Rien n'est plus fort qu'une idée dont le temps est venu Victor Hugo e L u n e v e R e s a B e d Pour la production de la totalité des biens et services nécessaires à la vie, on n’a besoin que d’une fraction des travailleurs, ...mais, tout le monde a besoin d’un revenu pour vivre ! Thomas Paine 1793 auteur des Droits de l’Homme Sans revenu point de citoyen Eléments pour alimenter la discussion sur le Revenu de Base Le revenu de base inconditionnel (RBI)*) : ...utopique, dangereux ou l'évidence de demain ? Face à la crise avec de plus en plus de personnes au chômage et dans la précarité ainsi que de plus en plus de familles, entreprises, communes, villes, voire de pays entiers confrontés à l'insolvabilité, une idée, vieille de plusieurs siècles, fait son chemin. L'initiative populaire suisse sur l'instauration d'un revenu de base Celle-ci trouve une résonance à travers les clivages culturels, politiques, sociales, économiques et idéologiques et a, le 4 octobre 2013, déposé à la Chancellerie Fédérale de Berne plus de 100 000 signatures nécessaires pour l’organisation d’un référendum national en 2016 (http://bien.ch/fr). Personne ne s’attendait à ce que le référendum allait passer du premier coup. Pour le moment le sujet est encore trop sensible et froisse les convictions viscérales d’une trop grande partie de l’électorat. Bien que prématuré, l'initiative a eu le mérite de relancer la réflexion sur une idée qui, comme c’était aussi le cas par le passé pour le droit de vote des femmes ou la sécurité sociale, risque de devenir une nécessité incontournable face à l’incapacité de nos économies de fournir un emploi rémunéré à tout le monde. Or, comme c'est un problème qui va s’accentuer avec les avancés fulgurantes dans l’informatique et la robotique, le revenu de base, aussi appelé revenu universel, commence à se faire une vraie place dans le débat politique et social, y compris en France. En France et dans l'Union Européenne, l'initiative BIEN cherche à faire inscrire le revenu de base dans l'agenda politique de l'Europe. Depuis le début de 2015, les médias s'intéressent de plus en plus à ce sujet — dans le sondage IFOP de mai 2015 60% des français se prononcent favorables à un revenu universel garanti à tous les citoyens — le conseil régional de l'Aquitaine a décidé d'expérimenter un RSA inconditionnel (Revenu de Solidarité Active) sur son territoire — aux Pays-Bas 30 villes envisagent d'expérimenter le revenu de base — le nouveau http://revenudebase.info/ gouvernement finlandais a inscrit le revenu de base dans son programme de réforme et va lancer des expérimentations. *) Le revenu de base est un droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont le montant et le financement sont ajustés démocratiquement”. 2 Aux Etats-Unis l'idée d'un revenu de base, aussi appelé "revenu universel", "revenu permanent "ou "basic income", fait partie du débat politique depuis leur fondation en 1776 Le révolutionnaire anglo-américain Thomas Paine, un des maîtres à penser des pères fondateurs des Etats-Unis et auteur en 1791 de "Rights of Man" (Droits de l'Homme), proposait l'idée d'un revenu de base en 1795 dans son traité "Agrarian Justice" (Justice Agraire). Et presque 300 ans avant lui, Thomas More, Chancelier du Royaume Thomas Paine a également influencé les d’Angleterre sous Henry VIII, acteurs de la Révolution Française et a été proclamé citoyen français le 26 août avait déjà évoqué l’idée d’un 1792 et élu député du Pas de Calais à la revenu de base en 1516 Convention le 6 septembre 1792. dans son ouvrage "Utopia". A Paris en 1948, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté la "Déclaration Universelle des Droits de l'Homme" qui, inspirée directement de la "Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789", stipule dans l’article 25 que "toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille". Aux Etats-Unis, propagée par les économistes et lauréats du Prix Nobel Milton Friedman, Paul Samuelson et James Tobin ainsi que par John Kenneth Galbraith, conseiller économique de plusieurs présidents, le concept du revenu permanent refait surface dans les années 1960 et devient l'une des idées phares aussi bien des Démocrates que des Républicains lors de la campagne présidentielle de 1972. En 1976, l'Alaska a mis en place un revenu universel d'environs 400 $ par mois pour une famille de 4 personnes. Il s'agit de la redistribution d'une partie des revenus issus des droits d'exploitation du pétrole et des ressources naturelles. Dans sa croisade contre la pauvreté, il est également mis en avant par Martin Luther King, Nobel de la Paix et leader du "African-American Civil Rights Mouvement". L'allemand Enno Schmidt et le suisse Daniel Haeni ont produit un excellent film-essai sur le revenu de base inconditionnel Celui-ci expose