Pérics
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nymie).
Périclès
Buste de Pérics portant l'inscription « Périclès, fils de
Xanthippe, Athénien ». Marbre, copie romaine d'après
un original grec de Crésilas (430 av. J.-C.), musée Pio-
Clementino.
Périclès (en grec ancien Περικλῆς / Periklễs, signifiant
littéralement « entouré de gloire »), né à Athènes vers
495 av. J.-C. et mort dans cette même ville en 429 av. J.-
C., est un éminent et influent stratège,orateur et homme
d'État athénien durant l'âge d'or de la cité, plus préci-
sément entre les guerres médiques et la guerre du Pélo-
ponnèse. Il est le fils de l'homme politique Xanthippe et
d’Agaristé, laquelle appartient à la puissante famille des
Alcméonides.
Périclès fait de la Ligue de Délos un empire athénien et
mène ses compatriotes au cours des deux premières an-
nées de la guerre du Péloponnèse. Il a eu une influence
si profonde sur la société athénienne que Thucydide, un
historien contemporain, le qualifie de « premier citoyen
de sa patrie » et que son époque est parfois appelée le
«siècle de Pérics ».
Il s’est illustré également dans la promotion des arts,
ce qui a été une des principales raisons pour lesquelles
Athènes détient la réputation d'être le centre éducatif et
culturel du monde grec antique. Il est à l'origine du pro-
jet de construction de la plupart des structures encore
présentes aujourd'hui sur l'Acropole d'Athènes dont le
Parthénon[2]. En outre, il favorise la démocratie athé-
nienne à tel point que des critiques le qualifient de
démagogue[3].
1 Des sources nombreuses mais
discordantes
Périclès a marqué ses contemporains et les gérations
suivantes à Athènes, dans le monde hellénistique puis
romain : il existe de nombreuses sources littéraires an-
tiques à son sujet dont les auteurs sont parfois devenus
des classiques. Ces sources riches en renseignements ne
sont jamais neutres et leurs orientations ont fait l'objet de
nombreux débats historiographiques[4].
Aristophane et Thucydide sont des Athéniens comme lui
et l'ont connu de son vivant. L'historien Thucydide, auteur
de l’Histoire de la guerre du Péloponnèse, l'admire tandis
que le poète comique Aristophane s’en moque et carica-
ture aussi bien son physique que sa politique. De nom-
breux autres poètes, dont il ne reste que des fragments
des œuvres, ont moqué Pérics, sa soif de pouvoir ou ses
amours[5].
Le philosophe Platon, né l'année suivant la mort de Pé-
rics, est un Athénien et appartient à l’aristocratie et au
parti oligarchique. Farouche adversaire de la démocra-
tie, il le considère dans ses textes comme responsable
d'un affaiblissement moral de la socté. Les autres dis-
ciples de Socrate, comme Antisthène, sont aussi hostiles
à Périclès[6].Aristote, auteur de la Constitution d'Athènes,
dresse un portrait plus nuancé de l'homme politique[7].
La Vie de Périclès de Plutarque, auteur grec né en 46
ap. J.-C. à l'époque romaine, est une source majeure très
utilisée par les historiens jusqu'au XXIesiècle. Il uti-
lise de nombreuses sources différentes dont certaines ont
aujourd'hui disparu. Parfois admirateur du stratège, il
reste un critique de son œuvre politique dans l'héritage
de la pensée platonicienne. Vivant à l'époque des em-
pereurs romains, il a parfois du mal à comprendre le
fonctionnement du Vesiècle av. J.-C. et que le peuple
puisse détenir réellement la souveraineté échappe à sa
comphension[8].
Les sources épigraphiques et archéologiques sont rares[9],
les ostraca au nom de Pérics, parfois écrits de mains
différentes, parfois de la même main indiquant ainsi qu'ils
ont été préparés à l'avance, apportent des enseignements
sur sa vie politique mouvementée.
2 Biographie
2.1 L'homme et ses relations
2.1.1 Famille
Selon la plupart des historiens, Pérics serait né vers 495
av. J.-C.[Note 1], dans le me de Cholargos juste au nord
d'Athènes[11].
