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En l’espèce, la Cour doit aussi avoir égard au lien existant entre la personne qui a eu
recours à une FIV et les embryons ainsi conçus, et qui tient au fait que ceux-ci
renferment le patrimoine génétique de la personne en question et représentent à ce titre
une partie constitutive de celle-ci et de son identité biologique.
Ainsi, la possibilité pour la requérante d’exercer un choix conscient et réfléchi quant au
sort à réserver à ses embryons touche un aspect intime de sa vie personnelle et relève à
ce titre de son droit à l’autodétermination. L’article 8 de la Convention, sous l’angle du
droit au respect de la vie privée, trouve donc à s’appliquer en l’espèce.
b) Fond – L’interdiction faite par la loi de donner à la recherche scientifique des
embryons issus d’une FIV non destinés à l’implantation constitue une ingérence dans le
droit de la requérante au respect de sa vie privée. À l’époque où la requérante a eu
recours à une FIV, la question du don des embryons non implantés issus de cette
technique n’était pas réglementée. Par conséquent, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi
litigieuse, il n’était nullement interdit à la requérante de donner ses embryons à la
recherche scientifique.
La Cour admet que la « protection de la potentialité de vie dont l’embryon est porteur »
peut être rattachée au but de protection de la morale et des droits et libertés d’autrui.
Toutefois, cela n’implique aucun jugement de la Cour sur le point de savoir si le mot
« autrui » englobe l’embryon humain, au sens où cette notion est entendue par le
Gouvernement, à savoir que, dans l’ordre juridique italien, l’embryon humain est
considéré comme un sujet de droit devant bénéficier du respect dû à la dignité humaine.
Non dénué d’importance, le droit de donner des embryons à la recherche scientifique
invoqué par la requérante ne fait pas partie du noyau dur des droits protégés par
l’article 8 de la Convention ne portant pas sur un aspect particulièrement important de
l’existence et de l’identité de l’intéressée. En conséquence, et eu égard aux principes
dégagés par la jurisprudence de la Cour, il y a lieu d’accorder à l’État défendeur une
ample marge d’appréciation en l’espèce.
De plus, la question du don d’embryons non destinés à l’implantation suscite des
interrogations délicates d’ordre moral et éthique. Il n’existe en la matière aucun
consensus européen sachant que certains États autorisent la recherche sur les lignées
cellulaires embryonnaires humaines, d’autres l’interdisent expressément et d’autres
n’autorisent les recherches de ce genre que sous certaines conditions strictes, exigeant
par exemple qu’elles visent à protéger la santé de l’embryon ou qu’elles utilisent des
lignées cellulaires importées de l’étranger.
Les instruments internationaux confirment que les autorités nationales jouissent d’une
ample marge de discrétion pour adopter des législations restrictives lorsque la
destruction d’embryons humains est en jeu. Les limites imposées au niveau européen
visent plutôt à freiner les excès dans ce domaine.
L’élaboration de la loi nationale litigieuse avait donné lieu à un important débat qui avait
tenu compte des différentes opinions et des questions scientifiques et éthiques existant
en la matière. Cette dernière avait fait l’objet de plusieurs référendums, qui ont échoué
faute de quorum. Ainsi, lors du processus d’élaboration de la loi litigieuse, le législateur
avait déjà tenu compte des différents intérêts ici en cause, notamment celui de l’État à
protéger l’embryon et celui des personnes concernées à exercer leur droit à
l’autodétermination individuelle sous la forme d’un don de leurs embryons à la
recherche.
La requérante allègue que la législation italienne relative à la procréation médicalement
assistée est incohérente, en vue de démontrer le caractère disproportionné de
l’ingérence dont elle se plaint. La Cour n’a point pour tâche d’analyser in abstracto la