, les catastrophes naturelles
forment le contenu traditionnel de cette forme archaïque de littérature à sensation depuis la Renaissance. Quand
les textes sont illustrés, ce qui est le cas des Messagers boîteux et des canards du XIXe siècle, les gravures
amplifient le caractère spectaculaire et pathétique des événements relatés, mettent en relief le « détail horrible ».
Les récits des malheurs d'autrui permettent au lecteur d'oublier la banalité et la monotonie de son quotidien, lui
procurent le plaisir de l'évasion dans des mondes lointains et exotiques. Si les faits divers sont une transgression
de l'ordre social, les catastrophes, rupture par rapport à l'univers familier, relèvent elles aussi de la transgression.
1/ Almanach.
Lise Andriès
Centre d'étude de la langue et de la littérature françaises des XVIIe et XVIIIe siècles (CELLF)
CNRS-Université Paris 4
Mél : [email protected]
Consulter le site web : CELLF
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Mémoires des catastrophes naturelles
Comment et pourquoi une communauté va-t-elle retenir ou oublier, transmettre ou modifier le souvenir
d'événements exceptionnels tels que les catastrophes naturelles ? Un questionnement au centre des recherches
rassemblées dans un ouvrage publié sous la direction de chercheurs du Laboratoire de recherche historique
Rhône-Alpes sur les récits et représentations des catastrophes naturelles.
Instrumentalisation et scénarisation
Avalanche, inondation, séisme… Si un événement peut être catastrophique pour les
populations qui en sont victimes, c'est souvent le discours tenu sur lui qui lui confère ou
non un statut de catastrophe. Les récits ne se limitent pas à rendre compte des
événements survenus ; par la manière dont ils sont construits et présentés, ils sont
l'expression de la façon dont les sociétés ont vécu avec la menace, acceptent ou
occultent le risque.
Depuis l'Antiquité, ces récits, savants ou populaires, et l'iconographie qui peut les
accompagner ont fait de la catastrophe un thème récurrent. Présent dans les discours
politiques et religieux comme dans les représentations, le thème de la catastrophe
traverse toutes les périodes et tous les pays. Les supports utilisés (bas-reliefs, journaux,
A. Blanc La Goutte,
Grenoblo Malhérou,
livres, sermons, films, photos...) contribuent à l'instrumentalisation et à la scénarisation de
Grenoble, Dardelet,
la catastrophe, à la construction de sa mémoire : incitation à la conversion, pour calmer la
1860-1864.
colère divine, par les pasteurs suisses après les tremblements de terre de Lisbonne et du
© Bibliothèque
Valais suisse en 1755, reconstruction de l'histoire d'un séisme à travers inscriptions et
municipale de
e
pièces de monnaie sous le Haut Empire, désacralisation de la catastrophe au XVIII
Grenoble.
e
siècle, résonance de la figure du sauveteur au XIX siècle, impact de l'iconographie des
éruptions de l'Etna en 1669 et 2002, catharsis du film catastrophe américain, etc.
Une compréhension globale de la société
Au-delà des études comparatives sur le compte rendu d'une même catastrophe au cours des siècles ou sur son
traitement à un moment donné par des supports différents, d'autres voies de recherche s'ouvrent aux historiens.
Objectifs : mieux connaître les atlas conservés par les groupes humains dans un territoire, en confrontant les
sources des archives et les différents niveaux de mémoires existants ; mieux comprendre les mécanismes de
mémorisation et d'oubli des catastrophes naturelles, en observant notamment le type d'ancrage dans l'espace
des populations impliquées ; analyser les réactions des populations face aux enquêtes officielles et face aux
solutions de prévention et d'aménagement.
Qu'il s'agisse de questionnements sur la construction de l'identité d'une communauté à partir des risques, sur les
relations des hommes avec leur territoire, ou encore sur les liens entre pouvoirs local et central… l'étude des
catastrophes naturelles offre aux historiens une entrée globale de la compréhension des sociétés.
Politique et catastrophe
• Récits et représentations des catastrophes naturelles depuis l'Antiquité, 2005.
• Histoire et mémoire des risques naturels, 2000.
Sous la direction de René Favier et Anne-Marie Granet-Abisset, Grenoble, MSH-Alpes
Consulter le site web : MSH Alpes
René Favier
Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA) - CNRS-Université Grenoble 2
Tél. : +33 (0)4 76 82 73 31 - Mél : [email protected]
Consulter le site web : LARHRA
CNRS > Presse > Thema > Des récits, des pensées et des hommes > Mémoires des catastrophes naturelles
Politique et catastrophe
Les catastrophes permettent-elles aux hommes politiques, depuis toujours, de renforcer leur pouvoir et
leur image ? Le point de vue de l'historien René Favier, membre du Laboratoire de recherche historique
Rhône-Alpes.
Si les propos de Condoleeza Rice sur la « merveilleuse opportunité » que constituait le tsunami du 26 décembre
2004 pour la diplomatie américaine ont pu scandaliser, la secrétaire d'État américaine reconnaissait ainsi
ouvertement une pratique fort ancienne d'instrumentalisation politique des événements catastrophiques, apanage
de nombreux États.
Dans l'Antiquité romaine, l'image de l'empereur bienfaiteur était popularisée par nombre d'inscriptions rappelant
l'ampleur des secours accordés par la générosité impériale. Certaines cités victimes de tremblements de terre
allèrent jusqu'à changer de nom en l'honneur du nouveau « fondateur ». Et la relation de 17 séismes anatoliens
par l'historien byzantin Jean Skylitzès révèle l'écho de ces événements dans la pensée et la pratique politiques
e
e
de l'Empire romain d'Orient (X -XII siècle).