de manière claire et convaincante son intérêt, sa mise en oeuvre et son fonctionnement. Entre autres, il attire l’attention sur le fait que, déjà à l’heure actuelle, environ 60% des revenus perçus par les Suisses et les Allemands ne sont pas directement liés à un travail rémunéré et que pas loin de la moitié des heures travaillées n’est pas rémunérée (travaux ménagers, Le revenu de base bricolage, bénévolat, études et formations, etc.) 3 Le Monde Diplomatique de mai 2013 contient plusieurs articles sur le revenu de base et trace le chemin que ce concept a fait à travers le monde (Une utopie à portée de main). Nos concepts sont dépassés Les concepts pour surmonter la crise tels que croissance aussi perpétuelle qu’exponentielle, endettement et consommation démesurés, exploits technologiques, instruments fiscaux complexes et L’idée du revenu de base a bureaucratie surdimensionnée, ou encore également été reprise par Jérémy Rifkin, économiste et l'illusion sacro-sainte de pouvoir vaincre le essayiste américain problème du chômage par la croissance mondialement connu. Son analyse, partagé en grande économique, sont dépassés. Ces illusions partie par Michel Rocard, p r é c o n i s e q u e p o u r l a sont particulièrement étonnantes dans un production de la totalité des contexte où la productivité et la population biens et services nécessaires à la vie, on n’a besoin que à la recherche d'un travail rémunéré d ’ u n e f r a c t i o n d e s augmentent bien plus vite que notre travailleurs, ...mais, tout le monde a besoin d’un capacité de créer des emplois, un dilemme qui se trouve amplifié dans les pays avec une revenu pour vivre !!! forte croissance démographique. Confronté à des taux de chômage qui, dans certains pays, dépassent désormais 25% de la population active, voire plus de 50% pour les jeunes, il paraît évident que la croissance de l'économie marchande et les mesures généralement proposées ne pourront jamais venir à bout de ce fléau. Fort de ce constat et pour éviter que la crise du chômage et de la précarité ne se transforme en chaos social, il semble urgent de mettre en place des solutions garantissant à chaque membre de la société un revenu qui permet une existence économique digne. Source : Schmidt/Haeni Le Revenu de base Les personnes avec un revenu total en dessous de 2000€ reçoivent un soutient net de l’Etat. Les autres, par le biais de la TVA à 50% perçue sur leurs consommations, finissent par contribuer plus aux caisses de l’Etat qu’il n’en reçoivent sous forme du revenu de base. Pour les revenus élevés, le taux d’imposition va s’approcher de 50%. Le concept et la manière de le financer sont simples et transparents Le RBI offre des solutions créatives et crédibles face aux multiples crises qui nous guettent. En permettant un partage plus équitable des fruits de la production économique et culturelle d'une région, d'un pays, c’est une véritable bouffée d'espoir face aux solutions "rustines" qui circulent habituellement. Avec le revenu de base, aussi appelé revenu 4 universel, revenu social, revenu citoyen ou allocation universelle, la consommation, la raison d’être de toute production, remplace le travail comme source principal d’imposition. Les charges sociales, l’impôt sur le revenu et une multitude de taxes tout au long du circuit d’élaboration d’un produit ou d’un service, se trouvent regroupés en une seule taxe de type TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée). Le résultat est un système de taxation plus simple et des coûts liés à la collecte bien plus faibles. Parfaitement transparent et équitable, il ne pénalise plus le travail, le moteur principal de l’économie et la base même de la richesse d’un pays. Source : Schmidt/Haeni Le Revenu de base Revenu de base Café au lait servi dans une brasserie suisse Dans le système actuel environ la moitié de son prix est liée aux salaires, charges sociales et impôts sur le revenu. Sans ces dernières et avec une partie des salaires couverte par le revenu de base, le poids des salaires n’est plus que d’un sixième. Ce type de raisonnement pour les postes marchandises et infrastructures aboutit à un résultat analogue (Pour une boulangerie française qui vend une baguette avec la TVA à 5,5%, le résultat d’une telle analyse serait similaire). Les salaires pèseront moins lourd dans les coûts de production Comme la partie des salaires couverte par le revenu de base ainsi que les charges salariales, impôts et autres taxes regroupés dans la TVA, ne pèsent plus directement sur le coût de revient d’un produit ou d’un service, celui-ci se trouve fortement diminué. Ceci facilite l’embauche tout en augmentant la compétitivité des entreprises aussi bien à l’exportation que face aux importations. Mais le pouvoir d’achat et le revenu global des salariés vont rester le même