Et si « moins » était synonyme de « plus » ? Les effets des stratégies low-cost sur la valeur perçue d’une offre Patricia COUTELLE-BRILLET Maître de Conférences IAE de Tours - Université de Tours CERMAT [email protected] Arnaud RIVIERE Maître de Conférences IAE de Tours - Université de Tours CERMAT [email protected] Et si « moins » était synonyme de « plus » ? Les effets des stratégies low-cost sur la valeur perçue d’une offre Résumé : Face au rôle déterminant de la valeur perçue dans le comportement des consommateurs, et dans un contexte de succès croissant des biens simplifiés à bas coûts, cet article examine l’impact des stratégies low-cost sur la valorisation d’une offre. Les résultats d’une étude qualitative démontrent qu’au-delà de la réduction largement perçue des sacrifices monétaires, ces politiques marketing peuvent exercer des effets parfois plus ambivalents sur la perception des sacrifices non-monétaires ainsi que sur l’appréciation des valeurs fonctionnelle, émotionnelle, sociale et éthique de l’offre. Par ailleurs, il est constaté que le degré de valorisation d’un produit low-cost est susceptible de varier selon certaines caractéristiques liées au consommateur, au produit et au contexte d’achat / de consommation. Mots-clés : low-cost, valeur, bénéfice, sacrifice, consommateur. Is « less » synonymous with « more »? The effects of low-cost strategies on the perceived value of an offer Abstract: Considering the influence of perceived value on consumer behavior and the increasing success of low-cost products, this article examines the impact of low-cost strategies on the valuation of an offer. The results of an exploratory qualitative study demonstrate that beyond reduction widely perceived of monetary sacrifices, these marketing policies can lead to effects sometimes more ambivalent on the perception of non-monetary sacrifices and on the assessment of functional, emotional, social and ethical product values. Furthermore, the value of low-cost offer seems to be affected by characteristics related to the consumer, the product and the buying / consumption context. Key-words: low-cost, value, benefit, sacrifice, consumer. Et si « moins » était synonyme de « plus » ? Les effets des stratégies low-cost sur la valeur perçue d’une offre Introduction Comment créer plus de valeur pour les clients ? : voici une question cruciale à laquelle de nombreux responsables marketing cherchent à répondre afin d’acquérir un avantage compétitif et pouvoir, ainsi, affronter un environnement fortement concurrentiel. Parmi les moyens d’action envisageables, des auteurs ont souligné la pertinence potentielle des stratégies d’enrichissement de produits (Carpenter, Glazer et Nakamoto, 1994 ; Nowlis et Simonson, 1996 ; Brown et Carpenter, 2000 ; Mukherjee et Hoyer, 2001 ; Thompson, Hamilton et Rust, 2005 ; Rivière, 2009). Ainsi, pendant longtemps, profitant de l’évolution continue des technologies, les fabricants de téléphones, les constructeurs automobiles, ou bien encore les industriels du secteur informatique ont cherché à enrichir continuellement le contenu de leurs produits en proposant toujours plus de nouvelles fonctionnalités innovantes à leurs clients. Le cas des téléphones portables, devenus en quelques années de véritables appareils multimédia, illustre bien ce phénomène de sophistication fonctionnelle croissante. Toutefois, dans un contexte de crise du pouvoir d’achat, et comme en témoigne la commercialisation très remarquée de la Logan en 2005, une tendance opposée s’est récemment développée sur les marchés : le low-cost. Cette dernière consiste à proposer des produits dénués de sophistication mais commercialisés à des prix durablement avantageux, grâce à une réduction significative du coût de revient. Ce modèle économique se distingue clairement d’autres pratiques commerciales (tels les prix promotionnels, les prix d’appel, les soldes) qui recherchent seulement une baisse occasionnelle des prix, sans pour autant s’appuyer sur une baisse des coûts. Depuis plusieurs années, l’importance dans les pays développés de l’effet « prix bas » et de l’intérêt des individus pour les produits simplifiés 2 (phénomène de « loganisation ») ne se dément pas (Croué, 2006 ; Aurier et Zollinger, 2009). Les concepts low-cost représentent, aujourd’hui, de réelles alternatives de consommation pour de nombreux acheteurs confrontés à une baisse perçue de leur pouvoir d’achat. Cet engouement pour les produits basiques à moindre coût traduit un phénomène de déconsommation, reflet d’un comportement de résistance des consommateurs aux propositions et sollicitations commerciales des entreprises (Roux, 2007 ; Séré de Lanauze et Siadou-Martin, 2010). Malgré son enjeu managérial, le low-cost a été peu exploré dans la littérature en marketing (Aurier et Zollinger, 2009). En particulier, bien que la valeur soit au cœur des préoccupations des chercheurs, l’impact de ces politiques à bas coûts n’a