Une histoire d'image et de pouvoir
La monarchie française utilisa les catastrophes naturelles pour intervenir politiquement et renforcer l'État. Dans
les provinces qui géraient l'impôt elles-mêmes, les intendants profitaient de l'administration des aides pour
remettre en cause des privilèges locaux. Les aides, émanation de la grâce royale, participaient de la rhétorique
du roi nourricier et protecteur.
Une image mise à mal dans les années 1780, mais plusieurs catastrophes naturelles constituèrent pour le
souverain une opportunité pour tenter d'inverser la tendance. La monarchie « médiatisa » largement les secours
accordés aux victimes des crues de 1784 et de la tempête de 1788. Par un arrêt en mars 1784, le roi accorda
trois millions de livres en indemnisation des souffrances endurées par « la classe de ses sujets la plus indigente,
et conséquemment la plus intéressante pour son cœur ». « Ce nouvel acte de bienfaisance de Sa Majesté sera à
jamais un monument de la bonté de son cœur et de la sagesse de son gouvernement [….], il a excité dans cette
province les sentiments les plus vifs […] de reconnoissance », répondait l'intendant de Dauphiné.
Le voyage compassionnel
Lors des inondations de 1856 dans les vallées de la Loire et du Rhône, Napoléon III inaugura une nouvelle
pratique : le voyage compassionnel. Pratique poursuivie depuis par les hommes politiques. Il s'agissait, via la
presse, de servir son image et d'affirmer la compétence de l'État à gérer les catastrophes naturelles au nom de la
science et de la technique. L'État s'assurait ainsi le monopole de l'expertise locale grâce aux ingénieurs
quadrillant le territoire, et imposait sa maîtrise d'œuvre des travaux confiés à ces mêmes ingénieurs.
Dans les sociétés contemporaines, l'échec ou l'absence de voyage compassionnel doivent aussi être interrogés.
Dans un contexte politique difficile, Lionel Jospin écopa en avril 2001 de la colère des sinistrés. En cette fin d'été
2005, le refus de l'administration américaine de prendre en compte la question du réchauffement climatique au
profit de la défense des intérêts pétroliers explique peut-être sa difficulté à prendre en compte immédiatement la
gravité de l'événement « cyclone Katrina ».
Avec le développement des médias contemporains et la mondialisation, c'est désormais à une autre échelle
spatiale que se pose le rapport entre catastrophe et politique.
• Les pouvoirs publics face aux risques naturels dans l'histoire. Sous la direction de René Favier. Grenoble,
MSH-Alpes, 2002.
René Favier - Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA)
CNRS-Université Grenoble 2
Tél. : +33 (0)4 76 82 73 31 - Mél : [email protected]
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La « mort collective » sous la loupe de la sociologie
Catastrophes naturelles, accidents technologiques, attentats terroristes, épidémies… : autant
d'événements traumatisants engendrant des « morts collectives » et désorganisant le tissu social. Un
thème d'actualité au cœur des réflexions de Gaëlle Clavandier, chercheur au Centre de recherches et
d'études sociologiques appliquées de la Loire (CRESAL).
Pourquoi avez-vous pris, en tant que sociologue, le phénomène de la « mort collective » comme objet
d'analyse ?
Gaëlle Clavandier. D'abord parce que le concept de « risque » ne me semblait pas en mesure d'approcher le
cœur du problème : une mort massive, brutale, imprévisible, profondément injuste et dont une société, quelle
qu'elle soit, doit donner les clefs, les modes de lecture. Ensuite, la catastrophe, au sens large, dévoile un univers
spécifique qui, jusque-là, n'avait été abordé que sous une forme « éclatée » : les accidents, les épidémies, les
guerres, les attentats… Enfin, les morts d'envergure touchent à « quelque chose » qui a à voir avec l'inédit tout
en étant soumis à des émotions, des imaginaires, des rituels, des réactions relativement uniformes.
Quelles sont les étapes nécessaires pour que l'existence « reprenne » après un tel temps de rupture ?
G. C. Il s'agit, dans un premier temps, de nommer la catastrophe en la rapprochant d'autres faits semblables, en
l'expliquant, fût-ce par des constructions imaginaires, des rumeurs qui semblent mieux à même de justifier
l'énormité des faits que les discours des experts. Puis, l'accent est mis sur la recherche des causes et des
responsabilités pour montrer une reprise en main, tandis que le consensus politique de rigueur symbolise un
resserrement de la communauté nationale et que la solidarité autour des victimes est soulignée par des
déplacements sur les lieux du drame. Par ailleurs, on s'attache à mettre en évidence tous les comportements
emblématiques de cette solidarité (dons, secours portés aux victimes par la population…) pour affirmer la
pérennité d'une cohésion sociale menacée. Cette « victoire de la vie » nécessite aussi des rites funéraires de
substitution extrêmement codifiés (chapelle ardente, cérémonie collective) qui revêtent une portée symbolique
d'autant plus forte que, pendant cette durée, les corps sont placés sous la responsabilité des pouvoirs publics, à
la différence de ce qui se produit habituellement.
La compassion qui se manifeste à l'occasion de ces tragédies manifeste-t-elle un désir de repenser les
rapports humains plus égalitairement ?
G. C. La sympathie qui se manifeste prioritairement à l'égard des victimes reflète surtout une même façon
d'envisager le drame. N'oublions pas que se jouent ici des passions en commun. Quant à repenser les rapports
humains plus égalitairement, il en va de la réconciliation « de l'homme avec lui-même ». C'est que le modèle
d'imputation de la responsabilité contemporain fait de l'homme l'acteur principal. Dès lors que les catastrophes
touchent les plus faibles, l'effet boomerang est immédiat : les survivants se veulent solidaires des victimes. La
catastrophe, par les ruptures qu'elle crée, laisse place à une ouverture. Des utopies peuvent voir le jour.
