« Tout peuple, pour exer-
cer sa souveraineté, doit
avoir conscience de lui-
même et par conséquent
de son Histoire. »
Préface
Tout peuple, pour exercer sa souveraineté, doit avoir conscience
de lui-même et par conséquent de son Histoire. À cette condition
seulement, le Peuple existe comme « demos », c’est-à-dire comme
corpus de citoyens capables de définir ensemble un intérêt général.
C’est pourquoi le récit national est une part importante et même déci-
sive de la conscience civique. C’est le mérite de M. Dimitri Casali et des
professeurs d’Histoire qu’il a réunis autour de lui d’avoir su élaborer ce
manuel de manière vivante, en s’appuyant sur la chronologie et quelques
grands personnages propres à frapper l’imagination des élèves, tant il
est vrai que pour enseigner l’Histoire, il faut raconter des histoires (mais
des histoires vraies !).
Si j’ai employé l’expression « récit national »,
c’est évidemment à dessein : un récit se doit
d’être objectif et de restituer l’Histoire, avec
ses lumières, mais aussi avec ses ombres. Je
distingue donc clairement le « récit national »
du « roman national » : la France n’a pas besoin
de « romancer » son Histoire. Celle-ci comporte
des taches. Ainsi la conquête de l’Algérie s’est faite avec des violences
inacceptables : les soldats de Bugeaud ont utilisé contre les Algériens
les méthodes qu’ils avaient apprises dans les guerres que les armées
napoléoniennes avaient livrées en Espagne, en 1812-1814, contre les
insurgés, levés à l’appel de l’Église. Mais si je partage le point de vue de
Clemenceau sur la colonisation (il contestait qu’il y eût des civilisations
supérieures à d’autres), je ne pense pas que la France occupe, au podium
des horreurs du colonialisme, la première place. Le livre de Dimitri Casali
rappelle utilement l’œuvre de Savorgnan de Brazza au Congo.
La France n’a pas commis de génocide (je ne ferai pas la liste des
peuples génocidaires). Je préfère donc au concept de repentance, celui
de « conscience ». Lui seul me paraît de nature à rompre avec les suren-
chères d’humiliations, de violences, de ressentiments et de haines qui
menacent aujourd’hui l’Humanité. L’Histoire de France est une belle et
grande Histoire, celle d’un peuple qui, comme l’a montré Michelet, a, le
premier en Europe, proclamé les « Droits de l’Homme et du Citoyen » de
par Jean-Pierre Chevènement
Ancien ministre de l’Éducation nationale
Membre honoraire du Parlement
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« Le mérite de ce livre
est d’offrir une docu-
mentation diversifiée
propre à nourrir un débat
équilibré et serein sur
tant de questions qui
font aujourd’hui
polémique alors qu’elles
mériteraient d’être
traitées avec recul et
hauteur de vue. »
1789. L’inspiration de la « Grande Révolution » a
façonné et façonne encore l’Histoire du monde.
Il n’y a donc pas lieu de revisiter l’Histoire de
France, même à la lumière d’un XXe siècle parti-
culièrement éprouvant. J’aimerais en particulier
qu’on montre davantage que l’effondrement
de mai-juin 1940, avant d’être militaire, a été
d’abord un effondrement politique : celui d’élites
déboussolées qui ne savaient plus quelle guerre
elles devaient faire. Et peut-être aussi pour-
rait-on mentionner Stalingrad, avant et avec le
débarquement du 6 juin 1944…
Pour éviter demain les « chocs de civilisations »
dont parlait l’historien américain Huntington, il
faut aussi connaître l’Histoire des autres : ainsi Charlemagne, qui s’ef-
forçait vers l’an 800 de relever l’Empire romain effondré trois siècles
plus tôt, échangeait-il des cadeaux avec Haroun al-Rachid, le calife de
Bagdad dont la magnificence des présents témoignait de la splendeur de
la civilisation arabe à cette époque.
On ne peut pas faire d’emblée de l’histoire comparative. C’est le grand
mérite du livre de M. Casali et de son équipe d’avoir centré ce manuel
destiné aux classes du cycle 4 (5e, 4e, 3e) sur l’Histoire de la France. Il faut
d’abord se connaître soi-même avant de prendre la distance qui permet
de s’ouvrir aux autres.
Le mérite de ce livre est d’offrir une documentation diversifiée propre à
nourrir un débat équilibré et serein sur tant de questions qui font aujourd’hui
polémique alors qu’elles mériteraient d’être traitées avec recul et hauteur
de vue. Un bon manuel d’Histoire est celui qui fait découvrir les continuités
au-delà des ruptures, sans occulter le sens de ces dernières.
Je souhaite que celui-ci remplisse pleinement ce rôle fédérateur et
fasse apparaître quelle somme d’efforts, de combats, de souffrances ont
été nécessaires pour « faire France ». Car cette tâche est plus que jamais
nécessaire, dans le temps d’épreuves qui est devant nous.
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