jamais été étudié au regard de la valorisation d’un bien. La problématique de ce travail peut donc être formulée de la manière suivante : quels sont les effets des stratégies low-cost sur la valeur perçue d’une offre ? Dans ce cadre, cet article se propose, au travers d’une revue de la littérature, de préciser la notion de valeur perçue, de souligner l’adéquation des offres low-cost aux attentes des consommateurs et enfin, de mettre en évidence l’importance d’une meilleure compréhension des effets de ces politiques marketing sur la valorisation d’un bien. Puis, après avoir exposé la méthodologie de l’étude qualitative, les principaux résultats sont présentés. Ces derniers permettent d’apprécier les effets du low-cost sur chaque composante de la valeur globale, et d’identifier les variables susceptibles d’influencer la valorisation d’une offre à bas coûts. 1. Les stratégies low-cost, sources de création de valeur ? Ces dernières années, les chercheurs ont témoigné d’un vif intérêt pour l’étude de la valeur perçue. Du côté des entreprises, les gestionnaires, conscients d’une évolution profonde du comportement des consommateurs, ont manifesté une attention croissante pour les offres simplifiées à bas coûts. Face à ce double constat, il semble essentiel de considérer ces deux 3 préoccupations et de s’interroger, ainsi, sur les effets d’une politique low-cost au regard de la valeur perçue d’une offre. 1.1 La notion de valeur perçue en marketing Le rôle de la valeur perçue dans le comportement du consommateur a souvent été souligné dans la littérature (Zeithaml, 1988 ; Monroe, 1990 ; Dodds, Monroe et Grewal, 1991 ; Grewal, Monroe et Krishnan, 1998 ; Parasuraman et Grewal, 2000). Ainsi, pour bon nombre d’observateurs, la création de valeur est la clé de réussite des organisations (Woodruff, 1997). Traditionnellement, la valeur perçue d’une offre est abordée selon une vision dichotomique, articulée autour des notions de valeur d’achat et de valeur de consommation (tableau 1). Elle correspond à l’évaluation globale de l’utilité d’un produit fondée sur Valeur d’achat les perceptions de ce qui est reçu (bénéfices) et donné (sacrifices). (perspective Toutefois, elle a souvent été réduite à la seule appréciation du ratio globale) qualité/prix. Elle se manifeste avant l’achat et s’inscrit dans une vision rationnelle, transactionnelle, cognitive et objective (Zeithaml, 1988). Elle traduit une préférence relative, caractérisant l’expérience d’interaction Valeur de entre un sujet et un objet. Elle ne précède pas mais résulte de l’expérience consommation de consommation/possession d’un bien. Elle s’inscrit dans une approche (perspective affective et expérientielle, et se forme à partir de diverses composantes analytique) (vision multidimensionnelle de la valeur) (Holbrook, 1994, 1999). Tableau 1 : L’approche traditionnelle de la valeur perçue en marketing Toutefois, au vu des limites relatives à cette conception duale de la valeur (pour une synthèse, voir Rivière, 2009), une approche alternative s’est progressivement développée (Amraoui, 4 2005). Celle-ci propose d’adopter une voie intermédiaire ou conciliatrice en profitant, à la fois, du cadre d’analyse structurant de la valeur d’achat (bénéfices / coûts), mais aussi, de la richesse des composantes de la valeur de consommation. Plusieurs travaux peuvent être rattachés à cette conceptualisation de la valeur (Lai, 1995 ; Sweeney et Soutar, 2001 ; Aurier, Evrard et N’Goala, 2004). Notamment, Aurier, Evrard et N’Goala (2004) considèrent que les composantes de la valeur de consommation contribuent à déterminer une utilité globale vue comme une somme de bénéfices reçus (ou à recevoir) qui, mise en balance avec la somme des sacrifices consentis (ou à consentir) aboutirait à un jugement de valeur globale. La diversité de ces sources de valeur (bénéfices perçus) peut s’apprécier à partir du cadre d’analyse d’Holbrook (1994, 1999), amenant ainsi à distinguer quatre formes principales de valeur (tableau 2). Extrinsèque Intrinsèque Valeur fonctionnelle Valeur émotionnelle Orientée L’utilité provient de la qualité perçue L’utilité provient de sensations ou vers soi et des performances du produit d’états sentimentaux et affectifs qu’un produit est susceptible de provoquer Valeur sociale Valeur éthique L’utilité provient de l’association du La valeur éthique peut reposer sur la bien avec une classe sociale, un statut vertu, la justice ou la morale Orientée vers les autres social ou un groupe social spécifique Tableau 2 : Les sources de valeur (adapté d’Holbrook, 1994, 1999 et d’Aurier, Evrard et N’Goala, 2004) 5 Concernant les sacrifices perçus, et à partir des travaux de Murphy et Enis (1986), il est essentiel de distinguer les sacrifices monétaires (le prix d’achat ainsi que les autres prix « annexes ») et les sacrifices non-monétaires (temps, effort, risque, coûts psychologiques). 