"Du concept d`espèce aux espèces nommées..." Sarah

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Du concept d’espèce aux espèces
nommées … histoire et enjeux
Sarah Samadi, Pr MNHN
UMR7205, ISYEB
« Chat »
« Chien »
Folk Biology
Classification des animaux chez les inuits
Indien Kayapos du Brésil
Connaissances des vertus
médicinales
Les mots “chien” et “chat” sont des “boites” dans
lesquels sont "rangées" les organismes
Les “boites” sont organisées selon un système de
classification
… ou un autre
La classification permet d’ordonner les boîtes selon un
système défini suivant les motivations du classificateur
Les poissons peuvent être classés
selon une théorie gastronomique
Les fleurs peuvent être
classées selon une théorie
esthétique
Petit Prince Pouf, Agnès Desarthe, Claude Ponti.
Troisième leçon du professeur Ku : « Un chat est un chat »
Daphnia lumholtzi & Daphnia monacha
A A Agrawal Science 2001;294:321-326
Two individuals of a single clone of the Asian and African water flea, Daphnia lumholtzi. The
individual on the left was exposed to chemical cues from predaceous fish (induced); the individual
on the right was not (control). The sharp helmet and extended tail spine of the induced morph
protect D. lumholtzi from fish predators. The uninduced form was formerly described as a different
species (D. monacha Brehm 1912). Green (83), in an accurate and prophetic study, related the
occurrence of both morphs to differences in fish predation. The induction of this morphological
defense has now been implicated as a key factor in the success of D. lumholtzi invading North
America (84).
ELEVAGE
Based on morphology and mitogenomic sequence data,
we show that fishes currently assigned to three families
with greatly differing morphologies, Mirapinnidae
(tapetails), Megalomycteridae (bignose fishes) and
Cetomimidae (whalefishes), are larvae, males and
females, respectively, of a single family Cetomimidae.
Les caractères permettent de :
décrire et de reconnaître les organismes mais …
La cause de la ressemblance est la généalogie
certains caractères témoignent de cette généalogie.
Un chat est un chat ...parce que les chats ne font pas des chiens !
L’espèce « pré-évolutionniste »
« ensemble d’individus qui
engendrent, par la
reproduction, d’autres
individus semblables à euxmêmes …
… nous comptons aujourd'hui
autant d'espèces qu'il en fut
créé à l'origine »
« L'espèce est la réunion
des individus descendus
l'un de l'autre et de
parents communs, et de
ceux qui leur ressemblent
autant qu'ils se
ressemblent entre eux. »
Cuvier (1769-1832)
Linné (1707 - 1778)
«Le barbet et le lévrier ne font
qu’une espèce puisqu’ils produisent
ensemble des individus qui peuvent
eux-mêmes en produire d’autres,
au lieu que le cheval et l’âne sont
certainement de différentes
espèces puisqu’ils ne produisent
entre eux que des individus
viciés et inféconds. »
Candolle
1778-1841,
Buffon (1707-1788)
« L'espèce est la collection de tous les
individus qui se ressemblent plus entre
eux qu'ils ne ressemblent à d'autres; qui
peuvent, par une fécondation réciproque,
produire des individus, fertiles et qui se
reproduisent par la génération, de telle
sorte qu'on peut, par analogie, les
supposer tous sortis originairement d'un
seul individu. » Dans un monde « préDarwinien »
 La question de l’origine des espèces n’est
pas du ressort de la science (renvoie à une
«création»): l’existence de la catégorie espèce est dans
ce cadre «originelle»
 Dans ce paradigme, les espèces sont définies
de façon généalogique (descendants issus
d’un couple originel)
 La ressemblance ou l’interfécondité sont des
critères qui permettent de déterminer si un
ensemble d’individus appartient ou pas à la
même espèce
La révolution Darwinienne
Charles Darwin (1809-1882)
Cette vision discontinue de la diversité du monde vivant
est perturbée par la théorie de Darwin (1859) qui introduit
l’idée d’un changement continu au cours du temps et
d’un apparentement généalogique entre les espèces.