Voir dans ce numéro la rubrique « L'Indonésie, un an après… »
Catastrophe « asiatique » : à qui la faute ?
• La mort collective. Pour une sociologie des catastrophes, Gaëlle Clavandier. CNRS ÉDITIONS, 2004.
Gaëlle Clavandier
Centre de recherches et d'études sociologiques appliquées de la Loire (CRESAL)
CNRS-Universités Saint-Étienne et Lyon 2
Mél : [email protected]
Consulter le site web : CRESAL
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sociologie
Catastrophe « asiatique » : à qui la faute ?
1
Depuis le tremblement de terre de Lisbonne en 1755 et la célèbre controverse entre Voltaire et Rousseau , trois
modèles explicatifs de la catastrophe dominent : 1/ La punition divine venant châtier le péché des hommes qui
doivent alors expier leur faute ; 2/ La toute-puissance de la nature contre laquelle l'humanité est impuissante ; 3/
La responsabilité humaine. « Ce dernier modèle, où la nature ne joue plus qu'un rôle subalterne, est le plus
régulièrement convoqué en Occident, ce qui explique que les avalanches, les crues et autres incendies soient du
ressort des pouvoirs publics et des 'consciences', plus que des événements fortuits », commente Gaëlle
Clavandier2.
Qu'en est-il du tsunami qui a frappé l'Asie du Sud-Est en décembre 2004 ? « En tout état de cause, on assiste à
la construction d'une figure hybride de l'imputation des responsabilités ». À preuve, l'argument de la « colère des
éléments » a été maintes fois brandi, « comme pour signifier que la nature, furieuse, reprenait ses droits face à
une humanité qui l'avait désarmée. En quelque sorte, elle serait réactive aux atteintes qui lui seraient portées, ce
qui constitue un des paradigmes de la pensée écologique. Cette vision d'un monde 'anthropocentré' (dans la
mesure où l'on prête des intentions profondément humaines à une Nature qui nous échappe) permet de
s'affranchir tant bien que mal des interprétations religieuses où un Dieu tout puissant vient à bout du péché des
hommes en les punissant sévèrement ».
À cette conception, est venue s'ajouter l'image d'une communauté humaine unie dans l'adversité. « Cette
solidarité massive est évidemment le signe d'une compassion, mais elle renvoie également à une culpabilité
latente. La présence de touristes sur place a impliqué les pays occidentaux. Surtout, elle a permis de renforcer
l'image d'une absence d'équité entre les hommes (par exemple, les corps des vacanciers ont été soumis à une
attention toute particulière afin de recourir à une identification). Se centrer sur le don, c'est signifier clairement que
la morale est sauve. Cette culpabilité fait écho, par les images qu'elle mobilise, au schéma de la punition divine ».
Enfin, contrairement aux catastrophes qui touchent le sol français, le modèle de la responsabilité a moins été mis
en évidence. Logique : « Il était difficile de stigmatiser le manque de vigilance et l'absence de dispositifs d'alerte
dans la mesure où les pays frappés sont considérés comme émergents, commente Gaëlle Clavandier. Pourtant,
un système d'alerte efficace aurait permis l'évacuation des zones côtières. De même, la mangrove détruite aurait
servi d'ultime rempart face à la vague menaçante. Guère explicité, ce modèle a été suivi d'effets d'annonce ».
Quelques semaines après le drame, un organisme de surveillance international des raz-de-marée a été évoqué,
comme la possibilité de se doter d'un SAMU international…
Voir dans ce numéro la rubrique « L'Indonésie, un an après… »
1/ Voltaire voyait dans ce drame la manifestation d'une « nature muette » résistant à l'analyse. Rousseau, lui,
rejetait le caractère naturel de la catastrophe et mettait en évidence une responsabilité humaine (constructions
trop denses, obstination à protéger les biens matériels plutôt que de sauver les vies…).
2/ Cf. Actualis n° 3 (dossier Tsunami), trimestriel, février 2005.
Gaëlle Clavandier
Centre de recherches et d'études sociologiques appliquées de la Loire (CRESAL)
CNRS-Universités Saint-Étienne et Lyon 2
Mél :
[email protected]
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CRESAL
CNRS > Presse > Thema > Des récits, des pensées et des hommes
Internet et SMS au secours des catastrophes
Les différents acteurs de la gestion d'une catastrophe ont-ils recours aux technologies de l'information et
de la communication (TIC)1 ? Quel rôle peuvent jouer ces réseaux ? Commentaires d'Alain Milon et Claire
Brossaud, membres du Groupe d'analyse du social et de la sociabilité (GRASS), responsables d'un
programme de recherche sur le sujet.
Contrôler la technique comme son destin
Le risque naturel est plus acceptable lorsque ceux qui y sont exposés pensent pouvoir y faire face. Moins on est
intégré dans le processus de décision, plus le sentiment de vulnérabilité, d'insécurité, est grand. Les parcours
personnels comptent dans la prise en charge d'un drame, les sinistrés ont besoin de retracer un fil entre le passé,
un présent qui échappe et l'avenir. Sans ce fil, la mobilisation affective reste très forte et on constate que
l'utilisation des TIC est plus faible (par exemple, on se cloître chez soi mais on ne se connecte pas sur Internet).
De même, moins les divers acteurs ont eu accès aux TIC, moins ils envisageront positivement l'aprèsévénement.
Les premiers récits, très subjectifs, de catastrophes sont ensuite « traduits » par différents experts et par une
prise de parole publique relayée par les médias. Le recours aux TIC participe de cette traduction : mise en place
d'un numéro vert, création d'un site Internet spécifique (comme celui créé par EDF lors de la tempête de 1999
pour informer, rassurer en temps réel les sinistrés et soutenir les techniciens).