Membre de la tribu acamantide, il a pour père Xanthippe,
un homme politique important qui s’est opposé à Miltiade
et qui, bien qu'ostracisé en 485-484 av. J.-C., est re-
venu dans la cité pour commander le contingent athé-
nien dans les victoires grecques au cap Mycale et à
1
22 BIOGRAPHIE
Sestos cinq ans plus tard[11]. Sa mère, Agaristé, est une
descendante de la puissante famille noble et controver-
sée des Alcméonides[12] et ses liens familiaux ont joué
un rôle crucial dans le démarrage de la carrière po-
litique de Xanthippe. Agaristé est l'arrière-petite-fille
du tyran de Sicyone,Clisthène, et la nièce du réfor-
mateur athénien également appeClisthène, un autre
Alcméonide[Note 2],[14]. Son frère aîné, Ariphron, nom-
mé comme le père de Xanthippe, n'a pas laissé de traces
d'activités politiques[12].
D'après Hérodote et Plutarque, Agaristé avait rêvé,
quelques nuits avant la naissance de Périclès, qu'elle
portait un lion[11],[15],[13]. Une interptation de cette
anecdote consire le lion comme symbole tradition-
nel de grandeur, mais l'histoire peut aussi faire allu-
sion à la taille inhabituelle du crâne de Périclès, qui est
devenue une cible de moquerie de la part des comé-
diens contemporains[16],[17] et l'origine du sobriquet de
« tête d'oignon »[18]. Plutarque présente cette malfor-
mation comme la raison pour laquelle Périclès est tou-
jours casqué mais c'est peu probable car le casque était le
symbole de sa fonction officielle de stratège qui incluait
notamment le commandement militaire, on le retrouve
sur de nombreux bustes de personnalités aux pouvoirs
similaires[19].
Au Vesiècle av. J.-C., la famille des Alcméonides est
en concurrence avec les autres familles eupatrides (aris-
tocratiques) de la cité, comme les Cimonides-Philaïdes
ou les Eumolpides. Ces familles nouent parfois des al-
liances matrimoniales mais elles se livrent également à de
féroces luttes politiques pour le pouvoir et le prestige, ces
luttes ont une grande importance sur la vie et la carrière
de Périclès[20].
2.1.2 Alliances matrimoniales
Périclès, suivant la coutume d'Athènes, a d'abord été ma-
rié à l'une de ses proches parentes : Dinomaque (Deino-
machè), petite-fille de Clisthène, avec qui il a deux fils,
Paralos et Xanthippe[21],[22]. Celle-ci avait déjà été ma-
riée à Hipponicos Ammon, membre d'une puissante fa-
mille ayant compté de nombreux prêtres. Périclès divorce
ensuite de Deinomachè et la remarie à Clinias, homme
politique et stratège particulièrement riche issu lui aussi
d'une famille prestigieuse. Loin d'être une source de dis-
corde, ces mariages renforcent les liens de solidarité entre
les diérents époux. À la mort de Clinias en 447 av. J.-C.
à la Bataille de Coronée, Périclès devient le tuteur de ses
enfants, dont Alcibiade[23].
2.1.3 Aspasie
Vers 445 av. J.-C., Périclès prend pour compagne une
métèque originaire de Milet,Aspasie[24]. Cette rela-
tion avec une étrangère suscite de nombreuses réactions,
même de Xanthippe, l'un des fils de Périclès qui a des am-
Statue d'Aspasie de Milet (vers 469 av. J.-C. - vers 406 av. J.-C.),
compagne de Périclès.
bitions politiques, qui n'hésite pas à critiquer son père[25].
Elle est pour les ennemis du stratège une occasion de le
dénigrer et même de l'attaquer en justice[26].
Bien qu'il soit certain qu'elle partage la vie et la mai-
son de Pérics, son statut n'est pas sûr, concubine ou
épouse officielle[27]. Ils ont ensemble au moins un fils,
Périclès le Jeune. Selon la tradition hostile à Pérics, As-
pasie est une taïre ; pour Aristophane et Hermippe le
Borgne, elle est même proxénète[28]. Cette hypothèse est
crédible mais elle est peut-être une calomnie inventée par
ses adversaires. La liberté sociale et de parole d'Aspasie,
sortant et discutant en public avec Périclès, a pu cho-
quer les Athéniens pour qui la place d'une bonne épouse
est au gynécée et contribuer à sa réputation de mœurs
licencieuses[26]. Pour d'autres auteurs anciens comme
Callias et Eschine, elle fut professeur de rhétorique[29].