voire sera plus élevé, une partie du revenu étant perçue par le biais du revenu de base, l’autre par le revenu du travail 1. Et ce qui est capital : à aucun moment le revenu global ne pourra être inférieur au revenu de base ! Les entreprises seront plus compétitifs face au marché mondial Les entreprises ne subiront plus de charges salariales, d’impôts sur le revenu et toute une multitude d'autres taxes et charges qui ne touchent pas les produits et services importés, notamment ceux en provenance de pays avec des salaires, exigences sociales et environnementales largement inférieures aux nôtres. Avec le revenu de base et les dépenses des collectivités financés, pour la majeure partie, par une taxe à la consommation (TVA), tous les produits et services, y compris les importés, participeront de manière égale au financement du secteur public 2. Terminées donc les acrobaties fiscales si astucieusement orchestrées par les 1 Globalement, les prix à la consommation ne devraient pas bouger de manière significative, étant donné qu’ils incluent déjà les charges, taxes et impôts déboursés par les producteurs, les transformateurs et les commerçants, charges désormais regroupées dans le montant de la TVA. Ceci dit, les prix de tout ce qui est produit à l'intérieur du pays va plutôt baisser, alors que les prix des produits importés, compte tenu d'une TVA plus élevée, prélevé lors de l'importation, vont augmenter. 2 En France environ 600 Md€ ou 30% du PIB sont liés à des importations. Avec une TVA à 50% au lieu des 19,6% actuellement leur participation fiscale se trouverait donc augmenté d’environs 180 Md€. 5 grandes multinationales pour minimiser leur imposition.3 En même temps, les exportations, entièrement ou éventuellement partiellement exonérées de TVA, seront plus compétitives sur le marché mondial. Avec une réduction significative du coût du travail les délocalisations auront moins d’intérêt et de plus en plus d’entreprises seront tentées par le rapatriement de leur production. Aussi, par la réduction du facteur main d'oeuvre dans le coût des produits et des services, le travail humain deviendra plus compétitif face à celui des machines et des robots qui, eux, n’ont jamais subi les coûts, charges directes et indirectes liés à l’emploi. Résultat : plus de travail, moins de plans sociaux, moins de délocalisations, moins de fermetures d’usines, moins de chômage, moins de misère. Est-ce qu’une société a le droit de ruiner la vie de l’un de ses membres parce que son économie n’est plus en mesure de lui fournir un emploi rémunéré ??? On se tire dans le pied en taxant le travail Entre charges sociales (URSSAF, RSI (Régime Sociale des Indépendants), MSA (Mutualité Sociale Agricole) et impôts sur le revenu, le travail est le secteur de l’économie de loin le plus fortement taxé et de loin la première source de recettes publiques ! Entre 40 et 80% du salaire net perçu par l'employé ou le travailleur indépendant sont prélevés au niveau de l'entreprise pour payer les charges sociales. Ensuite, pour la TVA payée sur la consommation, la TIPP, la taxe d’habitation, la taxe foncière, l'impôt sur Les charges salariales sont une le revenu, etc., il faut compter entre 20 partie majeure du coût du travail. Le coût total pour l'entreprise d'une et 60% du net. Quand la boucle est Plus de 60% des prélèvements rémunération nette de 2000€ bouclée voici donc le score final : 1,20 à obligatoires sont liées versée au salarié est environ 3500€ ou indirectement 1,60€ (60 à 80%) du montant global (le directement au revenu du travail revenu net plus les montants versés au fisc et aux assurances sociales) sont destiné à l'Etat et aux assurances sociales. Entre 0,40 et 0,80€ (20 à 40%) restent ensuite pour couvrir les besoins du contribuable ! Un score peu motivant pour ceux qui travaillent et peut-être l’une des raisons à l'origine du "ral-bol-fiscal" des professions libérales, artisans et PMEs. 4 Si l’on considère que le travail est le moteur et la base même de l’économie, de la culture et de la richesse d’un pays, le fait qu’il soit le secteur de loin le plus lourdement taxé semble paradoxe. Faisant penser à un moteur qu'on chercherait à brider, cette 3 A ce La chose la plus difficile à comprendre au monde, c’est l’impôt sur le revenu ! Albert Einstein propos, il faudra développer un système performant pour collecter la TVA sur les ventes internet. De plus en plus de travailleurs indépendants, beaucoup dans des secteurs où règne déjà la pénurie, réduisent volontairement leur activité pour échapper à une pression fiscale qu’ils jugent confiscatoire. 