1.2 Les stratégies low-cost A l’inverse du besoin de sophistication ressenti par certains individus, de plus en plus d’acheteurs recherchent une offre simplifiée à moindre coût. Pour répondre à leurs attentes, les entreprises ont développé des offres low-cost. Celles-ci trouvent un écho attentif sur les marchés en raison d’une évolution profonde du comportement des consommateurs. • L’émergence d’un nouveau comportement d’achat et de consommation La crise économique et financière, engendrant une baisse perçue du pouvoir d’achat, a accéléré l’émergence de comportements de déconsommation consistant, pour les individus, à réduire volontairement leur consommation de certains produits. Déconsommer signifierait ainsi moins, mieux consommer ou consommer moins cher, et impliquerait un recentrage de la consommation sur l’essentiel, avec à la clé une satisfaction accrue de l’acheteur. Parmi les motivations évoquées fréquemment par les consommateurs pour expliquer leurs pratiques de déconsommation, il y a la volonté de faire des économies et de se focaliser sur l’utile (Séré de Lanauze et Siadou-Martin, 2010). Cette notion de déconsommation est à relier à celle de wise shopping, qui consiste pour les individus à adopter un comportement actif, réfléchi et prudent dans leurs achats (Djelassi, Collin-Lachaud et Odou, 2009). Il s’agit, plus précisément, d’une démarche visant à maîtriser les dépenses en utilisant différentes tactiques destinées à restreindre les achats et à diminuer le coût des produits acquis. Le wise shopping est à distinguer du smart shopping1. En effet, alors que le smart shopping consiste à retirer du plaisir dans la recherche de « bonnes affaires », c'est-à-dire des offres proposant une remise 1 Pour une comparaison plus approfondie entre le smart-shopping et le wise-shopping, voir annexe 1. 6 tarifaire le plus souvent temporaire (promotions), le wise shopping s’inscrit dans une volonté de maîtriser durablement ses dépenses en achetant des produits moins chers et dénués de toute sophistication superflue. Dans le cadre du wise shopping, les achats sont revus de manière simplifiée de façon à n’acheter que ce dont on a réellement besoin. • Le low-cost : une réponse des entreprises aux nouvelles attentes des consommateurs Face aux évolutions des comportements d’achat et de consommation, bon nombre d’entreprises ont adopté des stratégies low-cost permettant, grâce à une simplification et une uniformisation de l’offre, de diminuer durablement les coûts de production et ainsi de proposer des prix réellement attractifs. Cette réduction des coûts a également été favorisée par le progrès des technologies d’information et de télécommunication (permettant d’améliorer la rationalisation des processus de production et de distribution) et par le phénomène de multinationalisation (ouvrant l’accès à une main-d’œuvre moins chère). Lendrevie, Lévy et Lindon (2009) définissent ainsi le low-cost comme une stratégie d’entreprise qui consiste à proposer une offre réduite à l’essentiel mais de qualité, à un prix de vente fixé de façon permanente à un niveau très bas, grâce à une réduction drastique des coûts de toute nature. La pratique du low-cost s’inscrit au sein des grandes options stratégiques qu’une entreprise peut adopter en vue d’acquérir un avantage concurrentiel. En effet, dans la littérature en management, il est fréquent de distinguer les stratégies proposant une offre similaire à celles des concurrents mais à un prix inférieur (stratégie de domination par les coûts / stratégie de volume), et les stratégies proposant une offre différente, qu’elle soit supérieure mais parfois plus coûteuse (stratégie de différenciation « vers le haut » / stratégie d’enrichissement) ou inférieure mais moins chère (stratégie de différenciation « vers le bas » ou d’épuration). Les politiques low-cost appartiennent à cette dernière catégorie de stratégies. Dans un contexte de crise économique et de tension budgétaire pour les ménages, le low-cost apparaît plus que jamais comme un marché porteur, s’étendant à un grand nombre de 7 secteurs d’activité : l’aérien (exemples de Ryanair, d’Easyjet), l’automobile (exemple de Logan de Renault), la distribution alimentaire (avec la montée en puissance des harddiscounters : LIDL, Leader Price, Aldi, ED), l’habitat (exemple des Maisons ELIKA de Bouygues Immobilier), la téléphonie (exemple du BicPhone de Bic et Orange) (…). 