Le choix des outils
Ceux qui maîtrisent le mieux les outils informatiques pratiquent le management par projet. La plupart de ces
« décideurs » ont entre 40 et 60 ans, ils savent gérer des situations personnelles ou professionnelles de crise et
se projeter dans le futur. Pour eux, les crises font partie des développements et les TIC, fonctionnelles, les aident
dans l'anticipation ou la maîtrise des risques et leur permettent de coordonner, voire de contrôler des acteurs ou
des actions. Leur gestion d'une catastrophe peut même les amener à concevoir de nouvelles technologies.
La communication sur un site sinistré n'est pas la même que celle à grande échelle, et on ne choisit pas les
mêmes outils selon les seuils d'alerte. Dans l'urgence, certains acteurs sur le terrain assument, sans l'aval de leur
hiérarchie, une prise de risque ; la communication de proximité prime alors ; les médias traditionnels (télévision,
radio) et non les TIC, perçues comme média trop froid, sont privilégiés pour diffuser l'alerte et atteindre le plus
grand nombre. Si le recours aux TIC est possible, le téléphone portable, parfois seul moyen de communication
restant, est alors le plus utilisé. La communication à grande échelle utilise davantage les TIC : données
satellitaires pour évaluer l'impact d'un événement et organiser les secours, cartes de vigilance en ligne pour
alerter rapidement sur une menace météorologique, etc.
Médiation technique, le recours aux TIC est-il aussi une médiation sociale ? Il se crée autour d'une catastrophe,
souvent imprévisible, une solidarité technique inhabituelle qui bouscule les façons de travailler, avec beaucoup
d'acteurs, moins de hiérarchie… le dispositif est complexe, la synchronisation des actions aussi. Les TIC, sans se
substituer aux médias traditionnels, influencent la nature des échanges entre les différents acteurs et renforcent
les moyens de prévention d'une crise, ainsi que sa gestion et sa communication. Les collectifs de concertation et
de décision ainsi formés mettent-ils en jeu des relations de pouvoirs, une redéfinition des rapports États/citoyen ?
Des questions à approfondir…
1/ Internet, téléphone portable, courrier électronique, bases de données, outils de travail partagés, etc.
• Le Recours aux technologies de l'information et communication (TIC) en situation d'incertitude : étude
comparée de trois réseaux d'acteurs dans la gestion d'une catastrophe naturelle, programme de recherche.
Alain Milon, Claire Brossaud, Virginie Tournay, Marion Feigenbaum.
• Le recours aux nouvelles technologies pour communiquer et alerter en situation de risques naturels. Marion
Feigenbaum, mémoire de DESS « Médias électroniques et Internet », Université Paris 8, octobre 2003.
Groupe d'analyse du social et de la sociabilité (GRASS)
CNRS-Université Paris 8
Alain Milon
Tél. :+33 (0)1 40 25 12 11
Mél : [email protected]
Claire Brossaud
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Technorisque
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Grass
CNRS > Presse > Thema > Des récits, des pensées et des hommes
De Lisbonne à Sumatra, qu'avons-nous appris ?
Philosophie de la catastrophe et pensée catastrophiste
À la lumière des débats opposant Voltaire, Rousseau et les partisans du système de Leibniz à propos du
tremblement de terre de Lisbonne en 1755, Jean-Pierre Dupuy, directeur de recherche au CNRS et
professeur de philosophie sociale et politique à l'École polytechnique, déchiffre notre émotion face au
tsunami asiatique de décembre 2004. Et s'interroge sur notre capacité à anticiper les catastrophes.
La catastrophe, naturelle ou humaine, n'est-elle au fond qu'un accident ? Un événement imprévisible auquel on
ne peut que se résigner ? Assurément non pour Rousseau, lequel affirme dans l'Émile : « Homme, ne cherche
plus l'auteur du mal : cet auteur, c'est toi-même. Il n'existe point d'autre mal que celui que tu fais ou que tu
souffres, et l'un et l'autre te viennent de toi ». Sous les traits de Candide, Voltaire pour sa part ironise sur la
philosophie optimiste de Leibniz, dénonçant la vanité de l'homme qui se croit capable de déchiffrer les desseins
de la nature.
La catastrophe de décembre 2004 marquera les esprits pour toujours. Désarçonnés par le tsunami, comme si
chaque catastrophe nous prenait au dépourvu, nous restons stupéfaits devant le désastre. En revisitant la nature
du mal à travers les grandes théories philosophiques, Jean-Pierre Dupuy plaide pour un catastrophisme éclairé,
attitude visant à nous protéger de nous-mêmes. Il faut envisager le pire comme un destin, « l'impossible » comme
ce qui doit nécessairement arriver, afin de se donner les moyens d'agir. Émerge alors une possibilité de salut
pour l'homme face à son avenir autodestructeur, une méthode philosophique pour sauvegarder un monde « que
nos enfants nous prêtent » et non pas « que nous leur fabriquons ».
• Petite métaphysique des tsunamis. Jean-Pierre Dupuy, Le Seuil, 2005.
Jean-Pierre Dupuy
Centre de recherche en épistémologie appliquée (CREA)
CNRS-École polytechnique
Tél. : +33 (0)1 55 55 86 26
Mél : [email protected]
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CREA
CNRS > Presse > Thema > Des récits, des pensées et des hommes
La France et les risques naturels : peut mieux faire
La gestion des risques naturels est encore problématique en France faute de traiter ces risques comme
des « risques de société ». Claude Gilbert, membre de l'Unité « Politiques publiques, actions politiques,
territoires » (PACTE), fait le point.
Quelle place occupe l'étude des risques naturels au sein de la recherche en France ?