6 4 surtaxation du revenu lié au travail est particulièrement problématique dans un contexte où chômage, précarité, exclusion, justice social, pouvoir d’achat et compétitivité se trouvent au centre du débat politique, économique et sociétal. Aussi, en taxant le travail au lieu de taxer la consommation, on incite les contribuables fortunés à quitter le pays. Or, d’établir son domicile à l’étranger, juste pour échapper au fisc, a moins de sens si l’on paie une bonne partie de ses impôts par le biais de la consommation. 3450 pages presque 2000 articles certains avec une vingtaine de sous-articles contenant parfois des dizaines de paragraphes et sous-paragraphes Comme l’ont montré les crises à répétition qui hantent le financement des systèmes de couverture sociale, l'imposition du travail n’est pas seulement problématique d’un point de vue économique et social, mais aussi d’un point de vue logistique. Demandant une bureaucratie lourde, elle est beaucoup plus compliquée à administrer qu’un système basée sur la TVA où la majeur partie du travail lié à la collecte est assurée par les entreprises. En plus de sa complexité et de son coût élevé, le système actuel de collecte de fonds et de leur redistribution sous forme de subventions, d’allocations et d’aides est truffé de contradictions, d'aberrations, d’injustices et n'empêche pas pour autant que des millions de citoyens, notamment beaucoup de personnes âgées et de mères de famille monoparentale, soient condamnées à vivre dans la précarité. Certaines des lois qui gouvernent les programmes d’aides sont à tel point contre-productives qu’elles coupent toute motivation pour travailler et trouver un emploi. Et les situations ne sont pas rares où en "travaillant plus on gagne moins" ! Autre problème épineux qui met le système de protection sociale en danger : depuis sa mise en place en 1930, le rapport entre actifs cotisants et retraités ne cesse de se détériorer passant d’environs 5 au départ à 4 en 1960 et à moins de 2 aujourd’hui ! Cette difficulté se trouve accentuée par l’augmentation de la durée de vie et l’envolée du chômage qui entraîne une perte de cotisants et des indemnités de chômage en forte progression. Pour boucher les trous budgétaires on est donc sans cesse à la recherche de nouvelles économies et sources de revenu, un processus qui entraine des débats sans fin, sème la discorde, provoque des descentes dans la rue et gangrène l’économie et les institutions de l’Etat. En choisissant la consommation comme base principale d’imposition, ces problèmes se trouvent fortement diminués étant donné que c’est une source de revenu beaucoup plus stable et qui reflète bien mieux que l’emploi l’activité économique et la richesse d’un pays 5. 5 Pour réduire le ravin entre riches et pauvres, on devrait étudier de nouvelles formes de l'ISF (impôt sur la fortune), des droits de succession, de l'impôt sur les revenus tirés de certains placements financiers et éventuellement un impôt ou une réglementation sur les très hauts revenus. 7 La couverture social : la collectivité assume le rôle ancestral de la famille Avec la montée de l'industrialisation, d'abord les fameux patriarches industriels et les entreprises, ensuite l'Etat ont peu à peu assumé le rôle de la protection sociale que la famille ne pouvait plus assurer. Depuis, du moins en dehors de l'école et certaines allocations, la famille s'occupe encore des enfants jusqu'à ce qu'ils quittent la maison, mais il est de plus en plus rare qu'elle prenne en charge les séniors, ses membres malades, handicapés ou au chômage. D'assumer les charges liées à l'éducation et à la formation professionnelle est souvent un casse-tête pour les parents et selon leur situation financière, peut avoir une incidence importante quant aux perspectives de réussite ou d'échec de leurs enfants. Pour remplir son nouveau rôle, l'Etat a mis en place un appareil de collecte et de redistribution des fonds qui, étant d'une grande complexité, a engendré un labyrinthe de lois, une bureaucratie coûteuse et un niveau de cotisations salariales qui pèsent lourdement sur l'économie et notamment l'emploi. Or, l'introduction du revenu universel assorti d'une réforme fiscale de fond en comble, représenterait une occasion unique pour corriger le tir et résoudre une bonne partie des problèmes et des injustices qui hantent le système actuel. Il remplacera notamment une partie des fonctions assurées aujourd'hui par une multitude de programmes dont notamment retraites, diverses allocations familiales, indemnités de chômage, RSA, aides au logement, etc., etc.. Le revenu de base permettrait d'éliminer la plupart de ces programmes qui, à cause de leur complexité et lourdeur administrative, sont souvent hors de portée pour les plus démunis. Il éliminerait aussi le coté paternaliste et humiliant associé aux aides actuelles. Or, à cause de leur aspect stigmatisant une bonne partie des personnes qui en aurait vraiment besoin n'ose pas ou a honte de les demander. Le revenu de base inconditionnel réduit la peur