FÊTE DU SAINT-SACREMENT A
Il y a des choses tellement élémentaires qu’on ne les remarque même
plus.
Tenez, par exemple, dormir. Vous y êtes habitués, vous vous endormez
le soir, vous sortez du sommeil le lendemain matin. Et nous passons
dans ce sommeil le 1/3 de notre vie !
C’est indispensable et nous nous apercevons de sa valeur inestimable,
quand on souffre d’insomnies et qu’il faut recommencer une journée
ordinaire avec en bagage, une nuit blanche :
« Ah ! Si je pouvais dormir ! »
On découvre alors le prix du sommeil.
Un handicapé, dans son fauteuil, un jour, m’a dit :
« Vous ne pouvez pas mesurer votre chance d’avoir vos deux jambes !
Quelle chance vous avez ! Vous vous jetez dans un fauteuil puis vous
vous relevez parce que vous avez perdu votre trousseau de clefs. Vous
courrez pour aller le chercher ; vous vous penchez pour le ramasser par
terre. Vous n’avez pas découvert votre bonheur !
Pouvoir parler, pouvoir respirer, entendre, voir, habiter un corps, ainsi
en est-il du ‘’manger’’ et du ‘’boire’’. Nous ne mesurons ce privilège
que lorsque nous en sommes privés !
La Bible nous dit qu’au but, l’homme vivait principalement du lait et
des produits laitiers de leurs troupeaux. Ce n’est qu’après le luge
qu’ils se mirent à tuer et à manger les animaux. Dieu le leur permit, à
contre-cœur, semble-t-il, à la condition expresse de vider toute chair
de son sang avant de le consommer ; car le sang, c’est la vie et
l’homme n’a aucun droit sur la vie.
Le sang, Dieu se le réserve toujours. Tout cela nous conduit à ne
manger et boire que dans un certain respect de la création.
L’homme athée, qui veut s’affranchir de Dieu et pour qui, le monde qui
l’entoure, n’est pas son œuvre, mais son milieu à lui, saccage la
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création ; c’est ce que nous appelons ‘’ la pollution ‘’ qui est en train de
faire de notre terre, une immense Jamaïque, une poubelle mondiale et
l’écologie n’est qu’un mouvement de prise de conscience que nous
sommes en train de détruire ce qui permet à l’homme de vivre dans un
milieu naturel.
En Afrique, dans certaines tribus, le chasseur demande pardon à la
bête qu’il va devoir mettre à mort pour se nourrir. Dans un ses livres,
Soljenitsyne dit cela merveilleusement en se souvenant de son repas
de prisonnier ; son repas, parce que c’était l’unique de la journée :
« Tu te rappelles cette soupe d’orge diluée ou cette bouillie d’avoine
sans un gramme de matière grasse ? Peux-tu manger une chose
pareille ?
Non, tu communies avec. Tu sais que la vie est en jeu avec cette
gamelle.
Non, tu communies avec. Tu la prends comme un sacrement = le signe
de tout ce que tu n’as pas, le symbole de tout ce que tu désires
violemment, tu la manges lentement du bout de la cuillère de bois et
tu la manges en t’absorbant totalement dans le processus de manger.
Cela devient sacré, tellement c’est important et déterminant pour les
heures qui vont suivre. Tu manges en pensant au fait de manger…et
cela se répand à travers ton corps ».
Ah ! Frères et sœurs, si nous pouvions communier de cette
façon ! La nourriture de Dieu = son corps et son sang, qu’il nous donne,
aurait peut-être pour nous une autre importance et peut-être aussi
d’autres effets ! Parce que l’Eucharistie, c’est cela : c’est Dieu,
s’apercevant de notre état famélique, de nos manques, de notre
besoin fondamental de manger une nourriture divine, spirituelle.
A nous, les fils, Dieu, va, non pas donner, mais se donner sous forme de
nourriture pour que cette vie divine reçue au Baptême, puisse toujours
s’alimenter, se sustenter à la vie même de Dieu.
C’est pourquoi, le Christ insiste tellement dans l’Evangile :
« ‘’ Mon corps est vraiment une nourriture, mon sang est vraiment une
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boisson’’ ». « ‘’ Tout homme qui mange de ce pain-là, vivra, vivra
éternellement’’ ». « ‘’Celui qui s’en abstient, périra’’ ».
