Magazine Racines, le temps de vivre près de chez vous Par Antoine Gazeau Le décollement de la rétine : pas une fatalité ! De plus en plus répandu, le décollement de la rétine est certes indolore, mais pour le moins handicapant. Qui doit se surveiller ? Et comment ? Éléments de réponse. n dit cette maladie rare. Elle l’est relativement, mais touche quand même environ 10 000 personnes en France chaque année, un chiffre qui augmente avec le vieillissement de la population : un ophtalmologue en examine à peu près trois cas par an. On estime parfois que cette maladie est bénigne. Mais non traitée, elle peut entraîner la cécité de l’œil concerné : le décollement de la rétine, défini par une perte de contact entre deux couches importantes de cette partie de l’œil – l’épithélium pigmentaire et le neuroépithélium, est un problème sérieux. O On croit en revanche trop souvent que ladite maladie survient sans que l’on ne puisse l’éviter : on se trompe ! “La vraie prévention, c’est la surveillance, résume le docteur Le Rouic, spécialiste en chirurgie vitro-rétinienne à la clinique Sourdille, à Nantes. Et la meilleure des surveillances, c’est le patient qui l’effectue.” A priori, nous sommes tous potentiellement concernés. Ce qui ne signifie pas que nous sommes égaux… La population des seniors est ainsi particulièrement touchée : le risque de décollement de la rétine augmente chez les opérés de la cata- racte, nombreux dans cette frange de la population. “Ils sont les principaux sujets à risque, résume le professeur Joseph Colin, chef du service d’ophtalmologie au CHU Pellegrin, à Bordeaux, par ailleurs président de la Société française de la chirurgie de la cataracte et de la chirurgie réfractive. Mais les décollements surviennent aussi chez les myopes et les personnes ayant souffert d’un traumatisme oculaire.” Ils ne sont pas rares non plus à la suite de certaines inflammations de l’intérieur de l’œil, en cas de tumeurs, de blessures ou de chocs oculaires. La réverbération du soleil sur la neige ou l’exposition La reproduction ou l'utilisation sous quelque forme que 26 ce soit de nos articles 2010 informations et photos est interdite sans l'accord du magazine RACINES décembre Magazine Racines, le temps de vivre près de chez vous à un éclairage prolongé et violent est, sans surprise, à éviter… “Il demeure que les antécédents sont importants, insiste aussi le docteur Le Rouic, qu’ils soient familiaux ou personnels : quand on a fait un décollement sur un œil, on a 10 à 25 % de risques d’en développer un sur le second…” Même sans symptôme particulier, il est de toute façon conseillé aux divers sujets à risque de consulter un ophtalmologue tous les ans. Pas plus souvent, pas moins non plus. Et en cas de signes avantcoureurs (lire-ci-contre), il n’y a évidemment pas de temps à perdre. “Dès qu’ils apparaissent, il faut savoir bien les décrire à la secrétaire, qui doit comprendre l’urgence de la situation ! Il faut fixer un rendez-vous dans les 24 à 48 heures, ce qui n’est pas toujours facile en zone rurale…” Le laser, dans le doute… Dans la phase préventive arrive alors le temps de l’action. En la matière, peu d’innovations récentes sont à noter, et beaucoup de certitudes se sont récemment envolées. “Jusque dans les années 1990, les leaders français de la chirurgie vitrorétinienne ont cru qu’en multipliant les opérations au laser sur des zones de rétine faibles, on réduisait le risque de décollement, raconte le docteur Le Rouic. Les Américains et les Britanniques étaient plus sceptiques et moins interventionnistes. Nombre d’entre nous les rejoignent aujourd’hui : les études ont du mal à prouver que le laser diminue le risque de décollement de la rétine...” Selon les anomalies du fond d’œil observées, à l’ophtalmologue de décider s’il propose ce traitement standard de “photocoagulation”. “Le risque est inexistant, continue le spécialiste, rassurant, mais le laser peut être inutilement désagréable, voire très douloureux…” Ce qui est certain, en revanche, Une alternative : la cryoapplication Quand l’application du laser est impossible, c’est-à-dire quand la déchirure est par exemple très antérieure ou chez les patients dont la pupille se dilate mal, une solution alternative peut être proposée : la cryoapplication. “L’opération est courte et plutôt simple : elle consiste en l’application d’une sonde délivrant du froid (-40 à -60° C) sur la sclère (le blanc de l’œil, NDLR) en regard de la déchirure à traiter. Ceci va induire une réaction cicatricielle de la rétine entourant la déchirure et ainsi augmenter l’adhérence de la neuro-rétine à l’épithélium pigmentaire”, détaille le docteur Le Rouic, à Nantes. Savoir repérer les symptômes Certains signes font assurément craindre un décollement de rétine. Lesquels ? Le professeur Colin évoque “de nombreux corps flottants, des mouches volantes abondantes” qui passent devant les yeux, surtout quand la lumière est forte : sortes de petits nuages grisâtres, ressemblant parfois à des toiles d’araignée, ils traduisent des modifications du vitré, ce gel composé à 99 % d’eau qui remplit une grande partie de l'œil. “Des patients se plaignent aussi de flashs, même les yeux fermés, toujours au même endroit, continue le professeur Colin. Ces symptômes annoncent une déchirure, et donc un fort risque de décollement.” Celui-ci est déjà présumé présent si “un voile ampute l’image en périphérie du champ de vision”, conclut le spécialiste. Une déchirure avec décollement de rétine. Une déchirure rétinienne entourée d’un impact de laser, afin de prévenir un décollement de rétine. c’est que ce fameux laser à argon qui coagule la rétine, c’est-à-dire qu’il la colmate – utilisé depuis plus de vingt ans en France, s’avère très efficace en cas de déchirure, laquelle survient souvent avant le décollement. Tout le secret de la prévention de ce dernier réside donc dans la surveillance. Mieux vaut, en la matière, être attentif plutôt qu’attentiste. La reproduction ou l'utilisation sous quelque forme que ce soit27 de nos articles informations décembre 2010 et photos est interdite sans l'accord du magazine RACINES