1.3 Low-cost et valeur perçue Malgré l’importance démontrée par les chercheurs de la notion de valeur perçue en marketing, les effets des stratégies low-cost n’ont jamais fait l’objet d’une étude spécifique au regard du degré de valorisation d’une offre. Outre le rôle essentiel de la valeur, plusieurs autres raisons peuvent inciter à explorer davantage cette piste de recherche. Tout d’abord, des investigations ont été menées récemment afin d’examiner l’impact des stratégies d’enrichissement de produits sur la valeur perçue d’un bien (Rivière, 2009). Ces travaux conduisent naturellement à s’interroger sur les effets des stratégies inverses qui consistent à simplifier l’offre en vue d’afficher un prix moindre pour les clients. De même, les comportements de déconsommation ont fait l’objet d’une analyse sous l’angle de la notion de valeur perçue (Séré de Lanauze et Siadou-Martin, 2010). Ces auteurs démontrent que de tels comportements peuvent s’appréhender comme une solution apportant une valeur supérieure (valeurs utilitaire, hédonique, sociale, spirituelle) : au-delà des économies monétaires, la valeur ajoutée peut provenir d’éléments moins tangibles. Toutefois, même si le low-cost peut s’inscrire dans cette tendance à la déconsommation, cette dernière présente un aspect beaucoup plus général, englobant ainsi un ensemble de réalités telles que la volonté des consommateurs de ne plus acheter certains produits (supprimer un produit de sa consommation ou le faire soi-même), d’acheter moins (réduire les quantités, diminuer la fréquence, moins jeter), d’acheter différemment (acheter moins cher, acheter en grosses quantités puis stocker, acheter des produits plus sains), d’acheter autre chose (remplacer le 8 produit par un autre). Dans le prolongement des travaux de Séré de Lanauze et Siadou-Martin (2010), il semble particulièrement intéressant de considérer à nouveau la notion de valeur, et de se focaliser sur les effets d’une pratique spécifique qui vise à répondre à une des manifestations possibles du comportement de déconsommation : le low-cost. Par ailleurs, l’Observatoire Cetelem a publié une enquête en 2010 relative à la perception du low-cost auprès des consommateurs européens (annexe 2). Il ressort de cette étude que le lowcost bénéficie d’une image clairement positive auprès des consommateurs. Plus précisément, il semble que les offres simplifiées à bas coûts puissent procurer aux individus des bénéfices autres que les seuls avantages économiques attendus. Plusieurs auteurs, se livrant à quelques réflexions sur ce sujet, abondent en ce sens. Notamment, concernant la Logan, Croué (2006) estime que ce véhicule répond à une double motivation sur les marchés développés : rationnelle / utilitariste (volonté de ne pas dépenser trop tout en ayant un produit de bonne qualité) et plaisir / ludique. De même, Kapferer (2004) déclare que « derrière le prix, le hard discount est un combat pour des valeurs : celui de la simplification de la vie, de la rationalisation des choix, d’un commerce plus humain, de la fin du gigantisme, de la proximité tout simplement ». Toutes ces raisons soulignent ainsi la nécessité d’explorer davantage la valorisation d’une offre low-cost. 2. Une approche exploratoire des effets des stratégies low-cost sur la valeur perçue d’une offre Afin de mieux comprendre les effets des stratégies low-cost sur la valeur perçue d’une offre, une étude qualitative a été réalisée. Après avoir détaillé les modalités méthodologiques de cette étude, les principaux résultats obtenus sont présentés et discutés. 9 2.1. Une méthodologie qualitative Une étude qualitative a été menée afin d’explorer la nature de la valorisation d’une offre lowcost et ainsi, identifier les sources potentielles de valeur. Par ailleurs, les conditions de création de valeur d’une offre simplifiée à bas coûts ont été examinées (en termes de nature de produit, de contexte d’achat / de consommation, et de profil de consommateurs). Vingt-et-un entretiens semi-directifs ont été conduits en face à face auprès d’une population hétérogène (au regard de l’âge, du genre, de la CSP) (annexe 3). Ces entretiens ont été menés en deux temps. Tout d’abord, les interviewés ont décrit leur comportement d’achat de manière générale (critères de choix d’un bien / service, attitudes et comportements à l’égard des principales stratégies de produit : enrichissement de biens, innovation, low-cost…). Durant cette première étape, nous avons privilégié un mode d’entretien de type phénoménologique, c’est-à-dire favorisant l’expression et le souvenir d’évènements antérieurs, d’expériences vécues associées à des émotions. Puis, dans un second temps, les individus ont été mis en situation de manière à décrire leur processus d’achat spécifique concernant des produits variés qui leur étaient soumis (voiture, voyage, ordinateur, courses alimentaires, shampooing…). Dans ce cadre, ils étaient notamment amenés à s’exprimer sur l’intérêt que pouvaient représenter pour eux des offres low-cost dans ces catégories de biens. Le nombre d’entretiens a été défini selon le principe de saturation sémantique. Les données qualitatives ont été traitées par analyse de contenu thématique. La comparaison des deux étapes a permis de mettre en évidence leur complémentarité car des opinions tranchées exprimées lors de la première étape se sont révélées plus réfléchies au cours des mises en situation (deuxième étape). 