UISG - Bulletin Numéro 144, 2010
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Passer les frontières en compagnie de Jésus de Nazareth
Toni Catalá, SJ
« Aujourd’hui, je me demande quelles sont pour moi les ‘nations’.
Nous avons ici, toutes les nations géographiques, mais peut-être
existe-t-il d’autres nations, d’autres communautés qui ne sont pas
géographiques mais humaines et qui réclament notre assistance : les
pauvres, les marginaux, les exclus. Dans ce monde globalisé le nombre
augmente de ceux qui sont exclus par tous, de ceux qui sont humiliés
parce que dans la société il n’y a de place que pour les grands, pas
pour les petits. Peut-être tous ces gens défavorisés, manipulés sont-
ils pour nous ces ‘nations’, des nations qui ont besoin du prophète,
du message de Dieu. » (P. Adolfo Nicolás lors de l’Eucharistie d’action
de grâces)
L’invitation à rejoindre la frontière est toujours un appel à sortir du
connu, à vaincre nos paresses et nos routines, à se laisser interroger par ce
que nous percevons comme une menace, à écouter les craintes susceptibles
de nous paralyser ; c’est une invitation à se tromper et à se corriger, c’est un
exercice de liberté et de courage, c’est rendre vraie la Bonne Nouvelle de
Jésus. Avec Jésus, je vais parcourir l’Évangile pour qu’il éclaire la vie
consacrée.
a) « Simon, j’ai quelque chose à te dire… »
« Si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme…, et ce
qu’elle est… ‘Simon, j’ai quelque chose à te dire... » Lc 7,36-50.
Jésus se trouve dans la maison de Simon le pharisien, et voici qu’entre
« la pécheresse de la ville ». Deux regards, deux perceptions différentes de
la réalité qu’ils ont devant eux. Le pharisien se trouve dans l’incapacité
radicale de voir en cette femme blessée dans sa dignité, une créature du Dieu
de la vie : il a une attitude de mépris et d’exclusion. Simon est incapable de
franchir la frontière qui délimite et définit les bons et les mauvais
comportements ; il est incapable, il est aveuglé, il est installé dans la bonne
opinion de sa relation avec Dieu ; il est sûr de lui-même, certain de percevoir
l’humain dans sa dimension la plus affligeante: la créature dés-équilibrée,
humiliée, qui a perdu le nord, une « pécheresse ». Jésus franchit la frontière,
il voit une femme qui a besoin d’être remise debout mais qui est en même
temps capable de manifester quelque chose d’aussi humain que la
reconnaissance et la recherche du contact corporel ; elle a besoin de s’attacher
à un autre être humain pour ne pas sombrer complètement : « elle embrasse
les pieds de Jésus », s’accroche à un fil de vie comme à une possibilité de
salut ; et la réaction de Jésus est de soulager, de pardonner, de reconstruire,
de guérir.
« Vie consacrée, j’ai quelque chose à te dire » : Comment vois-tu les