Claude Gilbert. Les risques naturels font l'objet d'un important investissement scientifique si l'on s'en tient aux
« sciences dures ». C'est moins le cas des sciences humaines et sociales. Il en résulte une certaine faiblesse de
l'effort de recherche publique en SHS, qui n'est pas compensée par l'intervention de structures relevant de la
consultance. Une autre conséquence est le poids dominant de l'approche des risques naturels par les « sciences
dures », le risque se confondant avec la notion d'aléa. Il y a toujours une difficulté à penser le risque comme le
croisement d'aléas et de vulnérabilités, donc comme pouvant devoir autant aux fragilités internes des sociétés
qu'aux phénomènes naturels.
En France, la question des risques naturels est-elle présente ou absente dans les milieux
décisionnaires ?
C. G. Dans le domaine des risques collectifs, les risques naturels sont un peu les parents pauvres. De fait, via
des programmes du CNRS puis d'un Groupement d'intérêt scientifique (GIS) associant organismes de recherche
et ministères, une communauté s'est constituée autour de « risques collectifs » dont les incertitudes ne pouvaient
être réduites. L'intérêt s'est donc focalisé sur les « risques majeurs » puis sur de nouvelles épidémies comme le
sida, enfin sur les « nouveaux risques » (OGM, « vache folle »...). C'est-à-dire sur des risques s'accompagnant
de controverses scientifiques, de polémiques, de crises politiques et renvoyant à des enjeux considérés comme
vitaux pour les sociétés présentes et à venir.
Les risques naturels, sauf lorsqu'ils atteignent une certaine ampleur (comme le tsunami ou les cyclones aux
États-Unis), ont rarement de telles caractéristiques. Par ailleurs, les risques naturels demeurent un peu
« orphelins » dans les politiques de gestion des risques, de nombreux acteurs étant concernés sans que se
dégage un acteur « pilotant » une politique coordonnée de prévention, de gestion de crise et de réparation. La
situation semble différente chez certains de nos voisins en raison d'une meilleure prise en compte des
vulnérabilités et des acteurs locaux.
Quelles sont nos lacunes dans la prise de conscience ?
C. G. La prise en compte des risques naturels est « aléatoire », comme le sont la plupart des problèmes
candidats à une « mise sur agenda ». Une des spécificités françaises est qu'il existe depuis 1992 un dispositif
associant assurance et solidarité, qui règle de manière assez satisfaisante la question des dommages pour les
personnes privées. C'est beaucoup moins vrai pour les collectivités. Comme ce dispositif autorise un traitement
financier et politique des problèmes, les « crises » à propos des risques naturels sont habituellement peu
durables. Ce n'est que depuis peu qu'on observe d'importantes mobilisations sociales dans ce domaine.
Dans l'état actuel, un véritable examen des divers compromis réalisés pour rendre ces risques compatibles avec
l'urbanisation et les activités économiques ne s'opérera qu'à l'occasion d'un événement majeur. Malgré l'affichage
de volontés politiques et le souci de territorialiser la gestion des risques, on reste encore souvent soumis à des
compromis non explicités. Ce ne sont pas les compromis qui font problème mais la difficulté à les rendre
évidents, publics.
Comment le message des risques est-il transmis à la population ?
C. G. L'information de la population est malaisée, mais des progrès ont été faits dans ce sens. L'enjeu est double.
Il faut d'abord, via des procédures ordinaires, que les personnes et groupes exposés à un phénomène naturel en
aient une connaissance concrète. Dire le risque est une priorité qui ne va toujours pas de soi. Le second enjeu
est de préparer les personnes, collectivités, entreprises à « vivre » avec le risque lorsqu'il se réalise. La
prévention, avec une information relative aux bons réflexes, est importante. Mais le retour d'expérience,
notamment autour d'événements mineurs, est formateur. La vraie question n'est pas celle de la population, trop
souvent assimilée à une entité prompte à la panique, mais celle des « responsables » et de leur capacité à dire
quels sont les risques et ce qui doit être fait pour ne pas le subir. Quand c'est le cas, la population suit et
demande même à être impliquée.
Le département des sciences humaines et sociales du CNRS vient de créer un réseau thématique
pluridisciplinaire « Risques et crises environnementales ».
Claude Gilbert
Unité « Politiques publiques, actions politiques, territoires » (PACTE)
CNRS-IEP Grenoble-Universités Grenoble 1 et 2
Tél. : +33 (0)4 76 82 73 02
Mél : [email protected]
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PACTE
CNRS > Presse > Thema > Des récits, des pensées et des hommes
L'humanitaire expert : des victimes plus abstraites
La conception du dévouement humanitaire a beaucoup évolué depuis une vingtaine d'années. De
nouveaux modes de perception des « autres à aider » et des rôles à tenir à leur égard ont bouleversé les
rapports instaurés avec eux au point d'en faire les grands absents des actions engagées pour les
« sauver ». Commentaires d'Annie Collovald, maître de conférences au Laboratoire d'analyse des
systèmes politiques.
Une réelle transformation de l'humanitaire
Depuis vingt ans, un nouveau mode d'action humanitaire est apparu. Des organisations de solidarité
internationale (terme également récent) structurent leur militantisme autour du modèle de l'expertise. Ce qui est
nouveau, ce ne sont pas les militants, souvent anciens militants syndicaux ou politiques venus de mouvements
chrétiens et tiers-mondistes et reconvertis dans cet humanitaire expert, mais la conception de l'aide à apporter
aux plus vulnérables, conception managériale de l'efficacité militante.
L'expertise du malheur
Les intervenants ne sont plus les représentants des victimes mais des spécialistes de leurs problèmes. Les
« aidés » ne sont plus des représentés ayant une voix à faire entendre mais des objets d'expertise. Le discours
humanitaire axé sur les « victimes », déclenché par des ONG « urgencières » (Médecins du monde, Médecins
sans frontières…) indignées par le sort réservé aux populations civiles lors de guerres ou de catastrophes,
s'inscrit dans cette vision fondée sur l'expertise du malheur des autres : les actions se pensent sur le mode de
l'assistance professionnelle, sans considérations politiques ni religieuses, en négociant avec tous les pouvoirs en
place l'accès aux populations en détresse, jusqu'à parfois « danser avec le diable ». L'accès à cet espace
d'intervention tend à devenir sélectif, rejetant les porteurs d'une vision plus socio-politique de l'humanité.