La révolution Darwinienne
L’objet de la théorie de Darwin est de fournir des
explications à l’existence de ces ensembles disjoints
que l’on nomme « espèces ».
Décrire vs. Expliquer
 Décrire : description des
espèces actuelles et fossiles, les
agencer dans le temps (dérouler
le film de l’évolution).
 Expliquer : comprendre les
causes de cette histoire
(proposer des modèles
explicatifs).
La révolution darwinienne
 Il existe de la variation au sein des espèces
 Les fossiles suggèrent une continuité dans le temps
entre les formes
 La comparaison des traits avec d’autres organismes
suggèrent des relations généalogiques entre les
espèces
Exemple :
Pasteur et la réfutation de la génération
spontanée
 Le phénomène à expliquer : e.g.
apparition d’asticots sur de la viande
 Le modèle couramment accepté : la
génération spontanée
 L’expérimentation apporte la
réfutation du modèle
 Ce qui permet de proposer un
nouveau modèle
 Les données accumulées depuis
confortent le modèle
La Sélection Naturelle :
un modèle explicatif
 Les faits : diversité actuelle et fossile
et sa structuration (pattern discret à
un instant et pattern continu dans le
temps)
 Le modèle existant : chaque espèce
résulte d’un événement unique de
génération (création)
(Le transformisme Lamarkien se situe dans se
contexte : génération spontanée + transformation
progressive)
La Sélection Naturelle :
un modèle explicatif
 Les données expérimentales qui
permettent de proposer un
modèle : la sélection artificielle
(expérimentation peu contrôlée)
Ces variétés de « Chien »
sont issues de croisements
contrôlés
= sélection artificielle.
la sélection artificielle illustre la
diversité des directions que peut
prendre l’évolution (le film) :
la direction dépend des contraintes rencontrées
(en l’occurrence la volonté de l’éleveur)
Une fois engagé dans une voie, la forme retenue
peut contraindre la suite de l’histoire (fardeau
historique)
La Sélection Naturelle :
un modèle explicatif
 Les données expérimentales qui
permettent de proposer un modèle
: la sélection artificielle
(expérimentation peu contrôlée)
 Les données accumulées ont
permis de conforter et d’affiner le
modèle (par exemple en
introduisant des raisonnements
probabilistes)
La théorie de l’évolution prédit que les
variations des caractères héritables se fixent
dans les populations
La révolution Darwinnienne
« Je ne discuterai pas non plus ici les différentes définitions que
l'on a données du terme espèce. Aucune de ces définitions n'a
complètement satisfait tous les naturalistes, et cependant chacun
d'eux sait vaguement ce qu'il veut dire quand il parle d'une
espèce. … Il est presque aussi difficile de définir le terme variété ;
toutefois, ce terme implique presque toujours une communauté
de descendance, bien qu'on puisse rarement en fournir les
preuves ».
Polémiques et confusions
autour de la définition de l’espèce.
Une multitude de « définitions d’auteurs »
(Solignac et Lherminier, 2000)
Dans les discussions autour de la définition de
l’espèce, les deux aspects pris en compte pour juger
de leur pertinence sont :
1) leur insertion dans le cadre de la théorie de l’évolution (prise en
compte de tous les organismes, historicité, descendance
commune…)
2) leur opérationnalité dans la pratique de la délimitation des
espèces.
Polémiques et confusions autour
de la définition de l’espèce.
Aspect ontologique : les propriétés qui permettent
de classer chaque organisme dans une espèce unique
et de statuer sur l'appartenance à la même espèce de
deux populations quelconques (définition de la
catégorie)
Aspect épistémologique : les critères empiriques de
délimitation des espèces (définition des taxons)
"Espèces"
Définition
Une espèce est une "branche" du réseau généalogique, c'est-à-dire
un fragment du réseau compris : soit entre deux événements de
spéciation soit entre un événement de spéciation et un
événement d'extinction
Samadi & Barberousse, Biol J Linn Soc
89
Samadi & Barberousse Biosystema 24
Les espèces sont des hypothéses testables …
…
X.
X.
X.