2 .2. Résultats et discussion 10 L’analyse des résultats de cette étude montre, dans un premier temps, les incidences positives du low-cost en termes de sacrifices monétaires perçus et les conséquences plus négatives au regard des composantes de la valeur (bénéfices perçus) et des sacrifices non-monétaires. Toutefois, des items positifs, concernant les différentes facettes de la valeur (fonctionnelle, émotionnelle, sociale, éthique) peuvent être mis en évidence dans le discours de certains répondants, prouvant ainsi la possible diversité des sources de valeur du low-cost. Les résultats montrent également des similitudes en termes de valeur créée, entre les stratégies low-cost et les stratégies d’enrichissement de produits. Enfin, des variables pouvant influencer la valorisation d’une offre low-cost sont mises en exergue : ces dernières concernent certaines caractéristiques liées au produit, au consommateur et au contexte d’achat / de consommation. • Et si l’effet positif du low-cost se limitait au seul avantage monétaire perçu ? La stratégie low-cost est bien une stratégie gagnante en termes économiques pour les consommateurs interrogés (20 interviewés sur 20 l’ont souligné). Cette stratégie gagnante s’exprime au travers d’avantages monétaires associés aux produits (Ind 1 : Je fais toujours mes petits calculs de comparaison et chez Aldi les prix sont moins élevés), au budget (Ind 13 : faire des économies sur mon budget, c’est le principal avantage), ou à la perception d’une bonne affaire (Ind 11 : « Le low-cost, c’est une offre moins chère que ce qu’elle vaut réellement, une bonne affaire en quelque sorte, un prix pour lequel le consommateur ne se fait pas avoir »). Toutefois, la réalité de cet avantage économique est, à quelques reprises, remis en cause : Ind 18 « La fameuse Logan, en fait c’est une grosse arnaque… la Logan, tu l’as sors comme une voiture étant à bas prix mais en réalité, elle est à bas prix à partir du moment où tu ne prends aucune option. Dès que tu commences à prendre des options, elle est plus chère que certaines voitures avec déjà des options intégrées » 11 Malgré tout, la perception d’économies pouvant être réalisées grâce au low-cost peut entraîner trois conséquences potentielles sur le comportement des consommateurs : se laisser convaincre plus facilement d’accéder à des offres jugées superflues, consommer plus fréquemment la même offre, ou consommer d’autres produits / services grâce aux gains monétaires obtenus : Ind 15 : « (à propos du low-cost) Ca permet de faire des dépenses qu’on n’aurait pas faites ou on aurait plus réfléchi pour les faire. Ca permet de faire des achats superflus » Ind 1 : « Je suis bien contente parce que je peux acheter autre chose à côté avec les économies, pour ma fille » Ind 12 : « Les compagnies low-cost me conviennent tout à fait et me permettent de voyager davantage que si ces compagnies low-cost n’existaient pas. Je trouve ça vraiment bien » D’une certaine manière, en permettant de consommer plus et / ou d’acquérir des offres « moins essentielles », le low-cost peut ainsi ne pas toujours s’inscrire, de manière systématique, dans une logique de déconsommation. Les conséquences comportementales, évoquées précédemment, sont à mettre en évidence par les managers commercialisant des offres low-cost car si l’économie réalisée en soi est importante pour les consommateurs, elle peut également leur permettre de revoir leur arbitrage entre les différents produits / services qui les intéressent, d’accéder à certaines offres, ou de profiter davantage d’un bien. De même, le low-cost semble pouvoir redonner, aux consommateurs, un certain pouvoir dans leur choix de consommation (en fonction de leurs critères d’achat) : Ind 6 « Chez le coiffeur, le massage ça ne vaut pas les dix euros de plus, alors le low-cost c’est mon choix ». En revanche, cette baisse du sacrifice monétaire perçu est très souvent associée à une faible valeur fonctionnelle, provenant essentiellement de la perception de la qualité médiocre du produit et / ou du service, ou bien encore du choix proposé qui est jugé trop restreint : 12 Ind 14 : « Le low-cost ? Ce n’est pas de la bonne qualité, un bien low-cost doit très souvent être changé, réparé ou remplacé » Ind 17 « Une voiture traditionnelle aura des avantages au niveau de la garantie, de l’aprèsvente, pour une voiture low-cost peut être qu’il y aura plus de difficultés lors d’un problème » Ind 21 : « Lidl a une offre limitée, donc forcément tu vas aller faire trois courses chez Lidl mais il faudra forcément que tu ailles chez Carrefour, Leclerc ou Auchan aussi » Cette appréciation souvent négative de la qualité (liée au produit et / ou service) renvoie, dans une certaine mesure, à l’existence de coûts non-monétaires importants : Ind 14 « Un meuble Ikea n’est pas pour moi une bonne affaire parce qu’il faut aller en banlieue acheter le produit, affronter la foule, faire tout le parcours du magasin (qui est une perte de temps énorme), transporter le meuble jusqu’à chez soi, puis le monter soi-même » Ind 19 « Si tu veux quelque chose de pas cher, tu vas quand même en payer le prix, ça va t’amener à aller un jour où tu n’auras pas forcément envie d’y aller ou choisir des horaires en dehors de ceux que tu auras fixés. En fait tu es quand même perdant quelque part » Ainsi, si la dimension monétaire du prix est jugée favorablement par les consommateurs dans le cadre d’un produit low-cost, il n’en va pas de même pour sa dimension non-monétaire. Cette évaluation négative des produits low-cost peut également concerner les dimensions émotionnelle et sociale de la valeur : Ind 1 « S’il s’agit de se faire plaisir, on va prendre quelque chose de bien, on ne va pas se priver en vacances ! Là où il y a gêne, il n’y a pas de plaisir... donc pas de low cost pour ça » Ind 3 « Un mec avec une Logan ça le fait moyen… C’est une question d’image » Ind 4 : « Je pense que je me sentirais mal à l’aise si je croisais quelqu’un du boulot dans un magasin comme ça, je pense que je me sentirais qualifié de pauvre, je ne m’y sentirais pas bien » 13 Les émotions négatives, exprimées à l’égard du low-cost, viennent, en partie, du design du produit (ou de l’apparence du point de vente) jugé souvent comme peu attractif : Ind 1 : « (à propos des magasins low-cost) Ils ne sont pas très beaux ces magasins-là hein, mais bon on n’est pas là pour les admirer, n’est ce pas !» Ind 18 « Je veux une voiture avec un beau design. En général, une voiture low-cost c’est rarement une voiture bien sur cet aspect » De manière générale, cette appréciation parfois très négative des produits low-cost est souvent associée à des personnes n’ayant pas encore eu d’expérience avec de tels biens. En revanche, après expérience, les consommateurs évoquent souvent l’existence de sources de valeurs utilitaire, émotionnelle, sociale et même éthique. • Les sources de valeur associées au low-cost Concernant la dimension fonctionnelle de la valeur, les offres low-cost ne sont pas toujours considérées comme des offres dénuées d’intérêt : elles ne sont pas forcément basiques mais, à l’inverse, peuvent correspondre à des produits originaux et de qualité. Ind 3 : « Le low-cost n’est pas forcément associé à une offre basique, exemple des forfaits Virgin mobile, c’est du low cost mais ce sont les mêmes offres que les autres opérateurs » Ind 8 : « Les produits frais et les légumes dans les magasins low-cost ont sensiblement le même goût et la même qualité » Ind 9 : « Chez Lidl, j’aime leurs produits. Je teste. Certaines fois je suis déçue, mais je suis souvent satisfaite, même parfois surprise de la qualité et je rachète » Ind 10 : « Il y a certains produits que je ne trouve que chez Lidl surtout à Noël, Lidl a des produits trop bons » Du point de vue émotionnel, les consommateurs associent parfois la non-culpabilisation et le plaisir aux avantages procurés par le low-cost : Ind 14 : « On peut faire des économies sans culpabiliser » 14 Ind 12 : « Le low-cost est très utile quand on a peu de moyens et on peut se faire plaisir en ayant la possibilité de partir en vacances grâce aux vols charters » Des aspects sociaux importants, notamment en termes d’appartenance à une tribu (les termes « malins », « petits malins » ont souvent été relevés dans les verbatims), ainsi que des considérations d’ordre éthique, sont évoqués à plusieurs reprises par les consommateurs : Ind 1 : « Le low-cost c’est pour les petits malins » Ind 3 : « Il y a des choses qui étaient inaccessibles auparavant pour certaines catégories de personnes, et maintenant c’est une uniformisation des modes de vie qui se crée grâce au lowcost malgré les différences de revenu donc c’est positif pour la société » Ind 7 « Pour les personnes ayant peu de revenus, je trouve cette initiative (le low-cost) très intéressante. Ces personnes ont accès aux produits frais et légumes comme tout le monde. Cela leur permet d’avoir une alimentation équilibrée » Les individus interrogés associent donc le low-cost à des éléments susceptibles d’enrichir la valeur d’une offre et ceci au delà des contextes de wise shopping et de déconsommation. Ils vont même jusqu’à trouver des similitudes avec les stratégies d’enrichissement de produits. • Des liens existants avec la valorisation des produits enrichis Souvent opposés car représentant des options stratégiques contraires, le low cost, tout comme l’enrichissement de produits, peuvent apparaître comme des facilitateurs de vie, source de valeur potentielle pour les consommateurs (grâce, notamment, à la diminution des sacrifices non-monétaires perçus) (tableau 3). Low-cost Praticité Enrichissement de produits Ind 9 : « Le fait que l’avion décolle de Tours, Ind 11 : « Les nouvelles c’est vraiment pratique… On ne galère pas fonctions ça peut faciliter la pour aller à Roissy » vie, ça peut être pratique » 15 Low-cost Enrichissement de produits Ind 14 : « Les enseignes low-cost comme ED Ind 8 « Les objets qui Gain de ou Lidl ont une petite