Des victimes abstraites et lointaines
La cause humanitaire s'accompagne d'une mise à distance, d'un effacement des autres vers lesquels ses actions
se déploient. Avant la mission, ces autres sont surtout imaginés : le contrôle expert de l'action passe avant
l'interaction avec ceux qu'il faut aider et la connaissance de leur vie.
La mission est alors un rappel à la réalité socio-politique de ces autres lointains : les choses ne se passent pas
comme les intervenants l'avaient prévu ; en dépit de leur engagement, ils se font parfois traiter de touristes ou de
colons ; ils doivent négocier avec les autorités locales ; il leur faut souvent improviser pour poursuivre leur
mission. D'où un désarroi d'autant plus douloureux qu'il n'a pas été anticipé. Une contradiction souvent
violemment ressentie qui les pousse, au retour, à relancer des actions d'expertise humanitaire qu'ils espèrent
plus efficaces, mais une fois encore dans une mise à distance de ceux qu'ils veulent aider.
Le dévouement humanitaire ne serait-il possible que dans cette mise à distance, une forme de déni de l'existence
sociale et politique de ces autres à aider, renvoyés au statut « d'étrangers » à leur propre destinée ?
• L'humanitaire ou le management des dévouements. Enquête sur un militantisme de « solidarité internationale
» en faveur du Tiers-Monde. Annie Collovald, dir., Rennes, PUR, 2002.
• De la défense des « pauvres nécessiteux » à l'humanitaire expert. Reconversion et métamorphoses d'une
cause politique. Annie Collovald, Politix, 56, 2001.
Annie Collovald
Laboratoire d'analyse des systèmes politiques (LASP)
CNRS-Université Paris 10
Tél. : +33 (0)1 40 97 56 65
Mél : [email protected]
Consulter le site web : LASP
CNRS > Presse > Thema > Pédagogie et médias
Sagascience : GéoManips
GéoManips, dossier réalisé en partenariat avec le Laboratoire de géologie structurale (Université Paris 6),
présente les mouvements de la Terre observés sur le terrain et reproduits en laboratoire. Le travail du géologue
est filmé et commenté lorsque celui-ci prépare ses expériences, qu'il les réalise, qu'il les interprète en les
confrontant à la réalité. Ces expériences sont reproductibles par tous, grâce aux conseils de GéoManips :
matériaux, plans, astuces, tout y est détaillé. Les trois facettes du dossier (Terrain, Laboratoire de recherche,
Pédagogie) en font un support précieux pour les enseignants et les médiateurs scientifiques.
Les dossiers de la collection sagascience sont une invitation à découvrir le foisonnement de la recherche
française au cœur des laboratoires. Délibérement visuelle, la collection sagascience présente pour chaque
dossier des photos, des vidéos, des animations 3D et des jeux interactifs. Étudiant, enseignant, chercheur,
journaliste, ou bien tout simplement curieux, chacun y trouvera une mine d'informations et d'illustrations
originales, validées par les chercheurs. Mis à jour et enrichis au gré de l'actualité, les dossiers sagascience
constituent une source de savoir accessible à tous sur le web.
CNRS > Presse > Thema > Pédagogie et médias
De 7 à 87 ans, les sciences de la Terre à portée de main
Vulgariser les géosciences pour expliquer les grands mécanismes qui animent notre planète. Christiane
Sabouraud, chercheur au Laboratoire de tectonique, s'emploie depuis de nombreuses années à faire
entrer les sciences de la Terre là où on ne les attend pas forcément.
L'image que les médias donnent de notre planète est-elle complète ?
Christiane Sabouraud. Pas tout à fait, il faut bien faire comprendre que la dynamique de notre planète ne
génère pas que des catastrophes ! Aujourd'hui des phénomènes comme les séismes et les éruptions volcaniques
règnent en maîtres sur nos écrans de télévision. Or ces événements majeurs, qui ne deviennent d'ailleurs
dramatiques qu'en présence des hommes, occultent trop souvent toutes les richesses (ressources et
connaissance du passé) que nous offre la Terre.
Prônez-vous des canaux de diffusion autres que ceux de l'enseignement traditionnel ?
C. S. Par des approches complémentaires de celles de l'Éducation nationale, l'éducation informelle permet, par
exemple, d'insister sur les échelles spatio-temporelles qui rendent impossible la prédiction des séismes à court
terme. Et de se défaire de la foi indéracinable en un « océan de magma » sous-jacent qui n'explicite pas vraiment
les ruptures à l'origine des séismes !
Qui véhicule les messages ?
1
C. S. En France, de très nombreux chercheurs confirmés ou vulgarisateurs professionnels sensibilisent un public
large, dans un cadre de loisir culturel, aux grandes problématiques des sciences de la Terre. Ici, l'arrivée ou le
départ d'une mer, l'accumulation de fossiles, là, l'exhumation d'une roche née en profondeur, ou encore les
ressources naturelles exploitées depuis la préhistoire... Toutes ces observations faites sur le terrain, dans
l'environnement de chacun mènent toujours à la tectonique globale !
Où la rencontre public/sciences de la Terre se déroule-t-elle ?
C. S. Outre les grandes institutions muséales et les petites maisons de la nature, les Centres de culture
scientifique technique et industrielle, les muséums, les réserves et parcs naturels, les associations, les clubs…
proposent une multitude d'activités : visites de sites géologiques, conférences, films, expositions, promenades et
journées thématiques… Le but : permettre à tous de prendre part aux débats de société : projets d'implantations
industrielles, grands aménagements, exploitation de ressources naturelles, évolution de nos environnements... Le
tout dans le respect des sites naturels.