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sp
sp
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Tester les hypothèses alpha-taxonomiques avec des
caractères supplémentaires
X. sp 1’
…
X. sp 3
X. sp 4
X. sp 5
Pante, E., Puillandre, N., Viricel, A., Arnaud‐Haond, S., Aurelle, D., Castelin, M., ... & Sammadi S. (2015). Species are hypotheses: avoid connectivity
assessments based on pillars of sand. Molecular ecology, 24(3), 525-544.
L’histoire démographique
Le déterminisme des
caractères
Les traits d’histoire de vie
… autant d’inconnues qui
compliquent la tâche du
taxonomiste !
La définition de la catégorie « espèce » offre un outil
pour caractériser la structure du réseau généalogique
du vivant
Les espèces décrites sont des hypothèses
permettant d’inférer cette structure
Ces hypothèses sont amenées à être révisées avec
l’acquisition de nouvelles données
Les critères utilisés pour formuler ces hypothèses
peuvent être hiérarchisés selon leur performance à
capter la structure du réseau généalogique
La facilité à mettre en œuvre un critère dépend des
compartiments de la biodiversité et de l’état de sa
connaissance
Biological nomenclature : set of rules that determine how
names are given to taxa. In the binominal system, when a
new species is described based on a given set of
biological criteria applied over a set of specimens, one of
them is designated as the holotype (the name-bearing
specimen). When the taxonomy is revised using additional
specimens and/or new biological criteria, the position of
the name-bearing specimens is used to name the new
taxonomic hypotheses. When studying the holotype is
impossible, other categories of type material might be
used (paratypes, syntypes, etc.).
Pante, E., Puillandre, N., Viricel, A., Arnaud‐Haond, S., Aurelle, D., Castelin, M., ... & Samadi, S. (2015). Species
are hypotheses: avoid connectivity assessments based on pillars of sand. Molecular ecology, 24(3), 525-544.
Liens entre les noms et les hypothèses de
délimitations
…
X.
X.
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Liens entre les noms et les hypothèses de
délimitations
X. sp 1’
…
X. sp 3
X. sp 4
X. sp 5
La révision taxonomique (R0)
b
a
a
b
d
c
c
d
e
e
f
f
Noms valides après la
plus récente révision
taxonomique (R0)
rattachés à une
référence
bibliographique
Collection de spécimens sur
laquelle est basée R0 (incluant
les porte-noms)
Matériel nouveau
(collection de
recherche)
La révision taxonomique (R1)
a
b
a b
d
c
h
c d g h
g
e
e
f
f
Noms valides après Collection de specimens après R1 (incluant des portela nouvelle révision
noms nouveaux)
taxonomique (R1)
→ en lien avec une
nouvelle référence
bibliographique
La révision taxonomique (R2)
a
b
a b
d
c d g h
c
h
g
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e
e
f
i
i
Noms valides après
la nouvelle révision
taxonomique (R2)
liée à une nouvelle
publication
Révision R2 fondée sur l’examen de nouveaux
caractères (i.e. moléculaire) et impliquant la
désignation de nouveaux porte-noms
LITTERATURE SCIENTIFIQUE
+
COLLECTIONS DE SPECIMENS
HEBERGEES DANS DES MUSÉES
Quelle est la cause initiale de la séparation
du réseau généalogique ?
Quels sont les mécanismes qui assurent
que la divergence est irréversible ?
Des espèces décrites aux causes de la spéciation
Sympatrie
Adipicola pacifica
Adipicola crypta
Micro-habitat
Facteurs physico-chimique
→ sélection naturelle
Fujiwara et al. 2007
Sampling of natural sunken
wood
 Depth range : 100-1500m
 Sunken-wood accumulations
around tropical islands
 Erratic substrates for example
on seamounts
 Trapps
Integrative Taxonomy
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X.
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Les espèces qui vivent en sympatrie sont-elles des
espèces soeurs ?
Fujiwara et al. 2007
Allopatrie
espèces
soeurs
habitat
bathymetry
Sympatrie
Symbiotic association
Allopatry
Species X
Species Y
Sister
species
Extrinsic barriers
Species Z
outgroup
tectonic events
Sea level variations during pleistocene
Marine currents
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