du chômage, limite la précarité, favorise la créativité, et résout le problème des retraites. Sans résoudre tous nos problèmes, le revenu de base facilitera le travail à temps partiel, le bénévolat, l’entraide et ouvrira la porte à une sphère d’activité non-marchande telle que des projets culturaux ou artistiques qui ne permettent pas toujours une rémunération monétaire, mais qui, en pouvant être aussi utiles que passionnants, polluent peu et consomment peu de resources non-renouvelables. Sans la peur de subir les conséquences existentielles d'un échec éventuel et Le chômage, ne serait-il pas un des avec la confiance d'une deuxième, enfants du progrès technologique ? d'une troisième chance, les Est-il normal d’être marginalisé et de barrières à la volonté d'entreprendre, à saisir une idée pour vivre dans la précarité parce qu’on n’a pas un revenu suffisant ? la transformer, seul ou à plusieurs, en un projet industriel ou 8 socio-culturelle, tombent. Et sans charges et impôts sur leur revenu du travail, beaucoup trouveront une motivation supplémentaire pour se lancer. Le revenu de base, sans doute mieux appelé investissement de base, donnera surtout une lueur d'espoir et une bouffée d'oxygène aux jeunes, les premières victimes de la crise, mais aussi la première source de créativité et le pilier du monde de demain. C’est logiquement par eux ainsi que par ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté qu’il faudra commencer avec la mise en place progressive d'une telle initiative. Le projet qui est en train de naître en Entreprises fondées par des jeunes Aquitaine cible les bénéficiaires du RSA, une allocation qui dont certains n’avaient même pas 20 ans sera accordé de manière inconditionnelle. Il permettra donc au moment de commencer leur aventure aux bénéficiaires de le cumuler avec d'autres revenus. Pour ne pas pénaliser le démarrage d'une activité d'auto-entrepreneur ou la recherche d'un emploi, cette inconditionnalité est évidemment primordiale. Ce n’est pas seulement le problème de la précarité et de la marginalisation, souvent endémique parmi les retraités, qui trouvera une solution avec le revenu de base, mais aussi celui des retraites qui polarise et déchire la France depuis des années. En disposant d'un revenu assuré, chacun pourra choisir librement son âge de départ à la retraite tout en gardant l’option de reprendre une activité par la suite — rémunérée ou pas — si la vie de retraité ne lui convient pas. Ceux qui souhaitent toucher une retraite plus confortable que celle fournie par le revenu de base, sont libres de mettre de l’argent de coté pour leurs vieux jours ou de souscrire une retraite complémentaire. — Associé à une meilleure rémunération des métiers éprouvants, ce libre choix du départ à la retraite va également apporter des solutions au bourbier des "sales boulots " et du "travail pénible ". Le revenu universel au service de l'économie et du citoyen Contrairement à l'inefficacité des milliards mobilisés par la BCE (Banque Centrale Européenne) pour stimuler l'économie et sauver les banques par sa politique de "Quantitative Easing" 6 , l'argent destiné au revenu de base aurait un 6 Politique du Quantitative Easing (QE) ou assouplissement quantitative : censée stimuler l'économie par des injections massives d'argent par le biais des banques, cette pratique, d'abord utilisée par le Japon, ensuite la Banque Fédérale américaine (FED), la Banque d'Angleterre et désormais par la BCE, est inefficace, voire dangereuse, dans un environnement de crise où les banques ont peur de prêter, les entreprises et consommateurs ne peuvent ou ne veulent pas emprunter. Le résultat de cette bévue a été le même des deux cotés de l'Atlantique : au lieu de doper l'économie réelle, celle-ci a dopé la spéculation. En augmentant la "masse d'argent richesse", elle a alimenté une activité aussi parasitaire que dangereuse, qui ne fait qu'accentuer la fragilité du système ainsi que le ravin et la tension entre les groupes sociaux les plus aisés d'un coté et les plus modestes, de l'autre. (Note : La FED, fondée en 1913 par les banquiers les plus puissants de l'époque, est une banque privée et non pas publique comme pourrait le suggérer son nom — pour plus d'information sur les querelles monétaires et bancaires aux Etats-Unis et la naissance de cette institution voir le film Money Masters de Bill Still). 