Plutarque rapporte les deux faits et Danielle Jouanna, la
biographe moderne d'Aspasie, ne tranche pas tout en sou-
lignant que l'un n'exclut pas l'autre[30]. Platon et Xéno-
phon affirment qu'elle recevait Socrate et discutait philo-
sophie avec lui. Il est certain qu'elle est érudite, que son
influence politique et intellectuelle sur Périclès est réelle
et qu'elle participe à entretenir son cercle d'amis[31].
2.2 Carrière politique avant 431 av. J.-C. 3
2.1.4 Maîtres et amis
Bien qu'il soit destiné à faire de la politique, ses premières
années sont calmes et le jeune Pérics, plutôt introver-
ti, prend soin d'éviter les apparitions publiques, pfé-
rant consacrer son temps à ses études[32], ce que lui per-
mettent la noblesse et la richesse de sa famille. Il apprend
la musique des maîtres de son époque comme Damon
d'Athènes[33] qui restera son ami et son conseiller jusqu'à
ce qu'il soit ostracisé[34].
Il apprécie la compagnie des philosophes Protagoras,
Zénon d'Élée et Anaxagore. Ce dernier en particulier de-
vient un de ses amis proches et l'influence beaucoup[35].
La manière de penser et le charisme rhétorique de Pé-
rics, son flegme proverbial et sa maîtrise de soi se-
raient le résultat de l'influence d'Anaxagore[36],[37], de ses
idées sur la nécessité du calme émotionnel face aux dif-
ficultés et de son scepticisme à propos des phénomènes
divins[14]. En plus de ces penseurs, il entretient aussi un
cercle d’artistes et d'artisans comme Phidias,phale de
Syracuse ou Hippodamos. Ses relations personnelles avec
des étrangers de Syracuse, de Milet, de Corinthe et même
de Sparte sont parfois mal vues par les Athéniens et dé-
noncées par ses adversaires politiques[38].
2.1.5 Descendance
Sa plus grande tragédie personnelle est la mort de sa sœur
et de ses deux fils légitimes, Xanthippe et Paralos, touchés
par l'épimie de 430 av. J.-C. Juste avant sa mort, les
Athéniens permettent un changement dans la loi de 451
av. J.-C. qui fait de Périclès le Jeune, son dernier héritier
mais fils d'Aspasie de Milet et donc demi-Athénien (no-
thos), un citoyen de la cité et héritier légitime[39],[40], une
décision d'autant plus frappante que Périclès a proposé la
loi limitant la citoyenneté à ceux de filiation athénienne
des deux parents[41]. Pérics le Jeune sera lui aussi stra-
tège et participera à la bataille des Arginuses en 406 av.
J.-C. à la suite de laquelle il est exécuté[39].
2.2 Carrière politique avant 431 av. J.-C.
2.2.1 Entrée en politique
Au printemps de 472 av. J.-C., Périclès présente la tragé-
die grecque Les Perses d'Eschyle aux Grandes Dionysies
en tant que chorège, forme particulière de liturgie, dé-
montrant ainsi qu'il est l'un des hommes les plus riches
d'Athènes[42]. L'historien Simon Hornblower a fait va-
loir que la sélection par Pérics de cette tragédie, qui
présente une image nostalgique de la cébre victoire de
Thémistocle à la bataille de Salamine, montre que le
jeune politicien a appuyé Thémistocle contre son adver-
saire politique Cimon, dont la faction a réussi à faire os-
traciser Thémistocle peu de temps après[43].
Plutarque indique que Périclès est le « premier citoyen de
sa patrie » pendant quarante ans[44]. Si tel est le cas, il a
dû prendre une position importante au début des années
460 av. J.-C. Tout au long de cette période, il s’est eor-
cé de protéger sa vie privée et a essayé de se présenter
comme un modèle pour ses concitoyens. Né dans un mi-
lieu aristocratique, il désire trouver l'appui de l'ensemble
du peuple et cesse de fréquenter les banquets organisés
par les riches familles[45],[46].
En 463 av. J.-C., Périclès est le principal accusa-
teur de Cimon, le chef de la faction conservatrice
accusé de négliger les intérêts vitaux d'Athènes en
Macédoine[47]. Bien que Cimon soit acquitté, cette
confrontation prouve que l'adversaire politique majeur de
Périclès est vulnérable[48].