Structure de la Terre et dérive des Continents
Extrait du reportage de Patrick Hesters pour l'émission « Planète déboussolée »
du 31 janvier 2005 sur France 3.
Durée : 1’ 21’’
1/ Une des sections de la Société géologique de France se consacre à la diffusion des sciences de la Terre : «
Géole » fédère des médiateurs de divers statuts et assure une formation permanente.
• Guide de la géologie en France. Christiane Sabouraud (Dir.), Annie Blanc, Nelly Cabanes, Jean Gaudant,
Maurice Mattauer, Sophie Tocreau, Co-ed Belin/SGF, 2004.
Christiane Sabouraud
Laboratoire de tectonique
CNRS-Université Paris 6-Université de Cergy-Pontoise
Tél. : +33 (0)1 44 27 74 64 - Mél : [email protected]
Consulter le site web : Laboratoire de tectonique
CNRS > Presse > Thema > Pédagogie et médias
La sismologie, une histoire en marche…
Musée de sismologie et magnétisme terrestre
Le musée de sismologie, installé dans l'ancienne station sismologique de Strasbourg, accueille environ 5
000 personnes par an. Musée d'instruments anciens, il reste très en phase avec l'actualité par ses liens
avec les laboratoires de recherche de l'École et observatoire des sciences de la Terre (EOST) et surtout
avec le Réseau national de surveillance sismique (ReNaSS) et le Bureau central sismologique français
(BCSF), tous deux installés à Strasbourg. Valérie Ansel, responsable du musée nous en dévoile l'histoire.
Musée de sismologie et magnétisme terrestre.
© EOST - Strasbourg.
1889 : Pour la première fois, à Potsdam en Allemagne, on enregistre ce qui semble être des signaux liés à un
séisme qui a eu lieu au Japon. On devient capable d'enregistrer des séismes lointains, dont on ne ressent pas les
effets. C'est le début de la sismologie moderne… Il a fallu faire le lien entre une discipline naturaliste qui observait
les tremblements de Terre et un domaine de la physique qui s'intéressait à la propagation d'ondes élastiques. La
Terre, dans son ensemble, se comporte comme un solide élastique et un séisme génère des ondes qui peuvent
s'y propager sur des milliers de kilomètres.
1892 : Ernst von Rebeur-Paschwitz, physicien allemand de Potsdam, s'installe à Strasbourg et milite pour la
création d'une station sismologique, la première du genre !
1900 : Construction de la station, qui devient la station sismologique centrale de l'empire allemand. À ce titre, tous
les grands scientifiques qui s'intéressent à la sismologie passent par Strasbourg, et les premiers congrès
internationaux de sismologie y sont organisés. On amène de nouveaux instruments, on en fabrique, on les
teste…
1918 : La France reconnaît à Strasbourg sa spécificité en tant que centre d'observation des séismes et crée
rapidement le Bureau central sismologique français (BCSF). La station fonctionnera jusque dans les années 1970
où, gênés par l'activité urbaine qui ne cesse de grandir, les sismologues déménagent leurs instruments
modernes, abandonnant sur place les plus anciens. Vingt ans plus tard, conscient du patrimoine exceptionnel que
représente cette collection d'instruments anciens, on transforme la station sismologique en musée.
Sismomètre vertical, fabriqué en 1910 à Saint-Pétersbourg par le prince
Galitzine. Collections du Musée de Sismologie de Strasbourg.
© EOST - Strasbourg.
La collection du musée illustre parfaitement l'évolution de la discipline, du plus ancien sismomètre datant de
1895, un petit frère de l'appareil célèbre de 1889, perdu définitivement, à des sismomètres récents. On découvre
de magnifiques instruments, notamment les sismomètres de grandes tailles (1 tonne, 19 tonnes) ou le premier
sismomètre électromagnétique fabriqué à Saint-Pétersbourg par un prince russe. Les instruments servent de
prétexte à des visites guidées où le visiteur découvre l'histoire de la sismologie à Strasbourg et les enjeux
actuels.
Valérie Ansel
École et observatoire des sciences de la terre (EOST)
CNRS-Université Strasbourg 1
Tél. : +33 (0)3 90 24 01 27
Mél : [email protected]
Consulter le site web : EOST
CNRS > Presse > Thema > À découvrir
Institut national des sciences de l'Univers
L'Institut national des sciences de l'Univers (INSU) a été créé en 1985 avec pour mission d'élaborer, de
développer et de coordonner les recherches d'ampleur nationale et internationale en astronomie, en sciences de
la Terre, de l'océan et de l'espace, qui sont menées au sein des établissements publics relevant de l'éducation
nationale, et au sein du CNRS, plus particulièrement de son département des sciences de l'Univers qui regroupe
les disciplines correspondantes dont il renforce et prolonge l'action.
Retrouvez sur le site de l'INSU des informations concernant les catastrophes et risques naturels.
CNRS > Presse > Thema > À découvrir
Photothèque du CNRS
La Photothèque du CNRS a pour mission de conserver le patrimoine photographique du CNRS, de collecter, de
gérer et de diffuser les images scientifiques issues des laboratoires de recherche du CNRS dans des disciplines
très diverses : physique, chimie, mathématiques, sciences de l'Univers, sciences de la vie, sciences pour
l'ingénieur, sciences de l'information et de la communication, sciences de l'Homme et de la société.
Le fonds de la photothèque comprend environ 24 500 images (expériences, manipulations, appareillages et
équipements, chercheurs in situ, résultats de recherche...). 12 000 d'entre elles sont accessibles en ligne et
l'accroissement annuel est d'environ 1 500.