surface de vente, ce qui regroupent beaucoup temps fait que je ne passe pas trop de temps dans les d’options, c’est un gain de rayons, donc je fais mes courses rapidement » temps » Tableau 3 : Comparaison des effets de l’enrichissement de produits et du low-cost sur la valeur • Des produits low-cost valorisés à certaines conditions L’analyse de contenu révèle que les offres low-cost sont le plus souvent créatrices de valeur : - Auprès des personnes ayant déjà eu des expériences avec le low-cost, qui sont sensibles au prix (en raison de leur profil socio-démographique : âge, CSP, revenu, nombre d’enfants), et / ou qui manifestent un faible intérêt pour l’innovation et la nouveauté en règle générale. - Pour des achats peu impliquants, dont la durée et la fréquence d’utilisation du bien / service est faible, et / ou pour les produits ayant une signification fonctionnelle / basique : Ind 3 « Dans le sens où on reste sur des produits de base, dont on est sûr, on n’a pas besoin d’un tralala de services, le low-cost c’est très bien ! » Ind 11 « Pour le coiffeur ? Je prends une low-cost parce que je demande une coiffure basique, donc qui ne risque pas d’être ratée » Ind 21: « Compte tenu des prix du transport aérien, on va peut être privilégier le pas cher car le but du voyage, ce n’est pas le voyage lui-même, c’est la destination » Ind 10 : « Si je prends un vol court, j’achèterais un vol low-cost, si le trajet est long, je privilégierais un vol plus cher dans de meilleures conditions avec des meilleurs horaires » 16 La valorisation d’une offre low-cost varie également en fonction de la situation d’achat et de consommation, notamment selon : - Le contexte d’utilisation (privé / professionnel) : Ind 11 « Si on a besoin d’une voiture pour travailler, on prend une low-cost… Mais si c’est pour un autre motif, on prend celle qui nous plaît, pas forcément du low-cost parce que c’est du plaisir » - Le destinataire de l’achat (moi / les autres) : Ind 18 « Pour moi, je pourrais prendre du low-cost mais à partir du moment où j’ai du monde, non » - Le type d’achat (achat réfléchi / impulsif) : Ind 15 « Si j’ai une envie soudaine d’aller dans un pays proche, je choisirais une offre low-cost comme Ryanair ou EasyJet parce que ça ne sera pas un achat réfléchi mais sur un coup de tête, et donc pour un coup de tête, on ne veut pas mettre trop cher » Conclusion Cet article démontre qu’au-delà de l’incidence positive attendue sur les sacrifices monétaires perçus, les stratégies low-cost peuvent aussi créer de la valeur pour les clients en proposant certains bénéfices (ayant trait aux valeurs fonctionnelle, émotionnelle, sociale et / ou éthique de l’offre) ou en atténuant la perception de certains sacrifices non-monétaires du produit. Des variables, susceptibles d’influencer le processus de valorisation d’une offre low-cost, ont également pu être mises en exergue : ces dernières concernent certaines caractéristiques liées au produit, au consommateur et au contexte d’achat / de consommation. Les résultats obtenus peuvent inciter les décideurs, en charge de la commercialisation de produits basiques à bas coûts, à mettre en avant, dans leur discours de vente ou leurs campagnes de communication, des arguments autres que le prix. Cela peut d’ailleurs permettre à leurs organisations de se différencier dans un marché low-cost de plus en plus concurrentiel. Plusieurs entreprises semblent inscrire leur démarche dans cette voie. C’est le 17 cas par exemple de la compagnie aérienne à bas coûts Southwest Airlines qui déclare sur son site Internet qu’elle propose « more than a way to fly – A way of life » (« plus qu’un moyen de voler, une manière de vivre »). Par ailleurs, dans un objectif de maximisation de la valeur créée, il semble préférable de réserver, en priorité, les stratégies low-cost aux produits à faible durée d’utilisation, peu impliquants, et / ou jugés comme basiques / fonctionnels. De même, ce type d’offre doit être proposée avant tout aux consommateurs sensibles au prix mais présentant un faible intérêt pour la nouveauté en règle générale. Malgré les apports de ce travail, celui-ci ne présente qu’un caractère exploratoire, nécessitant par conséquent d’autres investigations. En particulier, le rôle des marques low-cost n’a pas été mis en évidence dans le discours des consommateurs : certaines marques répandues, telles que Logan, Easyjet, Ryanair ou les hard-discounters, ont été citées mais sans véritables commentaires associés. Il serait ainsi opportun d’approfondir, à l’instar de Southwest Airlines, le rôle de la marque low-cost dans l’appréciation de la valeur. Par ailleurs, une étude quantitative pourrait être intéressante à mener afin de confirmer l’existence d’une diversité des sources de valeur d’une offre low-cost et d’apprécier le degré d’influence des variables identifiées dans cette recherche (notamment, les variables liées aux caractéristiques des individus, au produit, et au contexte d’achat / de consommation). Bibliographie Amraoui L. (2005), Les effets du prix, de l'image du point de vente et du capital de marque sur la valeur perçue des produits, Thèse de doctorat en sciences de gestion, Université des Sciences Sociales de Toulouse. Aurier P., Evrard Y. et N’Goala G. (2004), Comprendre et mesurer la valeur du point de vue du consommateur, Recherche et Applications en Marketing, 19, 3, 1-20. 