2.2.2 Ostracisme de Cimon
Autour de 461 av. J.-C., les responsables du par-
ti démocratique décident qu'il est temps de s’atta-
quer à l'Aréopage, un conseil traditionnel contrôlé par
l'aristocratie et autrefois l'organe le plus puissant dans
l'État[10]. Le chef du parti et mentor de Périclès,
Éphialtès, propose une forte réduction de ses pouvoirs
et sa proposition est adoptée par l'eccsia (l'assemblée
des citoyens)[45]. Cette réforme marque le début d'une
nouvelle ère de « démocratie radicale »[10]. Le parti dé-
mocratique devient progressivement dominant dans la vie
politique et Périclès semble disposé à suivre une politique
populiste afin de flatter le public. Selon Aristote, cette at-
titude peut s’expliquer par le fait que son principal ad-
versaire politique, Cimon, est riche et généreux et pou-
vait obtenir les faveurs du public en utilisant sa considé-
rable fortune personnelle[47]. L'historien Loren J. Samons
II fait cependant valoir que Périclès aurait eu suffisam-
ment de ressources pour faire une carrière politique avec
des moyens privés, s’il l'avait choisi[49].
En 461 av. J.-C., Périclès obtient l'élimination politique
de ce redoutable adversaire en utilisant l'« arme » de
l'ostracisme. L'accusation principale porte sur le fait que
Cimon a trahi sa ville en agissant comme un parti-
san de Sparte et qu'il est donc opposé aux intérêts des
Athéniens[50].
Selon Claude Mossé, au-delà d'un différend institutionnel
et philosophique, l'antagonisme entre Cimon et Pérics
s’inscrit dans une rivalité de personnes et de familles :
« le fils de Xanthippe sire infliger au fils de Miltiade
le même ostracisme que celui-ci avait infligé à celui-là »
vingt ans auparavant[51].
2.2.3 Dirigeant d'Athènes
L'assassinat d'Éphialtès en 461 av. J.-C. ouvre la voie à
Périclès pour consolider son autorité[Note 3]. En l'absence
d'opposition forte après l'ostracisme de Cimon, Périclès,
meneur incontestable du parti démocratique, devient de
facto le dirigeant de l'empire athénien. Il demeure au pou-
42 BIOGRAPHIE
voir presque sans interruption jusqu'à sa mort en 429 av.
J.-C.
Les réformes civiques Périclès adopte et promeut une
politique sociale populaire. Il propose d'abord un décret
qui permet aux pauvres d'assister aux pièces de théâtre
sans payer, l’État couvrant le coût de leur place. Il fait
ensuite abaisser le seuil de richesse exigé pour devenir
archontes en 458-457 av. J.-C.[54]. Sa mesure la plus im-
portante, populaire mais choquante aux yeux de l’aristo-
cratie, est la mise en place à partir de 454 av. J.-C. de
la misthophorie : une indemnité ou « misthos » (μισθός
/misthós, littéralement « gages, paie ») de deux oboles
par jour est versée à tous les citoyens qui servent comme
jurés dans l'liée (le tribunal populaire d'Athènes) puis-
qu'ils perdent les béfices d'une journée entière de tra-
vail. Cette indemnité, plus tard étendue aux autres magis-
trats et aux soldats, est ridicule pour les riches et intéres-
sante pour les pauvres : elle permet à tous de participer à
la démocratie[55].
Sa mesure la plus controversée est la loi de 451 av. J.-C.,
qui limite la citoyenneté aux personnes ayant une filiation
athénienne par leurs deux ascendances, alors que celle du
père suffisait auparavant[39],[56].
La guerre sur plusieurs fronts Articles détaillés :
volte d'Inaros et Première guerre du Péloponnèse.
Périclès fait ses premières manœuvres militaires pendant
la première guerre du Péloponnèse, causée en partie par
l'alliance d'Athènes avec Mégare et Argos et la réaction
subséquente de Sparte.
En 454 av. J.-C., il attaque Sicyone et l'Acarnanie où il
tente, sans succès, de prendre Œniadæ, avant de retour-
ner à Athènes[57],[58]. En 451 av. J.-C., Cimon serait re-
venu d'exil et aurait négocié une trêve de cinq ans avec
Sparte sur proposition de Pérics, un événement qui in-
diquerait un changement de sa stratégie politique[48]. Il
est possible qu'il ait pris conscience de l'importance de la
contribution de Cimon durant les conflits en cours contre
les Péloponnésiens et les Perses. Anthony J. Podlecki fait
cependant valoir que ce prétendu changement de position
est une invention des auteurs anciens afin de « donner une
vue tendancieuse de la sournoiserie de Périclès[59] ».