Depuis le paradis perdu, des hommes sont privés des vraies
nourritures, alors que les rayons de nos grandes surfaces regorgent de
nourritures terrestres, que tous les bacs alimentaires sont pleins à ras
bords, (au moins dans certains pays), de tous les produits que l’on vous
offre.
Dans ce même temps, le cœur de Dieu se retourne à la vue d’une
humanité affamée et faussement repue, car l’homme, nous rappelle
Jésus, ne vit pas seulement de pain de la terre ; il doit vivre d’abord de
la Parole de Dieu, de la vie de Dieu, de la nourriture que Dieu veut lui
offrir.
Il y a de vraies et de fausses nourritures, d’où l’insistance de Jésus :
« ‘’Ma chair est la vraie nourriture et mon sang est la vraie boisson’’ ».
Et il insiste avec un réalisme presque choquant.
Sa chair : c’est le mot employé par Jésus à la Cène, c’est tout l’homme
avec sa faiblesse.
Quant au verbe ‘’ manger’’ employé par Jésus, il n’emploie plus le
verbe’’ {Fageine} manger’’ qu’il a utilisé jusqu’ici mais le mot
‘’{Tropheine}’’ qui est beaucoup plus réaliste et qui signifie ‘’mâcher’’,
‘’ruminer’’.
Et Jésus enseigne aux hommes à prier en demandant dès
maintenant ‘’le pain de ce jour’’ ce jour Dieu aura restauré (dans
les deux sens du mot) l’humanité dans sa splendeur originelle.
Souvenez-vous du souci de la ‘’mère de famille’’ nombreuse et pauvre
qui veut nourrir à tout prix ses enfants qui vont revenir à midi, affamés,
et demandant quelque chose à manger. Va-t-elle pouvoir dire ‘’oui’’ à
la mesure de la faim de ses enfants ?
Tout autre est le souci de Dieu-Père. Lui, il a préparé le repas :
« ‘’Venez. Prenez et mangez-en tous’’ » « ‘’Venez ; La table est prête
pour vous accueillir’’ », et ne voit arriver à sa table sainte que
quelques-uns, qui y vont, parfois par politesse, parfois par habitude,
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sans avoir vraiment faim de Dieu parce qu’ils sont repus avec d’autres
nourritures qui leur font illusion et qui ne les nourriront pas vraiment.
Vais-je à la communion avec une véritable faim, un véritable désir de
participer, de m’assimiler à la vie du Dieu Vivant pour nourrir ma vie
baptismale, pour faire vivre et grandir la vie de Dieu en moi ?
« ‘’Donne-nous, aujourd’hui, notre pain de ce jour’’ » : quand nous
disons cela, à quel pain pensons-nous ?
« ‘’Ma chair est la vraie nourriture et mon sang est la vraie boisson’’ ».
J’ai autant besoin de Dieu que de pain et d’eau. La création, sortie de la
main de Dieu, a besoin de s’alimenter, à la source même de son
créateur. Elle doit se nourrir de son propre créateur, au lieu de
s’entredéchirer pour se nourrir artificiellement.
Nous sommes à une époque l’on redevient exigeant sur la qualité
de notre nourriture. Ainsi lit-on sur un flacon de sirop : garanti sans
colorant, pur sucre, tant pour cent de glucose.
Puisse cette préoccupation actuelle, faire retrouver au chrétien, ‘’
est sa vraie nourriture et quelle est sa vraie faim’’ !
De quoi manquez-vous ? De quoi avez-vous vraiment faim ?
Un enfant, avant même de se nourrir après sa naissance, a
besoin de se nourrir, neuf mois durant, du corps et du sang de sa mère.
De même l’humanité, pour accéder aux nourritures vraies, prévues par
Dieu pour elle à l’origine, doit-elle, elle aussi, consentir à se nourrir du
corps et du sang de son Dieu.
L’Eucharistie, voyez-vous, est comme ce placenta, qui permet à
l’homme de se créer d’abord, de se nourrir ensuite.
De l’homme ancien, elle refait un homme nouveau.
Par l’Eucharistie, l’homme qui communie est promu à la vie éternelle.
AMEN
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