78 LA PLACE DU DROIT
DANS LA NOUVELLE GOUVERNANCE ÉTATIQUE
des cas, cette efficacité est avérée. Et, de ce point de vue, il est tout
aussi de sens commun qu’il serait bien inefficace de proposer un
développement des formes de négociation par délibération éthique
et des dispositifs de médiation dans l’ensemble des secteurs de
l’action collective actuellement régulés par ce que G. Legault ap-
pelle un droit positiviste.
L’enjeu pour nous n’est pas de confronter le raisonnement de G.
Legault à l’exactitude formelle des thèses positivistes. L’enjeu est
ailleurs. Notre hypothèse est, en effet, que le double élément
d’ambiguïté que l’on vient de relever a, selon nous, valeur de
symptôme. Symptôme de ce qu’une critique du positivisme et,
corrélativement, une meilleure définition des conditions à respec-
ter pour assurer une meilleure garantie de réalisation de la finalité
régulatoire de la règle appelle un détour épistémologique, et donc,
un prolongement de la démarche initiée par G. Legault. Loin de
nous de ne pas partager les intuitions de base de G. Legault sur
l’insuffisance du positivisme et la nécessité de repenser
l’implication des destinataires privés d’une règle dans son proces-
sus d’élaboration et d’application. Mais, pour penser cette double
intuition, il nous semble qu’une meilleure élucidation de
l’insuffisance du positivisme s’impose. Cette insuffisance, selon
nous, est profonde et est de nature épistémologique. Où nous ar-
rivons à notre seconde interrogation critique s’agissant de la dé-
nonciation par G. Legault du positivisme juridique. En effet,
l’insuffisance du positivisme est une insuffisante construction de
la récursivité ou réflexivité de l’opération normative. En ne cons-
truisant pas cette nature profonde de l’insuffisance du positivisme,
non seulement G. Legault risque de dénaturer l’approche positi-
viste du concept de droit, mais aussi, et surtout, risque de succom-
ber lui-même à cette même insuffisance épistémologique dans la
construction du dispositif de délibération éthique qu’il suggère
pour pallier les carences régulatoires du « droit positiviste ». Ex-
plicitons rapidement cette double idée.
Risque de dénaturation tout d’abord. Certes, G. Legault a raison de
souligner la déficience du positivisme tant en ce qui concerne la