Plutarque affirme que Cimon a conclu un accord de par-
tage du pouvoir avec ses adversaires, selon lequel Périclès
s’occupe des affaires intérieures tandis que Cimon est le
chef de l'armée, faisant campagne à l'étranger[53]. S'il a
réellement été conclu, ce marché constitue une conces-
sion de la part de Périclès, mettant en doute ses qualités
de stratège. Donald Kagan estime que Cimon s’est adapté
aux nouvelles conditions et a fait la promotion d'un ma-
riage politique entre les démocrates et les aristocrates[60].
Au milieu des années 450 av. J.-C., les Athéniens ap-
puient sans succès une révolte égyptienne contre la Perse,
ce qui conduit à un long sge d'une forteresse perse dans
le delta du Nil. La campagne aboutit à une catastrophe
avec la défaite et la destruction de leurs forces[61]. En
451-450 av. J.-C., les Athéniens envoient des troupes à
Chypre. Cimon vainc les Perses à Salamine de Chypre
mais meurt de maladie en 449 av. J.-C. Pérics au-
rait été à l'initiative des deux expéditions en Égypte et à
Chypre[62], bien que certains chercheurs, tels que Karl Ju-
lius Beloch, fassent valoir que l'envoi d'une grande flotte
est conforme à l'esprit de la politique de Cimon[63].
De cette période complexe, l'existence de la paix de Cal-
lias, traité qui aurait mis fin aux hostilités entre les Grecs
et les Perses, est vivement contestée et ses détails et sa
négociation sont tout aussi ambigus[64]. L'historien Ernst
Badian écrit qu'une paix entre Athènes et la Perse a été
ratifiée en 463 av. J.-C. (faisant des interventions athé-
niennes en Égypte et à Chypre des violations de cette
paix) et a été renégociée à la fin de la campagne à
Chypre, entrant en vigueur en 449-448 av. J.-C.[65]. John
Fine, d'un autre côté, suggère que la première paix entre
Athènes et la Perse a été conclue en 450-449 av. J.-C. à
la suite du calcul stratégique de Périclès que le conflit en
cours avec la Perse porte atteinte à la capacité d'Athènes
d'étendre son influence en Grèce et en mer Égée[64]. Ka-
gan estime qu'il a eu recours à Callias, beau-frère de Ci-
mon, en tant que symbole de l'unité et l'a employé à plu-
sieurs reprises pour négocier des accords importants[66].
Au printemps de 449 av. J.-C., Périclès propose un dé-
cret qui conduit à une réunion (un « congrès ») de tous
les États grecs, afin d'examiner la question de la recons-
truction des temples détruits par les Perses. Le congrès
échoue en raison de la position de Sparte mais les vé-
ritables intentions de Périclès restent floues[67]. Certains
historiens croient qu'il a voulu mettre en place rapi-
dement une sorte de confédération de toutes les cités
grecques, d'autres qu'il a voulu faire valoir la prééminence
athénienne[68]. Selon Terry Buckley, l'objectif du décret
est un nouveau mandat pour la ligue de Délos et pour la
collecte du phoros (tribut)[69].
Pendant la deuxième guerre sacrée (448 av. J.-C.), Pé-
rics conduit l'armée athénienne contre Delphes et res-
taure la souveraineté de la Phocide sur l'oracle[70],[71].
En 447 av. J.-C., il conduit « mille colons athéniens »
en Chersonèse de Thrace pour augmenter la présence
grecque dans la région. Il souhaite ainsi créer une « bar-
rière » qui s’opposera « aux incursions des Thraces répan-
dus dans le voisinage de la Chersonèse » et aux attaques
de brigands qui demeurent dans la région. Son eort met
fin à des « guerres continuelles et pénibles » que doit sou-
tenir la région[14],[72]. À ce moment cependant, Athènes
est sérieusement contestée par un certain nombre de ré-
voltes parmi ses « alliés ». En 447 av. J.-C., les oligarques
de Thèbes conspirent contre la faction démocratique. Les
Athéniens demandent leur extradition immédiate, mais,
après la bataille de Coronée, Pérics est forcé d'admettre
la perte de la Béotie afin de récupérer ses soldats captu-
rés pendant cette bataille[32]. La Béotie dans des mains
2.2 Carrière politique avant 431 av. J.-C. 5
Buste de Périclès d'après une copie de celui de Crésilas.Altes
Museum, Berlin.
ennemies, la Phocide et la Locride sont devenues inte-
nables et tombent rapidement sous le contrôle des oli-
garques hostiles[73].