18 Aurier P. et Zollinger M. (2009), A la recherche du pouvoir d’achat : introduction au numéro spécial Marketing et pouvoir d’achat, Décisions Marketing, 56, 5-8. Brown C. L. et Carpenter G. S. (2000), Why is the trivial important? 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Tableau comparatif entre le smart shopping et le wise shopping (adapté de Djelassi, Collin-Lachaud et Odou, 2009) Smart shopping Wise shopping Assouvir son envie de consommer Maîtriser Objectif ses dépenses en dépensant le moins possible respecter le (optimiser son pouvoir d’achat) : préalable (quitte recherche active des budget à pour défini au réduire sa « bonnes consommation). affaires ». Raisonnement en termes de Raisonnement en termes de pertes gains (optique offensive) : le smart (optique défensive) : sensible aux shopper cherche, avant tout, à conséquences négatives de son Mode de profiter au mieux des opportunités comportement, le wise shopper raisonnement offertes par la distribution (le risque cherche surtout à respecter son pour lui étant surtout de rater « la budget, le risque étant d’acheter bonne affaire »). trop cher ou de dépenser trop. Attitude à Profiter du système et même parfois Méfiance et remise en question de l’égard de le détourner à son profit. certains éléments de l’offre (assortiment, communication…). l’offre du distributeur Actif : temps considérables et énergie Actif et critique : réflexion sur son consacrés à la mode d’achat et de consommation, Rôle du recherche des « bonnes affaires », maîtrise de ses achats. Principaux consommateur optimisation des achats, réflexion comportements : acheter moins cher sur l’utilisation du système à son mais également moins, chercher à profit. éviter les tentations. 22 Annexe 2. Etude de l’Observatoire Cetelem sur la perception du low-cost La perception du low-cost par les consommateurs européens Selon une étude publiée par l’Observatoire Cetelem en 2010, le low-cost bénéficie partout en Europe occidentale* d’une image claire et positive : il s’agit pour le consommateur européen de produits sans superflu et répondant à ses besoins essentiels (69%), de produits parfois classiques, mais rendus moins chers grâce à un moindre niveau de services (60%) associés à la vente. C’est le choix malin, le comportement de consommation intelligent pour faire des économies (65%). Le produit low-cost n’est surtout pas un sous-produit, dépourvu de technicité, de modernisme, en provenance d’une improbable zone de production, où les exigences de qualité n’existeraient pas. De même, la consommation low-cost n’est pas, dans l’esprit des consommateurs, réservée aux catégories sociales les moins favorisées : il s’agit clairement plus d’un choix délibéré et construit que d’une renonciation sous contrainte financière. Enfin, la majorité des européens (65%) pensent que « low-cost » et « protection de l’environnement » ne sont pas incompatibles. Cette bonne image est partagée dans tous les pays et quel que soit le niveau de revenus. Seuls les Français et les Britanniques se montrent plus partagés et soucieux d’un risque potentiel sur la qualité des produits low-cost (près de la moitié des répondants considèrent que le prix bas s’obtient au détriment de la qualité). Pour autant, Français et Britanniques ne nient pas d’autres avantages liés au low-cost. C’est d’ailleurs en France et au Royaume-Uni que l’on associe le moins une consommation lowcost aux catégories de revenus inférieurs. *Etude réalisée auprès de 3600 individus, dans six pays européens : France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne et Portugal. Source : L’Observatoire Cetelem (2010) 23 Annexe 3. Composition de l’échantillon interrogé Interviewés Sexe Age Profession Ind 1 F 73 ans Retraitée Ind 2 F 23 ans Etudiante en droit Ind 3 H 33 ans Ind 4 H 43 ans Ind 5 H 52 ans Ind 6 H 22 ans Ind 7 F 28 ans Chef d’entreprise Ind 8 H 46 ans Chef d’entreprise Ind 9 F 55 ans Agent de service Ind 10 F 23 ans Etudiante en graphisme Ind 11 F 16 ans Lycéenne Ind 12 F 21 ans Etudiante en école de commerce Ind 13 F 48 ans Employée Ind 14 H 50 ans Architecte d’intérieur Ind 15 H 73 ans Retraité Ind 16 H 50 ans Fonctionnaire Ind 17 H 20 ans Etudiant Ind 18 H 24 ans Développeur de sites web Ind 19 F 49 ans Ind 20 F 23 ans Etudiante Ind 21 H 53 ans Cadre 24 Chef d’entreprise d’une agence en conseil et communication Cadre Magasinier dans l’industrie automobile Commercial dans les cosmétiques et produits d’entretien Directrice adjointe dans une structure associative