9 effet de stimulation immédiat, étant donné que les bénéficiaires vont l'injecter directement dans l'économie en payant leurs factures et en l'utilisant pour leurs besoins immédiats. Le RBI, en remettant le pouvoir de la création monétaire dans les mains de l'Etat, serait donc un outil efficace pour doper rapidement l'économie réelle, alors que les milliards que la BCE a pompé dans le système bancaire ont surtout alimenté les poches des institutions financières, exaspéré la frénésie spéculative et sur-gonflé les bourses et autres bulles hypertrophiées dont profitent surtout les plus aisés, y compris une armée d'acteurs étrangers ! Ces deux manières de chercher à stimuler l'économie, nous montrent aussi les deux aspects de l'argent. Celui-ci a d'abord vu le jour comme moyen de paiement pour faciliter les échanges économiques. Dus aux fondements mêmes du capitalisme, il s'est émancipé de plus en plus de l'économie réelle pour devenir une valeur en soi et pour soi, une unité de compte au service du capital et de l'accumulation de richesses à l'affut d'une "opération rentable". Av e c l ' é v o l u t i o n d e s t h é o r i e s monétaires et les nouveaux moyens technologiques, l'argent est devenu largement dématérialisé et fiduciaire. Ce n'est plus la monnaie relativement stable d'autrefois, adossée à une valeur économique, à quelque chose de tangible ou du moins difficile à manipuler telle que l'indice du coût de production (IPP), La plupart des pays industrialisés ont légué le privilège de la création monétaire à des banques privées. C’est eux qui créent désormais la majorité de l'argent par un simple jeu d’écriture comptable (inscription d'un montant au crédit d'un client en contrepartie de sa reconnaissance de dette)*). Défendus contre vents et marées par les institutions financières qui, assurées d'un bénéfice confortable, ont ainsi acquis le monopole pour créer et prêter de l’argent à tout le monde, y compris aux Etats souverains ! Quant à l'exclusivité de pouvoir prêter aux Etats, ce cadeau étonnant a été gravée dans du marbre par l’article 104 de Maastricht et l’Article n° 123 de Lisbone qui contraignent les pays de l'Union européenne de se financer auprès des banques et du marché financier aux "taux du marché" ! Déjà introduit en France par la Loi n° 73-7 du 3 janvier 1973 sur la Banque de France, aussi connue sous le nom ”Loi Pompidou-Giscard-Rothschild”, ces articles empêchent le gouvernement français d'emprunter directement à la Banque de France à taux zéro. Cette générosité vis-à-vis des banques et autres intérêts privés, coûte désormais à la France, c'est à dire au contribuable français, la modeste somme de quelque 45 milliard d'Euro en intérêts par an ! Officiellement, on justifie ce cadeau somptueux que la loi oblige le contribuable à faire aux institutions financières privées par l'argument qu'on ne peux pas faire confiance aux politiques et aux gouvernements de gérer les déficits de manière responsable si, en même temps, on leur donne accès à la "planche à billet" et aux emprunts à taux zéro des Banques Nationales. Pour éviter ce dilemme,on a donné la "planche à billet" ainsi que le droit de créer et de prêter de l'argent aux banques dont les services ne sont évidemment ni gratuits, ni sont-elles forcement dans le meilleur intérêt du pays. Il est très bien que les gens de cette nation ne comprennent pas le système bancaire & monétaire. Car si c’était le cas, il y aurait une révolution avant demain matin ! " Citation attribuée à Henry Ford *) Pour plus d'information sur la création monétaire et la crise des dettes publiques voir le film Argent Dette et les vidéos de Michel Lasserre. sur l'impasse du capitalisme 10 l'indice des prix à la consommation (IPC), voire un amalgame des deux. L'argent est désormais lié à des électrons stockés dans d'énormes ordinateurs et son taux de change est établi et ajusté en permanence par la "main invisible" de la spéculation mondiale. Pouvant se déplacer à la vitesse de la lumière, quelques milli-secondes suffisent pour transférer d'un bout du Globe à l'autre, des fortunes à la recherche de nouvelles sources de profits ! Ayant acquis une importance disproportionnée, cette deuxième face de l'argent avec son corollaire du "toujours plus", de voracité, de masses gigantesques, de risques démesurés, de bulles spéculatives, d'effets dominos sans frontières, menace aujourd'hui l'équilibre économique et financier de la Planète entière 7 . En privilégiant les privilégiés et la haute finance dans ses plans de sauvetage, au lieu d'aider les plus modestes et la classe moyenne, les groupes sociaux les plus affectées par une crise qu'ils n'ont nullement provoqué, les banques centrales et les gouvernements ont choisis de créer le parfait monstre dont la mère s'appelle "injustice sociale", le père "myopie économique et financière". En revanche, une économie basée sur le revenu de base qui taxe la consommation au lieu de taxer le travail, augmentera d'une part l'envie d'entreprendre et de travailler et de l'autre permettra un partage plus équitable des fruits de l'économie d'un pays. Une telle réforme réduirait aussi le risque d'une crise financière et économique majeure. Le revenu universel commence aussi à être évoqué par les