CNRS > Presse > Thema > À découvrir
Vidéothèque du CNRS
La vidéothèque du CNRS a pour mission la conservation et la diffusion des films et vidéos produits ou coproduits
par le CNRS (CNRS Images médias, laboratoires...). Le fonds du CNRS comprend actuellement environ 1000
films scientifiques, documentaires, reportages, images d'archives et d'actualité de la recherche, produits depuis
1980 pour les deux-tiers d'entre eux.
Toutes les disciplines scientifiques sont représentées par les films de ce fonds, toutefois une des principales
richesses de CNRS Vidéothèque est constituée par les films ethnographiques (environ 300 titres).
Consulter quelques notices de films sur le thème du numéro
CNRS > Presse > Thema > À découvrir
SATMOS
Le SATMOS, Service d'archivage et de traitement météorologique des observations spatiales, est un
programme mené en partenariat entre Météo-France et l'Institut des sciences de l'Univers (INSU) du CNRS. Le
SATMOS a pour objectif la constitution et le maintien, pour les besoins de la recherche scientifique, d'une archive
des données de satellites météorologiques ou environnementaux et des produits dérivés de ces données, ainsi
que la mise à disposition de ces données et produits aux utilisateurs intéressés.
Le Centre de météorologie spatiale de Météo-France, situé à Lannion (Côtes d'Armor), est chargé de sa mise en
œuvre.
CNRS > Presse > Thema >
Index des contacts (A-Z)
• Andries Lise
Catastrophe et littérature de colportage
• Ansel Valérie
La sismologie, une histoire en marche…
• Armijo Rolando
L'Europe sismique et ses grandes failles
Sumatra ou le défi lancé aux scientifiques
• Bard Pierre-Yves
Risque sismique dans la Baie des anges
• Bernard Pascal
Inquiétude chez les géophysiciens
La prédiction, une science à trois temps
• Bonnet Xavier
Animaux et tsunamis : l'échappée belle
• Bopearachchi Osmund
Le tsunami : un tournant dans la vie des Sri-Lankais
Reconstruire Vellaveediya
• Brossaud Claire
Internet et SMS au secours des catastrophes
• Campillo Michel
Séismes : à la recherche de signaux d'alerte
• Cara Michel
Le BCSF surveille les séismes de France
• Cartier Stéphane
Urbanisme et risque sismique : comment réduire la vulnérabilité
• Chamot-Rooke Nicolas
Frontière à haut risque
• Charvis Philippe
En Équateur ou en mer Ligure, les OBS veillent…
• Clavandier Gaëlle
La « mort collective » sous la loupe de la sociologie
* Catastrophe « asiatique » : à qui la faute ?
• Collovald Annie
L'humanitaire expert : des victimes plus abstraites
• Cornet François-Henri
Le Golfe de Corinthe, laboratoire naturel de sismologie
• Darthou Sonia
Poséidon, dieu ébranleur et fondateur en terre d'Athènes
• Dias Frédéric
Les blessures de la grande bleue en 3D
• Dupuy Jean-Pierre
De Lisbonne à Sumatra, qu'avons-nous appris ?
• Euzen Agathe
L'eau source de mort
• Favier René
Mémoires des catastrophes naturelles
* Politique et catastrophe
• Feillard Andrée
Aceh ou la colère de Dieu ?
• Gilbert Claude
La France et les risques naturels : peut mieux faire
• Granet Michel
Séismes en France : une surveillance en temps réel
• Gutscher Marc-André
Lisbonne, 1755
• Hatzfeld Denis
Une mesure pour les mouvements du sol : le réseau accélérométrique permanent
Bam 2003 : un tremblement de terre dévastateur
• Hébert Hélène
Détection des tsunamis : une course contre la montre
• Ibrahimbegovic Adnan
Du béton armé pour la défensive
• Klinger Yann
15 000 ans de séismes
• Lallemand Serge
Déformation lithosphérique et phénomène de subduction
• Lardeaux Jean-Marc
Les Antilles au cœur d'un vaste chantier géologique
• Lavigne Franck
« TSUNARISQUE » : de la prévention avant toute chose
* Priorité à Cilacap, principal port menacé
* Expert ès-« coulées de débris »
• Leclerc Jean-Pierre
La question de l'eau au Sri Lanka
• Ludden John
Une leçon humaine et scientifique
• Milon Alain
Internet et SMS au secours des catastrophes
• Parrot Michel
Vol au-dessus d'un séisme
• Paul Anne
Sismomètres voyageurs
• Poirier Jean-Paul
Le tremblement de terre de Lisbonne
• Regnauld Hervé
3
2,5 à 5 km d'eau par kilomètre de plage !
* Jusqu'à 110 mètres d'altitude
* Des bouleversements écologiques hors normes
• Replumaz Anne
Une frontière de plaques complexe
• Roult Geneviève
La Terre, une planète turbulente auscultée par GEOSCOPE
Le séisme de Sumatra : un nouvel éclairage de la Terre
• Sabouraud Christiane
De 7 à 87 ans, les sciences de la Terre à portée de main
• Singh Satish
SAGER, voyage vers l'épicentre du séisme
• Souriau Annie
Pyrénées : zone sous surveillance
* Le Plan de prévention des risques sismiques pour la ville de Lourdes
• Tapponnier Paul
Le chasse-neige indien
• Vigny Christophe
Le GPS : pour ne pas mesurer à côté de la plaque… tectonique
Le séisme de décembre 2004 passé au crible grâce au GPS
• Vilotte Jean-Pierre
Le Chili : une forte activité sismique
* Chili : une coopération internationale
• Virieux Jean
La Côte d'Azur, une terre de contrastes
* Instabilités gravitaires terrestres et sous-marines
* Une prise de conscience politique
© CNRS
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