En 446 av. J.-C., un soulèvement plus dangereux éclate :
l'Eubée et gare se révoltent. Périclès passe en Eubée
avec ses troupes mais est forcé de revenir quand l'armée
spartiate envahit l'Attique. Grâce à la corruption et aux
négociations, il désamorce la menace imminente et les
Spartiates rentrent chez eux[74]. Lorsque la gestion des de-
niers publics de Périclès est ensuite vériée, une dépense
de 10 talents n'est pas suffisamment justifiée, puisque les
documents officiels mentionnent que l'argent a été dépen-
sé à des « fins très graves ». Néanmoins, ces fins, à savoir
la corruption, sont aussi évidentes pour les vérificateurs
qui ont approuvé les dépenses sans ingérence officielle
et sans même enquêter sur ce mystère[75]. La menace
spartiate disparue, Périclès retourne en Eubée pour écra-
ser la révolte. Ensuite, il inflige un châtiment rigoureux
aux propriétaires fonciers de Chalcis dont les propriétés
sont confisquées. Les habitants d'Histiée, qui ont massa-
cré l'équipage d'une trière athénienne, sont expulsés de
leur territoire et remplacés par des colons athéniens[76].
La crise se termine officiellement par la paix de Trente
Ans (hiver 446-445 av. J.-C.) qui voit Athènes renoncer
à la plupart de ses possessions sur le « continent » grec ac-
quises depuis 460 av. J.-C., Athènes et Sparte convenant
de ne pas attaquer leurs alliés réciproques[73].
Mise au pas des conservateurs En 444 av. J.-C.,
les factions conservatrice et démocratique s’affrontent
dans une lutte acharnée. L'ambitieux chef des conserva-
teurs, Thucydide[Note 4], accuse Périclès de gaspillage, cri-
tiquant la façon dont il a dépensé l'argent pour le plan de
construction en cours. Thucydide réussit dans un premier
temps à convaincre une majorité à l'ecclésia, mais quand
Périclès prend la parole, il remet les conservateurs en mi-
norité. Il l'emporte en proposant de rembourser la ville
de tous les frais sur ses propres deniers, en échange de
quoi il dédicacerait les monuments en son propre nom[77].
Sa position est saluée par des applaudissements et Thu-
cydide subit une défaite inattendue. En 442 av. J.-C.,
l'ecclésia ostracise Thucydide pendant dix ans et Périclès
est une fois de plus le maître incontesté de l'arène poli-
tique athénienne[44].
Le Parthénon, pièce maîtresse de l'Acropole d'Athènes, en 2008.
De l'alliance à l'empire Périclès veut consolider
l'hégémonie d'Athènes sur ses alliés et assurer sa préémi-
nence en Grèce. Le processus par lequel la Ligue de Dé-
los se transforme en un empire athénien s’amorce bien
avant Périclès, plusieurs membres de la ligue ont choisi
de payer un tribut ou phoros (φόρος/phóros) à Athènes
plutôt que de fournir des équipages et des navires pour les
actions communes[78]. Néanmoins, c'est bien lui qui par-
achève cette évolution[79]. C'est paradoxalement la défaite
en Égypte et la contestation par plusieurs cités, comme
Milet et Érythrée qui renforce la pression athénienne sur
ses alliés[80]. Pour les museler et pour prendre le contrôle
des finances de l'alliance, Périclès fait transférer le tré-
sor de la ligue de la ville de Délos à Athènes en 454-
453 av. J.-C[81]. En 450-449 av. J.-C., les révoltes de
Milet et d'Érythrée sont réprimées et Athènes rétablit sa
domination[82]. Vers 447 av. J.-C., un décret semble avoir
imposé la monnaie d'argent, les poids et les mesures athé-
niens à l'ensemble des alliés[69], précisant que l'excédent
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