experts en informatique et en robotique tels que Erik Brynjolfsson du MIT ou Martin Ford, auteur de "Rise of the Robots". Ils y voient un moyen pour amortir le choc de l'automatisation avec son cortège de chômage ainsi que pour assurer un marché pour pouvoir écouler la production de ces nouvelles armées de robots (article dans la NZZ du 3.1.2016 : "Bientôt on n'aura besoin de nous qu'en tant que consommateur"). On commence aussi à entendre ce type de discours de la part de quelques politiques. A cause de ce double aspect de l'argent et pour éviter que les mésaventures financières ne mettent en danger les comptes bancaires destinés aux échanges commerciaux et au fonctionnement des entreprises, il y a eu régulièrement des initiatives pour scinder les banques en établissements de dépôt et établissements d'investissements, les uns s'occupant des échanges économiques, les autres du financement des investissements. En Suisse, l'initiative populaire Monnaie Pleine va plus loin encore et cherche à redonner à l'Etat, via sa Banque Nationale, le droit exclusif de la création monétaire et d'en faire un service public. Par cette solution on contourne le piège du "too big to fail" qui, lors de la dernière crise, a forcé la main des pouvoirs publics pour sauver de la faillite de nombreuses banques et compagnies d'assurance. Or, la tendance récente en France et dans l'Union européenne de donner aux banques le droit de se lancer dans l'assurance et vice versa, est diamétralement opposée à ces initiatives. En exaspérant le cauchemar du "too big to fail", elle ne fragilise que davantage l'édifice financier. 7 11 Une bouée de sauvetage pour la Grèce et autres pays en détresse ? Autant en Grèce qu'en Espagne et au Portugal, trois pays particulièrement pénalisés par les taux d'intérêts élevés que les marchés financiers leur font subir8, l'idée du revenu de base fait son chemin. Comme c'est la manière la plus rapide pour atténuer les tensions sociales et réanimer une économie en berne, c'est certainement une voie qui mérite d'être étudiée. Dans le cas de la Grèce, une telle opération serait sans doute bien plus efficace et bien moins coûteuse que d'injecter des milliards dans le trou noir d'un système bancaire en faillite, ...et difficile, voire impossible, à remettre sur pied dans sa forme actuelle. Il reste évidemment à Le Revenu de Base (RBI) pour sauver la Grèce ? voir si un sauvetage par l'introduction d'un revenu de base est envisageable, ou même souhaitable, en gardant l'euro, ou s'il faudrait plutôt opter pour une nouvelle monnaie émise par la Banque Nationale du pays en difficulté. Dans ce cas, l'introduction du revenu de base se ferait de pair avec la reprise par l'Etat de la création monétaire, son pouvoir légitime qu'il n'aurait jamais dû léguer à des institutions privées. RBI L'agriculture comme précurseur du revenu de base ?! En agriculture, le revenu de base sous forme d'aides à la production existe depuis longtemps dans la plupart des pays industrialisés. Sans les aides, ni l'agriculture européenne (les DPU (Droit à Paiement Unique) de la PAC (Politique Agricole Commune) et les aides liées à des engagements environne-mentaux), ni celle des Etats-Unis (Farm Income Stabilization) ne pourraient exister dans le contexte actuel où, déjà du point de vue climat, réglementations, salaires, charges sociales, prix de la terre et qualité des sols, les différences à travers le globe sont énormes 9 . Or, il n'est pas difficile de voir que, sans paysans, nos campagnes feraient triste mine et tourneraient vite au cauchemar pour la collectivité. En considérant les enjeux, il n'est donc pas étonnant que l'Union européenne consacre la plus grosse part de son budget à la protection de son agriculture. En revanche, avec les sommes aussi colossales engagées, il est difficile de comprendre l'absence d'une politique agricole Fin août 2011 par exemple, les taux d'intérêt à 10 ans pour la Grèce étaient de 18,54 %, et ceux à deux ans de 45,89 %. Au sommet de la crise son taux à 10 ans a même atteint 29 %, celui du Portugal 14 % et celui de l'Espagne 7 % ! Pour un pays en difficulté ce type de taux ne peut qu'accélérer son naufrage. 9 Les paiements compensatoire de la PAC sont l'autre face de la médaille qui, par le démontage des barrières douanières, a permis la réduction de notre budget alimentaire. 8 12 cohérente qui, en encourageant le développement d'une agriculture de qualité alimentaire et environnementale, protègerait mieux et les populations contre les effets toxiques des produits chimiques et le marché interne contre les excès spéculatifs, la surpuissance de certains acteurs économiques et les aléas du marché mondiale. En regardant des secteurs comme la sidérurgie, le textile, la chaussure, l'électroménager ou les téléviseurs, on voit bien ce qui se passe si un secteur industriel doit faire face, seul et sans soutien public, à un choix sociétal qui entraîne une panoplie de réglementations contraignantes, de charges sociales, de taxes, de mises aux normes, de mesures environnementales ne s’appliquant pas à ses concurrents étrangers. Dans la plupart des cas, ces aventures se sont soldées par la délocalisation de la production, la perte d'emplois et la domination du marché par des sociétés étrangères 10 . Pour des raisons évidentes, la délocalisation n'est pas une option en agriculture, ni est-il souhaitable que la source de notre alimentation et secteur clef de l'économie soit dominé par des multinationales et autres acteurs étrangers. En optant pour un système de paiements directs aux producteurs, l'agriculture, la base indéniable de toute activité humaine, est donc en train de jouer un rôle précurseur quant à la mise en place d'un revenu universel pour tous. Par les méandres de son processus d'enfantement, la PAC nous montre aussi que, Rien n'est plus fort pour un projet sociétal d'une telle envergure, il n'y qu'une idée a ni solutions toutes faites, ni solutions parfaites, ni dont le temps est venu. solutions universelles ou figées. Sa mise en place Victor Hugo passe inévitablement par des débats, concertations, compromis et expérimentations qui impliquent des "quadratures du cercle", surprises, distorsions, échecs, exceptions, adaptations, etc.. Comme c'est aussi le cas pour la politique agricole de l'Europe, ce vaste chantier encore loin de la perfection, elle ne pourra se faire que par étapes et sera forcément étalée dans le temps. Aussi demande-t-elle la participation dans le débat de tous les groupes socio-économiques concernés par ce projet ambitieux. A l'aube d'un saut créatif ? Il s'agit d'un changement historique qui implique de faire confiance à la responsabilité de chacun, à la solidarité, à la créativité, à l'innovation, aux initiatives individuelles et collectives qui viennent d'en bas. Il met l'individu et la société au centre de nos préoccupations, L'Etat est notre serviteur et nous n'avons pas à en être les esclaves. Albert Einstein Par la TVA au taux faible de 5,5%, les importations agricoles à des prix souvent dérisoires accentuent les problèmes de concurrence. En même temps, leur contribution au budget de l'Etat est faible et sans doute largement inférieure aux dégâts et aux coûts que beaucoup de ces importations occasionnent. 10 13 le rôle, la priorité des gouvernements, de l'économie et du système financier étant de servir leurs intérêts et de favoriser leur émancipation et leur épanouissement. Il s'agit d'une révolution sociétale qui demande un saut créatif du même ordre que celui que nos ancêtres ont dû faire pour admettre que la terre était ronde ou abolir l'esclavage. Perspectives L'Utopie, c'est la vérité de demain Victor Hugo L'endettement et la fragilité du système financier, la crise économique, écologique et sociale, la pénurie chronique d'emplois rémunérés normalement, les taux de chômage et de précarité inacceptables, une construction européenne en panne, créent une conjoncture unique et un besoin urgent d'imagination et d'idées nouvelles pour sortir de l'impasse. Avec les mentalités qui évoluent et plusieurs initiatives et expérimentations concrètes en cours, est-ce que c'est trop espéré que le revenu de base, cette utopie née en Angleterre au début de l'ère moderne il y a 500 ans, fasse enfin partie de ces idées nouvelles tant attendues et dont "le temps est venu" ? Références et liens internet Pierre Serkine : Le revenu de base (Département d’Économie du Collège d’Europe de Bruges, 2012/13) André Gorz (1923-2007 - philosophe et journaliste français d’origine autrichienne) : Revenu garanti et postfordisme Expérimenter un RSA inconditionnel (7 juillet 2015) : le Conseil Régional d’Aquitaine vote une motion à l’unanimité http://revenudebase.info/2015/07/07/rsa-inconditionnel-aquitaine/ Stanislas Jourdan : PAYS-BAS : 30 villes envisagent d’expérimenter le revenu de base http://revenudebase.info/2015/07/24/pays-bas-experimentations-locales/ Le Figaro du 25 juillet 2015 : En Finlande, travailler pourrait devenir un choix (25 juillet 2015) http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/07/25/20002-20150725ARTFIG00001-en-finlande-trav ailler-pourrait-devenir-un-choix.php Ulrich Schreier : L'énigme de la déflation Ulrich Schreier : L'agriculture dans l'étau de la spéculation boursière Ulrich Schreier : La Biodynamie : un chemin prometteur vers l’agriculture durable de demain Ulrich Schreier : Le round-up dans le collimateur Lien internet de ce document : http://vernoux.org/economie_et_finance/revenu_de_base.pdf Ulrich Schreier Château de Vernoux F-49370 Le Louroux Béconnais e-mail [email protected] Octobre 2013 (MAJ octobre 2016) 14